A entendre le président Sarkozy, la ministre Lagarde et la kyrielle de leurs multiples porte-parole, ceux de l’UMP compris, la crise c’est les autres. Pour les deux premiers, les responsables se trouvent parmi les patrons des secteurs privés américains, belges, voire aussi français. Ils devront être punis. Ensuite, pour deux ou trois porte-parole de l’Etat, le responsable de la crise… c’est la crise internationale elle-même tout simplement. Enfin, pour un autre, noniste déclaré de l’Union européenne, la crise prendrait sa source dans l’Europe institutionnelle et ses diables de critères de Maastricht. Donc, comme d’habitude, ceux qui parlent ne sont ni coupables ni responsables et clameront demain : "Nous sommes innocents, nous le jurons Mesdames et Messieurs les jurés, Monsieur le président !" Eh bien, cette innocence déclarée haut et fort, la main droite levée en direction du tribunal, n’est pas du tout aussi certaine que cela.
Voici pourquoi l’Etat est coupable et responsable de n’avoir pas fait correctement son boulot !
L’Etat, ce n’est pas uniquement des personnes physiques qui passent et qui parlent devant les caméras. L’Etat, c’est surtout des entités, des services, des équipes, des agents qui agissent jour et nuit pour le compte de la nation. Ces services… ces agents ont naturellement pour patron, le premier d’entre nous, le président de la République.
Dans les multiples services qui lui sont rattachés, il y a celui qui est spécifiquement chargé des affaires bancaires et dont les missions sont définies par la loi, notamment :
1- de veiller et d’examiner, sur pièces et sur place, périodiquement, la qualité de la situation financière des banques et celle de leurs conditions d’exploitation ;
2- de contrôler que les banques respectent les dispositions législatives et réglementaires. Le cas échéant, il doit sanctionner les manquements constatés ;
3- de veiller au respect des règles de bonne conduite de la profession et à la mise en œuvre par les banques du fonds de garantie des dépôts.
En fait, comme on peut le constater, grâce à ce service, rien d’important pouvant mettre en péril le secteur bancaire et ses déposants ne peut normalement échapper aux contrôles de l’Etat. Ce service est donc le bras armé de l’Elysée en matière de contrôle bancaire. Il est son œil inquisiteur, tel que la loi l’a prévu.
Pourtant, les résultats sont là. Et, ils sont catastrophiques. Voire dramatiques. Aujourd’hui, les milliards du contribuable coulent à larges flots, comme s’ils étaient gratuits – c’est un comble au moment où la France est en faillite comme l’a dit un collaborateur du président – pour le fameux service en charge du contrôle des banques et de leur solvabilité.
L’Etat a semble-t-il encore failli. Comme il l’avait déjà fait pour le Crédit lyonnais, pourtant nationalisé ! Cela a coûté 20 milliards d’euros aux contribuables. La leçon n’a semble-t-il pas été tirée. Alors, l’Etat est-il coupable ? Est-il responsable ? Sera-t-il puni comme le dit le chef de l’Etat, quand il parle d’une tribune américaine ?
Quid, si le responsable est lui-même en charge de l’Etat ? Car, dans les faits, le service en question, dont les missions sont déclinées par les articles L. 613-1 et suivants du Code monétaire et financier (CMF) est présidé et codirigée par deux hautes personnalités nommées en Conseil des ministres. Conseil présidé par le chef de l’Etat lui-même...
Ces deux personnalités sont, le gouverneur de la Banque de France et le directeur du Trésor. Deux sommités internationalement reconnues pour leur expertise monétaire et de solvabilité bancaire, notamment.
Quel est donc ce service que nous décrions tant, bien qu’ayant sur le papier, potentiellement, de très très hautes qualités intrinsèques ?
Ce service, c’est la fameuse commission bancaire ! Commission souveraine, dont la loi a nommé comme patrons, le gouverneur de notre banque centrale nationale et le directeur de notre trésor.
Comment ladite
commission bancaire, avec les formidables moyens dont elle dispose et que la Banque de France met à sa disposition sans compter, comment cette commission a-t-elle pu une nouvelle fois faillir à ce point-là ? Comment, en jugeant pourtant sur pièce et sur place, tel que le mentionne l’article
L 613-6 du CMF, n’a-t-elle pas vu que les actifs des banques françaises contenaient, par milliards, des titres issus de crédits
subprimes américains, largement pourris, véhiculés par des titrisations souvent éhontées ?
Depuis 2002 déjà, beaucoup savaient que les crédits "Greenspan-Bush" pouvaient devenir nocifs. En décembre 2006, ils forment la fameuse bulle désormais célèbre des subprimes. Le monde entier de la finance, finance avertie, savait que ces crédits changeaient alors subitement de statut. Ils passaient de nocifs à pourris et de crédits à virus. La commission bancaire, institution pour le moins avertie, ne pouvait l’ignorer. C’est la spécialiste en la matière ! Le gouverneur de la Banque de France et le directeur du Trésor, éminents représentants de l’Etat, ne pouvaient pas non plus l’ignorer. Qui ont-ils informé ? Le chef de l’Etat, leur ministre de tutelle… les porte-parole peut-être ? Personne ?
Une commission d’enquête, une vraie, ayant la confiance des électeurs, devra déterminer la cinétique infernale de tout ce gâchis !
En attendant, c’est encore une fois la poche du contribuable qui, in fine, sera déclarée coupable et responsable. Puis, sera condamnée à payer.
C’est tellement facile pour l’Etat d’ériger son contribuable, citoyen et électeur, en coupable final ! Car, qui est-il ce contribuable, semble-t-il corvéable à merci ? C’est nous, c’est eux, c’est les autres ? Finalement, c’est personne !
Soyons tranquilles, il paiera quand même. Et demain, ses enfants aussi.
Dans tout ce gâchis annoncé demeure une quasi-certitude. Les choses continueront et se renouvelleront, quelle que soit la couleur de nos gouvernants. Seule la date nous manque ainsi que le montant exprimé en dizaines de milliards d’euros… inflation oblige !