Te maries pas avec le cheval
Avant de miser sur un cheval, observe le, tu n’as juste qu’à ouvrir les yeux de ton regard le plus pointu, le plus soutenu, le plus appliqué. Même à l’arrêt, ce qui n’est d’ailleurs qu’une courte pause, car un cheval de course n’est presque jamais fixe et stagnant en présence de public et surtout de rivaux, tu peux déjà savoir s’il est le bon gagnant.

La tension est à son comble lorsqu’il il se dirige vers sa porte d’embarquement, ce qui lui impose presque un contact rapproché avec ses principaux rivaux, tenant à distance ses concurrents pour ne pas les toucher, facteur d’agression ou de stress. L’idée de courir l’émeut déjà seul, mais de se mesurer à la meute l’excite terriblement et le moindre détail ou contact aléatoire peur le contrarier et perturber ses nerfs. Et comme chacun d’eux est empreint de la même tension juste avant la grande course, cela fait beaucoup d’électricité dans le même périmètre.
Suis le pendant sa course, même s’il part le dernier, à la jumelle ou sur grand écran, et observe comme avec son jockey, ils ne font qu’un, comme ils sont parfaitement synchronisés dans leurs mouvements, parfaitement coordonnés dans leurs rotations. Malgré la somme des masses en action et l’enroulement de chacune, l’ensemble suit une ligne pratiquement droite légèrement ondulée. Les deux corps, de l’animal et du jockey, suivent une vague sans accrocs, parfaitement tracée et pure.
Afin de ne pas contrarier le travail du cheval, le jockey qui est porté par celui-ci doit prendre appui sur ses étriers au bon moment, c’est à dire juste avant le contact des pattes avec le sol. Une seule fraction de seconde plus tard et l’appui se produit au moment de l’envol vers le pas suivant, raccourcissant la portée de celui-ci et ralentissant ainsi sa course. Entre chaque impulsion, le jockey vole au dessus de sa monture au point que celle-ci peut en oublier le poids qu’elle déplace avec ailes.
L’homme est d’ailleurs plié, pour ne pas faire obstacle au vent des kilomètres parcourus à l’heure. Il se raidit au moment de l’appui transmettant l’onde ainsi jusqu’au haut de son corps, mais il s’assouplit ensuite afin de se plier un peu plus, quitte à ce que son front touche le garrot de la bête. Afin de ne pas s’élever et ainsi observer un ligne parfaitement droite, il corrige le mouvement ondulant s’approchant du linéaire exact, ça n’a l’air de rien, mais quand tu vois qu’il n’est ni assis mais plié, en suspension en vol au dessus de son col pendant les trois minutes de la course endiablée, tu comprends mieux pourquoi ils fument en hiver...
Si tu as fait le bon choix, tu verras qu’au dernier virage, s’il n’est pas à la corde, il est en embuscade dans le paquet de tête, mais déboulera en virant large vers l’extérieur du terrain, car il est sûr de n’être ainsi gêné par aucun concurrent, ce qui le soulage quant aux entraves et le libère jusqu’à la ligne. Ce n’est pas le meilleur cheval ni le meilleur jockey qui l’emportent, mais le meilleur couple.
Le mot est lâché, le meilleur couple.
En effet, si ton amour est prêt à franchir des montagnes, il est temps de choisir celui qui t’accompagne. Si tu montes à cheval tu connais tes limites et ta sensibilité à comprendre l’animal ne se résume pas au fait que tu l’imites, mais bien que tu sois toi, moteur original. Si tu suis le cheval, il ira où il veut et en passant sous l’arbre, la branche dans tes yeux te jettera au sol, sans même qu’il s’en rende compte et pour le rattraper, tu connaitras la honte.
Mais si tu es motrice et domine la bête, si tu sais le conduire, l’emmener à la fête, il te remerciera et sera ton complice, et partout tous les deux, ne ferez qu’une tête. Sans forcer, sans rudesse en suscitant avant que l’obstacle ne se dresse, anticipant la route la plus simple à franchir, il te remerciera de rouler en déesse.
Et pour choisir l’homme et tenter l’aventure, il ne suffira pas qu’il se soit montré dur, ni doux, tendre et soumis, mais plutôt, souple et sûr, de bien savoir tenir fermement sa monture.
Te maries pas avec le cheval, mais avec l’homme qui sait maitriser l’animal.
A ma fille angélique, dix huit ans.
14 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON