L’acteur Olivier Martinez attaque fuzz.fr
L’acteur Olivier Martinez attaque fuzz.fr, l’agrégateur de news, pour le motif, écrit son responsable Eric Dupin, « d’atteinte à sa vie privée ». La décision de justice est attendue dans une semaine, mercredi 26 mars, mais déjà le débat sur la responsabilité des agrégateurs de contenus est lancé et la communauté des blogueurs se mobilise. Mais on attend un peu plus qu’une mobilisation corporatiste. Car si Eric Dupin dans cette affaire fait figure de bouc émissaire, ce procès qui probablement n’ira pas plus loin que le buzz qu’il provoque devra inciter les tenants du web 2.0 à réfléchir sur leurs pratiques et surtout arrêter de nous gonfler avec la pseudo liberté d’expression et avec cette tautologie qui voudrait que « le net c’est pas pareil ».

Le net c’est une évidence c’est pas pareil. Tellement pas qu’il est considéré par une majorité des Français comme la dernière source d’information fiable... C’est dire si les acteurs du secteur doivent se mobiliser pour améliorer leurs contenus et faire en sorte que le net soit pareil que la presse écrite ou la radio.
Mais revenons à l’affaire : « Fuzz, écrit 20 minutes, est un site qui permet aux gens de poster des news repérées ailleurs et de les partager. Olivier Martinez attaque la plate-forme, l’accusant d’avoir publié un lien renvoyant vers un blog qui évoquait sa liaison supposée avec Kylie Minogue ». Emmanuel Asmar, avocat d’Olivier Martinez, interrogé par 20 minutes a déclaré avoir également attaqué une trentaine d’autres sites ayant relayé la rumeur.
Précisons que l’info (la liaison supposée...) figure partout y compris sur la fiche Wikipédia d’Olivier Martinez. On ne comprend pas bien l’attitude de l’acteur. Ou il ne sait pas du tout ce qu’est le web ou il est très mal conseillé (ou il veut faire buzzer sur son nom). On se demande pourquoi, comme le veut l’usage, il n’a pas d’abord gentiment demandé à Eric Dupin, le boss de fuzz.fr, de retirer le lien litigieux qui pointaient vers l’article dit diffamant qu’Eric Dupin, explique-t-il sur son site, avait déjà banni de Fuzz, qui "n’a jamais fait la une et a fini sa vie dans les tréfonds des 30 000 news déjà publiées. Fuzz étant de surcroît très mal référencé dans les moteurs de recherche et pratiquement inexistant dans Google, il a donc dû être vu tout au plus par quelques dizaines de Fuzznautes".
Sur Kelblog on constate : « Nous assistons en ce moment à la multiplication des actions en justice contre les services internet de diffusion de flux RSS. Certaines "stars", peu au fait de la technologie, et conseillées par des avocats sans doute plus habitués à s’attaquer à la presse people, s’en prennent aux agrégateurs et moteurs de recherche internet à qui ils reprochent de véhiculer des rumeurs publiées dans le flux RSS de tel ou tel site indexé. C’est un peu comme s’ils attaquaient les kiosques à journaux sous prétexte qu’un écrit leur déplaît dans l’un des titres en rayonnage ». L’argument est pour le moins risible. C’est oublier que ce qui est vendu en kiosque est déjà passé par la censure (le dépôt légal)...
D’autre part, depuis quand demande-t-on aux citoyens de connaître l’intégralité du Code pénal ou civil ? La majorité d’entre eux respectent la loi sans la connaître (c’est ce que sous-entend l’adage « nul n’est censé ignorer la loi »). Pourquoi donc les acteurs du web s’abritent-ils toujours derrière ce ridicule raisonnement : « on peut tout dire sur le net donc disons n’importe quoi ! ».
De même qu’on ne peut pas tout dire, on ne peut pas davantage relayer n’importe quoi. Qu’on propage une information non vérifiée (c’est-à-dire une rumeur) est grave, qu’on la transmette juste pour faire du buzz et, au bout du compte, changer ses clics en monnaie sonnant et trébuchante (car c’est de cela qu’il s’agit) l’est tout autant. Les blogueurs comme Eric Dupin feraient bien de ne pas trop s’abriter derrière la loi pour la confiance dans l’économie numérique qui a priori les protège. Sauf que « les députés qui avaient fait voter cette loi en 2004 s’inquiètent de la non-application de la LCEN. La Gazette du net a dévoilé une version de travail d’un rapport des parlementaires Jean Dionis du Séjour et Corinne Erhel qui tirent la sonnette d’alarme, remarquant que de récentes décisions de justice remettent en cause l’esprit de la loi, qui devait permettre aux services web de se développer sans crainte de la justice » (20 minutes).
De son côté, l’avocat d’Olivier Martinez se fonde sur l’article 9 du Code civil qui stipule que « chacun a droit au respect de sa vie privée, les juges peuvent sans préjudice prescrire toutes mesures telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou à faire cesser une atteinte propre à l’intimité de la vie privée ; ces mesures peuvent s’il y a urgence, être ordonnées en référé ».
C’est loi contre loi. Laquelle prévaut ? On le saura le 26 mars. Récemment, rappelle le Journal du net, Olivier Dahan, réalisateur de La Môme a été débouté « d’une procédure de référé intenté contre Wikio.fr et son éditeur, Planète Soft, exigeant le retrait d’un lien présent sur l’agrégateur. Ce lien, tiré du flux RSS du site Gala.fr renvoyait vers un article relayant une supposée liaison entre le réalisateur de La Môme et l’actrice Sharon Stone... Planète Soft s’était défendu en expliquant que Wikio.fr n’était ni hébergeur ni éditeur ni webmaster de Gala.fr et ne pouvait être tenu responsable du contenu publié sur ce site ou des flux RSS qu’il édite ». Mais juste avant, le même « Olivier Dahan avait obtenu le 28 février la condamnation du site Lespipoles.com à lui verser 800 euros de dommages et intérêts concernant le même motif. Le TGI de Nanterre avait alors estimé que le fait de rediffuser un flux RSS n’exonérait pas l’éditeur d’un site de toute responsabilité ».
Dans l’affaire Olivier Martinez contre Fuzz, si le juge statue en faveur du Code civil, le Web 2.0 et les agrégateurs de contenus, Google, Youtube et autres mastodontes en tête, peuvent faire leur prière. Sinon ils se seront fait une belle frayeur.
Il vaudrait mieux pour Eric Dupin que la décision de justice lui soit favorable, évidemment, mais aussi qu’elle lui soit
instructive. Car celle-ci n’est qu’un avertissement. Et il s’adresse à l’ensemble du Web 2.0
Crédit photo : Equipier.com
29 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON