Crise de l’immobilier français ?
Durement touchés par la crise, les causes du ralentissement économique s’expriment différemment d’un côté et l’autre de l’Atlantique. Le marché immobilier américain a subi une crise importante, alors que le marché français de l’immobilier se porte relativement bien.
Plusieurs de mes amis se trouvent cette année en échange aux Etats-Unis, et voyagent souvent le week-end. Ils m’ont rapporté des nouvelles sévères sur la situation de l’immobilier dans ce pays : en se baladant dans les quartiers chics du Sud de la Floride, ils ont traversé des quartiers déserts, avec de nombreuses maisons saisies ou en vente. La situation est similaire dans la « Bible Belt » ou en Californie. Il n’y a guère que la ville de New York, éternel et énorme refuge d’immigrants et de la jeunesse ambitieuse, où les prix immobiliers ne baissent pas de manière importante. Les données publiées par l’association des agents immobiliers de Californie ici montrent qu’il y a eu une baisse médiane de 40 % des prix, avec les saisies immobilières représentant 50% des transactions. La baisse du marché, qui semblait ne toucher a priori que les foyers les plus pauvres, s’est étendu dans tout l’état, jusqu’au comté de Santa Barbara, le plus cher de l’état, où la baisse médiane atteint aussi 40%.
Qu’en est-il en France ? Les annonces positives ou négatives se succèdent pour les agents immobiliers. Une baisse des volumes de transaction a été notée, mais la variation des prix reste faible, avec une tendance à la baisse pronostiquée. Conscients de l’effet important psychologique des annonces sur leurs clientèles, associations de consommateurs et agents immobiliers envoient des signaux contradictoires à travers la presse. The Economist, de son côté, a pronostiqué une correction importante sur le marché immobilier français, espagnol et irlandais, en comparant l’évolution des prix historiques sur les 10 dernières années à l’évolution moyenne des salaires.
Il y a des arguments à la fois pour et contre l’éclatement d’une bulle immobilière en France :
- Lorsqu’on compare le loyer moyen au mètre carré dans les 10 plus grandes villes françaises avec le prix à l’achat, on trouve un rapport moyen de 1 à 15 (j’avais fait les calculations le mois dernier, par curiosité, mais je n’ai pas réussi à retrouver mes sources – c’était sur le site d’agences immobilières nationales). Autrement dit, un bien acheté aujourd’hui est amorti en 15 ans par les revenus que l’on peut obtenir en le louant. Soit un rendement annuel de 5%.Historiquement, ces niveaux sont soutenables. Au début des années 1990, à Paris, au plus haut de la bulle immobilière, ce ratio avait augmenté à 25 : il fallait 25 ans de loyer pour amortir l’achat spéculatif d’un bien immobilier.
- Les ratios de solvabilité des ménages français se sont améliorés l’année dernière, après plusieurs années de dégradations, ce qui avait d’ailleurs amené beaucoup d’analystes à prévoir une importante baisse du marché en .. 2007.
- Les prix de l’immobilier ont augmenté beaucoup plus vite que l’évolution moyenne des salaires depuis 2001 (en moyenne, pour l’immobilier, +10% d’augmentation annuelle depuis 2001 – avec un pic de +15% en 2004 et 2005 et un ralentissement depuis 2006, maintenant en légère baisse)
Il faut cependant noter d’importantes différences entre les marchés immobiliers français et américains. Les loyers en France sont indexés sur l’inflation, alors qu’aux Etats-Unis ils peuvent êtres renégociés chaque année par le bailleur, ce qui crée un marché plus volatil. Le marché américain est caractérisé par plusieurs sous marchés régionaux, ce qui n’est pas le cas en France. L’importance de l’immigration, ainsi que les migrations internes (un Américain sur 5 déménage tous les ans) nourrissent l’investissement (on utilisera plus volontiers le mot spéculation si le marché baisse…) et la construction. Le rythme des constructions est moins élevé en France, à cause d’une immigration quasi-inexistante et une augmentation naturelle de la population assez faible.
L’évolution du marché immobilier français est donc en suspens, entre atterrissage en douceur ou crise.
Excusez- moi pour toutes ces statistiques citées de mémoire pour la plupart, mais le manque de temps m’oblige à recourir à ces méthodes pour vous livrer une analyse économique incomplète. Ce sujet m’intéresse fortement vu que je travaillerais peut-être dans ce secteur, et que je compte essayer d’acheter un appartement au moment le plus opportun.. comme de nombreux autres lecteurs d’AgoraVox.
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