Une fabuleuse sculpture sur ivoire du III ème siècle (?) nous dit tout sur l’esplanade des mosquées des uns, mont du temple pour d’autres
Il est des oeuvres devant lesquelles on reste muet d'admiration tellement elles ont atteint le sommet de leur art. C'est le cas de cette sculpture sur ivoire, sculpture ignorée dont je ne sais plus dans quel musée elle se trouve mais dont j'ai conservé l'image. Constituée apparement de trois lames d'ivoire juxtaposées, le musée y voyait, dans le personnage central, saint Paul jeté en bas de son cheval en voyant le Christ apparaître dans le ciel. Bien sûr que ce n'est pas possible. Tous les artistes qui ont évoqué la scène l'ont située sur un chemin solitaire qui menait à Damas alors qu'ici nous avons la représentation "époustouflante" d'une véritable armée assiégeant une place forte redoutable. Génie de l'artiste, un maître de la perspective et de la composition ! Il ne manque que le bruit assourdissant de la bataille pour se sentir emporté dans le mouvement irrésistible qui nous fait monter à l'assaut.
Un jésus-Christ des évangiles qui apparaît dans les nuées ? Certainement pas ! Il ne peut s'agir que du Jésus, Christ, de l'épître de Jacques que celui-ci voyait dans le ciel, au début du Ier siècle, avant les évangiles, un Jésus, Christ, qui vient, messie juif, voire essénien. Il est celui qui fait le signe de reconnaissance dans un chapiteau de la cathédrale de Chalon.
Comment se fait-il qu'aucun expert n'ait vu que la ville assiégée était Jérusalem ? Il s'agit pourtant du siège le plus célèbre de l'Histoire : la prise de Jérusalem, en 70, par Titus. Voyez, au loin, en haut, à gauche, la muraille dont la hauteur nous est suggérée par la petite taille de la colonne de combattants qui la longe pour l'attaquer. Voici, dans leurs enceintes muréees, à gauche, la célèbre Sion du roi David ; voici, à droite, la très vieille Jérusalem des Jébusiens/Jebouséens.
Qui donc a pu sculpter de mêmoire un tel tableau, sinon un juif exilé de la diaspora qui en avait encore le souvenir avant que ce souvenir disparaisse ? Son nom est inscrit en bas, et à droite, Antonias, Venetis (?), un Vénète ? À moins, bien sûr, que le tableau soit une reproduction tardive d'un document d'époque, ce que je ne crois pas vu la trés grande ressemblance du visage de Titus avec les bustes qu'on lui connaît. J'aurais tendance à rattacher l'auteur à l'école de Chalon-sur-Saône dont j'ai évoqué, au III ème siècle, d'autres sculptures de cette qualité.
Voyons maintenant, en agrandi, la ville sainte telle qu'elle était avant sa destruction, témoignage non seulement rarissime mais unique.
Alors qu'Abraham ne pouvait mettre sur les rangs que trois cent dix-huit soldats (Gn 14, 14), David était en mesure d'en aligner trente mille (2 Sam 6, 1). Le roi David, avec ses hommes, marcha sur Jérusalem contre les Jébouséens, habitants du pays. Ceux-ci dirent à David : « Tu n'entreras pas ici » (2 Sam 5, 6). Contrairement à ce que pensent les exégètes, le livre de Samuel ne nous dit pas que le roi s'empara de la Jérusalem des Jébouséens qui se trouvait sur l'Ophel, colline basse ; il nous dit seulement qu'il s'empara de la forteresse de Sion, laquelle devint la cité de David (2 Sam 5, 7). Ce mont Sion, c'est bien évidemment la colline haute, là où les historiens l'ont situé jusqu'au jour où les archéologues israéliens ont décidé, sur la foi d'interprétations archéologiques discutables, de l'installer sur l'Ophel, ce qui est miltairement absurde.
Trente mille hommes ? Il n'y a que la colline haute qui pouvait les acceuillir.
Salomon commença à bâtir la maison de Yahvé à Jérusalem, sur le mont Moriyya, où Yahvé était apparu à David, son père, à l'endroit que David avait fixé sur l'aire d' Ornân le Jébouséen (2 Chr 3, 1) ».
Mont Sion, la cité de David
Ce mont Moriyya où Yahvé est apparu à David, cela se comprend s'il s'agit de la colline haute, le mont Sion, laquelle dominait l'Ophel des Jébouséens. Cela ne se comprend pas s'il s'agit d'une position sous les murailles des Jébouséens, que ce soit au sud ou au nord de l'Ophel, positions impossibles à défendre alors que la ville jébouséenne était encore indépendante, fortifiée et interdite aux Hébreux. Certes, Flavius Josèphe semble bien avoir écrit qu'Hérode avait construit son temple sur les fondations du temple de Salomon, mais après plus de dix siècles de troubles et d'oublis, il est manifeste qu'il se trompe (Antiquités judaïques, livre XV, XI). Quand le prophète s'écrie : "Debout ! Montons à Sion, vers Yahvé notre Dieu !", c'est bien vers un temple de Salomon qui se trouvait sur la colline haute qu'il voulait diriger ses pas (Jérémie 31, 6).
À gauche, la mosaïque de Madaba dans laquelle on veut voir Jérusalem. Il ne s'agit, bien évidemment, que de l'oppidum de Sion. Je l'ai élargi pour lui redonner la forme de l'ovale sacré. À droite, un plan ancien des quartiers ouest, notamment du quartier arménien actuel. On fait tout de suite le recoupement ; mais ce qui est le plus intéressant, c'est de faire un deuxième recoupement avec notre sculpture sur ivoire, ce qui nous permet de situer sur le terrain nos très célèbres édifices... détruits ?... ou toujours debout.
Le temple de Salomon, mais oui, il est là, parfaitement représenté, tel que la Bible hébraîque le décrit, avec sa nef classique et son porche élevé. L'artiste l'a décalé pour qu'on puisse en voir la façade, comme l'a fait, beaucoup plus tard, le sculpteur de la cathédrale de Laon.
Quant au temple d'Hérode, voyez mes anciens articles et ouvrages. J'ai déjà traité le sujet dans deux articles, l'un du 13 avril 2007 ; cela fait dix ans. https://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/le-temple-de-salomon-22316, l'autre adressée à Mme la Ministre de la Culture, en 2014, sans succés, https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/temple-de-salomon-mme-la-ministre-148660
De même que pour l'erreur de localisation du site de Bibracte, je suis bien obligé de constater, dans l'indifférence des élus, le parti pris de ce ministère contre tout ce que j'écris, probablement parce que je n'ai de cesse de dénoncer ses erreurs scandaleuses concernant les origines de notre histoire.
N.B. En réalité, Titus n'a pas attaqué, côté sud mais côté nord.
E. Mourey, 2 septembre 2017
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