L’insoutenabilité des retraites en France : pourquoi travailler quand les autres le font pour vous ?
Seconde partie : la retraite comme une réparation du "préjudice travail"
Dans une première partie nous nous sommes attachés à démontrer que notre pays, son économie ou ses emprunts ne pourront couvrir financièrement les retraites de 15 ou 18 millions de retraités (1 seul cotisant ne peut évidemment pas financer 1 retraité quel que soit le niveau des emprunts sociaux que l'Etat pourra lancer).
Mais le problème financier des retraites (une promesse sociale intenable) n'est pas le plus grave, la retraite en France n'est pas un droit mais un devoir improbable (laissons la place aux jeunes).
La confusion entretenue en France par notre "modèle social" sur la notion de retraite et d'arrêt de la vie active
A l'origine les retraites (inventées par Bismarck il y a plus d'un siècle) étaient destinées à permettre aux vieux travailleurs usés par leur activité de vivre leurs derniers mois ou années sans être à la charge de leurs proches Il s'agissait donc d'une mesure sociale : les travailleurs en ville étant souvent détachés de leurs anciennes structures familiales (dans les campagnes) et il fallait leur assurer un minimum vital en attendant la mort.
Cette notion de fin de vie professionnelle a basculé en France après 68 (et dans les années 80)
La fin de vie professionnelle s'est progressivement transformée en droit de ne plus rien faire pendant 30 ou 35 années sous prétexte de faire de la place aux jeunes (le même prétexte fallacieux de "partage du travail" qui a prévalu avec les 35 heures et toutes les conséquences économiques et sociales désastreuses que nous connaissons depuis l'an 2000).
Si les conquêtes "ouvrières et sociales" consistèrent, aux temps industriels, à réduire le temps et la durée de travail, au XXI siècle les enjeux ont radicalement changé
- Le travail est de moins en moins manuel et physique et si épuisement du travailleur il y a c'est avant tout pour des raisons organisationnelles, par un épuisement professionnel dû à l'inflation des tâches administratives, aux faibles mobilités sociales et professionnelle (l'ascenseur social est arrêté du fait du Code du travail qui bride toute innovation ou promotion individuelle ou sociale) et au désengagement dans la société face à la valeur travail et à l'activité.
- L'activité de nombreux travailleurs qualifiés est indispensable à notre société, si les ouvriers qualifiés, les techniciens, les professeurs, les ingénieurs ou les médecins partent prématurément (avant 70 ans en général) en se retirant du travail de nombreux postes de travail resteront inoccupés, sans possibilité d'être remplacés par des jeunes ou des étrangers (l'expérience est souvent plus précieuse au travail qu'une pratique superficielle et consommatrice du numérique).
- Le temps libre peut être une utopie et une malédiction. Contrairement à la vulgate socialiste ("ne pas perdre sa vie à la gagner", slogan encore prégnant 50 années après mai 68) de nombreuses personnes sont utiles (indispensables) avec leur travail. Le travail n'est ni une torture (tripalium) ni un passetemps, ni un mauvais moment à passer. Aujourd'hui on met à la retraite (ou on pousse à prendre sa retraite) de nombreux travailleurs compétents, utiles et qui peuvent être passionnés par leur travail, ce qu'il leur apporte (une dignité) et ce qu'il apporte à la collectivité. Les pousser ainsi à sortir du travail c'est les condamner à des loisirs fictifs et à se priver des compétences indispensables pendant des années alors que ces mêmes travailleurs seraient encore en pleine possession de leurs moyens professionnels.
La retraite en France est devenue une quasi-indemnisation du "préjudice" du travail
En France il ne s'agit pas d'entretenir des travailleurs usés (certains le sont évidemment) mais bien plus de réparer un pseudo préjudice entraîné par le travail, une malédiction sociale que depuis Eve et Adam les Français devraient endurer durant une vie.
On comprend bien que pour réparer cette "injustice du travail" des retraites les plus élevées possibles (au-delà du SMIC) et les plus longues possibles (pendant 30 ou même 35 années) seraient la panacée. Le modèle social ad hoc pour un peuple "épuisé" par le travail, qui rêverait de toucher de l'argent sans ne plus rien faire (le revenu universel). C'est évidemment très peu réaliste dans une économie mondialisée qui comptera bientôt 10 milliards de terriens luttant pour leur survie sur une planète dont les ressources sont comptées.
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