Et si on reparlait de nationalisations ?
L’article se propose de revisiter la question des nationalisations à la faveur de la pénétration en Europe des entreprises chinoises qui, elles, sont pour la plupart nationalisées.
En écrivant ce titre, je sais ce qu’il a d’incongru dans le contexte de mondialisation que l’on vit actuellement. Et pourtant ? La Chine qui affiche des taux de croissance à deux chiffres a une économie où les entreprises publiques sont majoritaires. Plus encore, les entreprises chinoises qui s’installent en Europe sont publiques et sont donc adossées à l’Etat chinois en tant que tel. Un rapport, disponible sur le site de la Banque des rapports publics (www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports) que vient de publier le ministère de l’Economie, des Finances et de l’Emploi (Direction générale des entreprises) intitulé « Présence et stratégies des firmes chinoises et indiennes en Europe : une perspective dynamique et comparative » fournit les éléments d’analyse sur la manière dont les firmes de ces pays se sont implantées en Europe. Au passage, il souligne que, bien souvent, c’est l’absence de stratégie des entreprises européennes qui permet aux entreprises chinoises et indiennes de s’implanter en Europe.
Dans ce contexte, que sommes-nous capables de faire ? Pas grand-chose, sinon « compter les points » et constater, après quelques effets de manches et des déclarations politiques tonitruantes, « que l’on n’abandonnera jamais... ». Les Etats-Unis semblent avoir des règles qui entravent l’achat d’entreprises américaines par des sociétés étrangères alors que nous, en Europe, dans la droite ligne du libéralisme de notre institution de régulation, l’Europe, nous laissons nos frontières grandes ouvertes, voire nous encourageons, par des aides et des primes diverses, ces rachats.
C’est dans ce contexte que l’on pourrait redécouvrir les nationalisations. Ne faudrait-il pas que, pour certains secteurs, l’Etat ou les Etats et pourquoi pas l’Institution européenne elle-même, forte de l’appui de 27 Etats membres, puisse racheter, en tant que besoins certains secteurs qui pourraient être menacés par des rachats étrangers. Non pas que le mot « étranger » soit dangereux en soi, mais parce que les stratégies d’entreprises étrangères peuvent être finalement dangereuses sur le court, le moyen ou le long termes aux intérêts nationaux ou européens. L’autre mot qui ferait peur serait-il le mot « intérêts ». Pourquoi se voiler la face en disant que la France ou l’Europe ont des intérêts qui ne sont pas forcément ceux des Américains, des Russes ou des Chinois ? Ou bien la notion de neutralité économique, toute théorique du reste serait-elle la seule qui devrait être de mise.
A un moment où l’on parle beaucoup de la présence de la Chine en Afrique, il y a lieu de noter que les Chinois ne donnent quelque chose qu’en échange de quelque chose de plus important encore. Les sommes fournies par la Chine à la RDC l’ont été en contrepartie de permis d’exploration et d’exploitation miniers substantiels au profit de la Chine. Plus encore, la présence dans les pays subsahariens d’Afrique francophone, la Chine et de l’Inde constituent le moyen le plus direct de se rapprocher de l’Europe pour mieux y pénétrer ensuite. La signature des APE - Accords de partenariat économique (que les pays africains refusent pour l’instant pour la plupart de signer pour diverses raisons) - pourrait constituer un « cheval de Troie » particulièrement efficace.
Quant au fond, pourquoi faudrait-il rejeter les entreprises publiques et donc finalement de nouvelles nationalisations en tant que besoins ? Parce que les entreprises nationales ne sont pas performantes ? A ma connaissance, la SNCF est encore une entreprise nationale, cela ne l’a pas empêchée d’innover et de dégager en 2007 un substantiel bénéfice. Il en est de même pour de nombreuses autres entreprises ou groupes holdings comme celui de la caisse des dépôts. A l’inverse, des sociétés purement privées font chaque jour la preuve de leur incompétence, à commencer par la Société générale. Au total, si ce n’est pour des raisons purement idéologiques, je ne vois pas ce qui pourrait justifier le retour à certaines nationalisations.
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