Reponsabilités partagées
" Les Corses doivent prendre leurs responsabilités " Certes.
La société n'est pas une entité immanente et désincarnée qui nous imposerait son évolution, ses fantaisies, ses égarements et ses diktats. La société, c'est nous. Chacun d'entre nous en est une composante et détient, à ce titre, sa part de responsabilité dans l'orientation qui est donnée à nos mœurs. Nous sommes cependant porteurs du bagage que nous ont transmis ceux qui nous ont précédés ; héritiers de traditions, de folklore pas toujours bénéfique comme le culte du "bandit d'honneur" mais aussi de réflexes de défense voire de survie qui, entérinés par l'usage et la nécessité, sont devenus partie intégrante de notre culture.
Il en est ainsi quand un peuple a dû tout au long de son histoire apprendre à ne compter que sur lui-même pour régler ses différents qu'ils soient privés ou nationaux. Des siècles de parodie de justice génoise suivie d'une ghjustizia morandina (celle, au XIXème siècle du général Morand, arbitraire, aveugle et expéditive) qui ne valait pas mieux laisse des traces. Des décennies de système clanique au cours desquelles les problèmes se sont réglés non pas à l'aune du Droit mais à celle de l'entregent ont engendré des habitudes détestables. Et puis, la Corse, c'est petit et la notion de famille élargie. Les liens familiaux en sont intriqués plus qu'ailleurs. Quand l'un d'entre nous "tourne mal" il n'est pas anonyme mais souvent de notre parentèle, ami d'enfance ou encore lié à quelqu'un qui nous est cher. Difficile alors de le rejeter, de le condamner, à plus forte raison de le dénoncer comme cette injonction de "prise de responsabilité" nous exhorte, à mots couverts, à assumer. De plus, cette absence d'anonymat accroit la crainte de représailles. Je ne prétends en aucune façon cautionner ici nos travers ni banaliser les dérives meurtrières de ces dernières années : ne pas y réagir, c'est se soumettre inexorablement à un suicide collectif. Je ne me pose pas non plus en donneur de leçons. Je ne cherche qu'à contribuer à la réflexion qui incombe impérativement à chacun d'entre nous pour extirper la Corse de cette spirale mortifère. A chacun d'entre nous, mais pas seulement. Des "dispositions pénales spécifiques à la Corse" vont être prises. Si elles devaient ne pas prendre en compte le contexte spécifiquement corse lui aussi, si elles venaient, par des mesures d'exception inappropriées, à accroitre ce sentiment d'injustice maintes fois éprouvé, les conséquences en seraient désastreuses et les effets contraires au but recherché.
Enfin, peut-on dument exiger des Corses qu'ils prennent leurs responsabilités quand on n'accorde à l'Assemblée de leurs élus qu'un rôle consultatif et non décisionnaire, soumis au verdict de responsables extérieurs ? Cette question s'inscrit en filigrane sur chaque page du débat.
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