En quoi le programme de Ségolène représente un danger
Je vais essayer de vous démontrer à travers ce post pour quelle raison le programme de Ségo est un hors-sujet économique d’une gravité extrême dont la France ne peut plus se payer le luxe. Ce non-sens va enfoncer encore davantage la France dans la voie du déclin, mais également dans celui d’un délitement du tissu social du fait de la paupérisation inéluctable de la société française dans son ensemble.
Pour cela, il faut d’abord savoir quels sont les différents agents économiques qui permettent de produire de la richesse, richesse qui pourra ensuite faire l’objet d’une répartition.
L’entreprise est le seul agent économique à créer de la richesse, condition préalable à la prospérité de chacun. Plus les entreprises créent de richesses et plus il est facile ensuite de les répartir.
Si je commence par ces lieux communs, c’est qu’effectivement, je veux que chacun parte d’un postulat de base qui ne puisse pas faire l’objet d’une quelconque appréciation partisane.
A partir de là, tout gouvernement qui se respecte devrait avoir comme priorité absolue de créer un environnement le plus favorable possible pour permettre aux entreprises de générer le maximum de richesses en tenant compte du contexte économique mondial dans lequel nous vivons. Cela signifie qu’il faut faire tout ce qui est nécessaire pour permettre aux entreprises d’être plus compétitives.
Toutes les économies qui "cartonnent" de par le monde ont adopté la même stratégie. Celle de privilégier la capacité à exporter plutôt que de favoriser le marché intérieur.
Et c’est là que le bât blesse pour la France !!
Pour s’en convaincre, il suffit de comparer la situation économique de l’Allemagne et celle de la France. La France a généré en 2006 un déficit commercial de 30 milliards d’euros (ce qui signifie qu’on importe plus qu’on exporte) alors que dans le même temps l’Allemagne a enregistré un excédant commercial record de 162 millards d’euros. Et pourtant, les deux pays ont à subir un euro fort, mais dans le cas de l’Allemagne, cela ne pèse absolument pas sur leur commerce extérieur, posez-vous la question du pourquoi !
La réponse est simple, c’est que l’offre française est inadéquate en terme de positionnement prix/produit. Cela signifie que l’image de la France en terme de rapport qualité/prix est inférieure à celle de ces concurrents. L’Allemagne n’est pas bon marché, mais elle cartonne parce que ces produits ont une image de qualité absolue, d’innovation technique et de performance. Il faut donc élaborer une politique économique qui va permettre d’une part aux entreprises d’être meilleur marché (c’est-à-dire en baissant les charges sociales et fiscales, ce qui induit une politique de réduction du train de vie de l’Etat et de refonte du modèle social) et d’avoir une meilleure offre produit (en investissant dans la recherche et l’éducation)
Or, aucun gouvernement depuis trente ans (qu’il soit de gauche ou de droite) n’a été capable de mener à bien les mesures qui s’imposent soit par choix idéologique (le cas de la gauche) soit par manque de courage politique (le cas des gouvernements de droite qui se sont succédé) pour jouer sur l’effet de levier capable de permettre à la France d’améliorer la compétitivité de ses entreprises afin que ces dernières génèrent le plus de richesses possible.
Quelles sont les raisons de ce contre-sens économique de la France depuis trente ans ?
Un modèle social qui fait la fierté de la France et que le monde entier nous envie mais que personne n’est assez stupide pour nous copier.
Cette suffisance qui nous aveugle finira par nous conduire à notre perte car nous nous accrochons désespérement à une chimère qui n’a jamais existé et que nous avons inscrite dans le marbre comme faisant partie de notre identité culturelle.
Bien sûr, certains gros méchants dont je fais partie diront que nous avons 9 % de chômeurs et au moins autant d’exclus du système, un taux de croissance de 2% (quand la moyenne mondiale est à 5%) ainsi que 1.200 milliards d’euros de dette (et bientôt 2 000 milliards d’euros puisque les retraites des fonctionnaires du baby boom n’ont pas été provisionnées), mais bon on ne fait pas d’omelette sans casser des oeufs et si c’est le prix à payer pour notre bonheur, alors ne soyons pas matérialistes et voguons allègrement vers les 2.000 milliards de dettes et les 20% d’exclus.
Certains diront que dans les années 70, notre modèle social marchait bien, qu’il n’y avait aucune dette. Et pour cause, ce n’est pas que le modèle marchait mieux, c’est que les déficits publics étaient financés par des bons d’Etat qui étaient payés avec une monnaie qui a dévalué en vingt ans de 70% face au mark.
Le modèle social français qui consiste ni plus ni moins à vivre à crédit, c’est-à-dire de dépenser plus que ce qu’on gagne, a été financé dans les années 60 à 80 par des dévaluations qui ruinaient ceux qui avaient souscrit aux bons d’Etat français.
Puis, au milieu des années 80, du fait de la construction de l’Europe et de la planification de la monnaie unique européenne, les pays se sont engagés à ne plus avoir recours à l’arme de la dévaluation. On ne pouvait donc plus financer les déficits résultant du modèle social français par l’arme de la dévaluation. Comme les gouvernements qui se sont succédé n’ont pas voulu réduire les dépenses car il s’agissait de mesures trop impopulaires (et le courage politique est une denrée rare dans ce pays), la dette a commencé à se creuser à raison de 3 à 4 % du PIB chaque année. La dette atteint maintenant 65% du PIB et la situation est de plus en plus intenable.
Et les solutions à prendre sont connues puisqu’elles sont appliquées à l’étranger, mais encore une fois, elle nécessite un courage politique d’une équipe capable de résister à un mouvement social de grande ampleur et à une opinion publique qui pourrait au fil du mouvement devenir défavorable. Or, du fait du quinquennat, ce courage politique est une denrée en voie d’extinction car l’échéance suivante électorale étant rapprochée, la peur de ne pas être réélu oblige les politiques à caresser l’opinion publique dans le sens du poil et donc à remettre aux calandes grecques les mesures qui pourraient fâcher.
De plus, l’opinion publique est en permanence sous l’emprise d’une politique de démagogie sectaire qui vise à opposer systématiquement le capital et le travail.
A ce titre, je vais prendre quatre exemples :
- Il y a quelques semaines, beaucoup de personnes bien pensantes se sont émues que les entreprises françaises aient perçu en 2006 65 milliards d’euros sous forme d’aides. On entendait alors : haro sur ces salauds de patrons qui s’en mettent encore plein les poches.
Ces personnes bien pensantes ont seulement oublié de dire que, dans le même temps, les entreprises françaises ont eu à subir pour la même année 291 milliards de prélèvement obligatoire (charges sociales, IS, Taxes professionnelles, etc...) pour 62 millions d’habitants.
Ces mêmes personnes bien pensantes ont oublié de préciser que, à titre de comparaison, l’ensemble des entreprises allemandes avait été prélevées de 221 milliards d’euros alors que l’Allemagne compte 85 millions d’habitants.
Nous faisons donc peser sur nos entreprises beaucoup plus de charges que les entreprises allemandes. Difficile dans ces conditions de permettre aux entreprises d’être compétitives.
- Dans le même cadre, certaines voix bien pensantes ont stigmatisé les bénéfices records des entreprises du CAC 40, démontrant par là même que l’ensemble des entreprises se porte bien. Sauf que la grande majorité de ces entreprises sont maintenant internationalisées et qu’elles vont générer du chiffre d’affaires sur les marchés en croissance, c’est-à-dire bien loin de la France, voire même de la zone euro. Ainsi, à titre d’exemple, Total, qui a réalisé 12 milliards de bénéfices, réalise 95% de son chiffre d’affaires en dehors de France. De plus, pour ce qui est des entreprises hors CAC40, une étude a montré que le taux de marge de ces dernières n’avait jamais été aussi bas depuis vingt ans, montrant que leur situation économique est de plus en plus précaire.
- Souvenez-vous également de l’affaire Hewlett-Packard qui a voulu fermer une usine en France alors qu’elle avait perçu 1 million d’euros de subventions de la part de l’Etat. Nos voix bien pensantes sont montées au créneau en criant au scandale appelant au remboursement de cette somme. Ils avaient toutefois oublié un petit détail vraiment sans importance, c’est que la société Hewlett Packard avait payé à l’Etat français, sur la même période que celle où elle avait reçu le million d’euros, 711 millions d’euros d’IS.
- Enfin, prenons le cas de France Telecom. Celle-ci a racheté en 2000 à la société Vodafone au moment de la bulle internet la société Orange pour une somme astronomique tout en cash, faisant de cette dernière à l’époque la société la plus endettée au monde. Puis la bulle spéculative se dégonfle et la valeur d’Orange dégringole et France Télécom se trouve dans une situation financière très difficile. Là, les voix bien-pensantes crient aux méfaits de la privatisation partielle et que France Telecom aurait dû rester dans le secteur public. Sauf que ces mêmes voix bien-pensantes oublient que c’est parce que l’Etat est resté majoritaire dans le capital de France Telecom que le paiement d’Orange n’a pu se faire que par paiement en cash et non par échange d’actions comme cela se fait traditionnellement. Un paiement par échange d’actions aurait rendu la transaction financière insensible aux fluctuations des marchés financiers. C’est donc la non-privatisation de France Telecom qui a poussé cette entreprise dans une situation financière délicate et non l’inverse. Et la non-privatisation a été la conséquence des mouvements orchestrés par nos voix bien-pensantes.
Je pourrais multiplier ces exemples à l’infini, mais cette politique de désinformation a pour but de stigmatiser la haine du patron, du profit et de poursuivre la lutte des classes.
Or, si on regarde ce qui se passe dans les autres pays qui ont atteint le plein emploi, on s’aperçoit qu’ils ont tous opté pour le libéralisme, qu’il soit social (cas des pays scandinaves) ou non (pays anglosaxons + Chine + Inde + Russie).
Je pense, pour ma part, que le social-libéralisme est la meilleure voie car il permet un partage équitable des richesses tout en s’assurant le meilleur environnement possible pour les entreprises. Mais il n’est assurément pas celui adopté par le Parti socialiste français et ce, pour une bonne raison.
Une bonne partie de l’électorat de gauche est antilibéral et le PS ne peut pas se couper de cette base électorale sous peine de ne jamais gouverner. Le PS agit donc de manière clientéliste et son programme en est l’illustration.
Alors, si on passe à la loupe les différentes mesures économiques proposées par Ségo, on s’aperçoit qu’elle fait une politique de la relance de l’économie par la demande :
- Elle propose le SMIC à 1 500 € pour relancer le pouvoir d’achat :
Or, en augmentant les niveaux des salaires les plus bas, on créé une pression sur les entreprises pour augmenter tous les salaires. Très bien pour les consommateurs, mais moins pour les entreprises qui ont, du coup, beaucoup plus de problèmes à être compétitives, y compris sur leur marché domestique.
De plus, la contagion du privé s’opère sur le public (inflation oblige) et alourdit du coup les charges de l’Etat augmentant de facto les déficits publics et la dette (puisqu’ils ne veulent pas baisser le nombre de fonctionnaires).
Donc ce scénario présente le double désavantage de diminuer la compétitivité des entreprises vis-à-vis du monde extérieur et de plomber la dette publique.
Si certains jugent qu’il n’y a pas de recette miracle pour s’en sortir, la relance de la consommation est à coup sûr un contresens dans le contexte de la globalisation des échanges telle que nous la vivons.
De plus, dans la mesure où les entreprises ne pourront pas vraiment répercuter ces hausses de salaires sur leur prix du fait de la compétition avec les autres pays, ceci va encore réduire leurs marges et elles auront alors moins de moyens pour investir dans la recherche et le développement par rapport à leurs concurrents.
Enfin, et c’est la conséquence de la baisse de compétitivité qui résulterait des hausses de salaires, croyez-vous réellement que les hausses de salaires se traduiront par une augmentation significative de la consommation des produits français. Ces hausses de salaires iront subventionner les économies du Sud-Est asiatique.
- Généralisation des 35 heures à l’ensemble des entreprises :
Cette mesure vise à réduire le chômage en proposant de répartir le gâteau travail pour tout le monde. On notera que nous sommes le seul pays à croire encore à cette chimère. De plus, rappelons-nous qu’une bonne partie des aides aux entreprises ont été octroyées pour compenser l’effet 35 heures payées 39 heures.
De plus, rappelons que ce sont les petites entreprises qui ne sont pas passées aux 35 heures parce qu’elles étaient les plus fragiles. Ce passage aux 35 heures devrait les fragiliser davantage et l’objectif affiché de création d’emplois pourrait se traduire par des destructions d’emplois massives, surtout si cette mesure est conjuguée à la hausse des bas salaires.
Là encore, cette mesure est un contresens dangereux pour notre économie.
- La réallocation de la cagnotte des 65 milliards d’aides aux entreprises :
Seule cette mesure paraît trouver grâce à mes yeux d’autant que, comme l’a déclaré Ségo, c’est pour retirer aux grandes entreprises qui sont les principales à bénéficier de ces aides et donner plus aux petites entreprises. Ceci est louable, mais encore une fois, les grandes entreprises ont bénéficié de ces aides pour les employés français pour compenser l’effet dévastateur sur la compétitivité du « 35 heures payées 39 heures ». Inutile de préciser que les grandes entreprises qui ont un pouvoir de menace (notamment en terme d’emploi) bien plus important que celui des PME risquent de mettre à mal cette mesure.
- Les 500 000 emplois tremplins :
Il s’agit encore de dispositifs du genre « emplois jeunes » qui n’ont comme utilité que de faire baisser artificiellement les chiffres du chômage à un prix, toutefois, celui d’alourdir les déficits publics.
Il s’agit donc, là encore, d’une mesure dangereuse qui altèrera la compétitivité de notre économie productive.
Conclusion :
La politique de relance de la consommation élaborée par Ségo montre que le Parti socialiste n’a toujours pas pris la mesure des enjeux économiques issus de la globalisation des marchés. Le programme s’inscrit toujours dans une démarche clientéliste et corporatiste d’autant plus dangereuse pour la France qu’elle constitue un hors-sujet économique puisque la politique économique pronée par ses derniers agit sur la demande alors que tous les économistes s’accordent à penser que le problème de la France est un problème sur son offre.
A contrario, le programme de Sarko, même s’il n’est pas parfait, présente l’avantage de jouer sur l’offre en faisant en sorte de baisser les charges sociales qui pèsent sur les entreprises via la TVA sociale. Ce surcroît de compétitivité des entreprises françaises répond directement au problème de fond français tel que je l’ai exposé précédemment. Sachez d’ailleurs que la TVA sociale a été expérimentée en 1987 au Danemark et a contribué au redressement du pays au même titre que la Flexisécurité (deux gros mots pour le Parti socialiste). Il est d’ailleurs paradoxal de voir que le Parti socialiste qui prend comme modèle « les modèles scandinaves » refuse systématiquement de regarder les mesures qui ont permis à ses modèles de réussir la cohésion sociale. Encore une fois, cette myopie est due à une démarche clientéliste qui écarte toute mesure allant à l’encontre des intérêts de son électorat et ce, même si l’intérêt du pays est en jeu. C’est en ce sens que le programme de Ségo constitue une réelle menace pour le pays.
Sachez que la TVA sociale et la Flexisécurité sont deux mesures qui font partie du programme de Sarko. Sachez également que l’Allemagne a aussi mis en place cette mesure au 01/01/2007.
Le surcroît de compétitivité liée à la TVA sociale va permettre d’enregistrer des commandes supplémentaires qui permettront de générer des richesses supplémentaires qui pourront être alors redistribuées.
Elle permettra d’activer le dispositif sur les heures supplémentaires prévues dans le programme de Sarko qui valideront l’augmentation du pouvoir d’achat. Le programme économique de Sarko est donc nettement plus cohérent et il présente l’avantage de s’attaquer au mal français. Le programme Sarko s’apparente davantage au programme libéral social (avec la sécurisation du parcours professionnel, la Flexisecurité et la TVA sociale) qu’au modèle libéral pur que beaucoup veulent lui faire incarner.
Pour toutes ces raisons économiques et d’autres encore, je voterai en mon âme et conscience Sarko. Je voterai Sarko non seulement pour moi mais également pour mon bébé de 19 mois car je pourrai regarder droit dans les yeux en lui disant que j’ai choisi pour lui le candidat qui présente la politique économique capable de permettre à la France de se redresser.
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