Le JT est-il du journalisme ?
Aujourd’hui, regarder le journal télévisé institutionnel français ne présente plus grand intérêt et ceci d’abord d’un point de vue journalistique. Si l’on veut avoir affaire avec des journalistes, mieux vaut bannir ces trois quarts d’heure quotidiens d’information et lire la presse. Ou s’informer soi-même. Le seul intérêt est peut-être d’y voir comment l’on présente les informations destinées à la masse que nous formons, nous, prolétaires, employés, rmistes, petites gens...
L’on sait que la télévision est la source d’informations privilégiée des classes populaires, et ce parmi les médias. Leur unique source d’information est donc constituée par le support qu’est le JT. Il y a donc une grosse responsabilité quant à son contenu et donc à son élaboration. Pourtant, le JT, loin d’accomplir son rôle, s’est petit à petit enfermé dans un conformisme délirant. Il ne compte pratiquement plus d’informations valables, pertinentes. Et pire, l’on doit s’interdire désormais de qualifier les personnes qui en sont les auteurs de journalistes. Le JT n’est pas une affaire de journalistes et de journalisme.
Pour s’en convaincre, il suffit de choisir un horaire, 13 ou 20 heures, et d’y relever le sujet des différentes informations qui se succèdent. De cet inventaire à
Voici quelques exemples de ce que l’on peut y trouver :
Les marronniers redondants :
Aujourd’hui, tous les journaux télévisés sont quotidiennement composés de marronniers. Le terme est d’ailleurs employé par les journalistes eux-mêmes. Un marronnier est un petit reportage sur un sujet qui revient périodiquement, tous les ans à la même date (la rentrée, les vacances, Halloween, le beaujolais nouveau,
La frénésie du micro-trottoir :
Aujourd’hui, les pseudo journalistes sont obsédés par le micro-trottoir. Et de nous montrer « les Français » pester par exemple contre les grèves. Ou de se montrer solidaires (les deux points de vue sont souvent présentés pour, semble-t-il, garantir une certaine impartialité). A-t-on affaire à du journalisme. Peut-on qualifier l’avis du Français lambda d’information nécessitant l’intervention du prompt journaliste qui fait remonter l’information jusqu’à nos oreilles, en un geste de gratitude envers nous. Et puis, c’est plus facile d’aller sur le trottoir (devenu le lieu privilégié du journalisme « sur le terrain ») que de mener une véritable enquête, se plonger dans les chiffres, dans les faits... Le micro-trottoir est tout sauf du journalisme.
La publicité dans le JT :
Les journaux télévisés sont aussi devenus des vitrines publicitaires. Aujourd’hui, l’on peut regarder le JT et y puiser des orientations de shopping. Et de consommation : CD, livres, jeux, consoles, pièces de théâtre parisiennes, nouveautés électroniques. Mieux, les invités ne viennent jamais les mains vides. Ils ont toujours un petit quelque chose sous le bras, généralement un livre à vendre, et qui est gracieusement présenté par le néo-animateur qu’est devenu le journaliste. Le journalisme doit rester étranger à la communication.
Les fais divers systématiquement relatés :
La présentation des faits divers au JT est sûrement plus discutable. Mais voir ces images volées d’hommes ou de femmes cachés sous leur manteau ; les pédophiles, les meurtriers, les délinquants, les voleurs, finissent par donner la nausée. Inutile de rappeler que tous ces actes répréhensibles ont existé de tout temps. Mais le traitement qu’en font aujourd’hui les JT s’apparentent plus à du voyeurisme qu’à de l’information et a fortiori du journalisme. Le journaliste se doit de faire état des évolutions des mœurs. C’est une obligation. Parler de l’augmentation, de la baisse, des comportements endémiques. Mais sinon le fait divers n’a pas sa place dans le JT. Et lorsqu’il est conjugué avec un petit micro-trottoir « maison » avec les voisins qui s’expriment sur le forçat, la quintessence de la nullité journalistique est atteinte.
Les images d’archives réutilisées :
Plus de journal télévisé sans images d’archives, avec parfois un lien chronologique de plusieurs mois avec les informations qu’elles sont censées illustrer. Pas de journalistes sur place, donc pas d’image. On a donc recours à des informations redistribuées. Il faut entendre par là que le JT n’est plus qu’un distributeur d’informations, que les rédactions achètent les informations, les photos, les films en amont aux grandes agences de presse.
Le parisianisme excessif :
Inutile de cacher que le provincial (la très grande majorité d’entre nous) peut se sentir submerger par de l’information parisienne destinée aux Parisiens (et à l’Île-de-France). Imaginer les Parisiens obligés de suivre un JT dont une grande partie est consacrée exclusivement aux Marseillais. Spectacles, manifestations, transports en commun, le tout relatif à Marseille. Quel Parisien supporterait cela ? Cette situation est pourtant le commun des mortels pour tous les Français hors Île-de-France. En ce moment, les JT parlent de la grève en Île-de-France. Près d’un quart d’heure du JT est consacré aux problèmes rencontrés par les pauvres petits Parisiens, plan du périphérique à l’appui, réaction à la sortie du métro, co-voiturage des Parisiens, auto-stop des Parisiens... Ou alors il faut clairement annoncer la couleur et les destinataires privilégiés des informations : « Mesdames, Messieurs, le premier quart de ce JT sera consacré exclusivement aux tribulations des Parisiens à Paris... ».
Le JT n’a bien qu’une seule utilité : voir comment l’on présente l’actualité à
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