Uruguay : Montevideo, nouveau Amsterdam des fumeurs de joints ?
L’Uruguay, un des plus petits pays d’Amérique Latine, est aussi un des plus libérales. En effet, il se donne pour ambition de lutter contre la consommation de drogues en empruntant un chemin tout à la fois inexploré, prometteur et dangereux : la légalisation.
Il y a mois, le Parlement uruguayen votait à 50 voix contre 46 la légalisation de la vente et de la production de cannabis. En attendant d’être présenté au Sénat, ce projet impulsé par le président Mujica soulève bien des débats.

Le projet Mujica
Pionnière dans cette partie du Monde minée par l’influence des narcotrafiquants qu’est l’Amérique Latine, l’expérience uruguayenne est un réel test afin de savoir si la légalisation peut être élargie au reste de la zone. Le projet prévoit un encadrement strict par l’Etat de ce nouveau marché. En outre, comme en Espagne ou dans plusieurs autres pays du monde, la production pour usage personnel sera autorisée. L’objectif est de créer un cadre législatif étatique pour un marché exclusivement uruguayen et ainsi limiter, voire annihiler, les flux clandestins venant du Paraguay notamment ; tout cela avec pour finalité de lutter contre la dépendance au cannabis et contre les dangers du narcotrafic. Le texte adopté par 50 des 96 députés présents au Parlement (total de 99 élus) après un long débat devrait être ratifié par le Sénat courant Septembre-Octobre.
Pour ou contre ? Les enjeux du débat
Afin d’appuyer sa proposition, Mujica apporte des éléments quantitatifs et déclare “Le narcotrafic est un commerce florissant. Si on met dans la balance l’argent gaspillé pour le contrarier et les retombées effectives, cela donne envie de pleurer. C’est l’entreprise la plus désastreuse au monde » (voir article avec les chiffres détaillés ici : http://www.elobservador.com.uy/noticia/256727/mujica-evalua-impulsar-referendum-sobre-marihuana/). Pour lui et les défenseurs du projet de loi, « mieux vaut donner des garanties aux consommateurs que de les laisser se risquer au marché noir ». De plus, les recherches scientifiques sur les dangers du Cannabis sont très contradictoires. Par exemple ci-joint à l'article, voici un tableau récapitulatif des dangers des différentes drogues proposé par l’Université de Médecine de Nantes (France) à ses élèves. SI l’on en croit les indications, il apparaît que le cannabis est moins dangereux que l’alcool ou le tabac...
Toutefois, d’autres enquêtes démontrent la toxicité relativement élevée de la marijuana. Mais plus que sa toxicité, les opposants à sa légalisation soulignent que cette drogue serait une porte d’entrée vers des produits plus dangereux, tels que la cocaïne. Selon eux, la pénalisation doit continuer et est le seul et unique moyen pour régler le problème.
La population uruguayenne, contrairement à ses dirigeants, est pour l’instant récalcitrante dans ses deux tiers au projet de loi impulsé par la Gauche au pouvoir. Pourtant il semblerait bien que dés Octobre l’expérience de tous les périls et de tous les espoirs commence en Uruguay avec un Sénat de Gauche qui devrait suivre les députés et le président.
Quelles réactions internationales ?
Ce projet de loi va à l’encontre des principes de la Convention de Vienne, que tous les pays des Nations Unies ont signé. Toutefois, aucun exemple de peine concrète pour violation de ce traité n’est à dénombrer. De plus, la communauté internationale a tout à gagner de cette nouvelle expérience qui se déroulera à échelle réduite (estimation de seulement 120.000 fumeurs de cannabis en Uruguay). Il est donc très peu probable que des sanctions économiques soient prises.
Quand aux Etats-Unis, pays à l’origine de la politique intransigeante appliquée à l’encontre de la production de drogues en Amérique Latine, la mise en place de ce projet l’affecterait. C’est un nouveau coup dur à son influence en perdition dans la zone. En effet, le Los Angeles Time souligne que Barack Obama a souvent répété que “La légalisation n’est pas la réponse” et que Gil Kerlikowske, le « Tsar de le Drogue » aux Etats Unis, directeur de l’Office of National Drug Control Policy, s’y est toujours opposé.
Moins attendu est la prise de position du pape François. Durant les JMJs au Brésil, il a déclaré : « Ce n’est pas la légalisation qui pourra réduire la propagation et l’influence de le dépendance chimique » ; « La plaie du narcotrafic, qui favorise la violence et sème la douleur et la mort, requiert un acte de courage de toute la société ».
Enfin il est intéressant de se pencher sur l’opinion paraguayenne, premier état producteur de marijuana en Amérique Latine, second au Monde. Le secrétaire National Antidrogue du pays affirme : « Je crois que c’est une réelle utopie ». Pour lui, « la situation ne changera pas » et, alors que l’objectif de Mujica est de développer un marché uniquement uruguayen, la drogue continuerait de transiter, grâce à l’économie parallèle, de son pays vers l’Uruguay, en passant par l’Argentine.
“Un apport à l’humanité”
Quant à Mujica, il est prêt à défendre bec et ongles son projet qu’il définit comme « un apport pour l’humanité ». Néanmoins, suite aux critiques, il a concédé dans les journaux du pays que si l’expérience échoue, il n’hésitera pas à faire marche arrière. La question est de savoir si cela sera possible... En attendant, les fumeurs de Marijuana du monde entier ont leurs yeux rivés vers ce petit bout de terre, où l’on peut même trouver dans les journaux un article intitulé « Como se cultiva la marihuana », soit littéralement « Comment se cultive la Marijuana ».
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