Une arme reste un « outil » pour accomplir une tâche particulière
Le ministre de l'Intérieur a présenté le 29 février le pistolet-mitrailleur HK G36, arme déjà en dotation au sein de quelques unités police/gendarmerie et qui devrait à terme équiper les unités de primo-intervenants (près de 2000 fonctionnaires). Cette arme qui tire des munitions de calibre 5.56 est plus maniable dans les lieux exigus qu'un fusil d'assaut, offre une meilleure précision et une munition plus vulnérante que le 9 mm FMJ (blindé). Chaque policier habilité à utiliser cette arme sera astreint à une formation particulière, le centre de tir de Montgerons (Val-d'Oise) est pour le moment le seul à disposer de pas de tir adaptés. Le stand en construction dans les sous-sols de la Cité judiciaire des Batignolles, Paris 17e arrondissement, ne sera accessible qu'au cœur de l'été 2017. Les fonctionnaires pourront en attendant utiliser le stand du Raid à Bièvre (Essonne) et ceux de la gendarmerie.
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A la suite des attentats survenus à Paris au mois de novembre et l'intervention courageuse d'un commissaire de permanence et celle de son chauffeur à l'intérieur du Bataclan où ils sont parvenus à neutraliser un « Tango », les syndicats de police ont enfin vu leur doléance portant sur l'extension du port d'arme aboutir : « Toutes les mesures doivent être prises pour garantir la sécurité de nos collègues et maintenir leur possibilité d’intervention, y compris dans les moments où ils ne sont pas en service, par le port permanent de leur arme (de service) individuelle. » Le ministère de l'Intérieur étudie la création d'un statut d'agent de sécurité renforcée, les agents de prévention affectés à la sécurité des sites sensibles, à des salles de spectacles, des usines ou des stades pourraient être armés à l'égal des transporteurs de fonds. Une solution partielle résiderait-elle du côté des policiers municipaux ?
Douloureux petit retour en arrière, le Syndicat des commissaires de la police nationale a rapporté devant la commission d’enquête parlementaire à propos de ce commissaire qui ayant demandé à un militaire d'apporter son renfort s'était entendu répondre : « Non j'ai pas d'ordre pour bouger » et de lui rétorquer : « alors passe-moi ton Famas » s'était vu opposer un refus catégorique. Le policier d'interroger en dernier recours l'état-major afin de savoir si les : « militaires de la force Sentinelle présents sur place sont autorisés à engager. » La réponse tomba comme un couperet : « les militaires ne sont qu'en assistance, ils ne peuvent pas intervenir ! » Pour cause, les militaires ne sont pas habilités à intervenir au sein d'unités mixtes police/armée. Cette doctrine inadaptée à la situation a sans doute contribué à alourdir le nombre des victimes. « L’armée n’est pas un stock de vigiles à déployer devant les lieux de culte ! » (général Desportes).
Le Français est un être paradoxal, la population reste opposée dans son ensemble au port d'armes mais non à l'auto-défense ! Il accepte de vivre à côté d'une poudrière ou d'une usine classée Sevéso, de produire des armes et munitions à l'export capables de massacrer d'autres homo sapiens, mais il reste partagé sur l'« outil ». Une arme est « inerte », elle ne tire pas toute seule, du moins pas encore, cette possibilité est dans les « cartons ». C'est l'homme qui prend la visée, lève la sécurité et qui appuie sur la détente. Le choix de la munition est aussi important que le choix de l'arme, aucun chasseur n'aurait l'idée d'utiliser des munitions identiques pour la chasse aux grives et aux grands animaux. Les hommes des groupes d'intervention utilisent en fonction de la mission, une grande variété de calibres : .223, .308, .338, .50 pour les armes longues et diverses cartouches calibre 12, dont la Brenneke et la « door buster » pour l'« ouverture » des portes.
Chaque type d'arme individuelle répond à un besoin bien particulier et l'arme polyvalente n'existe pas encore, il s'agit toujours d'un compromis entre : portée - précision - encombrement - cadence de tir - létalité de la munition - sûreté et sécurité. Le HKG36 reste un : « fusil est très modulaire et permet d’obtenir une version optimisée pour l’utilisation qu’on souhaite en faire. Le canon est plus court, la visée optique est modifiée pour tir de riposte, et Le mode rafale n’autorise qu’un double-coup. » Cette arme dote déjà : la Force d’intervention de la police nationale - le RAID - les brigades de recherches et d’intervention - les pelotons spécialisés de protection de la gendarmerie nationale (PSPG) et les PSIG Sabre.
Le fusil d'assaut FN Special Operations Forces n'aurait-il pas représenté un choix plus judicieux ? Il peut être chambré en 5.56 OTAN ou en 7.62/39 (AK 47). Dit autrement, l'opérateur peut récupérer les magasins des agresseurs utilisant un AK et en approvisionner son arme ! D'autre part, sa crosse permettre d'y retenir des chargeurs supplémentaires. Quant au HK G36, il présente un inconvénient pour les finances publiques. La munition inutilisée a une durée de vie limitée, une fois celle-ci chambrée elle est poinçonnée (marquée mécaniquement). Elle ne pourra donc être réutiliser dans les mêmes conditions, qu'une douzaine de fois...
Le fusil d'assaut est une déclinaison du pistolet-mitrailleur capable de tirer en rafale pour accroître les chances d'atteindre la cible. L'arme se devait de rester légère, le choix du calibre se porta sur un chargeur contenant des balles calibre 9 mm. Si le premier modèle est apparu en 1915, la « mitraillette » sera popularisée dans les années vingt. Actuellement, on rencontre surtout des pistolets-mitrailleurs (l'arme dispose d'un sélecteur de tir pour tirer soit au coup-par-coup, par rafales courtes ou limitées) de quatrième génération (tir à culasse fermée pour réduire le tressautement de l'arme) ou de la cinquième génération construite avec des matériaux composites et chargeur en arrière de la crosse. La prochaine amélioration sera très probablement l'arrivée de la culasse fermée.
La Seconde Guerre mondiale terminée, l'armée américaine réalisa une étude et constata que la majorité des blessures n'étaient pas dues à des tirs ajustés mais de saturation, et que la plupart des blessés se trouvaient à des distances inférieures à 300 mètres. La guerre du Vietnam vit apparaître une arme offrant un compromis entre un recul acceptable, une précision et un pouvoir vulnérant améliorés. Ce fut l'avènement du calibre 223 (centième de pouce) ou 5.56 mm dérivé de la munition 22 magnum utilisé pour la chasse. La taille réduite de la cartouche permettait au combattant d'emporter deux fois plus de munition. Le FAMAS qui équipe l'Armée française a la particularité d'avoir le chargeur placé derrière la poignée, astuce qui permet d'offrir une plus grande longueur de canon sous un faible encombrement, autre particularité qui a des répercussions sur le prix de cette arme (2000 euros selon la version) et qui limite sa vente à l'export, le canon est forgé à froid.
L'armement des policiers ne cesse de faire débat, dois-je rappeler ici que l'arme n'est pas uniquement un symbole de l'autorité et que le tir requiert maîtrise de soi et un entraînement régulier. L'usage de arme par le fonctionnaire pose le caractère d'irréversibilité ! S'il est facile au « pékin » de critiquer l'usage de la force armée, l'opérateur qui intervient à « chaud » ne se doit de ne jamais céder à la solution de facilité qui consisterait à faire immédiatement usage de son arme, sauf cas de force majeur. Il ne saurait être question de tirer parmi une foule sur des éléments hostiles. Avec le port d’une arme chargée ou cartouche chambrée (pratique interdite, le règlement impose l'arme approvisionnée pour gagner du temps), on ne peut jamais totalement exclure le risque d’un tir accidentel ni celui de se blesser ou de blesser autrui. Certains policiers, gendarmes, douaniers et militaires soucieux de se perfectionner dans le tir se rendent dans un pays limitrophe pour y suivre un stage payé sur leurs propres deniers ! Et pour cause, savez-vous combien de munitions un policier lambda « grille » par année ? moins d'une centaine alors qu'il en faudrait au bas mot 500 pour être capable de réagir au mieux d'une situation imposée et gérer un incident de tir.
L'unité se doit d'être une entité qui réagit à l'unisson, or dans notre société, le nombre de personne qui gardent leur sang froid dans une situation de catastrophe est estimé à seulement 15 %, chiffre dans lequel est compris le réflexe de sauvegarde personnelle. Adieu ! les temps records faits à l'entraînement. La préparation mentale et l'entraînement sous stress dans des conditions proches de la réalité peuvent contribuer à réduire l’inhibition, mais à part un entraînement spécifique (sous forme de duel pour développer un réflexe conditionné) rien ne permet de savoir comment une personne réagira dans une telle situation. Si vous avez déjà été « braqué » ou si vous avez eu à tenir en respect un individu, vous savez ce que cela signifie. Pour les autres, il ne s'agit que de spéculations et de « blablabla... » Il leur manque la réalité du combat. Seule l’épreuve du feu permet de se découvrir et de savoir comment on affrontera la situation. L’inhibition d'être tué ou de tuer une autre personne est très présente chez l'homme et cela n'a pas manqué de poser un problème de formation. Il a fallu mettre en place une pédagogie adaptée avec entre autre, l’apparition de cibles plus réalistes, de tirs avec des armes de marquage (Sigmunition ®, Paint ball, laser) en situation de duel. Dans ce genre d'exercice et avec de la pratique, le tir d’élimination est réduit à un réflexe conditionné, la cible est déshumanisée. Au combat, la détente est pressée comme à l'entraînement sans qu’aucune instance morale n'interfère puisque l'étape de l'analyse mentale est « court-circuitée ». Les opérateurs penseront au double « tap » ou au très prophylactique Mozambique shoot... Petite phrase du jour : « Au combat, seuls les touchés comptent »
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