Skyfall : un superbe James Bond
Le plus beau à mon goût, le plus raffiné, le plus élégant, les plus esthétique.
Un classique. Allez, je me lance. Un grand film. Dans son genre. Un de ces films dont on sait qu’ils donneront pour toujours des émotions liés à l’art et à la beauté.
Oui, je sais, j’y vais fort. Mais j’ai été saisie comme un steak des deux côtés et je suis encore grillée ce matin avec de belles traces dans ma mémoire.
Et Dieu sait si je n’en attendais rien. Une déception de plus de ces blockbusters « américains ». La bande annonce m’avait paru sans intérêt. J’y étais avec des amis. Victime consentante de leur goût pour le dernier « James Bond »…
Mais c’était sans tenir compte du réalisateur Sam Mendès qui est anglais, c’est donc beaucoup plus subtil comme film, pardon les Zuniens qui travaillent beaucoup pour les mangeurs de pop-corn. Mendès a fait ses classes comme metteur en scène de Shakespeare, il a proposé un excellent film « American beauty ». C’est un délicat. Il paraît que ce James bond a failli ne pas se faire. Qu’il y avait des problèmes d’argent. Que la Métro a remis le projet. Pas de regrets la Métro ! Encore une belle étoile à votre palmarès !
Wouah !
On en prend plein les yeux ! Dès le générique. Magnifique ! Quel film inventif toujours surprenant. On se dit : « Vont-ils trouver mieux ? » Hé oui. Dans cette surenchère d’effets spéciaux qui sont ici comme une galerie de musée avec des images, des tableaux, d’une beauté à foison qui ne dure que quelques secondes. On pense aux heures qu’il a dû falloir pour chaque plan qu’ils lancent sur l’écran dans une profusion de cascade. Dingue ! J’avais les yeux qui brillaient dans l’obscurité comme un enfant devant le sapin de Noël.
Comme c’est bon d’être respecté en tant que spectateur. A un moment, je me suis même demandé si ce film serait autant apprécié par le public car il sort des normes de ce genre de divertissement pour être, paradoxalement, plus lent dans son rythme, plus classique dans son étude des personnages, créant pour la première fois un méchant (Javier Bardem, étonnante création) qui va bien au-delà de tous les autres, qui ne sont que des « ombres de méchant ».
Oui, ce qu’il y a de moins bien dans ce film, c’est la bande-annonce. Du moins on n’est pas déçu quand on découvre le tout !
J’ai éprouvé les mêmes émotions esthétiques qu’en regardant « Blade Runner ». Un de mes films préférés. Certes « Blade » a une dimension métaphysique que n’a pas Skyfall, mais Skyfall est tout aussi remarquable dans la composition, la richesse des décors, la construction d’un univers fantasmagorique et précieux. Le passage qui a pour cadre Shanghaï est époustouflant. Et une scène de meurtre (entre autres) sur des murs de lumière changeante aligne un nombre incroyable de vues différentes, toutes superbes et étonnantes.
(Je vais avoir des problèmes, pour continuer, à trouver des adjectifs !)
L’histoire ? On s’en fiche. Il y a un méchant qu’il faut trouver. Er Bond, James Bond. Un peu vieilli. C’est le sujet d’ailleurs. Il a failli y rester. Après une poursuite qui ouvre le film et qui dure bien un quart d’heure. A la fois banale et étonnante. Déjà. Mais on ne sait pas encore ce qu’on va voir. Bond reprend donc du service. Même s’il n’a pas très bien réussi ses tests.
Disons que pour un quinquagénaire à l’épaule percée il s’en tire plutôt bien.
Et curieusement l’âge, pour la première fois, est au coeur du débat. Donnant d’autres enjeux et d’autres ombres. La vieillesse et l’enfance, avec une fin à la « Rosebud ». Mais je n’en dis pas trop !
Craig donne une autre dimension à son personnage. Il n’a pas l’air mondain, le côté coureur qui composaient le charme de ses prédécesseurs. Lui est plus strict. Plus froid. Coquin quand même de temps en temps…. Avec les femmes, dans ce film, il y va mollo mais les rares scènes où il les taquine sont superbes de retenue, de floutage, d’espace, d’intimité. C’est un espion froid qui court bien.
Quelles différences avec les autres films de la série ?
Les personnages sont beaucoup plus travaillés. Ce qui le rend plus profond. Plus sérieux. Les gros plans des visages, très souvent employés, aident à donner une forme intime à un film grand espace. Par ailleurs les scènes d’amour, remarquablement filmées, sont plus sensuelles qu’érotiques. ( La différence entre les deux : l’érotique est pour l’œil. C’est une promesse. Le sensuel passe dans le sang. On y est.) Ce sont des femmes plus que des pin-up. (Ah ! Ce déshabillé en soie crème et dentelle noire ! D’une élégance vintage à tomber.) Je me souviens d’une scène où une métisse à ravir lui passe un rasoir de grand papa sur les joues qu’il a mousseuses : elle est à genoux devant lui dans une robe rouge qui dessine sa cambrure. A l’arrière des lanternes de la même couleur. Un fond sombre. Chaque plan est travaillé. C’est admirable. Elle le touche, ils ne se touchent pas. Nous sommes touchés. Mmmmmmmm…
J’ai noté deux petits ralentissements. C’est peu sur un film de plus de deux heures.
Donc, voilà. Si vous avez envie d’aller au ciné. Si vous vous dites : « Tiens, vais-je aller voir le nouveau James Bond ? Est-ce une daube ou un divertissement sympa ? » N’hésitez pas. Un des plus beaux films que j’aie vus de ma vie. (Il me fait un peu penser à « Drive » si l’on s’en tient à l’esthétique qui est ici tout aussi travaillée mais beaucoup plus baroque, saupoudrée d’un zeste de mélancolie.)
Et la musique !
Ce film joue sans cesse avec les « codes James Bond » pour les réinterpréter subtilement à sa façon. Ainsi l’air connu va être retenu, amorcé, travaillé jusqu’au moment où il explose...Quand ? Pourquoi ? Mais je vous laisse le découvrir. (Pour patienter, voici la très belle chanson d’ Adèle : « Skyfall »)
Oh ! La ! La ! Que dire de plus. J’ai envie de le revoir demain ! (Qui est en fait aujourd’hui !)
Vous ne risquez pas grand chose : tous les critiques l’encensent !
Ah ! Un dernier point et non le moindre.
C’est un film extrêmement actuel. Internet est une des vedettes. Même si les débauches d’écran sont monnaies courantes, on les a déjà vues dans « Minority report » , ici elles sont esthétisées . Ce qu’il y a de super, en effet, dans ce film c’est le côté « Kakou », flambeur de Sam Mendès. Il a sans cesse l’air de dire : « Bon, vous connaissez ça ? Vous l’avez déjà vu ? Regardez ce que j’en fais ! » Et il nous en met plein les yeux comme un gosse surdoué !
Mais l’essentiel n’est pas là.
Les temps ont changé.
Jusqu’à présent quand on nous montrait un fou qui manipulait des fusées, on se disait : « C’est du cinéma. » Tandis que là, dans ce film, on se dit que tout ce qu’on voit est vrai. Que nous sommes, notre civilisation européenne, comme M (Judy Bench) et James Bond, un vieux monde prêt à se dissoudre face à des technologies utilisées par des fous. Ce jeu d’espion, cette amoralité totale, ce plaisir de tout dominer, cette mégalomanie terrible, on sait qu’elle est vraie. Quelque part , dans la vraie vie, il y a des gens devant des écrans qui se foutent totalement de nous, fourmis dont ils ignorent même l’existence, comme les habitants de cette île abandonnée, décor fabuleux, eux parcourant à grandes enjambées, nous anéantissant, des territoires virtuels dont nous n’avons même pas idée.
Il va falloir penser à notre Marabunta, les fourmis !
En attendant, bonne toile !
Et bravo Sam Mendès.
Du cinéma, du vrai. Que c’est bon !
(La photo qui illustre l’article vous présente Bérénice la petite française qui ne manque pas d’atouts ! Avec Ralph Fiennes, autre plaisir de l’aventure.)
Dernières nouvelles : il paraît que "Skyfall" démarre très fort sur Paris ! Tu m'étonnes !J'imagine le bouche à oreille !
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