Sur l’esprit du conservatisme
Un peu de controverse et de flou artitisque pour titiller les neurones
Conservatisme : pensée, attitude, résultant parfois en actions consistant à garder les choses en l'état. La posture conservatrice consiste à ne rien changer, ou, si absolument nécessaire, le moins possible. Dans ce cas les décideurs conservateurs feront des tractations, des échanges où les décisions seront troquées contre d'autres.
N'est pas un pur conservateur qui veut. Il s'agit ici de placer des repères sur l'esprit du conservatisme. Cet esprit s'observe dans chacun de nous à divers degrés et dans des domaines différents. Il n'est ni de droite ni de gauche.
Afin d'éviter le changement et pour en arriver là et justifier le " ne rien faire" la première attitude consiste à nier toute difficulté, problème ou manifestation d'insatisfaction, même au vu de résultats évidents. Nier l'évidence. Lorsque l'évidence est trop forte (chiffres, faits patents) on réclame d'autres preuves, on ergote, on demande plus d'expertise, bref on dilue l'impact de l'évidence. La comparaison avec d''autres temps, d'autres lieux, d'autres circonstances est appelée à la rescousse. On se réclamera du concept de justice, d'équité, d'antériorité ou de prudence tâtillonne. Car, inévitablement, ce qui existe déjà ne peut qu'avoir fait ses preuves. La tradition, les habitudes, la nature hypothétique et vague de l'homme, ou une nature idéalisée, par essence stables sont les garants du bien fondé de ce qui ne doit pas être changé. Les sociétés sont par définition d'une sagesse innée. Sinon, elles se seraient auto-détruites, disent les conservateurs les plus fermes.
Le bénéfice de telles attitudes ou de tels discours, articles ou livres est qu'il ne faut rien faire, ne rien entreprendre qui amènerait un changement que certains voient comme nécessaire. Les consevateurs taxent le plus souvent les innovateurs d'aventuristes, d'imprudents, ou de démagogues. Les plus habiles des conservateurs modifieront les noms ou les procédures de ce qu'il qu'il faudrait changer, tout en gardant caché les ressorts principaux de ce qu'ils veulent conserver. Ou encore, en politique une assemblée va vider une loi de sa substance par le système des amendements. L'affirmation de ce qui est, cachant alors ce dont on ne veut pas parler. Les Jeux très délicats du non dit et stratégie de la diversion sont alors à l'oeuvre.
Pour calmer les réclamations, pour minimiser un mal être, l'injustice, parfois le scandale, le conservateur réclame des preuves. Car, celui qui prétend que quelque chose ne va pas, doit en apporter la preuve irréfutable, la base juridique scientifique, statistique, ou que sais-je encore. Et le conservateur se pose alors en juge de ce qui est recevable et de ce qui ne l'est pas. "Prouvez-moi que ce que vous proposez est mieux que ce que nous avons déjà", dit le conservateur au messager du changement.
C'est ainsi qu'en son temps Pasteur s'est vu opposer l'Académie de médecine, ou que des savants pouvaient proclamer : "Le plus lourd que l'air ne volera jamais", ou encore à l'inventeur du téléphone : "Pourquoi les gens voudraient-ils se parler à distance ?"
Le conservateur, par définition veut le pouvoir, pour lui ou pour ceux qui le rassurent dans sa paresse intellectuelle ; puisqu'il va conserver ce qui est. Il est ou veut devenir le gardien du temple.
Tout pouvoir, par définition est conservateur, de sa doctrine, des faits établis, des idées reçues, admises comme prévalentes ou encore ce qui est dans l'intérêt général (mais défini par qui ?). Ce conservatisme affecte tous les courants de pensée, religieuse, scientifique, artistique, économique, sociale, et bien sûr politique.
Le conservatisme le plus ancré dans les moeurs est celui de la religion et de la politique mais se loge souvent dans les sciences. Car le conservateur n'est pas responsable, ne faisant que maintenir ce qui existe déjà (et dans ce cas, la durée est synonyme du bien) ou qu'il veut réinstituer. Il écarte systématiquement et habilement les réclamations. Son argument favori en matière sociale : "c'est pas moi, c'est les autres" ou encore, idée à la mode, "c'est le système". D'où le recours à des mots valises comme le système, la globalisation, la mondialisation, les marchés, la Nature, l'Histoire, et quelques autres.
Cela est répété ad nauseam en économie. Les choses sont ce qu'elles sont, dans une sorte de fatalisme résigné. Les causes de l'état présent des affaires reposent dans un ailleurs, voire un au-delà insaisissables, ou du moins n'impliquant que de très contestables relations de cause à effet.
Le conservatisme frileux ou mou appelle la réforme et le changement très graduels souvent après 30 ou 50 ans de débats. Mesure prudente destinée à ne pas froisser ceux qui ont un intérêt (poltique, financier, idéologique) à ce que rien ne change, et tout simplement ceux (ou organisations) qui ont un pouvoir donné. Et comme la prudence est une des quatre vertus principales et cardinales, tous les conservateurs y ont recours et convainquent ainsi les naïfs.
Quelques citations :
"Les conservateurs ne sont pas forcément stupides, mais la plupart des gens stupides sont conservateurs."
John Stuart Mill - 1806-1873
"Longtemps les centristes furent des politiciens de droite travestis, les gaullistes des conservateurs travestis et les socialistes des centristes travestis."
Jean-François Kahn - né en 1938 - Dictionnaire incorrect - 2005
L'apolitisme conduit, naturellement, à une sympathie vis-à-vis de la politique conservatrice. Le jour de l'élection, si l'apolitique ne s'abstient pas, il vote de préférence pour le candidat qui fait le moins peur, par conséquent pour le défenseur du régime tel qu'il est."
Alfred Sauvy - 1890-1990 - Mythologie de notre temps - 1971
Dans le langage politique, le parti conservateur est celui qui est opposé au parti qui poursuit le renouvellement des sociétés. On dit aussi substantivement un conservateur, les conservateurs. Le Conservateur, titre d'un journal qui dans les premiers temps de la Restauration, défendit les principes de l'autorité et de la légitimité contre ceux de la liberté et du droit populaire.
Qui sont les conservateurs aujourd'hui ? Les choix ne manquent pas.
Je vous propose un petit jeu : nommer un conservateur de votre choix, et repérer l'idée la plus conservatrice que vous connaissez.
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