Rupture : l’émergence de nouveaux repères !
Il est de ces habitudes qui choquent encore certains et qui paraissent normales pour d’autres. Et pourtant, à les voir de près, à les analyser, elles paraissent d’un autre âge, voire réservées à d’autres pays que le nôtre.
Que dirions-nous si, pour se déplacer, la ministre de la Santé le faisait avec un jet privé, prêté par un grand groupe pharmaceutique ? Nous pourrions dire que cela est normal de vouloir faire économiser de l’argent à un pays qui en a bien besoin, car en faillite - dixit le très sérieux Premier ministre de la France (23 août 2007).
Que dirions-nous si la ministre de la Justice allait passer, avec toute sa famille, le week-end du jour de l’An, à Monaco dans une suite mise à sa disposition par un grand groupe propriétaire de casinos et d’autres salles de jeux ? Nous pourrions nous demander pourquoi refuser une telle gentillesse, quand elle permet de mieux connaître ce milieu trop longtemps stigmatisé pour blanchiment d’argent.
Que dirions-nous si notre ministre de l’Industrie se voyait offrir des vacances de neige pour ses enfants et ses proches, dans l’un des nombreux chalets que possède l’UIMM, le syndicat des industries et métiers de la métallurgie ? Pourquoi refuser ? Nous pourrions dire qu’il ne faut pas toujours voir le mal partout, alors que beaucoup de gestes de cette nature partent de bons sentiments.
Que dirions-nous si la ministre en charge du Logement passait ses vacances d’été avec sa famille, dans le ranch d’un patron emblématique du bâtiment ? En fait, c’est peut-être tout simplement un ami d’enfance ? Pourquoi, ministre, elle devrait se méfier de tout ?
Et, que dirions-nous si Nicolas Sarkozy, chef de tous les ministres et véritable exemple pour beaucoup d’entre eux, avait ses loisirs payés par un ami, grand industriel français, Vincent Bolloré ou même par tout autre grand patron ? Là encore, pourquoi voir le mal partout ? Ce n’est pas parce qu’on devient président d’un pays qu’on doit changer ses habitudes et agir différemment. Par ailleurs, si cet ami a un jour des ennuis avec le fisc, il sera tout à fait normal que le président de ce pays ne renvoie pas l’ascenseur. Normal, car l’étanchéité entre le pouvoir politique et le monde des affaires a toujours été un exemple en France.
Soyons clairs et devenons sérieux. Ce n’est pas avec un salaire de 20 000 euros par mois, bruts de surcroît, qu’une personne, fusse-t-elle présidente d’un pays, peut passer ses congés dans des palaces, à bord de yachts, se déplacer en avion privé et payer, en plus, les pensions alimentaires des ex-épouses.
Alors, de deux choses l’une, soit on demande à des amis de payer à sa place, soit on demande un salaire digne de la fonction que l’on occupe. Car, être président vaut tout autant qu’être un grand capitaine d’industrie.
Bon, il faut savoir ce que l’on veut. Que faire pour relancer un pays déclaré en cession de paiement quelques jours après avoir tout promis : croissance, emploi, pouvoir d’achat, liberté de travailler et de gagner plus, etc. ?
Pour relancer la croissance, faut-il absolument maintenir des barrières absurdes entre le privé et le professionnel, entre le vice et la morale, entre le bon goût et le mauvais ? Cela paraît tellement désuet dans un monde où la compétition est de plus en plus ouverte et où tous les coups sont permis, qu’il fallait bien qu’un jour cela change. C’est désormais fait. Il l’a fait et il appelle cela la rupture !
Travaillons, travaillons chers amis et jouissons chaque jour des bienfaits que cela nous procure, à nous gens de pouvoir. Quant aux autres... ils n’ont qu’à être président comme moi ou bien, faire des heures supplémentaires. Cela tombe à pic, je viens justement de les défiscaliser. Ils peuvent aussi monétiser leur propre "épargne temps" ou vendre leur "plan d’épargne entreprise". Après tout, c’est à eux ! Pourquoi ne pas le leur permettre, s’ils sont assez fous pour vendre ce qui leur appartient ? Et puis, leur patron peut aussi leur donner une prime de mille euros. Elle sera, elle aussi, défiscalisée. Et puis, si cela ne suffit pas, ils peuvent faire comme moi, se faire payer leurs vacances par des amis. Que chacun le sache, il n’y a désormais rien de mal à cela. Je le fais bien, moi ! Pourquoi pas eux ?
Que voilà de bons exemples à suivre dans notre société en manque de repères fondamentaux depuis de nombreuses années. Continuez, continuez Monsieur le président, vous êtes décidément sur la bonne voie ! Une vraie rupture de valeurs, pour une France qui n’arrive décidément pas à se trouver !
Depuis quelques mois, en fait depuis le 6 mai 2007, l’indice de démocratie citoyenne vacille chaque jour un peu plus. Mais qu’importe, il finira bien par y avoir un peu de croissance ici ou là, tombée d’on ne sait où. Et alors, quand la croissance sera enfin là, comme par magie, tout me sera pardonné, à moi, le président de ce pays ! D’ailleurs, pour l’électeur, plus c’est gros, plus c’est scandaleux et mieux cela passe. On pourra vérifier cela aux élections de mars 2008 !
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