Et le gagnant est…. L’abstention

Pas de quoi pavoiser au vu des résultats de la participation du second tour des législatives. Avec 57,36 % d’abstention on atteint des sommets, encore faudrait-il ajouter les bulletins blancs (2.96 %) et les nuls (1.25%) pour avoir un état des lieux précis des suffrages qui se sont portés sur les candidats, soit seulement 38.43 % des inscrits : une déroute démocratique !
Le plus surprenant, c’est que les commentateurs qui commentent et les partis, vainqueurs comme vaincus ne s’attardent que très peu sur ces résultats pour ne retenir en définitive que la victoire écrasante des uns ou la déculottée mémorable des autres.
Ah, ces abstentionnistes irresponsables !
On ne pourra pas dire que l’on n’avait pas été prévenus : tous les scrutins nationaux ou locaux depuis une vingtaine d’années ont vu peu ou prou croitre le nombre des abstentions. Pour les législatives, le phénomène a commencé à être marquant en 2002 (souvenez-vous, après le second tour de la présidentielles Chirac/Le Pen).
Déjà, à l’époque, on minimisait le phénomène en disant que c’était la présidentielle qui comptait et que les électeurs donnaient toujours une majorité au Président élu, ce qui était démobilisateur. Pour la séquence de 2017, nous avons eu droit aux mêmes commentaires, sauf que la victoire de Macron à la Présidentielle a été beaucoup moins nette que pour Chirac, bien qu’on nous a refait le coup du danger du Front National qui était aux portes de l’Assemblée Nationale.
Parmi les autres commentaires indigents, nous avons également eu le droit, comme d’habitude à « ces irresponsables d’abstentionnistes » que d’aucuns se hasardaient à comparer à ceux qui allait se réfugier aux Etats Unis devant l’avancée des Allemands en 1940 (tout dans la nuance).
Bien entendu, période de chaleur oblige, nous avons eu également droit également à cette explication facile pour expliquer la désertion des bureaux de vote, sans compter la « déferlante Macron » annoncée qui a été démobilisatrice sur l’électorat.
Enfin, explication plus plausible, la lassitude après dix mois de campagne électorale et l’écœurement devant les affaires et scandales de toutes sortes.
Et si tout bonnement les français avaient exprimé un rejet de la classe politique qui compose les partis dits « de gouvernement ?
Un grand merci pour l’ensemble de leur œuvre
De Chirac, l’immobile du second mandat, en passant par Sarkozy, l’agité, pour arriver à Hollande, spécialiste du reniement, rien ne nous aura été épargné ces quinze dernières années.
La maison brûlait, semble-t-il, sous Chirac, qui s’était soudainement piqué d’écologie en oubliant la fracture sociale et qui a fini devant les juges après son second mandat pour des casseroles qui n’étaient plus couvertes par l’immunité présidentielle.
Pour Sarkozy, on nous explique qu’il a dû faire face à « la crise » et qu’il n’a pas pu faire tout ce qu’il avait prévu. La séquence judiciaire est désormais ouverte pour lui, comme son prédécesseur.
Hollande, on ne pourra pas lui enlever cela, n’est pas, à priori, concerné par des affaires, mais figurera comme le Président qui aura fait exactement le contraire de ce qu’il avait promis. Souvenez-vous « mon ennemi, c’est la finance », « je renégocierai les traités européens » : on en rit (jaune) encore.
Le fil conducteur pour ces trois derniers Présidents de la République, c’est d’avoir divergé vers des sujets sur lesquels on ne les attendait pas (l’écologie pour Chirac, les débats fétides sur la nationalité pour Sarkozy, et la déchéance de nationalité et les largesses du pacte de responsabilité pour Hollande) à défaut de tenir leurs promesses en faisant ce pour quoi ils avaient été élus.
Oublier tous les Ministres et parlementaires pris la main de le sac des affaires serait renvoyer toute la responsabilité sur les exécutifs, ce qui serait profondément injuste.
Cette œuvre gigantesque qui aboutit à des taux records d’abstention n’aurait pas été possible sans les Balkany, les Guéant, Thévenoud ou bien encore les Cahuzac et Le Roux (liste non exhaustive) avec une mention spéciale pour Fillon qui aura été « l’animateur » de cette campagne et le provocateur du suicide collectif de son parti programmé pour gagner tout en 2017.
Qu’on ne s’y trompe pas, il serait injuste de ne parler que des affaires des socialistes, des républicains ou du Front National. Chez les nouveaux venus « en marche », un doux parfum de scandales caresse nos narines. Normal, puisqu’ils sont l’émanation de cette ancienne politique venus relancer leur carrière chez Macron. Difficile de faire du neuf avec du vieux.
Le message de l’élection
Avec seulement 16.35 % des inscrits « La République en Marche » se retrouve avec une majorité écrasante à l’Assemblée Nationale. Cela les oblige, car il est impossible de prévoir ce qui se passera lorsque Macron entrera dans « le dur » (droit du travail, CSG pour les retraités, taxe d’habitation pour certains et pas pour d’autres,…).
En fait, la politique de Macron consiste, comme celle de ses prédécesseurs à travailler dans un périmètre constant (salariés, retraités) en prenant aux uns pour donner aux autres. Dans ce périmètre ne sont pas inclus les activités bancaires et l’économie qui en fait dirigent le pays. Rien de nouveau sous le soleil, donc, sinon une aggravation de la situation des personnes concernées et des cajoleries et des friandises pour les autres, tout cela au nom de la fameuse et inefficace de la « théorie du ruissellement » qui consiste à dire que ceux qui s’enrichissent en font profiter d’une manière ou d’une autre le petit peuple. Juste une aumône, rien de plus.
En ce sens la politique de Macron continue, en les aggravant, les politiques menées sous les quinquennats précédents.
C’est pourquoi, il convient d’être très prudent sur le sens à donner à l’abstention massive : il ne s’agit plus de quelques j’menfoutistes comme on avait coutume de la dire mais vraisemblablement d’une abstention réfléchie qu’on aurait tort de prendre à la légère.
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