Sexe & scrutin
On ne le répétera jamais assez, l'élection est un acte solitaire,
Côté de la source, de l'électeur, le vote d'élection de représentant est un acte individuel, qui n'est qu'une modalité de dépossession de sa subjectivité au profit d'un tiers : il n'y a pas de vote collectif entre l'isoloir et l'urne. Il faut le répéter !
Côté de la cible, le candidat tiers éligible est aussi une entité individuelle, il n'y a pas de collectif mandaté via les scrutins uninominaux. Il faut aussi le répéter. Formellement on ne vote pas pour un parti ou un programme, mais sur un nom. Malheureusement, aux présidentielles, on ne peu panacher les programmes ni les équipes ! Ce qui serait pourtant gage de meilleure représentativité des intérêts composites populaires.
Bien. Mais entre l'électeur source et le candidat cible, il n'y a pas de relation ! Aucune !
On peut dès lors s'agissant de l'acte électoral oser parler d'onanisme palliatif, mimétique, synchronisé, car acte sans partenaire réciproque sensible, sensuel, sensoriel. Juste un partenaire fantasmatique momentané.
Les « débats » et les « débavardages » partisans de campagne ou autres déclarations de martingales concurrentielles, spéculatives ou abstentionnistes, qui précèdent le scrutin n'ont aucune traduction réelle dans l'isoloir, mais visent à entretenir une illusion d'acte collectif, d'un « je vote » = « je-nous votons pour lui-nous contre l'autre-vous », algorithme mental chimérique délirant, une sorte de trouble de la structure de la conscience subjective, du Moi. L'électeur abruti et saturé de stimulis mentaux contradictoires entrant dans l'isoloir n'est plus en complète maîtrise de lui-même. Il est vulnérable.
Il oscille psycho-affectivement entre sentiment narcissique de toute puissance (maître absolu du choix), et désespoir d'impuissance et d'exclusion (individualité ponctuelle négligeable dans la foule votante, exclue du cercle des « élus éligibles »).
Du point de vue « psycho-analytique » sans prétention doctorale, disons que c'est un procédé malsain, psychopathogène. Une sorte d'invitation à une jouissance dans la frustration. Vote d'amour ou vote de haine, d'enthousiasme ou de vengeance, ce sera amour trahi ou coup d'épée dans l'eau, noyade dans la statistique comptable, glaciale et opaque du verdict quantitatif. L'objet aimé ou haï fantasmé part en fumée dès le bulletin déposé-dépouillé ! Fin annoncée de l'illusion addictive pré-électorale qu'elle soit festive ou guerrière !
On voit donc que le mot-clef de l'illusion électorale est « isoloir » : injonction morale d'un devoir onanique électoral donc solitaire frustrant, contraire d'un « devoir conjugual » accompli (comme disais Jean Ferré, fondateur de radio courtoisie, « il ne faut pas confondre les deux ! »)
Assimiler le vote en assemblée locale de personnes physiques dialoguantes et le vote en scrutin de masse sous isoloirs est donc une imposture. C'est l'imposture de la démocratie représentative, comme dit Etienne Chouard, une escroquerie qui assimile vote et élection, alors que l'un est le contraire de l'autre. Cette assimilation, c'est aussi le mensonge de classe.
Car dans la logique de classe, il y a un aspect, une tension sexuelle inconsciente et pourtant bien réelle : en se réservant le vote dans l'entre-soi des réciprocités assemblées de jouissance érotico-affairistes, la bourgeoisie éligible en prive le prolétaire électeur par l'élection onanique, par la frustration de l'isoloir (outre celle de l’assommoir !), re-signification de sa misère relationnelle réduite à la copulation reproductive de sa force servile.
Ici Freud et Marx se rejoignent dans un même schéma duel psycho-sociologique bien plus décisif que les bavardages politologiques, dont on nous abreuve, ne le laissent voir. Il y a peut-être dans le phénomène de l'abstention quelque chose à voir avec l'abstinence, incubation de l'isoloir affectif, elle-même corrélée avec l'infantilisation et la féminisation des rapports sociaux. On peut parler aussi de dévirilisation paradoxale au moment où ces rapports sociaux deviennent de plus en plus violents.
Donc hommes ou femmes, hommes & femmes, restons sujets virils et en éros insurectionnel face à l'imposture d'un président-candidat en ambiguité toxique et dystopique de genre dans tout les sens du mot, genre politique, genre économique, et genre psycho-affectif, voire dysphorique sexuel du mot.
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