PPP : des moyens de continuer à emprunter sans augmenter la dette
Nos hommes politiques sont incorrigibles. Nous en sommes déjà à 1 200 milliards d’euros de dettes dont le seul remboursement annuel correspond curieusement à notre déficit budgétaire traditionnel (on peut parler de tradition pour une pratique qui remonte à vingt-cinq ans !) de 40 milliards d’euros annuels. Plutôt que de chercher des économies, il vaut mieux, bien sûr, trouver de nouvelles méthodes pour dépenser sans emprunter.
La PPP, Partenariat public privé, est LA solution. Il permet en effet d’utiliser l’argent du privé pour tel ou tel investissement d’ordre public et de le rétribuer par un loyer qui, lui, apparaîtra dans les charges de l’Etat. Ni vu ni connu, vous avez ainsi transformé un investissement qui serait apparu dans vos dettes en un loyer (sur une vingtaine d’années) qui apparaît dans vos charges de fonctionnement.
Voici deux exemples récents de besoin de financements pour lesquels notre Etat impécunieux n’a pas d’argent, la rénovation des campus universitaires, pas en brillant état, il est vrai, et celui des cités. L’Etat, qui a fixé par la loi les domaines et les conditions dans lesquelles l’Etat peut faire appel à ce type de financement, modifie discrètement ces conditions pour les élargir. C’est ainsi que notre ministre des Finances, Christine Lagarde, vient de faire approuver en Conseil des ministres un projet de loi pour "faciliter" l’accès aux financements mixtes publics/privés. Seront désormais autorisés le financement de la rénovation des campus universitaires et celui des plans de rénovation urbaine qui viendront s’ajouter à celui des nouvelles technologies dans la police et la gendarmerie. Le tout, tenez-vous bien, "à titre expérimental et pour une période limitée" jusqu’au 31/12/2012 ! Par ailleurs, la justification actuelle de tels partenariats devait être la complexité particulière du projet ou l’urgence. Elle sera largement élargie au jugement par une commission ad hoc (à créer, largement pourvue en spécialistes, bien logés et bien rémunérés, j’en fait le pari) qui n’aura plus à en juger que sur la base de "la plus grande efficacité". Les portes sont désormais grandes ouvertes pour dépenser à tout-va.
Un élargissement avait déjà été introduit en 2006 dans la même loi. Il portait à l’époque sur l’extension de ce type de financement au secteur ferroviaire et autorisait donc celui, annoncé récemment, de la fin de ligne TGV entre Tours et Bordeaux. C’est RFF, Réseaux ferrés de France, déjà lourdement endetté de par la reprise des dettes de la SNCF lors sa création, qui lance fièrement l’appel d’offre pour ce "Premier partenariat public/privé" dans le ferroviaire qui ouvre la voie, paraît-il, aux prolongements vers Toulouse et l’Espagne. Vous avez compris avec quel financement.
Les 300 km de ligne supplémentaire à grande vitesse coûteront 7 milliards d’euros pour lesquels il reste, côté public, à se partager le financement entre Etat et collectivités locales et à fixer les droits de passages que devra payer la SNCF à RFF. Les deux intervenants se bataillent ferme d’ailleurs pour définir ce loyer, la SNCF ayant tendance à minimiser le trafic passager futur et RFT à l’augmenter. Il serait pourtant si facile d’en connaître le vrai prix, celui du marché, en mettant la liaison Paris-Bordeaux en adjudication... Si, si, ce serait possible, en 2012 le trafic de passagers sera libéralisé par l’Europe.
Vous comprenez maintenant pourquoi les collègues ministres des Finances européens de Christine Lagarde ne croient pas une seconde que nous tiendrons nos engagements de retour à l’équilibre budgétaire en 2012...
NB : vous aurez de la chance si vous avez pu trouver cet avis dans vos journaux. C’est tellement inintéressant pour nos journalistes que vous le trouverez éventuellement en 72e page et sous forme d’entrefilet.
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