Sébastien n’est pas Charlie
Sébastien n’est pas Charlie. Il n’a pas le droit de rire de tout. Voici la énième incohérence du gouvernement de l’hexagone. Commise par une ministre. Fâchée, la ministre. Choquée même. Il faut dire qu’entre elle et Sébastien ce n’est pas le même oiseau. Les chants diffèrent. L’un fait dans la grosse tambouille frenchie, l’autre dans la litanie de l'ordre moral.
Les faits
Sébastien, c’est Patrick. Animateur télé et amuseur public ayant fait ses preuves. Elle c’est Laurence Rossignol, ministre de la famille.
Dans sa dernière émission il a chanté un de ses derniers opus, intitulé : « Une petite pipe avant d’aller dormir ». J’apprécie le talent de Sébastien comme humoriste. Ses imitations ont été particulièrement réussies. Ses émissions révèlent de vrais talents. Pour ses chansons, par contre, ce n’est pas ma tasse de thé. Je trouve même cette chanson très nulle. Mais peu importe.
Mais le rossignol n’aime pas la pipe. Magritte non plus, souvenez-vous. Enfin, il y a pipe et pipe. Et de pipe, le rossignol n’en voit qu’une : celle qui parle de sexe. Évidemment. Sébastien n’aurait pas fait une chanson prude. Ce serait mal le connaître.
Paroles de ministre
Le rossignol s’est donc déclaré choqué parce que cette chanson est passée en début d’émission et que des enfants pouvaient l’entendre.
« Je trouve ça extrêmement choquant, je pense que ceux qui ont la responsabilité, la chance d'animer une émission de télévision doivent aussi se comporter dans le respect des familles et ça n'est pas une question relative avec des familles plus ou moins détendues sur ces sujets-là. »
Faux-cul. Venant d’un membre (hum…) d’un gouvernement qui a fait de la libéralisation des moeurs un de ses objectifs, c’est amusant. Les enfants en savent plus que ce que le rossignol imagine. Pipe, c’est à peine une miette comparé au reste, et les parents sont libres de répondre ou non à leurs enfants, ou de fermer la télé.
Mais elle franchit ensuite les bornes :
« C'est une question d'abord, de respect des enfants parce que je trouve ça limite incestueux que de faire chanter ça dans une famille, à 20h50. Or la lutte contre l'inceste et la pédophilie est l'une de mes priorités. »
On est dans le délire. Laurence Rossignol a-t-elle perdu la raison ? Les vieux soixante-huitards qui forment le gros des troupes défraichies de cette gauche agonisante doivent éclater de rire. Associer cette chanson et Sébastien à la pédophilie, il fallait le faire. Elle a osé. Il n'y a qu'une seule explication à cette dérive sémantique : on n'a pas le droit de tout dire et de rire de tout. Sébastien n'est pas Charlie.
Ne croyons pas que le cas de Laurence Rossignol soit isolé ni qu’il s’agisse d’une simple maladresse. C’est une posture assumée de retour de « l’ordre moral ». C’est le produit de l’idéologie au pouvoir et non une simple erreur d’appréciation. Pour l’anecdote, Patrick Sébastien répondait à la ministre hier soir dans l'émission Touche pas à mon poste : « Je pourrais l’attaquer pour diffamation » (vidéo plus bas).
Maladresse ou idéologie ?
L’écart de langage de la ministre, sa réaction émotionnelle particulièrement violente, sont des indices de l’errance idéologique socialiste en matière de mœurs. Car ce n'est pas du hasard : la ministre est parfaitement formatée. Elle sort spontanément ses fondamentaux bien appris. C'est la voix de son maître.
C’est aussi une insulte envers l’animateur et envers l’esprit français. Et surtout envers « l’esprit Charlie » dont elle semble se moquer follement. C’est une démonstration limpide du recul intellectuel et moral qui s’impose en France. La posture de la ministre est un appel à la censure. Elle veut influencer la programmation de la chaîne d’État France 2.
La liberté d’expression n’est pas la même pour tout le monde.
L’animateur de Touche pas à mon poste, Cyril Hanouna, a d’abord suggéré que la ministre ait pu être piégée par le journaliste. Prise à froid, recevant l’info au moment d’y réagir, elle a plongé dans une accusation d’une extrême gravité, sans recul, sans aucune précaution de langage. Un point va dans ce sens : on apprend que la chanson a été diffusée vers 22 heures, et non à 20 heures 50 comme annoncé précédemment et comme madame Rossignol le pense parce qu’on le lui a dit.
A-t-elle réagi trop rapidement ? Peut-être. Mais c’est secondaire. Ce qu’il faut retenir est ce qu’elle a dit. Chanter « Une petite pipe » - alors que les couplets ne mentionnent que des fumeurs de pipes célèbres ou des glaces à la vanille, la fait penser à la pédophilie et à l’inceste.
D’abord on ne voit pas ce qui la gêne dans l’inceste - entre adultes consentants. Le mariage pour tous devrait logiquement ouvrir les portes des mairies aux consanguins. Non ? Si. Pure logique, rien d’autre : les sexualités, toutes les sexualités. Quoi ? J’aurais mal compris ?
Précédents célèbres
Ensuite, pourquoi stigmatiser cette chanson alors qu’il y a quelques décennies France Gall chantait « Les sucettes » (faut-il encore vous faire un dessin ?), et que Lio suggérait une Lolita assumée dans « Banana Split » - chanson débordante d’une chantilly qui n’était pas sucrée ? Pierre Perret et son « Zizi » détaillé sous toutes ses formes a fait les beaux jours des chorales d’enfants. Et la ministre ne doit pas entendre le français puisqu’elle ne dit rien de la chanson « Je bande » du même Pierre Perret, ni de son « Chibre » qui se gonfle d’ivresse quand le printemps le caresse. Gainsbourg a écrit et chanté « Lemon incest » avec sa fille Charlotte - autrement plus corrosif que l’inoffensif « Une petite pipe ».
Je passe sur l’innocent « Je veux faire l’amour avec toi » de Polnareff à ses débuts. Georges Brassens n’a pas fait autre chose avec son « Fernande » : « Quand je pense à Fernande, je bande, je bande ». Il faut interdire tout cela. Interdire aussi tous les artistes qui ont parlé avec tendresse des prostituées. Et la liste n’est pas exhaustive. Les socialistes parisiens feront-ils un remake de « Fahrenheit 451 », film terrible où un pouvoir fascisant brûlait les livres ? Combien de temps les français devront-ils subir cette idéologie délétère ?
Quand-même, confondre une chanson paillarde soft avec un appel à l'inceste, il faut le faire. Tenez madame la Ministre Beloiseau Rossignol, vous qui semblez aimer faire du vent, pour votre édification je vous offre ce rappel des paroles de Gainsbourg chantant avec sa fille alors très jeune :
Je t'aime t'aime je t'aime plus que tout
Papapappa
L'amour que nous n'f'rons jamais ensemble
Est le plus beau le plus violent
Le plus pur le plus enivrant
Exquise esquisse
Délicieuse enfant
Ma chair et mon sang
Oh mon bébé mon âme
Brûlera-t-on les disques de Gainsbourg avec ceux de Sébastien en place de la Bastille ? Condamnera-t-on officiellement Boris Vian pour son iconoclaste « Fais-moi mal Johnny » ?
Et mettra-t-on Pierre Perret en prison pour exhibitionnisme quand il chante « Mon chibre » ? « Ah ce qu’il est beau mon chibre/Quand il est à l’air libre/C’est un piton rose et dur/De satin veiné d’azur/ ».
Sébastien n’est pas Charlie. Et les manifestations du 11 janvier n’ont jamais eu lieu. La nouvelle morale pourrait dès lors être résumée dans cette injonction : « Sus aux chansons paillardes et aux fumeuses de foutre pipe ». Sus sans jeu de mot, bien sûr. On ne peut quand-même pas autoriser, dans la mémoire d'une grande nation, des paroles comme celles de ce Branle Charlotte :
Dans son boudoir la petite Charlotte
Chaude du con faute d'avoir un vit
Se masturbait avec une carotte
Et jouissait sur le bord de son lit.
(Refrain :)
Branle, branle, branle Charlotte
Branle, branle, ça fait du bien
Branle, branle, branle Charlotte
Branle, branle, jusqu'à demain.
25 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON