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Accueil du site > Tribune Libre > Rentabilités comparées du travail libre et de l’esclavage

Rentabilités comparées du travail libre et de l’esclavage

Adam Smith (1723-1790) est le contemporain de l'âge d'or de la traite des Noirs et de l'esclavage nord-américain. Ce qui ne l'a pas empêché d'affirmer que, sur le strict plan de l'économie de marché, le travail salarié est nettement plus rentable que l'esclavage.

La raison essentielle de cette suprématie tient à ce que la liberté du travailleur condamne celui-ci à devoir assumer la responsabilité de sa famille et de lui-même dans les limites de la rémunération qu'il reçoit. De cette charge, l'esclave est indemne. Citons Adam Smith  :
« Un esclave, a-t-on dit, s'use aux dépens de son maître, mais un serviteur libre s'use à ses propres dépens. »

Mais, pensera-t-on aussi, c'est pourtant le patron qui - à travers le salaire qu'il verse - nourrit, vêt et loge toute la famille du serviteur libre, de sorte que, comme Adam Smith nous le dit sans adoucir son vocabulaire :
« Cependant, l'usure du second se fait en réalité autant aux dépens de son maître que celle du premier." Or, poursuit-il, "bien que l'usure d'un serviteur libre se fasse aux dépens de son maître, elle lui coûte généralement beaucoup moins que celle d'un esclave. »

Et pourquoi donc ? Mais parce que...
« [les] fonds destinés à remédier à l'usure de l'esclave ou à la réparer, si je puis m'exprimer ainsi, sont ordinairement administrés par un maître négligent ou un intendant insouciant. Ceux qui sont destinés à assurer les mêmes fonctions en ce qui concerne l'homme libre sont administrés par l'homme libre lui-même. »

Pour anticiper, on pourrait dire que l'économie réalisée ici par le maître se traduit, de nos jours, pour le travailleur salarié, par la délicieuse angoisse qui caractérise le syndrome des fins de mois difficiles - difficiles intrinsèquement, et plus difficiles encore quand s'y ajoutent quelques impacts du crédit à la consommation.

Ainsi Adam Smith pouvait-il, d'avance, offrir une forte dose de baume au cœur pour les futurs nostalgiques de l'esclavage :
« Il ressort donc de l'expérience de toutes les époques et de toutes les nations, je crois, que le travail d'hommes libres revient en fin de compte moins cher que le travail d'esclaves. »

Y compris dans des conditions de rémunération "extrême" des hommes libres :
« Cela se vérifie même à Boston, New York et Philadelphie, où le salaire du simple travail est extrêmement élevé.  »

S'agirait-il, alors, pour l'homme libre, d'échapper au minimum vital, avec la bénédiction du système capitaliste ?...


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6 réactions à cet article    


  • Clark Kent M de Sourcessure 9 novembre 2015 12:28

    D’autres calculs ont été faits à ce sujet...

    Les planteurs protestants de coton de la Nouvelle Orléans considéraient plus économique de faire de l’élevage d’esclave que d’utiliser des esclaves jetables sur les marchés des Caraïbes comme le faisaient les planteurs de canne à sucre espagnols et catholiques.

    • Jonas Jonas 9 novembre 2015 23:25

      @M de Sourcessure
      Si on compare avec la traite négrière en Mauritanie, Niger, Nigéria et Soudan, les esclaves ne coûtent quasiment rien à l’entretien (un peu de riz et du manioc suffit) et sont extrêmement rentables, bien que le taux de perte soit assez conséquent.
      Par ailleurs, ils peuvent gagner de l’argent en les revendant...pour les recapturer ensuite !
      Ce qui fait que leurs réserves d’esclaves sont inépuisables !
      https://www.youtube.com/watch?v=AfV5PIAqkSQ


    • Et hop ! Et hop ! 9 novembre 2015 14:36

      Vous comparez l’esclave agricole dans les colonies anglaises au XVIIIe siècle, aux salariés à notre époque dans le domaine de l’industrie et des services, ça n’a pas de sens.

      Les salariés de l’industrie en Angleterre au XVIIIe siècle, ou des latifondia en Espagne, étaient beaucoup beaucoup plus mal traités que les esclaves noirs des plantations coloniales, parce que les patrons n’avaient aucun intérêt à leur conservation. Les esclaves étaient au moins traités comme un fermier traite son bétail, il le soigne.

      Les travailleurs agricoles en France au XVIIIe était en très grande majorité des petits propriétaires ou des petits fermiers perpétuels, avec très peu de domestiques, en général pris dans la parenté. La création de grands domaines exploités par une main d’oeuvre salariée était impossible en France pour des raisons institutionnelles : le seigneur n’avait pas le droit d’exploiter ses terres directement avec des salariés, il devait la concéder. La France et l’Italie de cette époque, qui avait le même régime foncier, étaient les pays les plus productifs du point de vue agricole, avec la population rurale la plus prospères avec une classe moyenne de paysans aisés développée.

      Si on excepte la condition des ouvriers de l’industrie du régime manufacturier, la pire condition d’esclave depuis le XVIIIe siècle est celle des travailleur immigré qui travaillent clandestinement dans les pays développés.


      • sls0 sls0 10 novembre 2015 04:41

        J’ai des bateys pas loin se chez moi, l’esclave coute plus cher.
        Les droits sont les même mais il y a pas de devoirs.
        Autre avantage si par erreur on coupe une main à titre d’exemple, l’esclave manchot on le garde, l’autre on le vire.

        Porter plainte, déjà il faut passer par un avocat, ça coute, comme c’est un clandestin, le patron prévient les flics ensuite c’est bus ou camion direction la frontière. Il pourra causer de ses problèmes de l’autre coté.

        Un esclave en le chicottant bien on arrive à en sortir un kWh, un litre d’essence c’est 12kWh, avec la robotisation l’ouvrier pauvre n’est plus trop nécessaire.


        • Jean Keim Jean Keim 10 novembre 2015 09:24

          Un travailleur esclave ne gagne aucun salaire et par conséquent il ne peut pas consommer par l’achat ce qu’il produit, tout le reste n’est que des divagations.



          • sls0 sls0 10 novembre 2015 14:09

            C’est avec le fordisme qu’est apparu au début du XXème siècle le besoin d’un salaire plus important pour consommer. Keynes à beaucoup étudié le fordisme, les gens construisaient des voitures et les achetaient, c’était une première mondiale et historique.
            Avec l’arrivée d’une énergie pas chère et abondante (le pétrole) qui a permis une surproduction, alliée au marketing le modèle économique à changé, c’est encore le notre aujourd’hui. 

            Pour permettre cette surproduction le savoir habituellement confiné dans le 1% le plus riche a été ouvert aux autres, il fallait des ingénieurs en plus, des professeurs pour les former, ect... C’est le début de la classe moyenne et le début d’une croissance à plus de 1-1,5%.

            Vu l’enrichissement des plus riches, c’était bien vu.

            Ce modèle économique épuise rapidement les ressources naturelles, comme on est dans un monde fini, il arrivera un moment où il s’arrêtera.
            Le chiffre de la croissance un peu biaisé par le financier en ce moment en est l’indicateur.

            Le pétrole qui a été le principale moteur à atteint son pic, on peut envisager un changement de modèle économique.

            A travers l’histoire, les plus riches ont toujours fait preuve d’une grande résilience, la variable d’ajustement comme d’habitude ce ne sera pas eux. Cette période leur à permis un enrichissement jamais vu et le pouvoir que ça entraine.

            Sans parler de retour à l’esclavagisme, il y a des choses qui vont changer dans la variable d’ajustement (nous). PIB et population sont fortement corrélés à la production d’énergie.

            Sans boule de cristal on ne peut rien dire, ça peut aller vers le bon pour tout le monde* style partage de richesse qui est économiquement viable, ou un retour en arrière qui et aussi économiquement viable vu du coté des plus riches, à l’époque Dickens être riche n’était pas trop désagréable.

            * Malgré que l’on ne fasse pas partie des plus riches ça implique quand même que l’on partage aussi et que l’on soit moins gaspilleur. Là on voit tout de suite que ça risque de coincer, l’égoïsme étant un très bon moteur pour diviser donc régner.

            Divagations ou constat ?

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