Climat : la nécessaire complexité du discours écologique
Entrée dans le domaine du débat public, l’écologie fait parfois l’objet de discours simplifiés. Pourtant, elle pose des questions difficiles et compliquées qui appellent des réponses forcément complexes. Elle demande à chacun de faire un effort de documentation et de reflexion. La question climatique et les controverses qu’elle suscite actuellement en constituent une excellente illustration.
Les débats sur l’écologie comme ceux qui touchent aux questions de société souffrent de la difficulté à appréhender et à médiatiser la complexité.
Aucun facteur n’est univoque. Il existe des causes qui se contrarient et d’autres qui se renforcent ainsi que des effets de seuils qui viennent bouleverser les conclusions trop linéaires ou trop prudentes.
Quelques exemples :
L’émission de gaz à effet de serre entraîne une élévation de la température, mais ces rejets sont concomitants à la pollution générale de l’atmosphère et en particulier à l’émission de nombreux aérosols : poussières, suies et gouttelettes de produits divers. Or, ces aérosols présentent un effet inverse et tendent à refroidir le climat parce qu’ils limitent l’ensoleillement au sol.
Lequel des deux mécanismes l’emportera ?
Le second ne masquera-t-il pas le premier et ne nous fera-t-il pas sous-estimer les menaces de réchauffement ?
Cette concomitance sera-t-elle durable ou l’un des phénomènes prendra-t-il fin avant l’autre ?
Questions complexes et non résolues !
La hausse des températures provoque une fonte des glaciers et des calottes polaires participant ainsi à la hausse du niveau des océans(1)
Sans doute, mais en Antarctique, les températures très basses s’accompagnent d’un climat excessivement sec. Un réchauffement pourrait ainsi s’accompagner d’une élévation des précipitations (neige pour l’essentiel) et, comme les températures moyennes resteront très majoritairement en dessous de zéro la neige s’amoncellerait et se transformerait en glace. Le réchauffement conduirait ainsi paradoxalement à une augmentation du volume de la calotte antarctique et limiterait la hausse du niveau des mers.
Alors augmentation ou diminution de la calotte antarctique ?
Question complexe et non résolue.
La hausse globale des températures mondiales pourrait modifier le régime des vents et des courants. Certains ont donc imaginé que le Gulf Stream s’affaiblirait et que, même dans le cadre d’un réchauffement planétaire, l’Europe pourrait connaître au contraire un refroidissement marqué(2).
Alors l’Europe refroidie ou réchauffée ?
Question complexe et non résolue !
La hausse des températures va favoriser l’évaporation ce qui devrait augmenter la quantité de vapeur d’eau dans l’atmosphère or, il s’agit d’un gaz à effet de serre ? Alors réchauffement supplémentaire ?
Cela n’est pas acquis car l’on ignore dans quelle proportion l’évaporation se trouvera renforcée. De plus, la vapeur d’eau génère des nuages dont certains rafraîchissent et d’autres réchauffent l’atmosphère.
Solde du phénomène : Inconnu.
Ajoutons un dernier exemple en guise de question subsidiaire :
Est-il différent pour la planète que nous brûlions toutes nos réserves d’énergies fossiles en 50 ans sans faire d’économie ou en 100 ans en se montrant prudent ? Dans les deux cas, dans un siècle les compositions atmosphériques seraient très proches.
Alors différence ou pas ?
Question complexe et non résolue !
Les experts sont parfois divisés justement à cause de cette complexité, même si le Giec propose une vision relativement homogène présentant l’hypothèse du réchauffement comme presque certaine.
Moins qu’un autre, le problème climatique est un sujet qui s’accommode de slogans simplificateurs. Ni les dirigeants politiques ni les écologistes ni même le public ne pourront faire l’économie d’un effort intellectuel de compréhension.
La nature est belle, fragile … et subtile.
(1) Dans le cadre d’un réchauffement planétaire, la hausse du niveau des mers proviendrait pour une part de la fonte des islandis et pour une autre part de la dilatation des eaux.
(2) L’affaiblissement du Gulf Stream serait lié à la modification de la salinité des eaux dans l’Atlantique Nord à cause de la fonte des glaciers Groenlandais qui déverserait de grandes masses d’eau douce dans l’océan.
Précisons toutefois pour illustrer ces propos sur la complexité que le mécanisme n’est pas certain car le Gulf Stream fait partie de l’ensemble de la circulation dite thermohaline et que l’on ignore comment l’ensemble se réorganiserait.
D’autre part et contrairement à une idée reçue ce n’est pas le Gulf Stream qui est principalement responsable de la douceur du climat des côtes ouest de l’europe, mais bien les vents dominants. Généralement, à latitudes égales, et indépendamment des courants les côtes ouest de notre planète connaissent des hivers plus doux que les côtes est.
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