Joseph Stiglitz à la tête de la Banque mondiale ?
Maintenant que les jours de Paul Wolfowitz sont comptés, la quête de l’éventuel successeur peut commencer. Dans un geste d’apaisement envers un Congrès dominé par les démocrates, le président George W. Bush serait fort avisé de choisir Joseph Stiglitz. Après tout, cet économiste américain a toutes les qualités requises pour le poste de président de la Banque mondiale.
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Professeur à l’université Columbia, prix d’économie 2001 en l’honneur
de Nobel octroyé par la Banque de Norvège, vice-président et économiste
en chef de la Banque mondiale de 1997 à 2000, principal conseiller
économique de Bill Clinton de 1995 à 1997, Stiglitz a pris fait et
cause pour les nations les moins favorisées de la terre. Il a eu le
courage de dénoncer le Fonds monétaire international, reprochant à ce
dernier de faire passer les intérêts américains avant les intérêts des
pays qu’il est censé aider.
Stiglitz a contribué à renouveler la pensée de John Maynard Keynes, au point où on
le considère comme un des économistes les plus représentatifs du «
nouveau keynésianisme ».
Bien entendu, Bush pourrait lui reprocher d’avoir ouvertement appelé à
voter contre lui, et de s’en être pris aux chiffres officiels de son
administration concernant les coûts de la guerre d’Irak, mais ce sont
là des détails qui pèsent bien peu dans la balance de l’avantage
stratégique à le nommer à la place de Wolfowitz. Outre le Congrès
américain, la communauté internationale verrait d’un très bon oeil une
telle nomination. Il apaiserait ceux qui reprochent aux
États-Unis de maintenir leur emprise sur les institutions financières
internationales.
Qu’est-ce que Stiglitz apporterait à la Banque mondiale et au
développement international ? Une approche différente qui pourrait
contribuer à faire avancer, paradoxalement, diront ceux qui le croient
moins enthousiaste envers la mondialisation, l’intégration économique
mondiale.
Il suffit de lire un de ces derniers textes (Towards a New Model of
Development, Remarks Prepared for the China Development Forum, Beijing,
mars 2007), pour constater qu’au fond, Stiglitz ne demande pas mieux
que la réussite de l’économie de marché. Pour lui, les États ont un
rôle crucial à jouer dans cette réussite, ne serait-ce que dans leur
capacité de trouver et de mettre en application des solutions adaptées
au contexte propre à leur économie.
Dans le cas de la Chine, les récentes années de croissance économique
dues à ses exportations doivent désormais être suivies d’une politique
visant le développement du marché domestique, soutient Stiglitz. Les bases sont solides,
puisque la Chine a profité du boom de ses exportations pour développer sa
capacité d’innovation ainsi qu’un environnement institutionnel interne
favorable, dont un solide système financier domestique.
Ce qui manque à la Chine, c’est une meilleure répartition de la
richesse qui va faire en sorte que la demande intérieure pour des produits
et services puisse augmenter rapidement. Mais, avertit Stitglitz, l’absence d’un filet
social solide contribue davantage à nuire au développement de la
consommation intérieure. Encore ici, seul l’État peut mettre en place
un système de santé, un système de protection sociale et un système
éducatif efficaces qui vont détourner les ménages de leur habitude
d’épargne préventive.
Enfin, dernier élément non négligeable, l’État doit soutenir
les PME, créatrices de beaucoup d’emplois, qui ne réussissent pas à obtenir du crédit auprès des banques,
celles-ci préfèrant prêter aux grandes entreprises. À ce propos,
Stiglitz donne comme exemple le programme de soutien financier du
gouvernement américain aux petites et moyennes entreprises de ce pays.
De toute évidence, Joseph Stiglitz possède toutes les qualités requises
pour prendre la relève de Wolfowitz. Même la Chine pourrait voir d’un
bon oeil sa venue à la tête de la Banque mondiale. Il apporterait un
vent de renouveau dont pourraient bénéficier à la fois les pays les
moins avancés, les pays en transition et les pays riches.
Les paris sont ouverts, quelqu’un veut proposer une autre candidature ?
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