Nicolas Sarkozy et le syndrome Lang
Ce qui a fait basculer les personnalités socialistes du côté du pouvoir sarkozyste, c’est l’ennui. Ils n’osaient pas claquer la porte de leur parti ? Le nouveau président est arrivé pour leur tenir la porte.
On peut toujours disserter sur l’existence d’une stratégie de Nicolas Sarkozy pour destructurer totalement le Parti socialiste à coups d’ouvertures, mais cela ne doit pas cacher les vraies raisons pour lesquels le parti de la rue de Solférino en est arrivé là. C’est vrai, pour le nouveau président de la République, l’ouverture semble se limiter aux Socialistes et, dans une moindre mesure, aux ralliés centristes, mais c’est une autre affaire. A croire qu’il n’existe aucune compétence, dans ce pays, qui porte l’étiquette communiste ou verte, par exemple. Et personne ne peut croire sérieusement que Sarkozy ne se réjouit pas, en son for intérieur, de ce débauchage, comme François Mitterrand en son temps se réjouit de faire chuter de sa citadelle le Parti communiste. Mais c’est sûrement plus dans l’entourage de l’Elysée que l’on se frotte les mains et que l’on attend le jour où, déçus de cette aventure ou pris au piège, les participants socialistes à l’actuel pouvoir devront démissionner. En attendant, la liste de ces personnalités donne une explication très claire des raisons de ces ralliements. Elle se résume en un mot : l’ennui. Pour qui connait Jack Lang, il est à lui seul emblématique de ce séisme. Depuis des années, l’ancien ministre de la Culture n’a que plaintes à la bouche vis-à-vis de son parti. Maltraité, selon lui, par Lionel Jospin, qui ne l’avait pas prévu dans son gouvernement lors de son arrivé en 1997 et céda à ses complaintes, il estimait être maltraité, quasiment chaque semaine depuis deux ans, auprès de François Hollande et consorts. Jack Lang parle beaucoup, agit beaucoup, mais souffre beaucoup. Il ne remporte de succès que lorsqu’on le place là où il est, ne sait pas conquérir, et manie avec un brio extraordinaire l’art de paralyser ses ennemis et de se faire protéger par ses amis. Il ne sait pas travailler. Il n’a pas mis la main au projet socialiste mais en a été l’un des porte-paroles, se plaignant de la mauvaise qualité de ce projet. Il a collé à François Hollande tout en se plaignant de cette "garce" de Ségolène. Il a évité la sortie d’un livre très compromettant pour lui à ce sujet d’ailleurs. Il a mené sa campagne devant les militants pour être investi candidat socialiste aux présidentielles, en draguant prioritairement les milieux immigrés, pour mieux s’en détourner au moment de son retrait négocié, laissant dans la marre ceux qu’il avait convaincu. Surtout, Jack est un champion de l’absentéisme à l’Assemblé nationale. Quelle aubaine pour lui que l’élection de Sarkozy, dont il avait plus à attendre que celle de Ségolène. Car Lang désespère depuis longtemps d’un parti qui représente toute sa névrose : ne pas être récompensé pour ses mérites. Il a d’ailleurs été le premier à se précipiter chez le nouveau président de la République pour lui indiquer que s’il pouvait aider... Et le voilà récompensé : par la sortie à son encontre du président du Groupe socialiste à l’Assemblée nationale, qui lui offre à lui, le député fantôme, l’occasion de justifier une fois pour toute de son absence dans l’hémicycle ; par le comportement de ses amis socialistes, qui le justifient aux yeux de l’opinion dans son éloignement du Parti ; par la main tendue de Sarkozy, qui comme chacun le sait, ne recrute que les "éminences" du pays. Fantastique. Le syndrome Lang, c’est celui des Socialistes qui s’ennuyaient à mourir dans leur parti et auxquels le président a su offrir un motif "honorable" selon eux de s’éloigner du navire, en attendant que les jeunes, à l’image de Manuel Valls, prennent les commandes et les rappellent. Mais dans quelques temps, que restera-t-il de ces calculs ? Lang a du mal à sortir de scène, il est sans doute le plus pathétique des hommes politiques du moment, auxquels les Français, pourtant, trouvent encore une gueule assez sympathique. Curieuses moeurs, curieuse époque, mais tant va la cruche à l’eau...
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