Apprendre les langues étrangères dans les écoles publiques marocaines est un véritable calvaire, aussi bien pour l’enseignant que pour l’apprenant. Classes surchargées, élèves peu motivés, programmes inadéquats copiés directement sur les curriculae des missions étrangères, tous ces facteurs ont contribué, en plus de la démission des parents et l’incompétence de certains enseignants, à donner cette image que nous lui voyons aujourd’hui. Le changement, le vrai, n’est pas impossible à condition qu’il y ait d’abord une prise de conscience de l’échec et une volonté de réussir.
L’apprentissage des langues au Maroc de manière générale est catastrophique comme en témoignent les différents sites hantés par les jeunes teenagers, contraints souvent d’écrire leur langue maternelle Tamazight ou Arabe en lettres latines pour véhiculer le contenu de leur pensée, face à des interlocuteurs francophones, espanophones ou anglophones.Et puis ne me dîtes pas qu’un élève de deuxième année du bac ne ressent aucune infériorité de ne pouvoir s’exprimer dans la langue de Molière, de Shakespeare ou de Cervantes quand il le faut !
Ce sentiment existe bel et bien et plonge le jeune marocain dans une angoisse qui ne fait qu’augmenter son sentiment d’insécurité et, de fil en aiguille, réduit sa confiance en lui même et en ses capacités.Je ne parle pas bien sûr des enfants privilégiés, élevés par une nurse du Yorkshire ou envoyés à la crèche de la mission étrangère dés leur sortie des couches. Je parle de l’enfant du peuple envoyé à l’école publique où le nombre de ses congénères ne laisse guère à l’enseignant le temps de s’occuper de son apprentissage.
En outre, même muni de la meilleure volonté du monde, un enseignant ne peut pas toujours dans les conditions de travail en vigueur, communiquer à ses élèves cet amour de la langue qui l’a poussé lui même à y exceller. Ceci, bien sûr dans le cas où l’enseignant lui-même aurait reçu une excellente formation en langues, ce qui n’est pas malheureusement toujours le cas. A ce propos les anecdotes des hommes du métier sur les bavures et les incohérences langagières de leurs condisciples sont très révélatrices de l’incompétence de certains. C’est pour cela et pour bien d’autres raisons que des élèves reçoivent dès le primaire des notions tout à fait fausses en langues étrangères et grandissent avec l’habitude de les perpétuer jusqu’à ce que la lacune devienne la norme et soit ainsi perpétuée et "légalisée" par un emploi qui n’a jamais trouvé de correcteur et je n’en voudrais pour exemple que le très répandu (ou répondu !) "merci bien". A cet égard quelques enseignants n’ont de bilingue que le nom qui leur sert de passe-droit, comme une plus-value pour assurer leur supériorité factice dans un milieu social morphothèiste.
Un mien ami, qui garde toujours en réserve pour les mauvais jours une dose d’humour sapide qu’il serine au compte-gouttes, me confia un jour que le ministère de l’éducation devrait ,au début de chaque année scolaire,organiser une inspection impromptue des domiciles des enseignants et licencier, au sens de congédier bien sûr, tout professeur dont le nombre de plats en porcelaine de la marque "taws" aurait dépassé le nombre de livres dans la maison ! Ceci pour dire que nous les enseignants, avons tendance à nous reposer sur nos lauriers, si lauriers il y a, et à oublier toute forme de culture dès que nous recevons le premier mandat jaune de la perception, ce mot justement traduit mine de rien, la perception que beaucoup d’entre nous se font de la culture livresque !.
D’aucuns se hâteraient de me jeter l’anathème, sous prétexte que les "hommes saignants" sont souvent mal payés et retourneraient vite la balle du côté du fameux "système", ce mot qui a bon dos et qui sert à justifier tous les maux qui nous arrivent. Néanmoins il faut, pour l’éternité, avouer que parmi nous il y a aussi des brebis galeuses, des enseignants qui passent plus de temps dans la cour de récréation que dans leur salle de classe. D’autres qui ont encore besoin de formation élémentaire en français notamment .
Ceci sans oublier quelques inspecteurs plagiaires, voleurs de mémoires, comme j’ai eu la malencontreuse occasion d’en rencontrer, et qui ne compètent qu’à gravir les échelons sans jamais penser à produire quoi que ce soit dans le domaine pédagogique, censé être le leur. Cela n’exclut pas heureusement la présence de quelques perles rares qui embellissent ce corps enseignant agonisant et le maintiennent relativement émergé ; mais il faudrait que ceux-ci soient majoritaires pour pouvoir dissoudre les incompétences des autres, dont la gangrène souvent servie par un ego hypertrophié ,se propage rapidement jusqu’à noyer tout dans le magma bourbeux de l’ignorance.
A bon entendeur ! Amen !