Notre mère Athènes (première partie)
Récit d'une semaine à Athènes, partie 1/2.
N.B. : les personnes mentionnées ont été anonymisées.
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Géorgios
Arrivée à Athènes le mardi 10 avril, en fin d'après-midi. L'ami qui m'héberge vient me chercher à l'aéroport Vénizélos. Le printemps s'est mis à l'austérité par solidarité avec les Grecs. Le temps est étonnament nuageux pour un mois d'avril.
Géorgios P. est ingénieur dans le bâtiment. Il est au chômage. Il a travaillé plusieurs mois pour deux entreprises différentes qui ne l'ont pas payé : elles lui doivent au total 40 000 euros. Il pense qu'il n'a aucune chance de récupérer cet argent. L'État grec, pressuré par l'Union Européenne, le FMI et ses créanciers, refuse de payer ce qu'il doit aux entreprises afin de rembourser une dette qu'il ne peut rembourser. Ce défaut de paiement provoque une chaîne d'impayés : les entreprises, qui ont besoin de l'argent que l'État leur doit, ne peuvent plus payer ceux qui travaillent pour elles. Géorgios se trouve au bout de cette chaîne, comme beaucoup d'autres Grecs. Il est la preuve vivante que les calomnies hellénophobes déversées dans les médias européens sur le thème « les Grecs ne travaillent pas » sont ridicules. Non seulement ils travaillent, mais en plus beaucoup d'entre eux le font ou l'ont fait sans avoir touché leur rémunération. Ces Grecs travaillent gratuitement parce que l'État grec (que ce soit l'État central ou les collectivités territoriales) paye une dette illégitime au lieu de payer ceux auxquels il doit réellement de l'argent, c'est-à-dire ceux qui travaillent pour lui. Géorgios me prévient que chez lui c'est un peu le bazar, parce que depuis qu'il a dû fermer la boutique qu'il tenait à Rhodes la marchandise gît désœuvrée dans son salon.
Tandis qu'il nous conduit en voiture de l'aéroport à son domicile, il m'interroge :
« Vous allez avoir vos élections bientôt en France ?
- Oui, mais je ne pense pas qu'il en sortira quelque chose de bon. Moi, je n'irai pas voter.
- Tu penses que Sarkozy va perdre l'élection ?
- Oui, 70% Français le détestent et les médias font tout pour que Hollande soit élu. De toute façon, Sarkozy ou Hollande, ça ne fait pas de différence. Quel que soit celui qui est élu, c'est l'Union Européenne qui gouverne la France. Ils ont besoin d'un dirigeant de gauche maintenant pour faire passer leur politique de pillage, ils veulent faire en France la même chose que chez vous. Il y a dix candidats à l'élection présidentielle cette année et aucun ne veut faire sortir notre pays de l'Union Européenne et de l'eurozone. Je ne vais pas participer à cette mascarade. Quel que soit celui qui est élu, nous savons déjà qu'après les élections, ce sera le tour de la France. Après avoir "réformé" les retraites, notre gouvernement veut "réformer" la Sécurité Sociale. Vous aussi vous allez avoir des élections en avril, non ?
- Peut-être. » Géorgios rit jaune.
« Si Merkel le permet.
- Ils parlent du 6 mai pour l'élection, mais si elle doit se tenir le 6 mai, ils auraient dû l'annoncer déjà le 6 avril, parce qu'ils doivent l'annoncer au moins un mois avant. Et pour l'instant, rien.
- Bien sûr, les bureaucrates de l'Union Européenne ne veulent pas d'élections en Grèce. »
Je sais bien que notre pays aussi vit sous dictature étrangère, mais je ne le ressens tout de même pas de la même façon. Lorsque les dictateurs suppriment ce qui leur permettait d'entretenir l'illusion que nous vivions en démocratie, la dictature n'est soudain plus une abstraction. Elle devient palpable, réelle, comme elle l'est en Grèce maintenant. Ce qu'on appelle la "troïka"1 a subverti l'ordre constitutionnel sans la moindre gêne en mettant à la tête de la Grèce un gouvernement de coalition dirigé par un technocrate non élu. Les Grecs se rendent compte bien mieux que les autres Européens que leur pays est gouverné par des puissances étrangères.
« Cette Union Européenne, ça me fait rire, commente Géorgios.
- Pourquoi ? » Rigolo n'est pas l'adjectif qui me serait venu spontanément à l'esprit pour qualifier l'Union Européenne.
« C'est une union de rien, explique-t-il. On nous oblige à baisser les salaires et les pensions pour être compétitifs.
- Oui, la compétitivité c'est le dogme des dirigeants de l'Union Européenne.
- Mais c'est faux que l'on puisse être compétitifs en réduisant les salaires. Regarde la Bulgarie, les gens sont payés quelques centaines d'euros. Ils veulent nous payer 300 euros pour nous aligner sur les pays les moins avancés d'Europe. Mais de toute façon, il y a la Chine, on ne peut pas être compétitif contre la Chine.
- Oui, et à quelques kilomètres de chez vous, il y a des pays comme la Turquie qui n'ont pas l'euro. La lire turque coûte deux fois moins cher que l'euro. C'est impossible pour la Grèce d'être compétitive à l'intérieur de la zone euro. Personne ne peut être compétitif avec l'euro, il est beaucoup trop chef. Et puis il faudrait être compétitif face à l'Allemagne, qui n'a pas de salaire minimum. »
« Ici, les gens se taisent », me dit Géorgios. Je pense qu'il veut dire par là que les gens ne se révoltent pas, pas assez en tout cas. « Tu as vu tous les commerces qui sont fermés ? » me demande-t-il. À vrai dire, je n'y ai pas fait vraiment attention, mais je vais avoir l'occasion de voir ça de plus près. Nous passons la soirée à discuter de politique et d'autres choses en mangeant des Soulavkis, une spécialité grecque. C'est une sorte de kébab fait avec une pita où le porc remplace le mouton. Justement, j'étais en Turquie la semaine passée et Géorgios connaît bien ce pays. Il me surprend en faisant exactement la réflexion que je me faisais quand j'y ai mis les pieds pour la première fois : on dirait des Grecs. C'est stupéfiant la ressemblance qu'il peut y avoir entre les deux pays et les deux peuples.
« Si tu vas en Turquie et que tu ne vois pas de femme voilée, m'explique Géorgios, tu ne peux pas savoir que c'est un pays musulman. Une fois, je suis allé dans un café et je me serais cru en Grèce. Les gens sont exactement les mêmes : ils boivent le même café [qu'on appellera café turque, café grec, café bulgare, etc. selon le pays où on se trouve] en prenant la même attitude décontractée que les Grecs, manient le même komboloï2. Je me suis dit : ce sont des Grecs !
- C'est parce que la Turquie n'est pas un pays musulman, c'est un pays laïque. » D'ailleurs, la Turquie est, exception faite de la France, le seul pays laïque d'Europe.
Il nuance : « C'est vrai sur la côte, mais à l'intérieur des terres ce n'est plus la Turquie, c'est un autre pays. »
Sur les toits des Grecs comme sur ceux des Turcs, on voit des panneaux solaires affublés de leur réservoir d'eau. Chaque foyer athénien a son panneau solaire et son réservoir d'eau sur son toit. Lorsque le soleil jette ses rayons sur Athènes, ils scintillent et on croirait que la ville a été saupoudrée de paillettes. Le panneau solaire de Géorgios est cassé, mais il ne veut pas le faire changer car il faut 10 ans pour amortir son coût. Or Géorgios ne sait pas ce que l'avenir lui réserve. Jusqu'à présent, pour les ingénieurs grecs, l'avenir est bouché. Il songe à émigrer. Qu'en 2012 un Européen soit obligé de quitter son pays pour survivre, c'est la grande honte de l'Union Européenne.
Les Turcs, quant à eux, se trouvent sur la liste des prochaines victimes de la "construction européenne". L'annexion de leur pays est prévue pour bientôt, après celle scandaleusement réussie de la Croatie. Comme l'expliquait notre guide, les Turcs sont de plus en plus défavorables à une adhésion de leur pays à l'Union Européenne et, si un vote avait lieu aujourd'hui, la moitié d'entre eux voterait contre. Nonobstant le fait que tous les partis turcs, évidemment, sont favorables à l'adhésion. D'une certaine façon, il existe bien une culture européenne commune : ce doit être la haine de la démocratie professée par les élites et la haine des élites éprouvée par les peuples.
Tous les Grecs sont sur facebook. Du moins ceux qui sont au chômage et n'ont pas grand chose d'autre à faire. Ils y mènent des discussions politiques et échangent pas mal de blagues. Géorgios me traduit l'une d'entre elles : Un Grec décédé arrive en Enfer et demande au diable : « Est-ce que vous avez le Mémorandum3 ici ? - Non, répond le diable. - Alors c'est un jardin pour enfants. »
1 L'Union Européenne, la Banque Centrale Européenne et le Fonds Monétaire International.
2 Sorte de petit chapelet utilisé pour jouer ou passer ses nerfs.
3 Plan dit d'austérité, c'est-à-dire de pillage généralisé de la population grecque, en échange d'un prétendu prêt de l'Union Européenne et du FMI, qui sert en réalité à rembourser les créanciers.
Syntagma, place de la révolution
Le lendemain, je prends le métro pour commencer ma visite d'Athènes. Pour le moment, je décide d'éviter les lieux touristiques - c'est-à-dire l'Acropole - et d'entrer directement dans le vif du sujet. Je vais voir ce qu'il y a de plus intéressant pour moi : Syntagma. La place Syntagma, c'est-à-dire la place de la Constitution, est celle qui se trouve en face du parlement grec. C'est le lieu célèbre de rassemblement des Grecs lorsqu'ils décident de manifester leur colère contre les voleurs qui les gouvernent. Voleurs, c'est bien ainsi qu'ils appellent leurs ministres et leur parlementaires. Ce mot se trouve parmi les nombreux graffitis qui recouvrent les murs d'Athènes. Je le trouve plutôt faible, étant donné l'ampleur du pillage organisé du peuple grec.
La place Syntagma est composée de deux parties. La partie basse est la place à proprement parler, celle qui se situe le plus loin du parlement. Elle tient presque lieu de parc. De tous les côtés passent de grandes artères de la ville. Ainsi entourée, elle paraît plus petite que je ne l'imaginais. La deuxième partie, la partie haute, se trouve juste devant le parlement. On y accède depuis la place en montant quelques marches. Elle est composée du parvis du parlement et de la large chaussée qui le sépare de la place. Il y a de quoi contenir une foule assez considérable à cet endroit. C'est là où des centaines de milliers de Grecs se rassemblent régulièrement pour manifester.
Syntagma est le lieu d'affrontements violents de manifestants avec la police. De féroces batailles y prennent place : les flics la noient de gaz lacrymogènes, y matraquent sans modération et y jettent des pierres ; des manifestants - que nos médias appellent au choix « jeunes cagoulés » ou « anarcho-autonomes » pour faire trembler la ménagère de plus de 50 ans terrifiée et retranchée derrière son poste de télévision - répliquent avec toutes sortes de projectiles : pierres, bâtons, cocktails Molotov et plus généralement tout ce qui leur tombe sous la main1. Mais ce jour-là, pas de manifestation en perspective, tout est calme. La place porte bien quelques stigmates des affrontements, mais sans plus. Sur la place et dans les environs, des kioskes à touristes vendent des boissons, des sucreries, des livres et bien sûr l'indispensable kit des "Greek lovers". Des vendeurs ambulants y vendent des tickets du loto... On a du mal à imaginer que quelques semaines auparavant, cette petite place tranquille était le théâtre d'une guerre civile.
Enfin, tout est calme, c'est vite dit. À peine sortie du métro, je croise des flics. Tout d'abord ces fameux flics à moto, les deltas, qui sèment la terreur dans les manifestations : uniformes noirs, blousons en cuir, casques blancs, lunettes de soleil. Une poignée d'entre eux précède deux camions de pompiers : ils se rendent probablement sur le lieu d'un "incident" comme il s'en produit tous les jours à Athènes. Sur la place Syntagma elle-même, je croise deux flics municipaux : ils ont un uniforme étrange, pantalon vert kaki avec un blouson noir en cuir et des lunettes de soleil également. En traversant la rue au sommet de la place, pour aller devant le parlement, je vois des flics qui font la circulation. En faisant le tour du parlement par la gauche, je croise un bus plein de flics, du genre anti-émeutes. Le bus est très grand, ce n'est ni une boîte de 6, ni une boîte de 8. Ça doit bien équivaloir à une boîte de 12, mais je ne sais pas si cette catégorie existe en France. À quelques pas, une autre variété de flics est manifestement préposée à la protection des abords du parlement. Sur le trottoir d'en face, deux MATs2 tapent la causette. On les reconnaît facilement avec leur uniforme vert kaki et leur bouclier.
En fait, le parlement est bien assiégé aujourd'hui : assiégé par les flics. Et encore, je n'ai pas mentionné les flics en civils. Il faut dire qu'ils ne sont pas discrets, les flics grecs. Même quand ils sont en civils, on dirait qu'ils portent l'uniforme : même blouson en cuir, mêmes lunettes de soleil, même regard d'abrutis sadiques.
À part les flics, il y a en permanence trois militaires devant le parlement : les deux gardes qui sont vêtus d'un uniforme traditionnel et celui qui leur sert de garde-chiourme. Les deux gardes se livrent à un spectacle burlesque, qui consiste à marcher au ralenti en frottant et en tappant le sol avec leurs pieds avant de venir se planter chacun à son poste de garde et ne plus bouger un orteil. Je les plains.
Devant le parlement, les gardes du parlement. En face des gardes du parlement, une troupe de touristes. Aux pieds des touristes, une foule de pigeons. La Grèce a sombré sous le joug d'une dictature étrangère, des millions de Grecs sont dans la misère ou risquent de s'y trouver bientôt, mais il n'y a pas de raison de changer le décorum prévu pour amuser le touriste : une fois que les deux gardes ont atteint leur point d'arrivée par les contorsions que leur impose l'exercice de chorégraphie mentionné ci-dessus, le garde-chiourme entre en jeu. Il corrige la position des gardes l'un après l'autre en prenant soin de réajuster leur béret. Puis, il s'adresse - en Anglais - aux touristes, admiratifs devant tant de discipline vestimentaire et de précision chorégraphique, pour leur signifier qu'ils peuvent prendre des photos. Athènes brûle, les Grecs sont menacés par la famine, mais pour les touristes the show must go on.
Sur la place Syntagma, à part celui des flics, c'est le nombre des chiens qui est surprenant. Certains d'entre eux portent encore un collier ; ils ont dû être abandonnés il y a peu par des maîtres qui ne pouvaient plus les nourrir. On en trouve d'ailleurs pas qu'à Syntagma, mais dans toute la ville. Les chats aussi sont présents en nombre à Athènes, mais ils se font plus discrets. À vrai dire, le terme de chiens errants ne leur convient guère. Ils s'intègrent parfaitement au décor, leur présence semble tout à fait naturelle. Ils font la sieste au soleil étalés de tout leur long. Ils semblent s'ennuyer. Parfois, des gens viennent les nourrir. La solidarité grecque s'étend jusqu'aux animaux.
Je m'éloigne ensuite de la place Syntagma pour aller voir les quartiers aux alentours. Je rencontre les premiers magasins fermés dans le quartier touristique qui se trouve aux pieds de l'Acropole. Plus on s'éloigne du centre, plus on rencontre de magasins victimes de "la crise". Je me rappelle être passée dans une rue où presque tous les magasins étaient fermés. En plus, en fin de semaine, les Grecs célèbrent la pâque orthodoxe et beaucoup quittent Athènes à cette occasion. Pendant trois jours, la ville paraîtra quelque peu désertée. Pour l'heure, s'il n'y avait pas des flics à chaque coin de rue, on pourrait presque croire que tout est normal.
1 Il va de soi que les médias présentent toujours les évènements en sens inverse : selon eux, c'est la police qui riposte avec des gaz lacrymogènes aux jets de pierres et de cocktails Molotov.
2 L'équivalent de nos CRS, mais en plus féroces.
Dimitris Christoulas
Avec tous ces flics, Athènes semble être un territoire sous occupation. La présence des flics n'est cependant pas le seul signe du crime qui se commet en Grèce. En passant dans la rue Panepistimiou, je croise un homme qui mendie avec deux jeunes enfants. De retour sur la place Syntagma, je suis abordée par une femme qui m'explique en Anglais qu'elle a été licenciée et expulsée de son logement ; elle demande de l'aide pour nourrir son enfant. Sur la place, je remarque un arbre décoré de fleurs et de tracts. C'est l'hommage que les Athéniens rendent au pharmacien retraité de 77 ans qui s'est tiré une balle dans la tête quelques jours auparavant pour protester contre le sort auquel l'ont condamné le gouvernement grec et la troïka.
Dimitris Christoulas n'était pas vraiment un spécimen de grec moyen qui se suicide par désespoir à cause de "la crise". C'était un militant de gauche et à son âge, il avait déjà un long parcours de luttes derrière lui. Cela explique qu'il ait voulu faire de son suicide un geste politique. Il faut dire que la Grèce, au cours de son histoire récente, a presque toujours souffert sous le joug d'un empire étranger et sous la tyrannie d'un dictateur local. Naître grec dans les années 1930 ne prédispose pas a priori à une vie de tout repos. Dimitris Christoulas a vu se succéder les régimes qui ont opprimé la Grèce au cours du XXème siècle : d'abord celui du général Métaxas, monarchiste fasciste qui instaura une dictature en décrétant l'état d'urgence en 1936, puis la guerre avec l'Italie fasciste de Mussolini, puis l'occupation nazie avec le général collaborateur Tsolakoglou comme chef de gouvernement et, après la Libération, le nouveau régime d'occupation des royalistes alliés à l'empire britannique qui jetèrent le pays dans la guerre civile. Et ce n'est pas fini, car ensuite vint le colonel Papadopoulos qui, en 1967, organisa un coup d'État commandité par la CIA pour empêcher la gauche de prendre le pouvoir et instaura le régime connu sous le nom de dictature des colonels. Ensuite vint une nouvelle domination étrangère avec l'entrée de la Grèce dans l'Union Européenne.
Les gouvernements européens et les médias bourgeois ont chanté les louanges de l'accord d'effacement de la dette conclu entre la Grèce et ses créanciers en début d'année, et imposé en réalité par la troïka. Mais ce soi-disant accord, conclu sans que les Grecs n'aient jamais donné leur accord justement, est une véritable saignée : les créanciers et la troïka ont exigé en échange de la restructuration de la dette grecque, entre autres, une diminution criminelle des salaires et des pensions de retraite. La pension de retraite de Dimitris Christoulas avait diminué de moitié. D'un autre côté, l'État grec, transformé en protectorat de l'Union Européenne, s'efforce de prélever de plus en plus d'impôts et de taxes de toutes sortes sur le peuple grec. Il est aidé dans sa tâche par des experts allemands, le gouvernement allemand considérant vraisemblablement la Grèce comme un territoire conquis. Dimitris Christoulas souffrait de surcroît d'un cancer. Avant de se tirer une balle dans la tête, il a simplement crié qu'il ne voulait pas laisser de dettes à ses enfants. Mais son suicide sur la place Syntagma, où il avait l'habitude de manifester, est aussi un message politique, comme le prouve la lettre trouvée dans sa poche et que la police a vainement essayé de cacher au peuple.1
Pour mesurer le degré de maturation de la guerre civile qui couve en Grèce, il n'est pas inutile de lire le contenu de cette lettre : « Le gouvernement d'occupation de Tsolakoglou a supprimé ma capacité de survie qui se basait sur une retraite digne que j'ai moi même payée (sans l'aide de l'État) durant 35 ans. Comme mon âge ne me permet pas de réagir individuellement de façon dynamique (quoique, si un compatriote devait se saisir d’une kalachnikov, je m’empresserais de le suivre), à moins de chercher dans les poubelles de quoi me nourrir, je ne peux pas trouver d'autres solutions aussi dignes que cette fin. Je pense que les gens sans avenir finiront par prendre les armes et pendront les traîtres sur la place publique de Syntagma, comme les Italiens l'ont fait avec Mussolini en 1945 »2.
1 Pour une biographie plus complète de Dimitris Christoulas, voir Yanis Youlountas, Le sens d'une balle à paraître dans La Raison, juin 2012.
2 http://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/ce-qu-il-s-est-aussi-passe-le-4-114238 et http://www.courrierinternational.com/article/2012/04/12/traumatisme-un-suicide-en-forme-d-ultimatum-politique.
Les Grecs appelés aux urnes
Le soir, Géorgios m'informe que le président grec a finalement annoncé les élections pour le 6 mai. C'est le même jour que le deuxième tour de l'élection présidentielle en France. En Grèce, c'est l'élection législative qui est décisive. C'est elle qui détermine la composition du parlement et du gouvernement. La composition de l'Assemblée est proportionnelle aux suffrages. Cela me donne un sentiment extrêmement étrange. Même sous dictature étrangère directe, les institutions grecques continuent de fonctionner plus démocratiquement que les nôtres... qui sont issues d'un coup d'État militaire, il est vrai.
Géorgios essaie de convaincre une amie d'aller voter. Les débats autour des élections en Grèce ressemblent en fait fort à ceux qui déchaînent les passions en France et, probablement, à ceux qui se déroulent un peu partout en Europe. On peut distinguer trois catégories de citoyens, qui sont tous également mécontents (les mécontents représentant bien 70-80% du corps civique) du système politique tel qu'il est fait, mais qui adoptent des attitudes différentes quand vient le moment des élections.
D'un côté, il y a ceux qui, bien qu'ils sachent que les deux principaux partis qui se partagent le pouvoir sont corrompus jusqu'à la moelle, s'efforcent tout de même de voter pour celui des deux qu'ils considèrent comme le "moins pire", c'est-à-dire en général celui qui n'est pas au pouvoir au moment où a lieu l'élection, puisqu'il s'agit de virer le parti dont les méfaits sont les plus frais dans la mémoire du peuple. Ce système, appelé bipartisme, garantit la dictature de deux partis qui font semblant de s'opposer mais qui peuvent en réalité se partager le pouvoir de cette façon durant des décennies. La tactique est simple : celui des deux qui est au pouvoir a pour mission principale de se faire haïr suffisament pour garantir l'élection de l'autre, et ce dernier fera de même une fois au pouvoir. Ça peut durer très longtemps comme ça. C'est le cas aux États-Unis et c'est également le cas en Grèce depuis que le système électoral, abusivement appelé "démocratie", a été rétabli. C'est le système que les capitalistes veulent idéalement imposer dans toutes les "démocraties" occidentales.
La pseudodémocratie grecque étant dans un état de dégénérescence beaucoup plus avancé que la pseudodémocratie française, le choix s'y trouve compliqué par les dernières péripéties gouvernementales. En effet, le gouvernement qui dirige la Grèce depuis quelques mois est un "gouvernement d'union nationale" (ne riez pas) des deux principaux partis, le PASOK (Parti Socialiste Panhellénique, "la gauche") et Néa Démokratia (Nouvelle Démocratie, "la droite") auxquels s'est adjoint le LAOS (Alerte Populaire Orthodoxe), parti d'extrême-droite. Il a d'ailleurs fallu attendre la dictature mise en place par l'Union Européenne pour voir l'extrême-droite entrer au gouvernement, pour la première fois depuis la fin de la dictature des colonels. À la tête de son protectorat grec, l'Empire européen a placé le gouverneur Loukas Papadimos, issu non pas d'un parti mais d'une banque1.
Cependant, puisque le PASOK a gouverné le pays jusqu'au limogeage de Géorgios Papandréou par l'Union Européenne et son remplacement par Papadimos, il est responsable de l'adoption du premier "Mémorandum" honni des Grecs. C'est donc le parti dit de droite, Néa Démokratia, qui devrait avoir la faveur de cette première catégorie d'électeurs. En résumé, beaucoup de Grecs voteront Néa Démokratia comme seule alternative au PASOK, dont le gouvernement vient de les ruiner et de les réduire en esclavage. Géorgios me montre une blague qui circule sur internet à ce propos : « Vous trouvez que vous n'êtes pas encore assez pauvres ? Votez Néa Démokratia. » Je songe à tous les malheureux citoyens français qui voteront pour Hollande et le PS afin de se débarrasser de Sarkozy. On aurait pu faire la même blague : « Vous trouvez que l'UMP ne vous a pas encore assez appauvris ? Votez PS. » Le réveil post-électoral est toujours amer... Géorgios m'explique qu'il craint, comme vraisemblablement de nombreux Grecs, que le PASOK et Néa Démokratia fassent un gouvernement de coalition. Ça aurait au moins l'avantage de détruire les dernières illusions de ceux qui croient encore qu'on peut voter pour un moindre mal.
Ensuite, il y a une deuxième catégorie d'électeurs, ceux qu'on appelle en général "antisystèmes". Ceux-là sont plus politisés et en tout cas radicalisés. Soit ils sont certains de pouvoir faire une révolution par les urnes en votant pour un parti radical qui, pensent-ils, s'opposera au système, soit ils votent de toute façon pour un parti radical, même s'ils n'espèrent pas la victoire, parce qu'ils rejettent la mascarade de l'alternance éternelle de la gauche et de la droite. Ils se rendent comptent que l'élection est truquée, que le système bipartisan n'est pas démocratique, sans pour autant renoncer au principe de l'élection elle-même. Géorgios fait partie de cette catégorie. Il votera à gauche, pour SYRIZA2, un parti qui n'a jamais été au gouvernement. Il me montre des prévisions basées sur des sondages et m'explique l'état des forces politiques. Il y a de multiples partis à gauche et au moins trois formations qui ont bon espoir de remporter un pourcentage significatif des suffrages, dont SYRIZA et le KKE, le Parti Communiste de Grèce, qui compte déjà 21 députés à l'heure actuelle.
« S'ils se mettent ensemble, me dit Géorgios, ils peuvent faire environ 30%.
- Mais 30% ce n'est pas suffisant pour changer les choses, ce seront toujours les autres qui gouverneront. SYRIZA est pour ou contre l'Union Européenne ?
- Ni pour ni contre.
- Quel est leur programme ?
- Leur programme, c'est qu'on ne paye pas. »
Ne pas payer la dette indue, c'est un bon programme, mais inapplicable dans le cadre de l'Union Européenne. Qu'attendent les partis qui se réclament de la gauche en Europe pour en finir une fois pour toute avec le nouvel empire européen ? Ils ne gagneront jamais une élection s'ils ne se mettent pas dans le crâne que les peuples ont soif d'indépendance et de souveraineté.
Enfin, il y a la troisième catégorie, celle des abstentionnistes. Ceux-là ont atteint un degré de radicalisation plus avancé que les précédents : ils ont compris que c'est le système électoral lui-même qui est corrompu dans son ensemble. Ils pensent que les partis qui se présentent comme "antisystèmes" sont corrompus autant que les autres. En tout cas, ils ne pensent pas que voter pour un de ces partis changera quoi que ce soit au cours des choses. Dans cette catégorie se trouvent les anarchistes et d'autres Grecs qui pensent que les problèmes de leur pays ne se résoudrons pas par les urnes.
1 Il a été vice-président de la Banque Centrale Européenne. Pour la petite histoire, L. Papadimos est l'un des inventeurs de l'indice NAIRU, l'outil qui indique aux banquiers, financiers et industriels combien de chômeurs sont nécessaires dans un pays pour que l'inflation reste faible, c'est-à-dire pour qu'ils soient protégés contre une perte de valeur de leurs créances et de leurs capitaux et, surtout, contre une augmentation des salaires. Pour qu'il n'y ait pas trop d'inflation, le chômage doit impérativement rester supérieur (ou au moins égal) à la valeur du NAIRU, ce qui permet d'exercer une pression à la baisse sur les salaires et, de manière générale, de contracter la masse salariale au maximum. L'inflation se définit en effet non pas par l'augmentation des prix (idée fausse répandue par les capitalistes pour légitimer leur politique déflationniste auprès de l'opinion publique en versant des larmes de crocodiles sur les pauvres retraités qui verraient la valeur de leur pension réduite à rien par l'inflation), mais par l'augmentation des salaires, qui cause une augmentation des prix. Cette corrélation entre baisse du chômage et montée de l'inflation montre que plus le chômage baisse, plus les salaires augmentent, et réciproquement. Et qu'a fait le gouvernement grec, sur ordre de la troïka, jusqu'à présent ? Baisser les salaires en nous expliquant que c'est pour lutter contre le chômage en rétablissant la compétitivité. Alors que le chef du gouvernement grec, Papadimos, a lui-même co-inventé un indice établissant la corrélation entre la baisse du chômage et l'augmentation des salaires. Si le but était vraiment de faire baisser le chômage, la première chose qu'aurait fait Papadimos c'est non pas baisser les salaires et les pensions, mais les augmenter au contraire. En réalité, le gouvernement soumis à l'Union Européenne et au FMI mène une politique déflationniste, qui consiste à diminuer la masse salariale aussi bien en diminuant les salaires directs et indirects qu'en faisant augmenter le chômage, bien que la lutte contre le chômage soit mise en avant pour justifier la baisse des salaires. La baisse des salaires directs et indirects est ainsi justifiéé dans toute l'Union Européenne par la nécessité de lutter contre le chômage en rétablissant la "compétitivité".
2 Acronyme signifiant Coalition de la Gauche radicale.
Le chômage
Justement, un anarchiste grec, je devais en recontrer un le lendemain. J'avais convenu d'une rencontre avec lui jeudi. Mais il m'envoie un message pour me dire qu'il doit rester au lit. La veille, il était à l'hôpital. Nous reportons le rendez-vous à vendredi.
Je décide d'aller visiter l'Acropole, que j'avais déjà vu en février 2008 quand j'étais venue en Grèce pour la première fois. Je n'ai pas vu grand chose de l'Acropole ce jour-là. Je découvre peu après être entrée que l'Acropole elle-même ferme à 14h30 et que les monuments qui l'entourent, notamment l'Odéon d'Hérode Atticus et le Théâtre de Dionysos, ne sont visibles que jusqu'à 15h. Je me dis que c'est peut-être à cause de la pâque, mais c'est tôt. La célébration ne commence que samedi. Géorgios me dit que c'est parce qu'ils manquent de personnel. Il est vrai que le gouvernement grec s'efforce de détruire le plus d'emplois publics possible.
Géorgios m'informe que les chiffres officiels du chômage viennent d'être publiés : « Officiellement, il y a 21,8% de chômeurs, ce qui veut dire qu'en réalité il doit y en avoir 35%. » Beaucoup de Grecs ne sont en effet pas considérés comme chômeurs bien qu'ils n'aient pas de travail. C'est le cas de Géorgios : officiellement, il n'est pas chômeur. « Les gens qui travaillent à leur compte, comme moi, ne sont pas inclus dans les statistiques du chômage, m'explique-t-il. Parmis les ingénieurs, plus personnne ne travaille, sauf quelques-uns pour qui travaillent encore pour l'État. C'est pareil pour les médecins, ils n'ont presque plus de travail. Et aussi les avocats. Et puis il y a les commerçants qui ont dû fermer leur magasin. » Autant de catégories socio-professionnelles totalement ou partiellement au chômage, mais exclues des statistiques officielles. L'omission est sans doute volontaire, le gouvernement grec tente de minimiser les conséquences effroyables de sa politique. Mais il est de toute façon difficile d'établir une statistique du chômage en Grèce, car la réalité est toujours plus complexe que les tableaux statistiques. Il y a en effet des commerçants qui, sans avoir fait faillite et abandonné leur commerce, se trouvent dans une situtation très difficile du fait de la baisse considérable de leur chiffre d'affaires. Il faudrait y ajouter encore tous ceux qui ne sont pas considérés comme chômeurs parce qu'ils ont un travail, mais qui n'ont pas touché, ne touchent pas ou ne toucheront pas leur rémunération à cause de la politique d'impayés de l'État et des faillites d'entreprises. Alors il faut bien admettre que le nombre officiel de chômeurs est très en-deçà de la réalité.
Le soir, Géorgios discute vivement au téléphone et après avoir raccroché, s'exclame : « Je vais bien ! Vraiment, tout va bien pour moi ! » Comme je le regarde d'un air interrogatif, il m'explique qu'il était au téléphone avec un collègue ingénieur : « L'entreprise pour laquelle il a travaillé lui doit 12 000 euros. Il a une femme et deux enfants. Maintenant seule sa femme travaille et ils doivent vivre avec son salaire, environ 650 euros. En plus, sa mère est très malade et elle doit payer l'hôpital avec sa pension de retraite, environ 400 euros. Et il a en tout et pour tout 1000 euros. » Si on compare sa situation avec celle de son collègue, en effet, tout va bien pour Géorgios.
Un argument qui revient de façon récurrente quand je discute de la situation des Grecs avec des Allemands ou des Français, c'est qu'« il n'y a rien en Grèce ». Les Grecs n'ont pas d'industrie, pas d'agriculture, c'est à peine s'ils ont du tourisme et encore, avec toutes ces manifestations, il n'est pas sûr que les touristes reviennent. C'est en somme une version allégée, une version "de gauche", de la rengaine hellénophobe réactionnaire « les Grecs ne travaillent pas ». En d'autres termes, ce n'est peut-être pas de leur faute, à ces pauvres Grecs, mais ils ne sont franchement bons à rien. Évidemment, la conclusion d'une telle argumentation est toujours que les Grecs ne peuvent pas quitter la zone euro et l'Union Européenne, parce qu'ils ne peuvent rien faire par eux-mêmes. Il est donc tout naturel de les placer sous tutelle. Que seraient les Grecs sans l'aide des Européens ? Donc, les Grecs ne peuvent pas récupérer leur monnaie nationale, la drachme, ni rétablir la souveraineté de leur nation. Comment des gens qui n'ont rien et ne savent rien faire pourraient-ils décider de leur propre destin ? Il peut paraître a priori surprenant de rencontrer aussi fréquemment ce discours néocolonial et paternaliste, mais il faut prendre en compte la quantité extraordinaire de propagande eurofasciste déversée depuis plusieurs années dans les médias européens pour nous empêcher de concevoir le destin de la Grèce ou, d'ailleurs, d'un quelconque autre pays membre de l'Union Européenne, en dehors de cette Union. Il ne s'agit évidemment pas d'une explication de la crise économique que traverse la Grèce mais d'un argument intéressé contre la sortie de la Grèce de la zone euro et de l'Union Européenne. Les eurocrates ne veulent laisser aucun doute à ce sujet : il ne peut y avoir d'avenir en dehors de l'Union Européenne et il n'y a pas de vie après l'euro. Donc les Grecs sont au chômage parce qu'il n'y a rien en Grèce. Il faudra alors qu'on m'explique ce qu'ils faisaient avant d'être au chômage, quand ils avaient encore un emploi, dans un pays où il n'y avait pourtant rien !
Évidemment, il ne viendrait à l'idée d'aucun des imbéciles recrachant docilement la propagande eurofasciste de se demander s'il ne confondrait pas la cause et l'effet. Selon la vision des gens qui pensent qu'il n'y a rien en Grèce, les Grecs ne survivraient pas sans l'aide de l'Union Européenne. Mais jamais aucun de ces imbéciles ne se demandera si ce n'est pas l'Union Européenne qui est justement la cause du problème. Les imbéciles pensent qu'il n'y a jamais rien eu en Grèce, que la Grèce n'avait pas d'économie avant d'entrer dans l'Union Européenne. Ils concèderons sans doute que la Grèce est quand même un pays touristique. Prenons donc l'exemple du tourisme. Qui empêche les touristes de venir en Grèce ? À votre avis, choisiriez-vous d'aller passer vos vacances en Turquie, sachant que la lire turque ne vaut que la moitié d'un euro et qu'on peut trouver un séjour d'une semaine dans des hôtels de luxe pour environ 500 euros dans diverses villes de Turquie, ou bien en Grèce, où, pour le même climat, vous devrez tout payer en euros, donc beaucoup plus cher, dans un pays accablé de taxes, où vous aurez le privilège - si vous avez choisi Athènes - de payer votre café ou votre jus d'orange 4,50 euros (1 euro en Turquie), afin de passer un séjour très relaxant entouré de forces anti-émeutes ? Sinon vous pouvez encore aller sur la côte dalmate, mais profitez-en vite, la Croatie vient d'être annexée par l'Union Européenne. L'euro est tout simplement trop cher.
Je ferais remarquer en passant à mes concitoyens que depuis que la France a adopté l'euro, le solde de la balance du commerce extérieur de notre pays n'a plus jamais été positif. Et la situation ne fait qu'empirer. L'économie française pas plus que l'économie grecque ne peut survivre à l'intérieur de la zone euro. Notre tour viendra et, peut-être que ce jour là, les Grecs se moqueront bien des imbéciles français en leur expliquant avec la morgue d'un génie de village qu'« il n'y a rien en France ». L'euro n'est pas le seul problème. En fait, ce sont les traités européens qui sont le principal problème. Ils interdisent par exemple aux Grecs de protéger leur industrie et leur agriculture avec des barrières douanières et de contrôler les flux de capitaux. Et ce qui est vrai pour la Grèce est vrai pour la France également. Nos agriculteurs ne peuvent pas vivre de leur travail, ils subissent la concurrence des produits espagnols et allemands, moins chers, et les traités européens interdisent d'en limiter l'importation. La France perd en moyenne 800 emplois industriels par jour ouvrable pour la même raison. Je vous le garantit, un jour nous serons dans la même situation que les Grecs et il se trouvera des étrangers pour nous expliquer qu'il n'y a rien et qu'il n'y a jamais rien eu en France : ni agriculture, ni industrie, peut-être un peu de tourisme à la limite...
Pourtant il y a bien des choses en Grèce. Comme un malheur n'arrive jamais seul, Géorgios m'apprend qu'on y a découvert du pétrole. En fait, il m'explique que ça fait longtemps que des ingénieurs disent qu'il y a des réserves de pétrole en Égée. Mais le gouvernement grec, lui, fait mine d'avoir découvert subitement ce trésor. Ça a le don d'agacer Géorgios, car il craint évidemment que le gouvernement grec ne le dilapide pour rembourser la prétendue dette. « Avant ils disaient qu'il n'y avait pas de pétrole et maintenant ils vont le donner à des compagnies américaines. » Sur cette terre dominée par l'Empire américain, c'est une malédiction pour les peuples d'avoir de l'or noir.
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