Sauver le climat et gagner plus !
Nous sommes pour la plupart d’entre nous convaincus de l’urgence de lutter contre le dérèglement climatique. Toutes les mesures que nous prenons dans ce sens ont leur utilité mais elles resteront vaines aussi longtemps que le prix de l’énergie sera à la baisse. Si surprenant que cela paraisse, c’est le cas depuis 50 ans ! Les énergies fossiles (pétrole, charbon, gaz) coûtent en effet deux fois moins qu’en 1970 en proportion de nos revenus. C’est pourquoi notre intérêt personnel nous guide en toutes choses vers les solutions les plus énergivores, même si nous les réprouvons.
1 euro = 6,5596 francs |
Prix en 1969 (francs) |
Prix en 2020 (euros) |
Évolution |
SMIC horaire |
3,3 |
10 |
20 |
Baguette de pain (250g) |
0,55 |
1 |
12 |
Carte de métro hebdomadaire |
4,8 |
20 |
27 |
1 litre de super |
1,1 |
1,5 |
9 |
10 thermies de gaz |
1,1 |
0,9 |
5 |
Source : Tableaux de l’économie française (INSEE, 1970) |
Où en serions-nous si le prix du super était resté dans le même rapport prix/revenu qu’en 1969, soit à plus de 3 euros le litre ? Nous ne vivrions pas moins bien mais différemment. Nous aurions des villes et des villages plus concentrés, des lieux de travail plus proches des lieux d’habitation, plus de commerces de proximité et moins d’hypermarchés, des transports publics plus développés, notamment entre villages, villes et gares, etc. Les paysans pratiqueraient plus volontiers une agriculture raisonnée et utiliseraient moins de phytosanitaires si ceux-ci étaient également deux fois plus chers qu’ils ne sont aujourd’hui.
Le prix bas des énergies, en particulier des énergies fossiles, est une addiction, une drogue qui nous a conduits dans l’impasse actuelle, avec un mode de vie clinquant qui menace les équilibres environnementaux et en premier lieu climatiques.
Les gouvernants et les industriels à l’origine de cette addiction ne voient d’autre solution que dans une fuite en avant par la technologie : développement des énergies « renouvelables » et des véhicules électriques. Mais les énergies telles l’éolien ou le solaire comportent aussi de graves inconvénients (pollutions par les « terres rares », rendements faibles et incertains…). Quant à l’électrification des véhicules, elle ne compensera jamais et de loin la multiplication du nombre de véhicules (un milliard aujourd’hui, trois ou quatre milliards dans 50 ans ?). Elle ne fera aussi qu’accélérer l’étalement urbain et l’artificialisation des sols.
S’ensuit l’urgente nécessité d’augmenter fortement le prix des énergies pour nous libérer de notre addiction, mais à condition qu’il ne nous en coûte rien ! C’est possible dans le respect de l’économie de marché, de la démocratie et de la liberté individuelle, en préservant la croissance économique et en améliorant le bien-être de chacun.
Nous préconisons une solution incitative et même populaire : une contribution payée par les producteurs d’énergies primaires (EDF, compagnies pétrolières, usines d’incinération etc.) et toute entière redistribuée aux citoyens sous la forme d’une allocation forfaitaire mensuelle. Il s’agit que l’augmentation du prix de l’énergie et des produits énergivores soit toute entière compensée par cette allocation climat.
Ainsi chacun pourra-t-il arbitrer entre deux options sans altérer son bien-être :
• Ne rien changer à son mode de vie en finançant avec l’allocation climat les hausses de prix induites par la contribution énergie,
• Se réorienter vers des consommations moins énergivores et moins coûteuses, avec un reliquat de revenu qui lui permettra d’augmenter son niveau de vie !
Faisons donc confiance aux citoyens et à nous-mêmes et laissons chacun décider de consommer plus ou moins « vert » sans perte de revenu.
Une contribution énergie de 50 centimes sur 1 litre de carburant ou 10 kWh électriques rapporterait un minimum de 80 milliards d’euros. Si au lieu d’être noyé dans le budget de l’État (désendettement, administrations, subventions, investissements…), ce montant est redistribué par le fisc à chaque ménage, il s’ensuit une allocation forfaitaire de 150 euros par mois à chaque adulte et 80 euros par mois par enfant mineur (montant brut avant impôt).
Ne s'arrêtant pas à la mise en place de la contribution énergie redistribuée, l'État peut réorienter la législation de façon à encourager les pratiques les plus sobres en énergie sans entraver la croissance économique ni la compétitivité des entreprises.
La législation doit être en tous points incitative et non contraignante. Si un ménage souhaite une maison ouverte à tous les frimas, s’il ne se déplace qu’en voiture et ne rêve que de vacances aux antipodes, libre à lui. Mais telle une « main invisible », la loi doit lui montrer des alternatives plus attirantes et surtout moins coûteuses. Elle doit inciter chacun à s’établir au plus près des villes, des bourgs et des bassins d’emploi. Elle doit aussi permettre aux paysans respectueux de l’environnement de concurrencer les agro-industriels et aux industriels nationaux de rivaliser avec les importations de l’autre bout du monde...
Ces solutions sont indolores et porteuses d'espérance. Elles sont réalisables à l’échelle de la nation et susceptible de faire école dans le reste de l’Europe et de la planète. C’est une utopie à notre portée.
Le dessinateur Dominique Rousseau a retranscrit mon propos sous forme de BD : cliquez pour la découvrir. Vous pouvez aussi télécharger le livre numérique : Sauver le climat et gagner plus, des revenus plus élevés avec une énergie plus chère.
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