« Le grand bluff chinois ? »
Regard sur le livre de Dominique Wolton
« En route pour Beijing, j’ai acheté un livre au titre évocateur, « Le Grand Bluff (chinois) » signé Dominique Wolton, directeur de recherche au CNRS. Dès les premières lignes, je suis cloué au sol. Tir soutenu, sans merci ! Voilà que renaît sous les lambris d’un centre de recherche la politique de la canonnière, celle-là même qui a été à l’origine des traités inégaux et dont l’objectif était faire plier la Chine face aux exigences occidentales. La charge est cinglante, exténuante. Rien ne vient distraire l’auteur d’un jugement à l’emporte-pièce.
Première salve... la Chine serait tellement admirée par les Occidentaux qu’elle leur ôterait tout sens critique. La Chine s’impose surtout par l’importance de ses marchés. De surcroît, dans le monde des affaires, c’est le pragmatisme qui domine, rarement l’émotion. Cependant, si parfois un sentiment d’admiration guette, c’est en souvenir de ce qu’était la Chine voici trente ans : famélique et misérable. Autre bordée... La renommée de la Chine ne serait que le produit d’une vaste offensive marketing parfaitement huilée mais totalement mensongère. « Un kit totalitaire ! » déclare l’auteur. Pour qui a eu l’occasion d’assister à des conférences de promotion de villes chinoises, l’impression serait plutôt contraire. Une présentation rustre, des discours redondants, des documents incolores, aucune ingéniosité. Bref, une séance d’endormissement ! Non, les Chinois se vendent horriblement mal ! Et lorsqu’ils sont sur la touche, ils sont maladroits, fuyants. Ils s’accablent eux-mêmes. Alors pourquoi le kit totalitaire remporte-t-il autant de succès chez les Occidentaux ? Pour une raison simple : de la part des Occidentaux, l’appétit supposé du gain !
Dominique Wolton poursuit, la Chine serait phagocytée par 1000 familles, entendez par là les caciques du régime (donc communistes), notamment, le clan Jiang Zeming. Au XIXe siècle, en France, 200 familles irriguaient le pays. Chiffre varie, aujourd’hui, beaucoup moins ! Avec nos Bouygues, Lagardère, Pinault, Arnault et autres Dassault, nous connaissons aussi la concentration des pouvoirs. Donc, en Chine, mille familles se partageraient les prébendes, rien ou si peu pour le reste. Dans ce cas, il faudra interroger mes voisins de palier, originaires du Henan et du Shanxi. Loin des journées de jeûne de leurs parents, ils se gavent trois fois par jour, jonglent d’un portable à l’autre dans des appartements dont ils sont propriétaires.
Le régime chinois est despotique, autoritaire, corrompu, ajoute-t-il. Certes la Chine n’est pas exempte de critiques mais les libertés progressent. Déjà, la liberté de se moquer. Parfois, je demande à mes voisins ce qu’ils pensent de la politique ? » « Du gros ou du maigre ? » interrogent-ils. Ils en rient, c’est un début !
En Chine, les statistiques sont bidons, proclame D. Wolton. Au vu des controverses sur les chiffres du chômage en France, cette pratique semble répandue. Cependant, en Chine, il suffit de faire un petit tour dehors et de s’y reprendre tous les six mois, pour constater que la croissance est bien là. Pour la seule ville de Tianjin, trois fois plus d’ouvertures de chantiers ont été enregistrées en 2006 que pour la région Ile-de-France. Où se situe l’erreur ?
La Chine est l’atelier du monde mais ses produits manquent de technologie, affirme D. Wolton. Je suggère à notre directeur des recherches au CNRS de reprendre ses recherches ! La Chine est désormais l’un des laboratoires de la planète. Dans l’environnement de 52 zones de développement de haute technologie, 700 centres R&D et 55 000 start-up se déploient. La R&D atteint désormais 1,38% du PIB, la part des entreprises chinoises étant en forte augmentation. Qui plus est, l’affirmation de la puissance technologique de la Chine repose souvent sur l’existence de projets à rentabilité non immédiate. Dans ce cadre, la contrainte comptable est plus lâche, le canevas expérimental plus étendu, les axes de recherche plus variés. Dès lors, il est plus facile de valoriser une nouvelle technologie en Chine qu’en Europe où les contraintes sont lourdes. Tenez-le vous pour dit, D. Wolton ! La Chine qui copie nos brevets sera bientôt celle à qui on achètera des licences d’exploitation.
Pour conclure, l’auteur s’en prend au tourisme rouge, il s’insurge contre les visites de mausolées et à la maison de Mao à Shaoshan. Dans ce cas, il devrait aussi s’en prendre à moi. Je pratique le tourisme tricolore, je me suis rendu au chemin des Dames et à Verdun, là même où 230 000 Français ont servi (inutilement) de chair à canon.
En refermant le livre, j’éprouve un curieux sentiment. Peut-être D. Wolton a-t-il raté un copier-coller ? N’est-ce pas le France qui devrait se trouver à la place de la Chine ? Peut-être avait-il à dessein de tirer à boulet rouge contre notre pays en prenant la Chine à témoin ? Peut-être sont-ce là les servitudes d’un fonctionnaire émérite de l’Etat ?
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