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Accueil du site > Tribune Libre > Vol au-dessus du projet législatif de l’UDF

Vol au-dessus du projet législatif de l’UDF

Il est . Et je l’ai lu. Si. Je l’ai fait. Préalablement à l’introductif préliminaire qui va suivre, laissez-moi noter avec une perfidie relative qu’il s’agit en fait d’un (i) avant-projet législatif (ii) soumis au débat. Vibrant hommage à la politique 2.0, qui voudrait que l’on rende publique des versions bêta plutôt que des versions finalisées, ou emprunt à la prétendue participativité ségoléniste ? S’il avait été envisagé l’organisation d’une convention à la suite du débat, j’aurais irrémédiablement penché en faveur du deuxième terme de l’alternative.

Le préalable clos, envisageons le préliminaire. En fait, commenter le projet législatif de l’UDF est pour moi un défi intellectuel : je sais que d’injustes et ingrats commentateurs seraient prêts à m’imputer une partialité de mauvais aloi. Aussi, pour rester crédible, me faut-il nécessairement trouver des mesures que j’approuve dans cet avant-projet. Soit. Mais, jamais au grand jamais, que cela soit dit et ouï, je ne laisserai les réactions présumées de mes lecteurs influer a priori sur ma perception d’un document quelconque.

Et je ne veux aucunement, pour complaire à mes détracteurs, adopter une position qui ne serait point mienne.

Vais-je alors vous dire que cet avant-projet est calamiteux ? Vais-je soutenir qu’il n’est pas à la hauteur des enjeux qui s’imposent à la France ? Que leur vision des institutions françaises est pathétique ? Leur appréciation de l’Europe dépassée ? Leurs préconisations sur l’éducation ridicule ?

En vérité, je vous l’écris, non, je ne vais pas soutenir tout cela. A tout le moins pas avec cette intensité, si ce n’est pas du tout. Ou pas tout ça. En tout cas pas avant d’avoir achevé de lire le projet de l’UMP (dont je dois dire tout de même que les premières pages me paraissent plus mordantes, mais bon, le centriste est mou, c’est un principe).

Que vais-je vous dire, alors ? Ouh... Le suspense m’étreint tant que cela me fait comme des trucs bizarres dans l’dos. Pas vous ?


Je vais vous dire que je partage de 70 à 90 % des propos de cet avant-projet soumis au débat. Je n’ai pas bondi. Jamais. Aucune exclamation furieuse dans mon train de banlieue. Et je ne dis pas cela pour soutenir ensuite que je me suis fort ennuyé à cette lecture. Il s’agit tout de même d’un projet législatif. Par nature, c’est pas ce que l’on fait de plus haletant.

Partons, de mémoire (assistée par ordinateur), de ce que j’ai le plus approuvé.

Sans conteste les développements consacrés à l’Europe. Que le Grand Cric me croque si j’en renie une ligne. Bon, disons, par prudence : l’esprit global. Mais, sans ambages, ni crainte, je l’écris : je suis probablement de la même famille de pensée que l’UDF au sujet de l’Europe. "L’Europe est bien un moyen pour écrire l’avenir, non pour le subir". Je leur en voudrai longuement de l’avoir écrit avant moi. Rédaction d’un nouveau traité, soit. Extension de la codécision, ok. Allongement de la durée de la présidence, oui. Restriction de l’usage de l’unanimité, jawhol. Opposition à l’entrée de la Turquie afin de conserver à l’Europe son caractère politique, da.

Les institutions françaises ? Ouiii ! "L’élection au suffrage universel direct ne peut pas faire du président un observateur retiré sur son Aventin et n’intervenant que dans de rares occasions". Parfait. Un premier ministre ayant un rôle de coordination ? Oui. Un Parlement renforcé ? J’ai cru en percevoir la nécessité. Reste la question du numéro : s’agit-il d’une version 5.3 ou d’une version 6 ? A la suite d’Adam Kesher, je veux bien me tâter. Sans savoir si, en fin de compte, je ne m’en tamponne pas. Car, en fin de compte, on peut aussi réviser la constitution sans jeter aux orties l’existante, qui nous a tout de même rendu de loyaux services.

L’éducation ? "Si nous étions condamnés à ne conserver qu’une seule idée, ce serait celle-ci : l’investissement dans la formation, le progrès des connaissances, la culture est vital pour l’avenir de notre société. C’est lui qui est le plus à même de favoriser son adaptation, son efficacité économique et, en même temps, sa cohésion". Ca aussi, j’aurais dû l’écrire. Je n’en ai pas eu le temps. Faut dire aussi qu’eux, ils n’ont que ça à faire.

Faire de la France un pays "pro-entreprise"  ? Bien évidemment. Tout comme le fait de voir davantage en la mondialisation un processus dont les Français peuvent tirer parti qu’une sombre menace dont il conviendrait de se protéger. Je ne pourrais le renier.

Gageons que c’est une position qu’apprécieront nos amis de gauche. Tout comme cette citation de Durkheim, "si l’Etat est partout, l’Etat est nulle part", ou la référence à Tocqueville ("Certes, la France évolue, comme les autres, dans un ensemble de contraintes. Mais comme le faisait déjà remarquer Tocqueville, dans ce vaste cercle, subsiste une large part de la liberté. C’est à nous d’en user.")

Sur le temps de travail ? "Multiplier le travail ,non le diviser [...] C’est pourquoi il faut qu’un nouveau régime des heures supplémentaires permette à chacun dans l’entreprise de répondre librement à ses attentes"... Ah, le choix ! Ah, la liberté !


J’ai bien trouvé matière à m’étonner, comme lorsque je lis : "Qui oserait prétendre que l’évolution démographique sonne le glas de la retraite par répartition ?" J’en ai lu de guère optimistes, et je doute que de tels propos soient de nature à provoquer la nécessaire prise de conscience...

J’ai trouvé aussi matière à sourire en lisant, dans ce projet qui ne se veut pas un programme, la nécessaire taxation des deux-roues, bruyants.

Mais surtout, j’ai envie de dire à l’UDF : pourquoi tant d’acrimonie à l’égard de l’UMP ? Pourquoi présenter des candidats contre l’ensemble des candidats UMP qui ne rendent pourtant pas la pareille ? Pourquoi ces attaques incessantes et quasi exclusives, puisque, si l’UDF s’affirme à égale distance des deux, on ne l’entend guère s’opposer aux socialistes ? Pourquoi, si ce n’est que l’UDF est dans l’évidente obligation d’affirmer une originalité qui ne saute pas aux yeux du lecteur que je suis ?

J’ai envie de dire à François Bayrou que si, comme il l’a déclaré récemment, et comme on l’aura entendu en boucle sur France 2 pour annoncer "A vous de juger" de ce soir, Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy, "ces deux candidats prétendument rivaux ne sont pas un duel, ils sont un duo", il serait parfait, comme troisième homme, pour valser avec eux, et former un trio.

J’ai envie de lui dire que, lui qui affirme vouloir dépasser un clivage droite/gauche inutile et apaiser le débat public, c’est de façon bien artificielle et virulente qu’il s’efforce d’en créer un nouveau. Pour exister.


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10 réactions à cet article    


  • Bernard Dugué Bernard Dugué 17 novembre 2006 10:55

    Bonjour

    «  »« J’ai envie de lui dire que, lui qui affirme vouloir dépasser un clivage droite/gauche inutile et apaiser le débat public, c’est de façon bien artificielle et virulente qu’il s’efforce d’en créer un nouveau. Pour exister. »«  »

    C’est effectivement le fond de ma pensée exposée (avec dureté) sur l’article écrit hier soir et proposé pour une publication sur Agoravox. Main dans la main, Sarko et Ségo, et le petit garçon Bayrou cherche à les séparer pour se mettre au milieu et leur tendre une main et une autre


    • Cécile (---.---.171.93) 17 novembre 2006 11:25

      La durée réelle du travail est de 39 heures en moyenne pour les emplois à temps plein et de 36,3 heures pour l’ensemble des emplois (à temps plein et à temps partiel) en France (INSEE, enquête emploi 2005).

      En faisant la moyenne de tous les emplois, à temps partiel et à temps complet, on travaille plus en France (36,3 h / semaine)

      qu’en Allemagne (33,6 h),

      en Angleterre (31,7 h),

      aux USA (33,8 h),

      au Danemark (35,1 h),

      en Espagne (33,2 h),

      en Hollande (29,2 h)

      et dans d’autres pays.

      Lire : http://travail-chomage.site.voila.fr/emploi/duree_travail.htm un texte précis et bien documenté (sources officielles).

      Vous en doutez ? Allez consulter les documents statistiques précis indiqués pour chaque pays (internet).


      • gem gem 17 novembre 2006 14:43

        LOL !

        vraiment n’importe quoi, cette moyenne... évidemment, si vous ne tenez compte ni du chômage, ni des cumul d’emplois, ni des congés payés de toute sorte et autres jours fériès-chômés, ni de la durée de vie au boulot, vous pourrez peut-être « prouver » qu’on bosse plus en France qu’ailleurs. Avec un choix judicieux, vous pourrez même, peut-être, rendre jaloux les japonais...


      • faxtronic (---.---.184.224) 17 novembre 2006 21:40

        Gem, si les chiffres sont falsifiables dans un sens, ils sont falsibiables dans l’autre.


      • Jules 17 novembre 2006 11:45

        « Jamais [...] je ne laisserai les réactions présumées de mes lecteurs influer a priori sur ma perception d’un document quelconque. » Dans le genre surréaliste, c’est pas mal. Je vais demander à mes élèves de mettre le déroulement de la phrase sur une ligne du temps smiley

        J’ai rarement vu un article dont le ton et les propos se contredisaient autant. C’est dommage que les versions Beta de Bayrou vous gênent, car vous pourriez faire de même pour vos articles : les faire relire.


        • koz koz 17 novembre 2006 11:56

          Puis-je vous suggérer qu’il n’est pas interdit d’avoir un peu d’humour ? Ce que je veux dire par là, c’est que, avant de lire cet avant-projet, je me posais ces questions-là, sur le mode : écrire ce que l’on attend de moi, ou non ? Surprendre ? Oui mais, surprendre pour surprendre, c’est inutile... etc... Relisez cela avec le sourire.

          Pour ce qui est du temps, il me semble assez logique que les réactions présumées (soit avant qu’elles ne soient exprimées) puissent influer a priori (soit, de même, avant que je ne les lise) sur ma perception. En bref, que l’idée que je me fais des réactions prévisibles m’amène à modifier ma réaction. Comprenez, là ?

          Dommage que vous ne reteniez que ceci, et le passage sur la version « bêta » qui, là aussi, doit être pris avec le sourire. Ce n’est tout de même pas un reproche d’une gravité phénoménale.

          D’autant que j’ai marqué, sincèrement, mon accord sur la plupart du fond. La seule chose qui m’interpelle, c’est que je ne vois pas, en quoi, avec ce projet, l’UDF se place sur une quelconque « troisième voie ». J’ai même été étonné de lui trouver bien plus de convergence avec le programme de l’UMP que je ne m’y attendais.


          • jades (---.---.99.44) 18 novembre 2006 11:21

            « D’autant que j’ai marqué, sincèrement, mon accord sur la plupart du fond. La seule chose qui m’interpelle, c’est que je ne vois pas, en quoi, avec ce projet, l’UDF se place sur une quelconque »troisième voie« . J’ai même été étonné de lui trouver bien plus de convergence avec le programme de l’UMP que je ne m’y attendais. »

            Et par rapport au programme du PS, plus ou moins de convergence que prévue ? Peut être est-ce cela le début de la « troisième voie »... Ne pas s’enfermer dans de la « technocratie politicienne », mais essayer de répondres à nos besoins. Je n’ai pas besoin que le PS ou l’UMP « gagne », j’ai besoin que nous gagnions, que notre Nation (l’ensemble de la Totalité des Citoyens) gagne !


          • koz koz 20 novembre 2006 10:07

            Je comprends bien ton « souci », sur la « technocratie politicienne » mais je ne suis ps convaincu par la démarche de l’UDF et par le fait que l’UDF n’en soit pas atteinte. Ses députés ne sont pas des petits nouveaux en politique et, en regardant Bayrou sur France2, je n’ai pas véritablement eu le sentiment d’un discours très différent de celui des présumés technocrates.


          • Jérôme de Nomazy J2N 22 novembre 2006 12:10

            Comme je le dis dans mon article sur le même sujet posté sur Agora (La France ensemble de François B.) ou sur Toutvabien(http://touvabien.typepad.com/touvabien/2006/11/la_france_ensem.html), ce qui ressort de ce projet est, à mon avis, un minimum de cohérence, ce qui n’est pas le cas du projet UMP pour ne prendre que cet exemple. Certes, c’est mal écrit. Certes c’est incomplet. Certes c’est Bayrou. Mais si j’enlève de ton post les commentaires humoristiques et sarcarstiques (de bon ton quand même smiley), tu sembles plutot d’accord ou en tout cas tu n’es pas particulièrement précis dans ta critique. Ce document n’est il pas justement destiné à être critiqué de façon constructive ?


            • totor (---.---.140.250) 24 novembre 2006 11:17

              Soyons clair, ce n’est certes pas sur l’économie que l’on verra d’énormes différences entre l’UMP et l’UDF. Comme celui de l’UDF, le programme de l’UMP est - ou devrait etre- un projet libéral modéré. Faut-il pour autant prétendre que l’’UDF n’a rien de plus ou d’autre à dire que l’UMP. Evidemment non !

              D’abord, c’est le seul parti dont le discours pro-europen ne souffre d’aucune ambiguité. La gauche sera longtemps handicapée par le NON au TCE tandis que la droite souffrira de son aile souverainiste et du manque de conviction europeenne de son leader actuel. Grand absent des débats du PS et probablement grand absent de la presidentielle, ce sujet crucial est pourtant deja une motivationde vote importante.

              Ensuite, contrairement a l’UMP, l’UDF se présente comme un parti libéral du point de vue economique mais aussi social : contrairement à l’UMP qui reste profondement conservatrice sur ces questions, l’UDF envisage le mariage ou l’adoption par des homosexuels. On retrouve des clivages similaires dans la vision de la société par exemple sur la police de proximité (UDF pour, Sarko contre), sur la loi SRU (encouragée par l’UDF, flinguée par l’UMP).

              Enfin, et je pense que là est le fond du problème, de facon un peu populo-demagogique, l’UDF se presente comme un parti renovateur des moeurs politiques, en surfant sur la vague de l’ecoeurement des francais envers sa classe politique. Sa credibilité sur ce sujet sera a mon avis l’élément qui determinera son score aux presidentielles. Et là, Bayrou devra convaincre !

              En attendant, je trouve le centriste ’mou du genou’ bien plus credible que le droitiste qui rase gratis et attise les peurs et la gauche marketing qui nous sont proposés. Mais peut-etre est ce le fond du probleme : critiquer le fond de populisme sur lequel surfe Bayrou pour mieux oublier les discours creux, demago, tout en faux semblants, et surtout sans projet d’avenir credible de nos deux grands partis de gouvernements.

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