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Du vocabulaire, des médias, de la mode

On voit fleurir dans la presse écrite et audio-visuelle des expressions, à l’origine bien française, tels que "bien pensant", "pensée unique", "prise d’otage" ou d’autres complètement inventés comme "bobo", "politiquement correct" et ma préférée : "franco-français". Je m’arrête là mais la liste s’allonge tous les jours. Je ne critique nullement l’invention de nouveaux mots ou de nouvelles expressions, bien au contraire, je m’intéresse plutôt à l’usage ou à la récupération de ces vocables.

Il est impressionnant de constater combien des expressions de journalistes sans talent peuvent marquer notre inconscient collectif. L’une des plus marquantes est : "prise d’otage". Pour moi prendre quelqu’un en otage c’est : s’emparer d’un individu et l’utiliser comme moyen de pression contre quelqu’un, un État, pour l’amener à céder à des exigences. C’est Larousse qui le dit. L’idée que l’on se fait communément d’une prise d’otage est violente, implique des menaces et l’utilisation d’armes. Il s’agit d’ailleurs d’un délit sévèrement réprimé. Quand j’entends par exemple que les agents SNCF "prennent les usagers en otage" alors qu’ils font simplement la grève, je me pose des questions. A ce que je sache, aucun usager ne s’est retrouvé un couteau sous la gorge ou menacé d’une arme. L’usager n’aura pas pu se rendre d’un point A à un point B et c’est tout. D’autre part, la grève n’est pas un délit mais un droit, la prise d’otage, c’est le contraire.

Concernant les "politiquement correct", "bien pensant", "pensée unique", le sens réel de ces expressions n’a plus aucune importance et tout le monde s’en fiche. En effet, ces expressions ne sont plus utilisées que dans le but de décrédibiliser un interlocuteur. Si vous n’êtes pas d’accord avec quelqu’un vous n’êtes plus, à ses yeux, qu’un "tenant de la pensée unique" voir un "stalinien", qui plus est "bien pensant" et "politiquement correct". C’est beaucoup plus facile, il n’y a plus besoin d’argumenter et le débat est expédié en cinq minute à coup d’arguments qui n’en sont pas. Dans la série, je garde le meilleur pour la fin : le bobo. Alors la, c’est l’insulte suprême. Bobo, il n’y a pas pire, le retour de la chienlit ma bonne dame ! Bobo pour Bourgeois Bohème. Qu’est-ce qui est dérangeant : bourgeois (on n’en a pas fini avec l’esprit de 68 alors), bohème ou les deux ?

Attention l’insulte : vous n’êtes qu’un bobo preneur d’otage tenant de la pensée unique et politiquement correct. Avec ça on vous habille pour l’hiver à moindre frais.

Enfin, j’aimerai que l’on m’explique le sens de l’expression "franco-français". Français, on sait ce que c’est. Franco-belge, on se doute, mais franco-français ... Ca me rappelle les lessives qui lavent plus blanc que blanc. Franco-français ça doit être plus Français que Français. Ben oui ma bonne dame ! Il y a les Français Franco et les autres, les Français pas franco ! Ca doit être ça. Si quelqu’un peut éclairer ma lanterne.

Ces expressions font maintenant partie de notre inconscient collectif et sont employées à tort et à travers dans les médias, par les politiques et finalement par tout un chacun. Ceci s’inscrit dans ce que j’appellerai le grand lavage de cerveau collectif. Une trouvaille journalistique se trouve du jour au lendemain propulsé sur le devant de la scène et utilisée comme bouche trou. Rappelez vous les schtroumpfs de Peyo : tout mot peut être remplacé par stroumpf. Il s’avère que toute nouvelle expression de ce genre n’enrichit ni ne nourrit notre belle langue. Ce genre de vocable contribue plutôt à l’appauvrir : quand on ne trouve pas de mot ou d’idée adéquate, on peut piocher sans vergogne dans ce réservoir d’expression toute faite.

Chers amis bloggueurs, ne vous mettez pas au niveau de ces journalistes de bas étage, vous êtes certainement capable de mieux.

 
Jiache


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12 réactions à cet article    


  • le mave 3 janvier 2009 11:35

    "Rappelez vous les schtroumpfs de Peyo : tout mot peut être remplacé par stroumpf. Il s’avère que toute nouvelle expression de ce genre n’enrichit ni ne nourrit notre belle langue. Ce genre de vocable contribue plutôt à l’appauvrir : quand on ne trouve pas de mot ou d’idée adéquate, on peut piocher sans vergogne dans ce réservoir d’expression toute faite."

    Vous auriez pu faire appel à Orwell et son "1984" ,ça aurait fait plus référence ,mais c’est vrai que c’est pénible ces superlatifs journalistiques .
    Il y a aussi :" toute la France ,pleure ,soutient attend .........


    • Laurent B 3 janvier 2009 12:13

      Le terme de "franco-français" décrit un évènement qui n’intéresse que nous et dont les autres pays se moquent totalement. Contrairement à vous, j’aime assez ce terme de "franco-français" ou "franchouillard" peut être parcequ’il me donne l’impression que la france est un pays à part mais par contre je déteste les nouvelles expressions comme "dégats collateraux" ou "frappes chirurgicales" qui sous estiment des actes criminels pour les rendre moins inhumains et ainsi les justifier. Ils ne servent qu’à manipuler nos esprits !



      • Laurent B 3 janvier 2009 12:12

        Le terme de "franco-français" décrit un évènement qui n’intéresse que nous et dont les autres pays se moquent totalement. Contrairement à vous, j’aime assez ce terme de "franco-français" ou "franchouillard" peut être parcequ’il me donne l’impression que la france est un pays à part mais par contre je déteste les nouvelles expressions comme "dégats collateraux" ou "frappes chirurgicales" qui sous estiment des actes criminels pour les rendre moins inhumains et ainsi les justifier. Ils ne servent qu’à manipuler nos esprits !



        • Fergus fergus 4 janvier 2009 09:40

          "Franchouillard" a une connotation négative que n’a pas "franco-français" qui stigmatise simplement notre nombrilisme. Personnellement, je trouve cette expression plutôt bien utile.


        • Jiache 5 janvier 2009 11:16

          Je n’ai jamais dis que j’approuve les grèves SNCF. J’essaye simplement de remettre les choses à leur place.


          >>Il ne prennent peut-être pas les usagers en otage , ils pensent simplement qu’ ils sont en droit de faire chier tout le monde en s’ arrêttant de travailler .
          Encore une fois la grève est légale en France. Si la direction de la SNCF ne peut pas palier au manque d’agent, c’est son problème.


          >> Ils seraient dans des petites boîtes où ce sinistre moyen de pression n’ existe pas , on en entendrait tout simplement pas parler .
          Quand un grève est bien suivie dans une petite boite, les résultats sont rapides et parfois impressionnants.


          >> Vous vous prenez pour qui vous , pour approuver des salopards laissant sur le trottoir des milliers de voyageurs ? des femmes avec des enfants
          ... et même des enfants tout seul, vous vous rendez compte ?


          Pour votre information, je prends le train tous les jours depuis un bon moment. Ce que je constate : c’est le lent et triste abandon par l’état d’un service ferroviaire public qui il y a 10 ans était certainement le meilleur du monde. Diriez vous que l’état vous prend en otage ? Qui sont les salopards dont vous parlez ? Les agents SNCF ou les gouvernement qui ont volontairement laisser pourrir les transports publics ?


        • cathy30 cathy30 3 janvier 2009 18:48

          Autant que faire ce peut... elle n’est pas mal celle là non plus ?

          Je me souviens que ma mère aussi dans ma jeunesse avait des expressions toutes faites dans chaque discussion comme, la cinquième roue du carosse et plein d’autres encore dont je n’ai plus le souvenir, autant dire que je ne comprenais rien, je ne captais que l’émotion.

          Aujourd’hui toutes ces vieilles expressions ont été remplacées par celles que vous citez, elles n’ont d’existances que par un manque de culture, elles remplacent ce que nous ne pouvons exprimer par un langage développé.


          • jeancitoyen jeancitoyen 3 janvier 2009 19:05

            Excellent article, cher Jiache.

            "et c’est tellement vrai " ! ! Ce que vous faites remarquer n’est pas très important, il est vrai, mais ces petites expressions contribuent, avec certains discours, à nourrir la pensée unique vers laquelle on veut nous conduire.

            Car, il ne faut pas se leurrer (ou se faire leurrer !), cette catégorie de presse écrite ou parler, n’a semble-t-il qu’un but : nous montrer, voire nous désigner le droit chemin, la bonne façon de penser, la bonne attitude que doivent adopter les uns et les autres.

            Ces petits mots ou petites expressions, au sens souvent excessif et exagéré, répétés quotidiennement passent peu à peu dans le langage courant. Cela ne serait pas grave si leur sens démesuré ne finissait pas par être adopté puis approuvé par quasiment "toute la France".

            Je ne veux défendre personne en particulier mais lorsque les cheminots, les postiers ou les gaziers font grève, c’est bien entendu en premier lieu pour eux mais cela contribue aussi à tenter de préserver le service public. J’en suis sincèrement convaincu. Le droit de grève est et doit rester un droit. Parler alors de "prise d’otage" revient à orienter l’opinion du lecteur, de l’auditeur et/ou du téléspectateur. Le répéter plusieurs fois par jour est une méthode qui a fait ses preuves.

            Quand on observe aujourd’hui le contenu de certains journaux ou émissions télévisés par exemple, on a là une belle démonstration de la méthode Coué (et non Cauet).

            Appauvrir notre langue n’est déjà pas glorieux mais ces libertés prises par certains avec le sens des mots font partie des moyens qui permettent peu à peu de nous conditionner : voici le bien, voici le mal. Je ne suis pas certain, sans prétention de ma part, que ces journalistes-là soient en accord avec le code déontologique de leur profession.

            Excellent article Jiache mais peu politiquement correct !


            • ddacoudre ddacoudre 3 janvier 2009 23:30

              bonjour jiache

              bon article, même si c’est plus compliqué, entre un vocabulaire réducteur de réalités complexes que l’information ne prend plus le temps de disséquer car nous sommes dans le zapping de l’information qui consacre au phénomène du concept publicitaire, et sa récupération très tendance permettant aux "nuls" de parler d’un événement complexe qu’il ne maitrisent pas. Cet usage est indicateur de superficialité et parfois distord la réalité comme tu l’indiques avec le mot otage ou enjolive le concept, il est plus jolie de parler de "franco français" que de franco centrisme, mais il y a avec franco français redondance.


              Parfois ces raccourcis sont utiles entre initiés, mais leur usage est identique a celui des acronymes parfois il est nécesaire d’en préciser le contenu ou le sens.
              cordialement.


              • Jean G. 4 janvier 2009 00:33

                Cet article complète une réflexion que je me fais depuis quelques temps sur le détournement du sens des mots fondant les grandes valeurs de certains partis politiques.
                L’UMP, par exemple, pour Union pour un mouvement populaire. Récupérer le mot "populaire" pour nommer un parti dont la vocation est pourtant très affichée à droite, donc au profit des plus nantis, c’est tout de même contradictoire, non ? Et pourtant, ça marche.
                Mais ne croyez pas que je ne vise que l’UMP. Au sein du parti socialiste, les discours ont pris, ces derniers mois, de moins en moins la peine de recourir aux mots de valeur dite "de gauche", et on se demande si le parti mérite encore de s’appeler socialiste (heureusement, il semble que des nouvelles personnalités tentent de remettre le parti dans ses valeurs fondatrices).
                Aux Etats-unis, c’est encore plus marquant pour nous : traiter quelqu’un de "liberal" (sans accent puisque c’est en anglais) marque cette personne de l’infâmie d’être proche du communisme ! En effet, à l’origine, l’esprit "libéral", à "l’époque des Lumières", représentait une philosophie progressiste orientée vers une meilleure répartition des biens et des richesses, ce qui est à l’encontre du capitalisme pur et dur de la période Bush. Le "libéral", en Français, est désormais marqué beaucoup plus à droite.
                Il existe quantité d’exemples de ce type dans tous les pays, et cela mériterait une belle étude sémantique, qui mènerait probablement à conclure que tous les mots représentant des valeurs éthiques et politiques fondamentales devraient être réapprises dès l’école, et rappelées aux journalistes, aux communicants en général, et en particulier aux politiciens avant tout autre. Ceci illustre parfaitement la pensée de Jean Rostand : "le plus difficile dans une conversation, ce n’est pas de ne pas parler la même langue, c’est de ne pas accorder aux mots les mêmes sens."


                • Fergus fergus 4 janvier 2009 09:51

                  Absente de votre article, une expression courante dans les médias et pourtant inélégante et très lourde : "sans compter sur" employé à la place de "compter sans".

                  Exemple : "Tsahal a conduit une offensive terrestre destinée à détruire le commandement du Hamas. C’était sans compter sur la résistance des combattants palestiniens..." Un langage correct devrait conduire le (ou la) journaliste à dire tout simplement "C’était compter sans la résistance..."


                  • Fergus fergus 4 janvier 2009 09:57

                    Une autre observation : les fameux "bobos" sont très loin de ressentir ce terme comme une insulte. Pour eux, il valide un mode de vie citadin moderne et branché. Sociologiquement, les bobos sont plutôt cultivés, plus tolérants que la moyenne des Français et votent majoritairement à gauche. Leur défaut : ils sont aussi assez égoïstes !


                    • poetiste poetiste 13 janvier 2009 09:40

                      Superlatifs superfétatoires.

                      Claude Berri est mort. Les médias y vont de leurs superlatifs : il était magnifique, l’empereur du cinéma, le géant etc. J’ai un copain qui vient de mourir, il était menuisier, le nabab des menuisiers, un formidable professionnel, il était merveilleux. Il avait fait un escalier en 98 ; on en parle encore dans toutes les chaumières ; des fenêtres en 2001 qui laisseront des traces dans l’histoire. Bref ! Si on disait que Claude Berri faisait bien son métier est-ce que nous ne lui rendrions pas un meilleur hommage ? Ces superlatifs sont tellement usités et usés qu’ils sont déjà des fleurs artificielles sur une tombe. A force de vouloir donner du panache à l’information, les médias nous affadissent les fleurs de rhétorique. On se demande si ils ne se complimentent pas eux-mêmes par personnes interposées, par ces personnes qui, vivantes ou mortes, font leur gagne-pain. Claude Berri mérite respect mais pas un panégyrique professionnel à l’emporte pièce. Il est vrai qu’il est difficile de faire taire la déesse aux cent bouches quand les médias n’ont rien d’autre à faire que de la faire parler. Quand la camarde intervient dans leur monde virtuel, il leur faut inventer des mots forts pour faire un bon article. La pompe funèbre est pour le journaliste mais le vrai deuil revient à la famille, aux proches. Alors, le meilleur hommage que je pourrais rendre à Claude Berri, ce serait de lui dire qu’il a bien fait son boulot, comme mon copain menuisier. Qu’ils montent au ciel tous les deux mais messieurs les journalistes, redescendez un peu sur terre. Il y a des mots simples pour exprimer un vrai deuil.
                      A.C

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