Bilger vs Taubira
Philippe Bilger magistrat incisif et caustique dresse le bilan de Christiane Taubira à la justice

Philippe Bilger sort le 2 avril "contre la justice laxiste" avec un bandeau "Taubira carton rouge", dans la collection "Grosse colère" des éditions L'Archipel.
Philippe Bilger, lorsqu'il vous parle, tombe la veste, mouille la chemise et s'exprime avec ce phrasé inimitable qui en fait un débatteur de radio ou de télé redoutable et écouté.
Il est magistrat honoraire,ancien avocat général à la Cour d'assises de Paris, président de l'Institut de la parole.
Il ne mâche pas ses mots lorsqu'il critique vertement l'actuelle garde des Sceaux et la conception que le gouvernement se fait de la justice pénale.
Il annonce la couleur : en 2012 il a voté François Hollande, en pensant que la diversité des soutiens du candidat devait, après l'élection, donner une politique judiciaire équilibrée. Il avoue aujourd'hui sa désillusion et sa naïveté, "l'absurdité de sa décision".
La garde des Sceaux nommée en 2012, "extrêmement intelligente", "plus fine que ceux qui la soutiennent","a déçu à droite,à gauche, les magistrats, les avocats".
Elle a une "grande capacité d'assimilation" de ce que son "cabinet, pas fameux" lui présente de l'outil juridique. Elle bénéficie d'une "aura médiatique extravagante" ("la femme de l'année" pour le magazine "Elle").
En admettant qu'il est" très difficile de dire du mal de quelqu'un qui n'a rien fait", Philippe Bilger pointe"la parole verbale dont elle use, dont elle abuse,et qui la caractérise".
Elle a fait preuve de "courtoisie" envers les magistrats, mais Bilger dénonce "son arrogance",le soutien incompréhensible de la part de François Hollande "tenu par des contraintes politiques".
Bilger estime que la délinquance qui n'est pas idiote, a bien compris "le changement de philosophie, de conception sociale" du gouvernement et "elle s'est engouffrée dedans".
Christiane Taubira a déploré les conditions pénitentiaires, a considéré que "la prison est inutile" et a fait preuve d'un" humanisme hémiplégique".
Le lien a été brisé entre les citoyens et les magistrats.
Christiane Taubira n'aime pas le débat même si elle défend la "démocratie totale". Elle" fuit le débat". Elle n'a pas invité l' "Institut pour la justice" (qui prend en compte les victimes), au grand débat sur le "Consensus". Elle a mis son veto sur la présence d'un membre de cette organisation lors de l'émission de Frédéric Taddéi."Elle n'accepte de débattre qu'avec des gens qui pensent"(dit-elle).
Elle a certes laisser en place 2 magistrats du Parquet de Paris, car plus dévoués après leur maintien,mais elle a une Chancellerie pour elle essentielle, "noyautée".
Il faut donc pour changer les choses, aux dires de l'ancien avocat général, faire un "inventaire de la réalité", pour pointer les dysfonctionnements de la justice (il n'est pas normal que les cours d'appel rendent des arrêts au bout de 4 ou 5 ans).
Il faut donner les moyens nécessaires à la justice, même si l'explication des problèmes par la crise sert trop souvent d'échappatoire à certains magistrats.
Il faut exercer un vrai "contrôle professionnel des magistrats". Avec "un inventaire" à la prise de fonction dans un poste et à la fin de l'action du magistrat. Du plus petit des magistrats au plus grand. Ce qui sera difficile à appliquer car pour la Haute Magistrature "rendre des comptes, il n'y a rien de pire".
Il faut une "reponsabilité des magistrats" avec "mise en cause des pratiques judiciaires aberrantes".
Et les syndicats sont trop souvent sur des bases corporatistes.
Pour le "réactionnaire" qu'il dit être, qui "aime contrecarrer la pensée dominante", "la prison n'est pas forcément l'école du crime". Il n'y a pas prison par hasard, mais à la suite d' "infractions graves, d'immoralité, de transgression". "Il ne faut pas laisser l'être humain hors de sa responsabilité".
Pour lui le modèle français n'est pas le plus répressif, et il n'y a "aucune indignité morale à construire des prisons". Il ne faut pas qu'il y ait " des magistrats honteux de réprimer".
La justice n'a pas besoin d'un "grand soir", mais de "petits matins".
Il y a pléthore de lois," un amas, un entrelac de réglementations". "La loi est un moyen trop commode pour montrer qu'on agit". "Un ministre s'estime "déshonoré" s'il ne produit pas un texte de loi (même voté à la va-vite) à son nom. Et il y a une "course absurde entre la loi et la délinquance" qui évolue chaque jour. "Un pouvoir impuissant aime à voter des lois".
En cette période de remaniement ministériel annoncé, Philippe Bilger estime qu'il y a une opposition interne au sein de la gauche concernant la justice, qui la paralyse et qui paralyse François Hollande.
André Vallini que certains pensent voir arriver au ministère de la Justice, lui semble lucide, et méritant le respect, lui-même étant respectueux, pour un discours équilibré.
Quant à l'arrivée de Philippe Bilger au gouvernement, la réponse est claire : c'est non. Même s'il décline un plan pour de véritables Etats Généraux avec "une pluralité politique, judiciaire, intellectuelle", pour créer "une structure pour l'indépendance du Parquet", "structure vivifiée par des personnalités dignes de ce nom"
On lira son blog fait de "coulées de vie, de subjectivité."Je n'ai jamais attaqué des faibles". "Ce sont les conformismes qui m'exaspèrent". Avec "la volupté de penser contre soi".
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