Après communisme en 1989, chute du panarabisme en 2011
Les historiens semblent peiner à analyser ce qui se passe dans les pays arabes, ou du moins, les médias ont quelque difficulté à en parler, préférant commenter les volte-face des dirigeants occidentaux tout en montrant quelques pittoresques mais tragiques images provenant de la rue. La vérité est difficile à extraire mais l’interprétation la plus évidente nous renvoie à la chute du mur en 1989, avec à la clé le démantèlement de l’empire soviétique mais auparavant, le décrochage des pays de l’Est, synonyme de changement de régime. La chute des régimes communistes s’est faite sous la conjugaison de deux facteurs ; l’un, sans doute surévalué, fut le sentiment religieux diffus portée par un pape fort en verbe théologico-politique ; l’autre, plus répandu, était représenté par une aspiration des populations vers plus de liberté et surtout, plus de consommation ou du moins, une consommation différente, plus occidentalisée, pas celle que les bureaucrates du régime prétendaient imposer aux peuples sous couvert de vertu économique incarnée par l’idéal communiste érigé en destination finale de l’humanité, enfin, aux tous débuts, du temps de Staline.
Le communisme est né au début du 20ème siècle. Son avènement remonte à Lénine mais la montée en puissance moderne et industrielle du bloc soviétique a été causée par la Seconde guerre, Staline n’étant que le capitaine d’un navire fou lancé dans l’Histoire tragique du monde occidental. L’Union soviétique est le fruit de ces années de plomb, de poudre, de contraintes techniques et idéologiques imposées aux populations. C’est là qu’une interprétation de 2011 se dessine. Tout a commencé comme pour le communisme. Autre lieu, autre idéologie, le panarabisme, qui a eu son Lénine en la personne de Hussein Ibn Ali, et qui pratiquement en même temps que Lénine, lança la révolution panarabiste pendant la Guerre de 14, promouvant la révolte arabe contre l’Empire ottoman, prenant Damas, puis proclamant l’indépendance du Hedjad. L’apogée du panarabisme est consécutive à la Seconde guerre puis à la décolonisation. Le bloc panarabe, contrairement au bloc de l’Est, a été loin de l’unification mais s’est constitué de manière éclatée et diffuse avec des tensions et des connivences entre plusieurs nations. Deux mouvances, le parti Baas en Syrie et Irak, et le nassérisme en Egypte. Nul ne peut situer l’apogée du panarabisme mais l’on peut voir les développements différenciés des nations arabes, avec deux pays puissants qui se sont du reste disputés le leadership, l’Egypte de Moubarak et l’Irak de Hussein.
Le panarabisme a sans doute permis aux régimes autoritaires de se maintenir, en jouant sur l’orgueil des dirigeants et des peuples, mais la mondialisation a, comme dans le cas du bloc soviétique, aiguisé les aspirations des peuples vers un mode de vie plus démocratique, plus occidental. Les Egyptiens, les Tunisiens, n’étaient pas affamés, pas plus que les Allemands de l’Est en 1989. Ils étaient affamés d’autres choses, plus culturelles, plus démocratiques, lassés d’être brimés par un pouvoir qui ne donnait pas de travail alors que le sentiment panarabiste était loin dans le passé, surtout pour la jeunesse, comme pouvait l’être le rêve communiste pour un Polonais en 1980. Le parallèle entre 2011 et 1989 est plausible. L’avenir dira ce qu’il reste de cet effondrement des régimes arabes et de la transition vers autre chose, mettant sans doute un terme à une période de l’Histoire qui a commencé en 1945. Ce qui permet de dire que le long 20ème siècle a bel et bien duré un siècle, de 1914 à 2011, si l’on invite nos frères arabes dans l’Histoire, et non pas 80 ans conformément à la thèse trop occidentaliste d’Eric Hobsbawm. Le panarabisme est destiné aux livres d’histoire. Il reste maintenant à ces pays d’écrire une nouvelle page et d’y associer les populations.
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