Quand Google voit rouge...
Au début de cette année 2006, Google acceptait de se plier aux exigences du gouvernement chinois pour conquérir l’empire du milieu. Pour la première fois, Google montrait alors que son seul objectif était d’ordre financier, contrairement à tous ses beaux discours des années précédentes. Oui, mais voilà, même en collaborant avec les Chinois, Google ne parvient pas à s’imposer...
La collaboration : une pratique courante
Rassurez-vous chers lecteurs, Google n’est pas la seule firme collaborant avec les autorités chinoises. On peut citer Yahoo ! et Microsoft, deux de ses principaux concurrents ou encore Amazon et Cisco qui ont rapidement fait le choix entre éthique et profit.
Ce qui peut surprendre dans le cas de Google, c’est la différence
flagrante entre son discours et ses actes. Le credo jadis clamé par
Google : “Nous croyons fermement au caractère démocratique du Web pour
déterminer l’inclusion et le classement des sites dans nos résultats” a
d’ailleurs disparu peu de temps après l’annonce de Google.cn.
Une mobilisation malheureusement peu efficace
De nombreuses associations comme Reporters sans frontières, Human Rights Watch et Amnesty international ont accusé les firmes américaines de favoriser la censure dans le monde et de “sympathiser avec l’ennemi”.
Plus récemment, le Parlement européen et le Congrès américain
ont demandé des comptes à Google, Microsoft et Yahoo ! sur cette
collaboration suspecte se traduisant par une rétention de
l’information.
Les firmes n’ont alors observé aucun regret affirmant qu’elles
n’amplifiaient pas la censure mais ne faisaient que se plier aux
exigences des autorités. Google a d’ailleurs eu l’audace de comparer la
rétention de l’information chinoise à la censure exercée par les pays
européens et américains à l’égard des sites pédophiles !
Google piqué au vif : un moteur local dérangeant
Mais ce ne sont pas tant ces considérations d’ordre moral qui gênent
Google que son absence de leadership en Chine. Collaborer avec le
gouvernement chinois, d’accord, à condition que la réussite financière
soit au rendez-vous.
Or, Google ne cesse de perdre du terrain face à son concurrent local Baidu. Les parts de marché en 2006
du moteur de recherche chinois sont supérieures à 60% tandis que celles
de Google sont à peine de 25% (soit une perte de 8% par rapport à 2005).
Récemment, Google avait voulu se rapprocher du peuple chinois en
acceptant pour la première fois de changer son nom en choisissant
l’appelation “Guge”. Cette opération s’est terminée par un fiasco, un site “NoGuge”
ayant d’ailleurs vu le jour.
L’avance de Baidu sur ce marché peut s’expliquer par une meilleure
compréhension de la langue et de ses subtilités, ainsi que par une
meilleure connaissance du comportement des Chinois. Il s’agit en effet
d’un marché très différent des standards occidentaux, où Google semble
bien affaibli.
Et lorsqu’un acteur local vole la vedette à Google et annonce vouloir
se lancer au Japon, cela a le mérite d’irriter la firme aux 150
milliards de dollars.
Racheter Baidu : la possible stratégie de Google
Le marché chinois compte aujourd’hui 120 millions d’internautes
(deuxième pays derrière les Etats-Unis en termes d’utilisateurs) et il
s’agit du marché en plus forte croissance. Compte tenu des enjeux
stratégiques du marché chinois et de l’arrogance affichée de Google,
nul doute que la firme de Moutain View tentera par tous moyens de
s’emparer du leadership.
Et cela pourrait bien passer par un rachat de Baidu. La faiblesse qui
est également la force de Baidu est de proposer une recherche
spécifique de MP3. Ce type de recherche est à l’origine de nombre de procès entre le moteur chinois et les majors américaines.
Une alliance pourrait alors voir le jour entre les majors et Google pour faire tomber Baidu, d’autant que Google a désormais l’habitude de négocier avec ces groupes.
D’autre part, Google a cédé en juin sa participation
de 2,63% du capital de Baidu. Cette annonce a fait baisser le cours de
Baidu d’environ 6%. Une stratégie de Google pourrait donc être
d’affaiblir Baidu pour racheter ensuite l’entreprise à bas prix.
Seule inconnue : le gouvernement chinois acceptera-t-il de laisser cette entreprise être rachetée par une firme américaine ?
A priori non, mais Google est en train de négocier avec les autorités chinoises concernant la diffusion de vidéos sur les téléphones portables.
Google accepterait alors de se plier à la censure chinoise qui désire
vouloir valider tout contenu avant sa diffusion. Un deal qui pourrait
peut-être laisser prévoir le rachat de Baidu...
Quoi qu’il en soit, nous sommes bien loin d’enjeux purement
économiques... Et quant à l’éthique, ce mot semble décidément ringard !
Affaire à suivre...
Youri Regnier
Googlinside
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