TAFTA : pour tuer la bête, il faut aussi écraser son avatar, le CETA
Mort le TAFTA ? Meffi, il bouge encore et risque de revenir après une hibernation le temps de laisser passer les élections en France et en Allemagne.
Mort ? Peut-être, mais il risque d’exister sous son avatar canadien, le trop oublié CETA (Comprehensive Economic Trade Agreement).
En tout cas, il a pris du plomb dans l’aile, l’exécrable Tafta. En effet, le gouvernement français va demander en septembre à la Commission européenne d’arrêter les négociations, dixit le ci-devant Matthias Fekl, secrétaire d’État au Commerce extérieur. Le projet d’accord est rejeté par un nombre croissant de Français et d’Européens. Fervent partisan de l’accord en 2014, François Hollande s’y est radicalement opposé en 2016. C’est une bonne chose, mais quand on connaît Rantanplan, on peut rester dubitatif…
C’est en Allemagne que l’opposition de la société civile au traité transatlantique est la plus vive dans l’UE. Le vice-chancelier Sigmar Gabriel s’est carrément déclaré favorable, comme son collège français, à l’arrêt des négociations. Pourtant la chancelière allemande Merkel ne cesse pas de se montrer favorable à la signature du traité qu’elle estimait, en juillet, « absolument juste et important et dans l’intérêt absolu de l’Europe ». Il est vrai qu’après le Brexit, l’Allemagne devient la tête de pont privilégiée des multinationales yankees, et donc de la politique européenne des USA.
Il bouge encore même si, après 14 « rounds » de négociations opaques (disons plutôt d’expression unilatérale des volontés étasuniennes), l’Union européenne et les États-unis n’ont pas trouvé le moindre accord sur aucun 27 chapitres du projet de traité ! Pourtant un quinzième « round » doit s’ouvrir début octobre aux États-Unis… Quant à la Commission européenne, elle est favorable à ces accords, prête comme toujours à se coucher devant les diktats des multinationales qui sont les instigatrices réelles et les seules bénéficiaires potentielles de ce traité.
Hypocrisie des institutions européennes : en juin, juste avant le 14e round de négociations qui avait lieu à Bruxelles, les États membres ont renouvelé à l’unanimité le mandat de la Commission. Forte de ce mandat accepté à l’unanimité, le porte-parole de la C.E., le ci-devant Schinas martèle : « Nous avons un mandat de négociation qui a été accepté unanimement. Si les conditions sont remplies, la Commission européenne est prête à boucler l’accord à la fin de l’année ». Avec évidemment le soutien du patronat allemand… « Le TTIP (Tafta) ne doit pas être sacrifié sur l’autel de la campagne électorale qui commence », s’est pour sa part insurgé le chef de la puissante fédération automobile VDA, Matthias Wissmann. D’ailleurs, en coulisses, des diplomates sont convaincus que les négociations devront être suspendues au moins jusqu’à après les élections en France et en Allemagne en 2017. Pour revenir ensuite par la fenêtre…
Rappelons que le Tafta est un projet de partenariat de libre-échange transatlantique, négocié depuis juin 2013 – dans la plus grande opacité – par l’Union européenne et les États-Unis. Son but est de créer la plus grande zone de libre-échange du monde pour un marché de près de 800 millions de consommateurs. Dans la réalité, il s’agit de faire de l’Europe un simple vassal économique des États-Unis…
Ne faisons pas les fines gueules et savourons cette victoire du bon sens. Mais, bien camouflé dans l’ombre du tonitruant TAFTA sévit le CETA pour Comprehensive Economic and Trade Agreement. Négocié entre l’Union Européenne et le Canada comme toujours dans la plus grande opacité en 2009 et signé très discrètement en 2014, ce traité est aussi nuisible que le tant détesté TAFTA. Signé, mais pas ratifié !
Bien qu’il soit censé ne concerner que les échanges commerciaux entre l’U.E. et le Canada, le CETA est en fait le cheval de Troie des États-Unis puisque 81 % des entreprises étasuniennes présentes en Europe ont aussi une filiale au Canada. Par ce biais, les multinationales yankees pourront utiliser ce traité pour attaquer, via leur filiale canadienne, les États européens qui adopteraient des lois pouvant porter préjudice aux intérêts réels ou supposés de ces multinationales ! De plus, tout comme TISA (http://www.agoravox.fr/auteur/victor-71026) ce traité - contrairement à l’OMC (organisation mondiale du commerce), qui utilise des « listes positives » dans lesquelles les États énumèrent clairement les services publics qu’ils souhaitent inclure dans l’accord à l’exclusion de tous les autres – CETA propose la libéralisation de tous les services sauf ceux mentionnés dans des « listes négatives ». Ce qui change tout et entérine les desiderata des multinationales avides de bouffer tous les services publics, y compris la santé, l’éducation, l’environnement, le droit au travail et, pourquoi pas, la police et l’armée. Ainsi, stopper le TAFTA et ratifier le CETA serait une énorme konnerie.
Comme il se disait il y a quelques décennies, « ce n’est qu’un début, le combat continu ! »
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