Taxe Google : fin du parasitisme digital ?
Le gouvernement songerait (finalement) à faire payer Google : payer des impôts, payer les artistes et payer pour les réseaux qu'il sur-utilise. Une révolution dans le Far-West 2.0 dont on attend de voir les effets réels. Le mastodonte californien a plus d'un tour dans son sac pour consolider son quasi-monopole sur le Web.
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Ce n'est pour l'heure qu'un "rapport de travail sans caractère officiel", assure Fleur Pellerin, la ministre de l'économie numérique. Toujours est-il que le rapport existe, qu'il a été préparé par ses conseillers et qu'il prévoit pour la première fois de réclamer à Google de mettre la main à la poche.
Peut-être un bon calcul politique à l'heure où le gouvernement multiplie les annonces de rigueur et où les Français ont de plus en plus la sensation d'être les dindons de la farce socialiste. Pourquoi en effet le très prospère Google ne participerait pas à l'effort de "redressement national" cher à François Hollande et plus globalement continuerait à être le passager clandestin du Web français ?
Le rapport des services de Fleur Pellerin demande des comptes à Google (même si aucun moment la société californienne n'est citée, il n'est question que d'elle) sur trois points principaux qui alimentent la polémique depuis des mois voire des années.
Si Google se réfugie régulièrement (et fort hypocritement puisqu'il s'agit de la première société à avoir proposé la mise en oeuvre d'un Internet à plusieurs vitesse pour le mobile aux USA) derrière le principe de "neutralité du Net" (accès non discriminatoire aux réseaux), le gouvernement semble énoncer pour la première fois un principe qu'on pourrait définir par le principe de régulation.
Premier point. Dans la foulée du conflit entre Free et Google (le premier avait bloqué auprès de ses abonnés les publicités du second), le rapport gouvernemental assure, tout en condamnant les méthodes pour le moins cavalières de Free, que Google ne pourra pas éternellement sur-utiliser les réseaux français sans mettre la main à la poche.
Car avec Youtube, sa filiale spécialisée dans le partage de vidéos, Google est le premier consommateur (et de loin) de bande passante de France. Une consommation qui nécessite de financer de nouveaux réseaux pour faire face à la demande croissante de bande passante afin d'assurer aux internautes français (et pas seulement aux amateurs de Youtube) un Internet de qualité.
Les pistes du gouvernement ? Elles sont on ne peut plus claires :
Les services de partage de vidéos, au premier rang desquels Youtube, ne doivent pas "pouvoir utiliser sans restriction les réseaux ouverts, et bénéficier d’une tarification attractive conçue pour des utilisateurs de capacité marginale. Une telle utilisation serait à la fois injustifiée et économiquement inefficace. Elle ne permettrait pas aux opérateurs de développer des modèles permettant une juste rémunération de leurs infrastructures, et des investissements importants engendrés par ces usages gourmands en capacité".
Deuxième point. La question de la répartition des revenus de la création. A l'heure actuelle, le système est simple : tout pour Google, le reste aux artistes. En diffusant gratuitement et massivement dès leur sortie la musique de la quasi-totalité des artistes du monde (des super-stars aux groupes indépendants), Youtube génère beaucoup d'argent... et en redistribue très peu.
En situation de monopole, le géant californien est plus qu'en position de force pour négocier les prébendes qu'il distribue. Et là encore, le gouvernement semble vouloir agir, en proposant que Youtube contribue désormais, à l'image de ce que font les chaînes de télévision, au financement de la création.
"Ces hébergeurs, lorsqu'ils tirent des revenus directs ou indirects d'une activité audiovisuelle, devraient contribuer au financement de la création, au même titre que les éditeurs et distributeurs traditionnels", recommande le rapport. Un mini-tsunami dont on attend de voir les effets réels.
Enfin la question fiscale. Google réalise dans l'hexagone un volume d'affaires avoisinant sans doute le milliard d'euros annuel pour des bénéfices qui se chiffrent en centaine de millions d'euros. Pourtant, la société ne s'est acquittée en 2012 auprès du fisc français que d'une note fiscale de 4 millions d'euros.
Une pécadille qui s'explique par un tour de passe-passe fiscal que les conseillers financiers de Jérôme Cahuzac n'auraient pas imaginé : la filiale européenne de Google est basée en Irlande, petit paradis fiscal au milieu de l'Union européenne. Du coup, les clients français de Google, qui règlent depuis la France pour des services en France (par exemple des campagnes publicitaires géolocalisées) n'entrent pas en ligne de compte pour l'impôt français.
Une faille du système qu'exploitent également Apple ou Amazon, autres géants US qui réalisent un véritable dumping fiscal à double sens (ils ne payent pas d'impôts en France et leurs produits sont vendus avec un taux de TVA inférieur à celle de leurs concurrents basés en France).
Fleur Pellerin a promis depuis des mois de combler ce vide juridique qui handicape les entreprises françaises et pénalise les comptes publics... Le dossier est toujours en stand-by.
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