Réformer ou créer ?

Ce petit article est en fait une réponse à celui de Kevin Quéral au sujet de la réforme du collège.
Il y a un petit bout de temps que je ne suis plus imprégnée de cette réalité, mon fils ayant quitté l'école depuis longtemps et mes petits enfants n'y étant pas encore entrés.
Néanmoins, comme la jeunesse est un potentiel d'énergie et d'idées infini, pourtant fragile, voir ce que l'on en fait aujourd'hui fait froid dans le dos.
Y réfléchir sérieusement et faire des propositions comme le fait l'auteur de l'article que je prends en référence, me paraît, non seulement de la plus haute importance, mais, pour une fois, fait dans un sens d'ouverture positive et non plus, comme toujours, sous forme de râleries quémandeuses. Cela induit le regard, intransigeant et perspicace ; cela motive, encourage ceux qui, non seulement aiment leur travail et souffrent de son nouveau cadre, mais ont conscience de l'urgence et de l'aspect fondamental de leur fonction, si elle a l'aise de s'épanouir et la possibilité de donner.
Les choses se passent toujours ainsi : des pionniers, plus audacieux, courageux, impliqués, se mettent en marche et donnent les bases d'un nouveau chemin. La plupart du temps, on ne les découvre que des décennies plus tard.
Alors, comme la chose est urgente, il serait profitable qu'on s'y mette tous, parents, ex profs, profs et tous ceux qui, du lieu de leur fonction, administratifs, éducatifs, psy,etc, fassent le pas du bilan exhaustif, en relèvent leurs manques, les impairs, voire les horreurs rencontrées.
Le retour au passé, y dénicher ce qui marchait bien me paraît le premier pas à faire ; le plus facile aussi car innover pour innover, merci, on a vu ! Mais qui sait, il y a peut-être des choses à garder de ces nouveautés ( c'est pas si vieux !!)
Avec les moyens modernes de communication que nous avons, il ne devrait pas être très long de réveiller chez eux les susdits concernés, sachant que nous sommes nombreux à attendre le signal pour se lever ; réfléchir et discuter, quand on sait que cela risque de ne pas rester des causeries de bistrots, ça aide et ça régénère.
C'est un énorme boulot ; partir bien sûr des idées de base produites par les pionniers, puis les pimenter, les délier, les compléter par d'autres idées qu'il faudra bien décortiquer ! ( bonjour les fins de semaine, loisirs gratuits garantis !).
Puis, trouver ce compromis pas compromettant et sans compromission, qu'on pourra proposer à tous.
L'équipe de départ, au taquet, comme on dit aujourd'hui, très au fait du sujet et très motivée, plus elle sera grande, plus la vague provoquée sera haute. En fait il s'agit rien moins que de provoquer un raz-de-marée !
Qu'on ne parle de rien d'autre en salle des profs, en surveillance, et même entre initiés, le week-end devant un barbecue !!
Je me suis laissé dire par des copines profs de collège à la veille de la retraite, que les jeunes recrues n'en avaient pas grand chose à foutre - elles-mêmes issues de cette « nouvelle » école-, faisaient leurs heures sans rechigner si celles-ci n'étaient que des heures de garderie ou de discipline, et fichaient leur camp dès la sonnerie tintée, pour aller vivre leur vie. Pourtant, je suis convaincue que parmi elles, si jamais se profilait une aventure qui les demande, il s'en trouverait de partantes et même si leur choix de carrière fut fait par défaut ! Avoir un métier intéressant est tellement plus intéressant.
D'un autre côté, nous avons tous souvenir des quelques profs qui furent nos guides, même si d'autres furent fatals en leur matière, et que la proportion des passionnés pédagogues avec qui on « accroche » est infime. L'important, c'est que les élèves n'aient pas tous les mêmes et qu'au bout, s'ils sont meilleurs en math qu'en latin, en anglais qu'en histoire, ils aient acquis par ceux-là qui a su les séduire, les rudiments, les bases de l'apprentissage, de la réflexion, de l'esprit critique et de la curiosité.
Redéfinir les buts de l'éducation et de l'instruction, nous contraint à être subversifs, aujourd'hui ! J'ai envie de dire donner des armes, mais quelles armes et à qui ?
Les premières sont les outils pour se débrouiller, mais pas juste comme ça vite fait, non, en approfondissant, en situant notre langue dans son évolution, mais surtout en donnant à l'esprit les structures pour le faire ; le latin, et l'allemand, sont deux langues extrêmement structurées, les enseigner compensent, si j'ose dire, les structures foutraques et complexes de la nôtre.
Or il apparaît que ce sont elles que l'on veut faire disparaître de l'enseignement !!
En lisant le programme proposé dans l'article de Kevin Quéral, cela saute aux yeux : à gauche, le nouveau programme, on pourrait presque dire, l'ancien, et qui a fait ses preuves.Comme petite parenthèse, je vous prie de vous rappeler comment les « petites gens » écrivaient naguère : belle langue, belle expression, aucun ego original s'impose qui se place en avant. Rappelez-vous aussi les armes donnés au peuple, solidaire et militant, qui firent de lui, par l'entremise du Parti Communiste, ne l'oubliant pas, des exploités, pauvres, qui n'avaient pas fait l'université, mais savaient faire des discours, lire des journaux, écrire leurs revendications et rêver au-delà de demain.
Certes, aujourd'hui, un tel but ne s'inscrit nullement dans les visées gouvernementales, au contraire ; et si on veut bien y faire attention, à chaque échelon social le problème est le même. Les élites ne sont pas ouvertes vers la culture, mais formatée pour servir le capital.
J'ai discuté récemment avec une gamine très douée qui, comme toutes ses semblables ayant réussi le bac avec dix-huit de moyenne depuis un lustre, se trouve drivée ( c'est fait exprès !) vers les écoles préparatoires, en vue d'enquiller Sciences-Po, l'ENA ou Lettres sup. Hargneuse et tenace, elle a voulu finir son année. Faisant visiter à sa mère les locaux de son lycée, elle lui montra tout en haut du bâtiments des fenêtres hautes et fermées : c'est là ; les fenêtres ne s'ouvrent pas pour que les jeunes ne se défenestrent pas.
L'oppression est une torture infligée. D'abord les profs toisent les élèves et les prend pour des cons, les humilient, les bafouent.
Les montent les uns contre les autres tout en leur demandant le même travail que jadis dans ces écoles. Plus de la moitié gicle avant Toussaint, et pas par incapacité intellectuelle, bien par « faiblesse » psychique à subir ce traitement ! Ils sont tous sous anti-dépresseurs, portés à bout comme pour craquer et accepter toutes les consignes !
En revanche, aux lycées ordinaires, on est cool, on met des bonnes notes, on incite les profs à être généreux au bac !
Tout se fait là ; tout. Même à dix-huit ans, on n'a pas le répondant.
Cette gamine a fini brillamment son année, a compris qu'elle ne voulait pas devenir « ça », a dit « tchao », et est partie en fac !
Mais la tête dans le guidon des études, les faibles, mine de rien, repartent merdeux et ne disent rien, ou un peu mais pas fort, et surtout, n'en font aucune analyse politique qui leur permettrait de comprendre de quoi il retourne. Alors le monde continue de tourner ; après le formatage hard de prépa, celui des écoles qui suivra ; au bout : nos élites.
Ainsi, vouloir l'exigence, plus douce et respectueuse, chez les jeunes – ce qui les empêcherait de pouvoir subir l'essorage nécessaire à la formation des élites- donner les clés à tous en les laissant libres à la sortie de faire ce qu'ils voudront, ou ce qu'ils pourront ( j'ai idée qu'à cet âge, si les choses ont été assez bien vécues, c'est quasi mêlé) n'est pas au goût du jour.
Donc il est bien clair que se lancer dans le projet énoncé dans l'article de référence ( dont je donne le lien à la fin) est un acte de désobéissance, au sens large, c'est-à-dire afficher qu'on se prend en main, que l'on a des choses à proposer, qu'on contredit les directives et, au fond, qu'on peut se passer du personnel ministériel !! Si les moyens mis chez ceux-ci étaient mis là, il y a de fortes chances que tout aille mieux !
Car qui pourrait contester sans arguments fallacieux, que ce qui vient de la base pour la base et qui se fait dans un but altruiste, a plus de chances de correspondre aux vrais besoins ; pas les besoins dont on nous fait croire qu'ils sont nécessaires au monde tel qu'il est.
C'est qu'on a envie de le changer ce monde, qui ne convient à pas grand monde !!
Alors, mobilisons-nous avec eux ; faisons passer le message et quand la crème aura prise, qu'ils ( que nous, mais je suis un peu « out » pour m'y inclure vraiment !) seront assez nombreux, que le projet sera convenable, pour tous ses pères, clamons le, montrons-nous, faisons du tapage, faisons peur, prouvons que non, nous ne sommes pas tous avachis, des, comment, des adeptes de la servitude volontaire !!
Renversons la vapeur et les profs, ces profs si décriés, si mal aimés, ces fonctionnaires si privilégiés, plutôt que de survivre, de se mettre en congé déprime, sans abuser, reprendront le cœur à l'ouvrage, la dignité, la fierté de l'inestimable fonction qui est la leur.
L'avenir est entre leurs mains, on le sait bien.
Comme il y a eu les cent signatures pour je-ne-sais-plus-quoi, pourquoi pas les cent signatures pour un nouveau collège, les mille, les dix mille, le million ? Des acolytes, des soutiens, des aides, à condition que, comme on le remarque souvent, cela ne devienne pas une débandade ingérable ; donc propositions exigeante !
Courage à vous.
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/pour-une-contre-reforme-du-college-166731
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