Vous avez dit « erreurs » ? ... - combien de morts ?
Vous avez dit « erreurs » ? : … - combien de morts ? (*)
Dans son allocution (1) du 31 mars 2021, le président de la République a suggéré que des erreurs avaient été commises. Sans dire clairement qui les aurait commises ; sans dire explicitement en quoi auraient consisté ces erreurs.
Sans identifier les fautes et sans chercher à donner un nom aux « fautifs » (ce qui relève de la compétence des pénalistes) , on peut se livrer à une évaluation des décisions prises. En partant des choix politiques qui ont été faits, et en imaginant ce qui aurait bien pu se passer si d’autres choix avaient été faits.
Cet exercice, peu à la mode aujourd’hui, sera sans doute fait plus tard, par les historiens. (A défaut d’enquête parlementaire).
Premier choix politique : tout miser sur la commercialisation d’un vaccin. Décision renforcée par le gel de l’usage des médicaments existants susceptibles d’avoir une efficacité sur le virus ( voir par ex. l’interdiction par un décret du 25 mars 2020, de la prescription de médicaments hors AMM par certains médecins).
Deuxième choix politique : de ne pas accroitre, (autrement que par l’utilisation différente de ce qui existe) le nombre de lits et d’équipements hospitaliers, spécialement de réanimation.
D’où les sujets de recherche suivants.
Premier sujet de recherche.
Si, tout en attendant un vaccin, c’est à dire une nouvelle substance, le gouvernement avait incité les médecins à prescrire , fût-ce qu’en « tâtonnant », et selon les règles existantes en la matière, les médicaments existants (que ces derniers estimaient pouvoir être efficaces), les résultats sur le nombre et la nature des hospitalisations ainsi que sur la mortalité auraient-ils été les mêmes ?
La recherche est possible puisqu’on dispose des informations chiffrées des médecins qui l’ont fait.
Par exemple si le protocole Raoult pratiqué par les équipes de ce dernier et par d’autres a été voué aux gémonies (2), il demeure que ledit protocole a été mis en œuvre, au moins au sein d’établissements hospitaliers. Si sa mise en œuvre a donné des résultats positifs sur telle ou telle population de malades, on peut le cas échéant évaluer le gain de chance de survie lié à la prescription des substances en question. Et en déduire une fourchette de perte de chance de vivre liée d’une part aux consignes de rester chez soi en absorbant du Doliprane et, d’autre part, liée à l’interdiction inscrite dans le décret précité.
Deuxième sujet de recherche.
Si le nombre de lits à l’hôpital avait été augmenté lors de l’élection du président de la République ou dès le début de l’épidémie (comme le président se fait fort de pouvoir le faire en l’espace de quelques jours comme il l’a dit le 31 mars – à moins qu’il ne donne un autre sens au mot « augmentation » -) deux questions se posent dès lors que cette augmentation n’a pas eu lieu.
a) combien de malades n’auraient pas été « triés », dont ceux dont la prise en charge a été reportée. Tri (les polémiques portant sur l’usage de ce mot sont inopérantes sur les statistiques) ayant eu une possible incidence sur la mortalité de certaines personnes (3).
b) Peut-on chiffrer les conséquences économiques, financières (contribuables qui rembourseront d’une manière ou d’une autre les emprunts), et sociales ( chômage, retards scolaires, etc… etc … ) découlant des mesures de « confinement » (4) et de « couvre feu », officiellement fondées sur le manque de lits ?
Enfin, dans le futur, les spécialistes des relations publiques et de la manipulation des masses relèveront probablement quant à eux, le tour de force des dirigeants, aidés en cela par les médias amis. Tour de force qui a consisté à éviter que le débat ne porte sur les questions essentielles : celles des choix signalés ci-dessus. En focalisant l’attention des citoyens (ou de ce qu’il reste de ce concept) sur la question de savoir si le président de la République allait « confiner » ou pas, et, s’il le faisait, si son « confinement » était suffisant, avait été tardif, était précoce ou s’avérait inutile ou indispensable. Si les mesures de détail prises étaient sérieuses, logiques ou « loufoques » de tel point de vue ou de tel autre. Si ces dernières étaient prises sous l’influence des uns ou des autres … Etc… Avec discussions complémentaires sur le vaccin, qu’on voudrait bien injecter ici , mais qu’on ne le peut pas parce qu’on manque de produit. Ou qu’on injecte là à des gens que le gouvernement n’avait pas prévu de faire vacciner tout de suite. Etc…
Technique de gouvernement, qui donnera également quant à elle des sujets d’analyse et de commentaires aux spécialistes de droit constitutionnel. Car les relations que les rédacteurs de la constitution de 1958 avaient voulu établir entre « le peuple » et le président de la République, comme le rôle qu’ils avaient voulu donner au président de la République (5) , étaient radicalement différentes des pratiques (et des comportements) que l’on observe aujourd’hui.
Marcel-M. MONIN
m. de conf. hon. des universités.
(*) Les erreurs portant sur la protection de la vie, se comptent nécessairement en morts.
(1) certains esprits facétieux frappés par la structure des discours de M. Macron, disent que les interventions du premier personnage de l’Etat empruntent leur forme à celle des homélies des ministres du culte. Il est vrai que si l’on remplaçait le début ( : « mes chers concitoyens ») par « mes frères et mes sœurs » et la fin ( : « vive la République, vive la France ») par « Amen », il n’y aurait rien à changer à la forme des développements tels qu’ils sont pensés et structurés pour pénétrer les cerveaux. Quant aux paraphrases de la parole présidentielle et les commentaires (louangeurs) des ministres et secrétaires d’Etat, ils pourraient selon la même logique, être introduits par la formule rituelle : « Acclamons la parole … ».
D’autres esprits malveillants estiment que les discours rappellent par leur le ton et leur rythme, les histoires que l’on raconte aux enfants … pour les endormir.
(2) il est « amusant » de constater que dès l’annonce de la possible efficacité de médicaments existants sur les patients atteints du covid, une campagne démarra en trombe : il était interdit à quiconque de prétendre que les médicaments donnaient des résultats positifs dès lors qu’une étude académique n’avait pas été conduite à son terme. Et que les détracteurs estimèrent en revanche que tel vaccin était efficace dès lors que les industriels qui le fabriquaient l’affirmaient et dans la proportion avancée par ces derniers.
(3) Que quelqu’un qui est en train de mourir … meure, est une chose. Qu’on enlève, contrairement à ce qu’on fait habituellement, la chance de vivre à ceux qui le peuvent encore, fût-ce d’un point de vue statistique pour peu d’années, en est une autre.
(4). Beaucoup ont trouvé des vertus au « confinement ». Lequel d’un point de vue logique, a vocation à réduire le nombre des contacts entre les personnes, donc la contamination. Pour autant que l’on néglige dans ce raisonnement sur les lieux accessibles, la manière dont la contamination s’y opère. Puisque ce sont des personnes qui ne savent pas qu’elles sont porteuses du virus qui contaminent les autres.
Dès lors que tous les virus, y compris le covid et ses cousins, connaissent une évolution semblable, il convient de savoir ce qui dans les courbe des contaminations, des hospitalisations et des décès, est dû d’une part à la « vie » des virus et, d’autre part, est dû éventuellement aux mesures – par ailleurs changeantes et non liées au seul paramètre santé - de restriction des déplacements. On aurait en effet aimé avoir, au delà des affirmations, des données matérielles faisant apparaître de manière incontestable et chiffrée le lien entre la diffusion du virus et les mesures portant sur les déplacements et les lieux ouverts ou non accessibles. Et d’autres données, à comparer avec les précédentes, sur les liens pouvant exister entre les contaminations et les précautions ( autres que le confinement et le couvre feu) prescrites ou omises, tendant à éviter que les personnes atteintes du virus (souvent sans le savoir comme il a été dit ci-dessus) contaminent les autres. Peut-être cela sera-t-il étudié … plus tard.
Surtout qu’un virus nait et meurt comme tous les virus, vit (en tuant), se transforme. Sans que les scientifiques ne sachent trop comment et pourquoi. Et que la seule chose qui permette depuis toujours aux êtres humains de ne pas succomber à une maladie quand elle est dangereuse, c’est la prise en charge et le traitement médicaux immédiats (v. la note 2 sur ce point).
Comme le gouvernement et le virus campent (en même temps) en quelque sorte sur leurs positions (le gouvernement prend les mêmes mesures depuis un an et le virus s’en moque, qui mute allégrement) , il y aurait bien, selon les humoristes, une solution alternative au « confinement » : Que le gouvernement fasse dire des prières en attendant le produit miracle.
Evidemment, la constitution proclame que la République est laïque.
Ce qui ne serait pas forcément un problème insurmontable (indépendamment de ce qui est dit dans la note 1) pour l’élite dirigeante et pensante. On pourrait en effet dire et faire dire par les secrétaires d’Etat et les journalistes amis, qu’on peut respecter la constitution tout en faisant, en même temps, brûler des cierges … En application du principe de la loi du marché appliqué à ces produits.
(6) sur ce point, v. notre « textes et documents constitutionnels depuis de 1958 ; analyse et commentaires » Dalloz-Armand Colin , collection Compact.
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