Vaccination et Passe-sanitaire : le tour de passe-passe électoral de Macron
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Le samedi 18 septembre était le neuvième rassemblement des « antipass ». Bien sûr la presse « de service » s’est fait l’écho des chiffres du ministère de l’Intérieur : la participation est en baisse. Personne n’attend un discours de vérité de la part de ce ministère d’autant moins que la reconnaissance de la vérité n’est pas une des valeurs cardinales du ministre de l’Intérieur actuel. Il serait du devoir de la presse télévisée, si elle était autre, d’enquêter sur le terrain et rendre compte honnêtement de la situation. Comment, face à la jouissance des journalistes des chaînes de télévision, comprendre les propos de la presse régionale ? Par exemple Centre Presse à Poitiers écrivait le 5 septembre dernier : « Après un certain fléchissement à la mi-août, la mobilisation contre le Passe sanitaire, huitième du nom, semble repartir à la hausse. »
Au-delà de la sempiternelle querelle des chiffres, ce qui est fascinant dans les commentaires de la presse « de service » c’est la quasi-absence d’analyse de ce qui, au vu de sa répétition (9 semaines, aujourd’hui nous en sommes à 11), apparaît comme étant un phénomène social. En attendant de reconnaître ces manifestations comme « phénomène social » prenons-les simplement en tant qu’« évènement social », c’est épistémologiquement plus prudent. Mais, quelle que soit la dénomination que l’on donne à ces manifestations, elles doivent être analysées au regard de leur répétition, du nombre non négligeable de participants ainsi que de celui des soutiens (environ 35 % le 15 juillet, 46 % le 22 août), et le contenu des revendications dans leur rapport aux politiques publiques. Le « mouvement antipass » n’est pas une galéjade de quelques Gaulois réfractaires. Le gouvernement et plus particulièrement l’actuel président de la République auraient intérêt à analyser cet évènement car il s’agit bien de savoir si, parmi les faits (slogans, violence…) qui se passent au sein de ces manifestations, certains d’entre eux dessinent la nature d’un groupe en tant que groupe, et non pas seulement la nature des individus, de chacun des individus, qui participent à ces manifestations. Existe-t-il des attributs généraux qui seraient constitutifs, ou pas, d’un groupe revendicatif particulier qui pourrait constituer un groupe politique d’opposition au président de la République en cette année électorale ?
Pour comprendre un évènement social il ne suffit ni de quelques secondes d’explication par un chercheur et moins encore du simple (voire simpliste) récit des manifestations par un journaliste stagiaire. Karl Popper écrivait qu’un « événement social est compris lorsqu’il est analysé dans les termes des forces qui l’ont produit ».
Les forces qui ont engendré le mouvement antipass sont nombreuses, toutefois elles peuvent se regrouper sous le terme de « réaction au mensonge ».
Le premier mensonge consistait à dire, comme l’on fait certains médecins médiatiques, que le Passe sanitaire serait un complément à la vaccination. Or le Passe sanitaire ne contient en lui-même aucune valeur prophylactique ni thérapeutique. Un complément est un élément qui apporte quelque chose de plus par rapport au traitement initial, par exemple dans le cas de la douleur et des traitements du cancer, en complément des médicaments contre la douleur d’autres méthodes sont utilisées pour soulager la douleur : soutien psychologique, relaxation, sophrologie, hypnose, neurostimulation, kinésithérapie, massages, etc. Ce n’est pas le cas du Passe sanitaire qui n’apporte aucun bienfait en plus de ceux de la vaccination. Le discours de ces médecins médiatiques, sur les plateaux de télévision est dommageable pour l’image de la médecine, alors que le discours médical a déjà perdu énormément de crédibilité depuis le début de cette crise sanitaire.
Le Passe sanitaire ne sert à rien sur le plan prophylactique et il n’est d’aucune utilité sur le plan thérapeutique. Mais, son utilité réside dans ce qu’il est, comme l’a voulu le président de la République, un moyen de gestion des individus pour les obliger à se faire. Le but du président de la République est bien, soutenu par le monde médical, d’obtenir une couverture vaccinale quasi-totale de la population. La stratégie choisie par le président de la République, pour ne pas paraître se désavouer après ses déclarations de décembre 2020, a été de mettre en place une prise en charge individualisée de la vaccination : chacun se débrouille pour prendre rendez-vous avec un centre de vaccination. Chacun se débrouille donc chacun choisit, par conséquent suivant ses opinions personnelles chacun se fait vacciner ou pas. L’affaire fut compliquée par une histoire de calendrier vaccinal : tous vaccinés mais par ordre de priorité, par la difficulté pour certains d’accéder au système de prise de rendez-vous et pour se déplacer. D’autre part il faudra, comme pour toute politique publique, et au-delà des procès éventuels comme celui de Madame Buzyn, poser la question de l’efficacité du Passe sanitaire comme l’a fait le journal allemand Die Zeit (04/09/2021) sous la plume de Annika Joeres « Le Passe sanitaire à la française, un succès, vraiment ? » : « Le gouvernement n’a pas tenu sa promesse d’attirer davantage de monde dans les lieux publics rendus « sûrs » [par le Passe sanitaire]. [Début septembre], Matignon s’est vu contraint de prolonger les aides publiques à destination des hôtels, des restaurants et des théâtres, comme lors des différents confinements. Le dispositif pose par ailleurs problème en matière de lutte contre la pandémie : il encourage surtout les jeunes et les plus riches à se faire vacciner, car ce sont eux qui veulent continuer à fréquenter les bars et les cinémas, et à prendre le train sans encombre. Le Passe sanitaire n’a en revanche pas dopé la vaccination des plus âgés, qui auraient pourtant particulièrement besoin d’être immunisés. D’après les statistiques de la Commission européenne, la France se situe au-dessous de la moyenne européenne en ce qui concerne la vaccination des personnes âgées. Dans les quartiers défavorisés, où les gens tombent plus souvent malades à cause de leurs conditions de vie précaires, le taux de vaccination est également plus faible qu’ailleurs. Et là non plus, l’introduction du Passe sanitaire n’a rien changé. »
On mesurait bien début juillet 2021 que la stratégie vaccinale n’avait pas été un franc succès, même si au bout elle atteindrait l’objectif d’une vaccination quasi-totale de la population. Trop de gens ont été laissés de côté ou malmené, et comme l’écrit Contrepoints : « De même, on assiste depuis plusieurs mois à un blâme constant des personnes refusant de se faire vacciner ». Ce ne sont là que quelques-uns des éléments qui ont un impact négatif considérable dans le regard porté par les citoyens sur la stratégie vaccinale. Dans un tel contexte seule une mesure coercitive pouvait permettre au président de la République d’obliger tout le monde à concourir à sa stratégie et à son objectif : le Passe sanitaire, ce qui en outre lui permet de se positionner en « sauveur de la nation ». Toutefois, comme le rappelle le journal Die Zeit : « Mais en y regardant de plus près, le Passe suscite de nombreux conflits et privations. »
On voit donc comment s’est mis en place un des plus beaux mensonges politiques. Le président de la République avait annoncé en décembre 2020 qu’il ne rendrait pas la vaccination obligatoire. À l’époque il pouvait difficilement annoncer l’obligation tellement nous étions dans l’incertitude de disposer d’un nombre suffisant de doses ; il a fallu attendre la fin du printemps 2021 pour que le pays ait suffisamment de doses de vaccins pour envisager de vacciner toute la population avant fin août.
Là, ouvrons une parenthèse pour mettre à jour un mensonge médical non négligeable : on ne met pas la vie d’un individu face à des statistiques de population. Certes les effets secondaires de la vaccination sont infimes sur une population totale, mais les individus ne se vivent pas comme « une population totale », ils ne se vivent que dans leur individualité ce qui peut être, dans le cas qui nous occupe, un paradoxe. Chacun pense que la maladie, l’accident c’est pour les autres, mais là où on va introduire un corps étranger dans sa chair l’individu vit la probabilité d’accident pouvant lui arriver comme très haute. Alors, il ne faut pas dire, même si statistiquement c’est vrai, que les risques sont infimes, les gens ne vivent pas de chiffres mais de représentations, d’images, d’imagination et aussi de croyances. Comment peut-on penser quand on est médecin que l’évocation du syndrome de Guillain-Barré, par exemple, qui est une affection dans laquelle le système immunitaire du patient attaque les nerfs périphériques n’est pas d’ordre sinon à faire peur du moins à inquiéter et à rendre réticent à la vaccination ? Au moins eut-il fallu dire qu’il pouvait y avoir des effets secondaires, quels ils sont, quelles sont leurs manifestations et leur incidence. Comment ceux (politiques et médecins) qui ont tellement menti peuvent-ils appeler les quidams à être responsables d’autrui ; cet appel est vécu comme si on demandait à quelqu’un qui ne sait pas nager de se jeter dans une rivière pour sauver une personne qui se noie !
Le mensonge politique primitif dans la situation que nous étudions a consisté à rendre, sans crier gare, dans le discours du président Macron le 12 juillet 2021, la vaccination obligatoire pour certaines professions dont les personnels soignants par un chemin détourné, en trompant les citoyens, et en utilisant une « arme de combat » : le Passe sanitaire. Si le Passe sanitaire peut être obtenu dans des conditions granguignolesques et en outre, le 15 octobre, les tests deviendront payants avec ce que cela représente pour un budget familial s’il faut se faire tester 2 ou 3 fois par semaine sans compter la gestion du temps. À cela s’ajoutent la lâcheté et l’orgueil qui consiste à ne pas vouloir reconnaître que l’on s’est trompé de stratégie ou plus simplement que la stratégie adoptée correspondait à un moment de la crise et que, celle-ci évoluant, on devait de changer de stratégie. Le président de la République se « grandirait » à déclarer qu’il rend la vaccination obligatoire pour tous, ce qui éviterait de stigmatiser certaines professions notamment celles à qui on a tant demandé à une période où l’État était incapable d’assurer la vaccination ; cela apaiserait le pays dans la mesure où la question de savoir si on est favorable ou pas à la vaccination n’aurait, en pratique, plus lieu d’être. La seule question qui demeurera serait celle de savoir, individuellement, comment chacun se positionne en tant qu’individu et citoyen par rapport à la loi, avec des conséquences claires en cas d’infraction. Cependant il faudra conserver le Passe sanitaire pour montrer qu’on est vacciné comme on montre son carnet de vaccination quand on prend l’avion pour certaines destinations, comme on montre le carnet de vaccination de ses enfants lors de l’inscription à l’école, comme on montre son permis de conduire ou de chasser à la réquisition d’un agent des forces de l’ordre. Le Passe sanitaire prendrait alors une autre image symbolique.
Le maintien d’une stratégie peu assurée avec une cohorte de volte de face et d’éléments de coercitions, où de surcroît on utilise une communication infantilisante, constituant un système contreproductif qui est largement préjudiciable à la crédibilité de la parole publique et à la parole médicale. In fine, l’objectif de vaccination massive de la population française sera atteint puisque les gens se soumettront, mais cette stratégie « crée inévitablement un effet de Réactance » comme il est écrit dans Le Vent se Lève.
Nous sommes là à la charnière de deux axes d’explications de l’évènement social constitué par les manifestations antipass dont nous avons vu le premier : les mensonges, que ce soit par omissions pour les mensonges médicaux, ou par stratégie ou lâcheté pour ce qui concerne la stratégie du président de la République. Le deuxième axe est construit autour des gens, des individus et des questions qu’ils se posent ; il se constitue autour de questions pragmatiques dont certaines recoupent amplement celles du premier axe c’est-à-dire de la constitution et de la vie du mensonge politique et médical.
La première question se pose par rapport au principe même de la vaccination et plus particulièrement en ce qui concerne les effets secondaires de la vaccination contre le virus de la COVID-19. J’ai évoqué plus haut combien le manque de transparence et d’explication concernant les effets secondaires a pu entraîner de réticence voire d’hostilité vis-à-vis de cette vaccination. Il aurait aussi fallu être très claire, et transparent, dans les explications relatives à l’ARN-m ; le public ne peut pas se contenter d’une « sentence » déclarant que cet ARN-m ne passe pas la membrane nucléaire et n’a pas d’incidence génétique.
La deuxième question est celle de la cohérence de la stratégie des décideurs. Les voltes de face ont été nombreuses : les masques étaient inutiles en mars, puis obligatoire en avril ; il ne fallait surtout pas de « vaccinodromes » en décembre 2020 puis en janvier il fallait en ouvrir d’urgence et en grand nombre ; les médecins de villes ne pouvaient pas disposer du vaccin à ARN-m en raison des conditions de conservation puis subitement en septembre 2021 ces conditions disparaissent comme par enchantement et les médecins pourront en disposer ; le vaccin Astra Zeneca était un bon vaccin puis subitement il provoquerait tellement d’effets secondaires qu’on l’écarte du process de vaccination en même temps que les États ne renouvellent pas les contrats d’achat imposant aux gens qui ont été vaccinés avec ce vaccin d’avoir leur troisième dose avec un vaccin à ARN-m, laissant penser que derrière ce choix « commercial » il y a des affaires financières peu claires ; voilà de quoi rassurer ceux qui sont inquiets.
Chacun comprend bien que « la science » ignorait tout (ou presque) de ce virus et de la façon dont évoluerait cette pandémie, d’ailleurs les médecins médiatiques n’annonçaient-ils pas en février 2020 que ce virus n’était pas plus dangereux que celui de la grippe saisonnière ; je ne m’étendrais pas sur les errements des médecins médiatiques. Chacun comprend donc que dans un tel contexte il était extrêmement difficile pour les gouvernants de prendre des décisions. Mais, dans la litanie non exhaustive des errements que je viens d’évoquer, trop souvent le public s’est aperçu des écarts entre les recommandations des scientifiques et les décisions des gouvernants qui apparaissaient plus mus par des orientations économiques et par le souci de leur image politique, par la volonté de protéger un système hospitalier insuffisant et à bout de souffle dont ils sont responsables de l’état, que soucieux de la santé des citoyens, d’ailleurs ils ne parlent jamais des « effets collatéraux » : opérations reportées dont le report a une létalité importante, les examens repoussés avec des morts faute de soins pratiqués à temps... D’ailleurs, chacun a remarqué dès septembre 2020 la façon dont Emmanuel Macron s’est érigé en épidémiologiste chef et a écarté tout avis scientifique, y compris ceux du Conseil scientifique qu’il avait lui-même créé dès le début de la pandémie. À ces vagabondages stratégiques, entre recherche du maintien de son image politique, satisfactions de lobbies, maintien de l’activité économique (reste à voir laquelle), s’est ajoutée une stratégie de communication déplorable.
La troisième question, celle de la communication, est triple. Il s’agit de celle du président de la République, de celle du gouvernement et enfin de celle des médecins médiatiques qui inclue le fonctionnement des médias télévisuels à grand spectacle. Je ne traiterai pas de cette dernière qui nécessite une étude pour elle seule ; là je ne retiendrai qu’un slogan : les médias télévisuels constituent désormais un incroyable « tout à l’ego » !
La communication institutionnelle est caractérisée par un langage infantilisant et par l’irrespect des gens à qui elle s’adresse. C’est, par exemple, les propos de la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye qui déclarait le 20 mars 2020, au début de la crise sanitaire de Covid-19 : « Vous savez quoi ? Moi, je ne sais pas utiliser un masque », elle souhaitait défendre la position de l’exécutif face à la pénurie des masques dans l’hexagone. Cet épisode d’une rare stupidité s’ajoutait à une communication délirante dans les semaines précédentes que retrace bien l’émission Quotidien de Yann Barthès[1]. C’est elle aussi qui déclarait le 17 mars : « Les Français ne pourront pas acheter de masque dans les pharmacies parce que ce n’est pas nécessaire quand on n’est pas malade ». Pour tenter de protéger le gouvernement et surtout le président de la République à propos duquel elle avait déclaré qu’elle était prête à mentir pour le protéger, elle expliquait à la commission d’enquête sénatoriale : « Nous avons dit ce que nous savions. »
Nous ne pouvons pas suivre Sibeth Ndiaye lorsqu’elle déclare « Nous avons dit ce que nous savions. », parce que les déclarations du gouvernement (et des médecins) allaient bien au-delà de ce qui était su. Ils ont spéculé sur l’ignorance notamment sur l’état de méconnaissance de la situation par le public ; cette communication ne fut qu’un monument d’approximations qui rapidement ont pris rang de mensonges, de railleries, de moqueries, donc d’irrespect du public. En science quand on ne sait pas on le dit et éventuellement on avance prudemment des hypothèses en annonçant clairement qu’il ne s’agit que d’hypothèses. Le plus grave c’est que tout scientifique sait la gravité potentielle de chaque virus. Denis Diderot définissait la connerie comme étant le fait de porter un jugement sur des choses qu’on ne connaît pas !
Cet irrespect du public a été augmenté, notamment en termes d’impact négatif, par une dimension infantilisante des discours. Comment situer les guignoleries de Macron sur une chaîne Youtube autrement que par la volonté d’accaparer l’électorat des moins de 30 ans (je vois large) et se donner une image « jeune » ? En même temps ramener la vaccination à de la gaudriole ne donne pas à ce sujet un statut d’obligation sociale, ni un caractère sérieux et responsable. Dans Die Zeit Annika Joeres souligne ce mépris affiché par le gouvernement : « Mais pour l’heure, le gouvernement fait passer ceux qui hésitent à se faire vacciner pour des égoïstes irresponsables, et Macron ignore les manifestations anti-Pass, malgré le nombre non négligeable de participants. » N’est-ce pas aussi méprisant pour les soignants et les sapeurs-pompiers que le président de la République annonce sans crier gare le 12 juillet dans une allocution télévisée qu’ils vont être soumis à une obligation de vaccination ? S’ils ne sont pas vacciner ils perdront leur salaire dans un premier temps puis leur emploi ; on les punit comme on le ferait d’un gamin qui a trempé ses doigts dans un pot de confiture, pire on les stigmatise aux yeux de l’opinion publique : pas vaccinés ils deviennent les méchants alors qu’on n’avait pas hésité bien qu’ils ne pouvaient pas se faire vacciner (ils n’appartenaient pas alors à la bonne cohorte des gens autorisés à se faire vacciner) à les rappeler alors qu’ils étaient en congés, à leur demander de travailler souvent plus de 50 heures par semaine, souvent sans matériel de protection.
On assiste depuis plusieurs mois à un blâme constant des personnes refusant de se faire vacciner, et le gouvernement refuse, obstinément, de prendre en compte qu’en de telles circonstances un mécanisme naturel et psychologique se met en place dans lequel tel ou tel individu tente de protéger sa liberté d’action lorsqu’il pense cette dernière menacée. C’est dans ce cadre qu’il faut lire la réaction contre le Passe sanitaire et contre l’obligation vaccinale ; comme l’écrit Le Vent se Lève « n’aurait-il pas été bénéfique d’interroger les causes profondes de cette peur de la vaccination pour mieux les remettre en cause ? [...] Là encore, la stratégie sanitaire d’individualisation et de « selfcare » des citoyens montre ses faiblesses. » Macron préfère jouer du bâton et de la punition. Tout cela est sans compter sur le « la mise en scène constante par les médias de l’indignité des mouvements sociaux » (Fondation Copernic, 12/09/2021).
Tout cela ne se converge-t-il pas vers une question centrale dans le traitement de cette crise par le pouvoir macronien qui est celle de la prise en compte de la parole des citoyens dans une gestion respectueuse des individus, transparente et qui sortirait du centralisme égotique mis en place par Emmanuel Macron ? Nous pourrions penser qu’un gouvernement, faute d’un savoir assuré sur les termes de la crise saurait poser des hypothèses, les expliquer et les utiliser à bon escient ; en somme qu’il saurait anticiper. Mais, comme l’écrit Henri-Pierre Jeudy[2] « l’urgence nie le conditionnel », ce qu’Emmanuel Macron a confirmé en enchaînant, sans réfléchir, refusant contrairement à ses annonces en mars 2020 d’être éclairé par la science, une série de mesures contraignantes qui offraient, qui plus est, tellement d’exceptions dans leurs mises en œuvre que le quidam perdait le fil de leur utilité et qu’il finit par en rire. Comment pourrait-il en être autrement compte tenu du narcissisme quasi pathologique qui l’anime ; un processus accru par son entrée en campagne électorale renforce son habitude de travailler en temps réel dans une communication qui confère au marketing basique. Comme l’écrit Nicolas Hague dans Contrepoints : « Pour résumer, la décision du président de généraliser le Passe sanitaire est un coup politique qui a toutes les chances de se révéler gagnant. Il devrait lui permettre de sortir grandi de la crise sanitaire et en position de force pour la prochaine présidentielle. » coup politique peut-être, coup médiatique et marketing c’est certain, qui réussira c’est moins sûr. Le roi pourrait bien être nu à la veille des élections de 2022 car comme l’écrit Annika Joeres (Die Ziet) : « Macron ignore les manifestations anti-pass, malgré le nombre non négligeable de participants. En 2019, le président libéral avait parcouru la France entière pour échanger avec les « gilets jaunes ». Si cette fois-ci le gouvernement n’entame pas le dialogue avec les contestataires, c’est peut-être aussi parce qu’Emmanuel Macron n’a pas de plan B : à huit mois de l’élection présidentielle, le Passe sanitaire est sa seule réponse au virus. »
Macron a fait de la lutte contre la pandémie de COVID son arme principale de conquête d’un deuxième mandat. Il espère se débarrasser des antipass comme il s’est débarrassé des Gilets Jaunes : par le mépris, en créant des divisions dans le pays comme il l’a fait ce 19 septembre en incitant les manifestations de chasseurs à qui ils promets au-delà de ce qu’ils demandent. Mais, les participants au mouvement antipass sont multiples comme l’évoque la fondation Copernic dans sa lettre du 12 septembre en évoquant, au-delà du seul Macron, le système infantilisant de la V° République finalement assez peu démocratique qui ne laisse qu’une place très formelle à la parole des citoyens. « Qu’un homme seul, dans un processus de délibération opaque, en particulier dans le cadre du Conseil de défense, puisse décider seul des mesures qui touchent l’ensemble de la population est inacceptable, le débat au Parlement n’ayant abouti qu’à des amendements à la marges. En tant que révélateur d’une crise de la démocratie, les mouvements en cours sont la poursuite indirecte de la revendication des Gilets Jaunes en faveur du RIC ou encore une façon diffue et peu structurée, de réclamer une autre république, plus démocratique. » Mais, ce qui a fonctionné une fois ne fonctionne pas forcément une deuxième fois, d’autant moins si les contextes sont différents. En plus comme le souligne Annika Joeres : « Macron ignore les manifestations anti-pass, malgré le nombre non négligeable de participants. En 2019, le président libéral avait parcouru la France entière pour échanger avec les “gilets jaunes”. Si cette fois-ci le gouvernement n’entame pas le dialogue avec les contestataires, c’est peut-être aussi parce qu’Emmanuel Macron n’a pas de plan B : à huit mois de l’élection présidentielle, le Passe sanitaire est sa seule réponse au virus. » Malheureusement, bien que la pandémie ne soit pas à elle seule la crise de la société, comme le souligne Henri-Pierre Jeudy « L’état d’exception que créent la crise des sociétés et les incertitudes de devenir de l’humanité instaure pourtant une forme de totalitarisme. Les roitelets intellectuels pratiquent une censure efficace. Le principe en est simple aucun point de vue n’est frappé d’interdit, il suffit de pouvoir accéder aux médias pour pouvoir l’exposer ! Comme les places sont réservées, le silence obligé devient l’effet même de la censure. » Macron est, en pleine jouissance, dans son jus narcissique et autoritaire, les médecins médiatiques et les chroniqueurs occupent l’espace médiatiques empêchant toute controverse.
La manœuvre électorale pourrait bien jouer en boomerang car comme l’écrit Arnaud Bénedetti (rédacteur en chef de la Revue Politique et Parlementaire) dans le Figaro, « la macronie n’a rien appris depuis les Gilets Jaunes ».
version longue de cet article sur https://politiqueethumanite.over-blog.com  ;
[1] Retour vers le Covid : quand Sibeth Ndiaye trouvait hilarante l’idée des masques pour enfants - Quotidien | TMC (tf1.fr)
[2] Henri-Pierre Jeudy, Sciences sociales et démocratie, Circé.
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