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Accueil du site > Actualités > Santé > Bien sûr, la Terre est plate et le Soleil tourne autour

Bien sûr, la Terre est plate et le Soleil tourne autour

La médecine scientifique, bien en peine de trouver des solutions médicamenteuses pour aider les fumeurs à cesser leur tabagie, recommande des palliatifs nicotiniques inefficaces. Ma tentative de contribution au Forum citoyen sur le tabagisme a été censurée. Texte intégral ci-après.

J’aimerais dire tout haut ce que nous sommes nombreux à chuchoter tout bas : les palliatifs nicotiniques, c’est une arnaque !!

C’est cher, et leur prix est calculé pour que cela représente un effort du client, effort nécessaire pour que ça marche. Si c’était gratuit, ça marcherait moins bien, et comme déjà ça n’empêche pas la rechute, plus personne n’en prendrait, et les laboratoires l’auraient dans le baba.

Cela ne marche pas : lisez la notice des gommes Pfizer. En tout petit, vous verrez les références d’une étude montrant que cela double les chances d’arrêt à 6 mois ou à 12 mois. Peu importe la durée ici, car pour affirmer cela, on fait des tests avec des cobayes. Un groupe a des gommes sans nicotine (test de référence), l’autre, choisi au hasard, a des gommes avec le produit actif, tout ceci en aveugle. On ne sait pas qui a quoi.

A la fin, on compare les résultats. Bien sûr, différentes études sont menées, alors je vais donner ici des chiffres moyens :
* taux d’arrêt avec gommes à mâcher sans rien (dites placebo) : 5,5 %
* taux d’arrêt avec vraies gommes dosées ad hoc : 11 %

En d’autres termes, on dit que cela double les chances de succès en omettant de préciser qu’il y a 89 % de rechutes ! Moi, je ne prendrais pas un bus avec 90 % de chances de ne pas arriver à la bonne destination. Et vous ?

En plus, la nicotine, ça pique : je voudrais être sûr que les gommes bidons avaient un produit qui pique. On sait bien, avec les enfants, quand ça pique, c’est que ça soigne.

Un autre facteur à prendre en compte : l’effet placebo de l’expérimentation. Quand on participe à une expérience, on est valorisé, et l’on fait en sorte que l’expérience réussisse. Je suspecte ces résultats d’être majorés par rapport à votre situation, tout seul, dans votre coin. Donc 90 % d’échecs est un chiffre optimiste. Quand on sait qu’il y a - mettons - 5% de succès de tentatives spontanées, on réalise que le bonus du "traitement" est vraiment mince comme... une feuille de papier à cigarette. Les gommes et les patchs sont une arnaque totale !

Le 31 mai : j’ai reçu hier une lettre ouverte du Dr KHALATBARI : Lettre ouverte d’un médecin tabacologue aux médecins fumeurs. Journée mondiale sans nicotine ! dit-il. Comprendre sans la nicotine des patchs et autres prétendus substituts. Son site : www.sansnicotine.com. Il s’agit d’un médecin, tabacologue, qui ne croit pas plus que moi à l’utilité de médicaments bidons. Effrayant combien on est doublement arnaqués : par les marchands de cigarettes, et par l’industrie pharmaceutique qui a intérêt à ce que les gens restent dépendants à la nicotine le plus longtemps possible...

Les médecins, ils obéissent aux ordres, ceux de l’OMS, de l’OFT (Office français de prévention du tabagisme) et de tous ceux dont la carrière dépend des subsides des laboratoires. La médecine a perdu la tête. On a retrouvé "Du Prozac dans l’eau potable", titrait cet été David Servan-Schreiber dans Le Monde (fin août, de mémoire). Il faut écouler des produits, c’est à ça que l’on forme nos médecins, car leurs professeurs sont financés par les labos... Il est temps d’arrêter le massacre. Le problème des aides à l’arrêt, c’est non pas un problème médical, mais le problème de la médecine. On confond médecine et santé. Le ministère de la Santé est en réalité le ministère de la Médecine, qui est piloté par l’industrie pharmaceutique, en sous-main.

Donc, la loi médicale, les recommandations officielles des autorités de santé (comprendre du corps médical colleur de patchs), c’est de recourir à des "traitements de substitution nicotinique", comme ils disent doctement.
Traitement ? Non, on a vu que cela traitait (guérissait) pas mieux ,vraiment, que de ne rien mettre.

Substitution ? On utilise ici une analogie avec les opiacés (l’héroïne, etc.). On remplace un produit illicite par un produit licite (fabriqué par un laboratoire) censé avoir moins d’effets nocifs. Mais dans le cas du tabac, on remplace la nicotine par... de la nicotine. C’est le même poison que le pauvre patient s’administre !

Les patchs peuvent avoir une utilité pour les bronchiteux, qui ne doivent absolument plus fumer. Ou pour les endroits (les avions, par ex.) où l’on aura un long séjour à effectuer. Ils ont été inventés par un médecin suédois pour remplacer la chique que des sous-mariniers utilisaient à la place de cigarettes évidemment interdites en plongée. Les mineurs de fond chiquent aussi. Les patchs, c’est mieux que la chique ou le snif, mais cela n’a pas été conçu pour faire cesser de fumer. Des travaux scientifiques l’ont montré : ils ont été censurés. Je cite ici le Pr Molimard, dans son bel ouvrage La fume, Sides, 2003. Molimard sait de quoi il parle en matière d’arrêt du tabac, ce qui n’est pas le cas de tant de tabacologues plus ou moins cooptés qui n’ont pas fumé... Les patchs, c’est utile entre les mains d’un médecin pour des fumeurs malades. Si c’est votre cas, être malade, alors je n’irai pas contre, ce n’est pas de ma compétence. Mais si vous êtes, comme la plupart, un fumeur en bonne santé générale (je ne parle pas des bobos qui sont notre lot à tous), pourquoi consulter un médecin ?

Fumer n’est pas une maladie. Les fumeurs ne sont pas des malades. On ne guérit pas de ce qui n’est pas une maladie.

En plus, vous savez bien, pour l’avoir en général constaté (les trois quarts des fumeurs, la moitié déjà à 15 ans !) que cesser de fumer, ce n’est pas le vrai problème. Le problème est de ne pas reprendre. Comment croire que se coller un patch aux fesses pendant quelques semaines va vous enlever cette envie de fumer qui vous prendra la tête dans six mois ou dans six ans ? Le tabagisme est une addiction, un comportement, pas une maladie. On n’en guérit jamais totalement : c’est inscrit dans notre mémoire.

Alors il existe des intervenants, non médecins en général (eux, ils sont obligés de suivre le dogme, sinon ils risquent la radiation), qui vous apprennent à faire face à cette envie de fumer qui ne manquera pas de vous attraper par le collet un de ces jours : la vie est ainsi faite qu’il y a des hauts et des bas. Haut (joie) ou bas (déprime) peu importe : dans ces cas-là, l’envie de fumer revient.

Alors, croyez-moi : le patch ou la gomme, qui vous a évité d’avoir à faire face à ces envies lancinantes, vous ont empêché d’apprendre à gérer la situation, d’autant que vous êtes perturbés émotionnellement, et que c’est plus problématique.

Mon conseil : cessez de fumer avant d’avoir à consulter un médecin pour ça ! Ils vous disent que c’est difficile, parce qu’ils ne savent pas comment faire : cela devrait durer. Il serait temps que l’on ouvre le champ des solutions aux approches qui ne relèvent pas de la science médicale et ne sauraient être validées par elle. Que font nos autorités de santé et leurs relais comme "Tabac un faux service" ? Elles censurent tout ce qui fâche : on n’est pas sorti de l’auberge.


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18 réactions à cet article    


  • JiPi (---.---.181.237) 5 juin 2006 11:38

    Arrêter de fumer, c’est rompre totalement avec la nicotine. On lui dit adieu et pas à tantôt au prochain patch.

    C’est ce que j’ai retenu de mon expérience personnelle. Je ne fume plus depuis cinq ans et je vais très bien, merci.

    Les produits de substitution créent l’illusion du sevrage en remplaçant la cigarette, mais prolongent l’intoxication sous une autre forme. Les gestes changent mais le problème central, c’est-à-dire la dépendance à la nicotine, reste entier.

    Mais c’est excellent pour le commerce.


    • Jeremie (---.---.246.78) 5 juin 2006 15:40

      En ce qui me concerne, le patch m’a bien aide a realiser ce sevrage qui me tenait tant a coeur depuis si longtemps. Il s’agit de remplacer la source de nicotine le temps de faire le sevrage psychologique (instinct de succion, geste, habitude, projection de soi, etc), puis une fois le geste desappris, de diminuer la substance qui cree la dependance physique. J’ai au moins quatre ou cinq personnes dans mon entourage direct qui ont utilise le patch a la nicotine pour arreter de fumer et n’ont pas repris depuis plus de 5 ans maintenant. En ce qui concerne le prix, a mon avis, il fait partie du traitement. C’est un investissement a la fois moral et financier. Mais oui votre sante vaut ce sacrifice.

      J’en tire donc les consequences et le conseille a mes amis qui desirent s’en sortir. Car le tabac, c’est la mort et tout le monde n’a pas la volonte de rompre avec sans aide. Moi je ne l’avais pas.

      Cordialement, Jeremie.


      • Luc DUSSART Luc DUSSART 5 juin 2006 16:46

        Il y a des fumeurs qui cessent de fumer avec des patchs et tant mieux pour eux. Il y en a d’autres qui y sont arrivé avec l’acupuncture ou une technique dérivée. Il y en a qui sont arrivé ’comme ça’, sans rien... La majorité en fait.

        Le but de mon papier n’est pas de dézinguer les patchs : on a 10% de chance de réussite d’après les scientifiques qui ont fait les expériences contrôlées. Ce qui est mieux que rien.

        Ce que je mets en cause c’est la prétention à l’unique vérité du ’scientifiquement validé’ précisément. Il y a des méthodes qui ne sont pas validées ni validables par la médecine qui donnent de meilleurs résultat que les patchs. Il y a une intense communication pour faire croire que c’est LA solution. Ce qui est pour le moins inexact.

        La science n’a pas le monopole ni du savoir ni de la vérité : ceux qui ont des croyances spirituelles en savent quelque chose. Les mythes ont forgé l’humanité et ils n’ont précisément rien de scientifique : doit-on les rejeter pour cette raison ?

        Ce que j’ai personnellement constaté sur mes clients, c’est que ceux qui voyaient une utilité d’user de patchs avaient en général un autre problème qui les empêchaient de cesser sereinement de fumer. Les patchs pour les malades : why not ? si ça peut aider.

        Mais en règle générale, il est plus facile de trouver une solution pour cesser sans patch que de cesser avec. Les patchs ont comme défaut, parmi d’autres désagréments bénins, de ne pas ôter la frustration. Ceci se traduit par une prise de poids, mal vue par les temps qui courent.

        Bref, si tu as cessé de fumer avec des patchs très bien, je suis content pour toi. Mais pour ceux qui ont essayé sans succès ou qui vont le faire, mon message est de ne pas écouter aveuglément la publicité pharaonique des laboratoires. Il existe des solutions plus faciles, plus pérennes, plus rapides aussi.


        • Hume (---.---.205.1) 5 juin 2006 19:51

          Merci pour ce papier interessant et le titre tres sympa, qui le merite de pointer la ou ca fait mal. C’est cependant la meme chose que l’homeopathie : L’effet « physiologique » semble nul mais... ca marche !! Je suis surpris par ce chiffre de 10/11 % (mais je ne le remet pas en question) car tous les gens qui on reussi a arreter de fumer autour de moi ont essaye d’abord sans patch : echec total. La reussite a eu lieu avec les patchs et parfois l’aide d’un petit anxiolytique leger. Mais peut-etre que l’effet le plus interessant est que d’avoir le patch, vous n’avez pas la « possibilite » de fumer, alors qu’en son absence, qu’est-ce qui vous en empeche ?

          La chose qui m’a un peu choquee :

          "Fumer n’est pas une maladie. Les fumeurs ne sont pas des malades. On ne guérit pas de ce qui n’est pas une maladie. En plus, vous savez bien, pour l’avoir en général constaté (les trois quarts des fumeurs, la moitié déjà à 15 ans !) que cesser de fumer, ce n’est pas le vrai problème. Le problème est de ne pas reprendre. Comment croire que se coller un patch aux fesses pendant quelques semaines va vous enlever cette envie de fumer qui vous prendra la tête dans six mois ou dans six ans ? Le tabagisme est une addiction, un comportement, pas une maladie. On n’en guérit jamais totalement : c’est inscrit dans notre mémoire."

          Si, le tabagisme est une maladie, justement car c’est addiction qui entraine des modifications cerebrales, modifie l’homeostasie de notre organisme et en particulier de notre systeme nerveux, induisant une perte de controle sur cette substance. Pour moi, c’est la definition d’une maladie. Et malheureusement, a l’heure actuelle on reste « malade » a vie en effet, mais peut-etre qu’on trouvera un traitement miracle ???

          Cela m’amene au fait que je pense que la consultation d’un medecine est necessaire : quand vous etes dependant a une drogue dite « dure », vous avez besoin d’une prise en charge medicale et psychologique. La dependance a la nicotine/cigarette est moins violente mais quand on voit l’etat nerveux de certains fumeurs essayant d’arreter... Ca sent le "craving’ !

          Voila, j’ai donc juste peur qu’avec la fin de votre article vous banalisiez sans le vouloir « l’arret de la clope » !!


          • Luc DUSSART Luc DUSSART 5 juin 2006 21:39

            @ Hume

            Merci de ces critiques gentiment présentées. Cela m’aide à affiner mon propos.

            Oui le tabagisme est un comportement hautement addictif. Je ne dirais pas que c’est une ‘drogue’, réservant ce terme pour les substances modifiant les états de conscience, ce qui n’est que très marginalement le cas du tabac couramment consommé.

            Non il n’est pas établi que ce soit la nicotine qui soit la responsable - unique - de cette dépendance. C’est un discours de vendeur de palliatifs : les contestations scientifiques abondent, quand bien même elles seraient étouffées par nombre de parties-prenantes du business Tabac (dont les autorités de santé, qui sont face à la contradiction du financeur de Bercy).

            Banaliser l’arrêt de la clope ? Oui, d’une certaine façon je propose de mettre le sujet sur la table en le sortant des cénacles médicaux. Un sondage réalisé par le site stop-tabac.ch, l’un des 5 sites les plus visités dans le monde toutes langues (occidentales) confondues sur la cessation du tabagisme, a ré-vélé que l’ouvrage que 90% des francophones achètent pour arrêter la cigarette est celui de Allen Carr, le ‘fumeux’ comptable anglais qui a fait fortune avec sa ‘méthode’. Fumeur : oui, et sa vie fut un calvaire. Fumeux : moins sûr, quand bien même les tabacologues qui m’en ont parlé n’y ont rien vu d’intéressant. Si l’on veut voir Venus, vaut mieux un télescope qu’un pied à coulisse : on voir ce pour quoi on a développé des instruments. Les instruments de la science médicale sont diablement réduc-teurs de la réalité et ne voient pas pourquoi le public plébiscite ce petit ouvrage mal écrit.

            Vous citez le cas de l’homéopathie. Effectivement ce que j’en ai lu, et ceci m’a interpellé, c’est que l’action de la pilule serait d’envoyer une information. J’utilise cette image avec la métaphore suivante. La scène : un bord de plage, un homme guette l’horizon, la nuit. Soudain il voit un court éclair, celui d’une lampe-torche sur un sous-marin resté au large. Le signal de cette torche est ténu, mais l’information est passée. Il n’y a pas besoin d’un gyrophare pour savoir que le navire est prêt à la suite de l’action.

            L’analogie avec le tabagisme la voilà : il suffit d’une petite bouffée de fumée pour renvoyer au cer-veau le signal que l’on est redevenu fumeur. Rares sont ceux qui ont joué à ce jeu sans rechuter quelques jours ou quelques semaines plus tard.

            La médecine ne sait pas très bien encore exploiter les sciences de l’information. Il y bien l’immunologie et les hormones, mais les modèles sont encore un peu trop simples apparemment pour y intégrer l’homéopathie. Encore une fois la science est dépendante de ses instruments, et l’instrumentation pour comprendre comment l’homéopathie fonctionne - car c’est le cas d’après ce que j’ai lu - semble encore trop limitée.

            Est-ce que fumer est une addiction ? Qu’entend-on par addiction ? Il en existe des dizaines de modè-les différents, pas tous compatibles entre eux. On peut envisager un modèle où l’addiction serait une information dans la tête de celui qui se comporte de façon addictive. Je travaille beaucoup avec ça, et de façon plutôt utile pour mes clients. Je ne crois pas, au vu de mes constats de terrain, UN MOT que la cessation du tabagisme dépende de la quantité fumée, présente ou cumulée dans le temps. C’est comme si le fumeur avait sans le savoir, très vite d’après certains (Valleur à Marmottant pour ne pas le citer) appuyé sur le bouton :Fumeur = ON. Si l’on considère la dépendance comme cela, ce que je fais, cesser de fumer revient à trouver le bouton et à le basculer sur OFF.

            CA, ON SAIT LE FAIRE ASSEZ FACILEMENT ET RAPIDEMENT - QU’ON SE LE DISE !

            C’est d’ailleurs un processus courant, qui m’est personnellement arrivé, presque par surprise un sa-medi matin à 9h30 : je suis dans ma tête redevenu Non Fumeur. Imaginez ma joie ! Je n’ai plus re-touché à la fumée depuis et n’ai vraiment mais vraiment aucune envie de remettre ça. Les anciens fumeurs sont rares, qui veulent délibérément remettre cela un jour. Au pire ils me disent : quand je serai vieux, une petite de temps en temps. Alors ils sont en danger de rechute bien avant, et il convient de leur expliquer les mécanismes de sensibilisation qui sont très prégnant avec le tabagisme ( le crack ou la coke, même si la base neurologique sous-jacente est possiblement différente comme l’a montré récemment Tassin du Collège de France - sur des rats). Quand on est libéré, on n’a pas envie de retourner au cachot. Je parle volontiers d’affranchissement du tabagisme, comme on parle d’affranchissement pour un esclave. Cesser de fumer est bien sortir d’un esclavage.

            Les modèles de l’addiction rendent bien compte de cette prison - comportementale et/ou physiologi-que - enfermant l’addict : s’il ne s’adonne pas à son addiction, il est en souffrance. S’il n’y a pas de plaisir à fumer, ce que je prétends contrairement au discours médical, il y a en fumant soulagement d’un état de tension dû au manque. Les fumeurs réguliers adultes comprennent ça assez facilement. On appelle cela le craving, la recherche effrénée d’une cigarette, même s’il faut faire une heure de déplacement pour ça (j’ai connu un fumeur étant redescendu d’un refuge assez haut au dessus de Chamonix pour acheter des cigarettes ... et remonter de nuit pour sa course du lendemain !).

            Comment permettre à un addict de sortir de son comportement addictif qui n’est qu’une séquence in-définie de souffrances renouvelées ? Pour la cigarette, on a trouvé les patchs. Mais pour la cyberdé-pendance, la boulimie ou le jeu pathologique, quelle chimie va t-on inventer ? Je préconise de se pencher non pas sur ce qui fait qu’un homme ressemble à un rat avec lequel on peut faire une foule d’expériences contrôlées, mais sur ce qui fait qu’un fumeur cesser un jour de fumer sans réelle diffi-culté. Il y a une base neurologique, mais aussi la capacité du cerveau à traiter l’information. Com-ment permettre au fumeur de basculer l’interrupteur sur OFF ? Voila ce qui m’intéresse et j’ai constaté que les patchs n’y aidaient pas et même étaient source de difficulté.

            La chimie permet d’esquiver le travail cognitif nécessaire : contre-productif à 90%.

            La longue période où la rechute peut intervenir se compte en décennies : les patchs ne garantissent pas la sortie de la dépendance psychologique. C’est précisément ce sur quoi nous faisons porter notre formation (car redevenir Non Fumeur, cela s’apprend indiquent de nombreux experts dont le Pr Moli-mard). Une fois que la dépendance psychologique est traitée, le comportemental et le physiologique deviennent des épiphénomènes sans réelle importance (pour des fumeurs sans co-morbidité dois-je préciser).

            Une addiction se différencie d’une maladie : on peut guérir de la seconde, mais la première restera durablement en mémoire.

            Ce que je constate reprendre le contrôle de ses pensées relatives à la cigarette est possible en quel-ques heures. Et ce peut être même fait sans lassitude ! Il faudra qu’on m’explique pourquoi des fu-meurs invétérés, dont encore une fois j’ai fait partie, peuvent cesser de fumer comme de façon miraculeuse, sans stress, sans prise de poids, sans syndrome de sevrage passés on va dire deux ou trois jours (nécessaires effectivement à un rééquilibrage physiologique). J’ai aidé une ancienne infir-mière qui a suivi à ma demande son acidité urinaire : + 1,5 pH en un mois. Son corps a certes été secoué, mais dans sa tête, elle a assuré avec calme et lucidité. Le choc du sevrage brutal tel que je le pratique est absorbé sans difficulté (encore une fois par un fumeur sans co-morbidité, car dans ce domaine je n’ai pas de références statistiques).

            Pour parvenir à cette reprise de contrôle, différentes techniques existent : l’hypnothérapie est bien connue et évaluée (et dénigrée par une partie du corps médical, plus en France que dans les pays anglo-saxons...). Il existe d’autres possibilités, qui ne sont pas évaluables par la science médicale (toujours cette question des instruments) : le plus souvent un bricolage pragmatique de techniques psycho-cognitives plus ou moins inspirées de travaux scientifiques et ayant fait la preuve se leur effi-cacité opérationnelle. A défaut de pouvoir utiliser ces techniques, la médecine propose ses médica-tions. OK pour moi, je consulte aussi mon médecin (fumeur...). Mais ce que je trouve inacceptable c’est de dénigrer toutes ces alternatives plus rapides faisant appel à l’intelligence et/ou l’inconscient du fumeur. C’est bien connu la science n’aime pas l’inconscient : il existe cependant et il est plutôt puissamment à l’œuvre, même à ses dépens, dans l’esprit d’un tabacologue.

            En déclarant malade chaque fumeur, on en fait un assisté. Cela me fait penser au rôle de la religion dans certains pays actuels et de façon plus précise en France du temps de la royauté. Tout français était dépendant et du roi et de Dieu. La Révolution Française y a mis le holà. Il me semble que le moment est venu de fixer des bornes à la médecine allopathique, avant qu’elle nous abreuve de dro-gues diverses - et largement inefficaces en ce qui concerne le tabagisme - au quotidien. On lui de-mande d’évaluer les psychothérapies maintenant : à quand le tour de la psychologie ? Et de la théologie ?

            Le discours médical enfin n’est pas audible par les fumeurs comme l’ont montré les travaux de Falo-mir-Pichastor : les médecins auront beau répéter que fumer est nocif pour la santé, le nombre de fu-meurs réguliers ne réduira pas pour autant.

            Les protocoles médicaux recommandés et diffusés dans des centre spécialisés sont lourds, onéreux. Et moins efficaces avec des consultations individualisées que ceux d’intervenants privés en entreprise dont un benchmarking a établi la performance : il n’y a pas photo. Les premiers sont satisfaits de 30% de réussite (cf. des papiers dans Le Monde début 2004), les seconds dépassent régulièrement 50% (et certains remboursent en cas d’insuccès !!). Les employeurs mis en demeure de respecter la loi Evin ont vite fait leur choix. C’est en entreprise qu’aujourd’hui le tabagisme recule le plus vite.

            Etre scientifique, c’est d’abord reconnaître de la valeur aux faits. Les faits existent. Arrêter de fumer peut être facile et rapide. La médecine, avec son mauvais trousseau de clés, s’acharne sur la serrure. La promotion de ses fausses solutions rend les choses encore plus problématiques, les fumeurs se demandant pourquoi cela ne marche pas développent une résistance à l’idée qu’il leur est possible de cesser de fumer sans traumatisme. D’autres ont découvert quelques ‘passe-partout’ assez polyva-lents, presque banals effectivement. Je m’efforce de le faire savoir : cela peut les aider à trouver la sortie.


          • Jojo2 (---.---.198.37) 5 juin 2006 20:21

            S’arréter de fumer c’est très facile...Je l’ai fait souvent.

            Bon, ça a l’air d’une blague mais c’en est pas une (je ne fume pas...) Beaucoup de fumeurs rechutent, s’ils n’ont pas eu une maladie très sérieuse qui leur a filé les jetons. C’est pour ça que les incitations comme l’interdiction dans les lieux publics (qui les obligent à limiter leur consommation dans un premier temps) sont indispensables.

            Même un petit gain, 11 vs 5,5% est appréciable.


            • Luc DUSSART Luc DUSSART 5 juin 2006 22:02

              Merci de ce commentaire, bien humoristique.

              Beaucoup de fumeurs rechutent : s’ils ne rechutaient pas, tous auraient arrêté depuis longtemps un comportement ruineux qui leur empoisonne la vie. C’est le propre de ce produit, et il est optimisé pour la rechute avec des adjuvants et préparations chimiques pour que son effet soit encore plus violent dans le cerveau.

              Donc la question revient à : comment prévenir la rechute ? Car cesser de fumer, beaucoup de ceux qui l’ont fait quelque temps, reconnaissent que ce n’est pas si difficile que ça...

              La médecine préconise la ’poubelle’ : on remplit une poubelle avec des petits papiers incitant tous à l’arrêt. Un jour, peut-être, la poubelle est pleine et comme la soupe, ça déborde ! On arrête. Une fois, puis deux, etc.. jusqu’à ce qu’on se lasse de cesser de fumer, que l’on réalise enfin qu’on ne gagne pas contre le tabagisme. La bataille est perdue, la guerre est perdue : c’est la reddition sans condition l’unique porte de salut.

              Ce discours sanitaire, nous prévenant des effets nocifs de la fumée à l’horizon de 20 ans, se combine bien avec des politiques répressives.

              Je suis partisan d’une politique répressive mais avec d’autres arguments. Il faut interdire de fumer parce que tout bonnement les fumeurs ont du mal à le faire et que cela les aidera. Ils le disent dans les enquêtes : 54% des fumeurs sont favorables à l’interdiction de fumer au travail ...

              Interdire de fumer fera baisser leur consommation : c’est précisément leur souhait.

              Mais on peut aussi critiquer cette politique en reconnaissant que l’on ne combat pas un désir avec une interdiction : au contraire, il se potentialise.

              Ma recommandation serait la suivante : pointer, chez chaque fumeur, de façon individuelle, les sensations et sentiments qu’il aura de trouver la vie plus belle sans fumer. Alors il devient possible de pousser le désir de fumer par un autre désir : celui d’être Non Fumeur.

              Cette tactique est bonne, d’une part parce qu’elle fonctionne parfaitement (avec les adultes au moins) et d’autre part parce qu’elle évite de transformer nos pauvres fumeurs dépendants en paria sociaux ou victimes expiatoires.

              Il y a du bonheur à redevenir non fumeur. L’argument probant vient du fait que ceux qui se sont libéré du tabagisme n’ont aucune envie de remettre le couvert. Plus jamais ça !

              En pratique donc, un savant dosage de bâton et de carotte, bien positionné dans le temps d’un projet collectif, semble à recommander.


            • (---.---.192.171) 5 juin 2006 21:33

              Je fumais 30 à 40 cigarettes / jour, et j’ai mis deux ans à arrêter de fumer, en diminuant très progressivement ma consommation. C’est l’équivalent d’un sevrage, mais sans patch.

              Les trois dernières cigarettes quotidiennes ont été le plus dur à éliminer, question de rituel.

              A l’arrivé de notre premier enfant, ma femme s’est mise à jeter systématiquement tous les paquets que j’achetais. Au bout d’un moment, j’ai laissé tomber...sans ressentir le moindre manque physique.

              Ca fait déjà 8 ans...


              • Luc DUSSART Luc DUSSART 5 juin 2006 22:24

                @ Anonyme

                Merci de ce témoignage, qui creuse encore la trace. On peut être et avoir été un gros fumeur et arrêter sans ressentir grand chose. Vous faites porter votre difficulté sur le rituel : je n’y crois pas, il ne joue que dans les premières semaines après l’arrêt. Ce point est exagéré comme je vais vous le préciser.

                Ne pas fumer fait mal nul part !!

                Tout se passe dans la tête. Distinguons pensée relative à la cigarette et envie de fumer.

                L’envie, c’est comme la faim. C’est un signal qui se transmet entre les organes et le cerveau : « c’est le moment de ta dose, sinon tu vas être mal ».

                Ce signal ne fait pas mal en soi.

                Il y a l’interprétation de ce signal, ce que je vais nommer la pensée relative à la cigarette. « En fumant, je sais que je vais calmer cette tension, je vais pouvoir à nouveau me concentrer sur le papier que je dois finir, etc... »

                Une pensée c’est anodin en soi : on peut penser que l’on va gagner à l’Euromillions. Faites un test : restez le plus longtemps possible câlé sur cette idée que vous avez gagné le gros lot. Combien de temps cela occupe votre esprit ? Faites le test : vous auriez mérité de le gagner ce petit magot si vous étiez capable de penser sans interruption plus d’une minute d’affilée. L’esprit s’y refuse. Son job, c’est de fournir une pensée après une autre pensée.

                Alors pourquoi pense t-on si souvent à la cigarette quand on cesse de fumer ? Parce qu’au lieu d’accepter cette pensée, normale, déclenchée le plus souvent par des messages internes, le fumeur abstinent la repousse : elle lui fait peur.

                Paradoxalement en repoussant la pensée, on l’incite à revenir : c’est par ce processus que se créent les obsessions. Comme un boomerang.

                Accepter l’idée que l’on va penser à la cigarette permet d’y faire face sans appréhension. Ce n’est pas cette peur de refumer qui va vous faire refumer...

                Vous n’êtes plus obsédés par l’envie de fumer : c’est cool. Vous voila durablement tranquille. Bravo !

                Permettez que je vous assure que mettre à jour le message ’Juste une petite’ serait prendre un risque sérieux. C’est comme pour l’alcool : une fois que l’on a été dépendant, c’est quasiment pour la vie. Il suffit de ne pas refumer celle-la : cool. Si vous pensez que vous n’en avez plus besoin, votre femme vous aura rendu un fier service. Sinon faites comme si c"était le cas. Ca marchera ! (J’ai bien conscience que ce genre de conseil peut prêter à sourire, mais du moment qu’il est opérant, faut pas s’en priver).

                Longue vie à vous sans tabac. On est mieux, hein ?


              • Hume (---.---.205.1) 5 juin 2006 22:56

                Merci de suivre votre article et de prendre le temps de repondre a tout le monde. C’est agreable et tres constructif.

                Votre reponse est tres interessante et tres complete, et j’adhere presque a 100% sauf sur le concept de maladie.

                On ne peut pas definir ce qui est une maladie ou non sur le fait que l’on arrive a la guerir ou non. Cela va dependre de la presence ou non d’un traitement efficace. La rage est une maladie : elle l’etait avant que pasteur developpe la vaccination meme si on ne « guerissait pas ». Idem, prenons l’exemple malheureux du VIH, on peut stopper la progression du SIDA mais on ne gueri pas et pourtant, c’est bien une maladie.

                Je pense que c’est la meme chose pour l’addiction, en general et pour la cigarette (et je suis d’accord il n’y a surement pas que la nicotine...). D’ailleurs il y a des cas de guerisons puisque certains se mettent en mode OFF spontanement !!

                Si je pinaille la-dessus, ce n’est pas pour faire de la masturbation intellectuelle, car au final ce n’est qu’une definition mais cela peut orienter sur les strategies a adopter pour guerir. Je suis en postdoc en Neurosciences et travaille depuis quelques mois (seulement !!) sur l’addiction a l’alcool. Je me pose egalement cette question du pourquoi certains arrive a stopper net mais avec mes rats : certains sont totalement refractaires et ne deviennent jamais dependants (je ne crois pas toujours que la recherche animale soit toujours mieux « calibree » sur les questions de variabilite inter-individuelles). Pourquoi ? Il semble qu’il existe un circuit d’autoregulation sur la consommation d’un produit, ce syteme etant depasse voir detruit par les substances addictives. Pourquoi les sensbilites des gens aux drogues seraient differentes ? En partie surement a cause de ce syteme dont l’effacite est differente d’une personne a l’autre. Tout ca pour dire quoi ? Il y a de serieuses pistes de cibles therapeutiques contre l’addiction en reprennant justement cette question qui me semble, est la bonne question : comment se fait ce basculement en « mode OFF » Trouver un medicament aidant a ce basculement pourrait guerir de l’addiction a la cigarette et et aux auyres substances addictives.

                Mais nous sommes en effet tres loin de ca a l’heure actuelle avec les patchs dont vous avez parfaitement eexpose la mediocrite therapeutique. Peut-etre que la reponse viendra de la recherche fondamentale car je trouve qu’elle de facon tout a fait significative sur ce sujet.


                • Luc DUSSART Luc DUSSART 6 juin 2006 10:48

                  @ Hume

                  J’ai vu des contributions sur Internet relatives à la neuro-psycho-immunologie : il est probable que c’est par une approche pluridisciplinaire que l’on avancera. Mais il faut beaucoup de courage pour se lancer dans cette voie : comme ces émigrés qui ne sont reconnus ni d’un pays ni de l’autre (je pense aux Harkis), et rejetés partout. La Science aime bien les disciplines et la discipline, l’obéissance à un maître.

                  Jean-Pol Tassin à l’INSERM a publié récemment sur ces problèmes d’addiction, avec une couverture médiatique remarquable dans Le Monde. J’ai l’impression que vous connaissez cela mieux que moi. Ma réflexion fut la suivante : on cherche sous le lampadaire, comme l’homme qui a perdu ses clés. Mais rien ne dit que les clés ne soient pas plus loin, dans l’ombre. Ce que je veux dire par là, c’est que la science a besoin de budgets pour se financer (c’est le lampadaire) et que l’on cherche surtout là où il y a un levier industriel potentiel. D’où la focalisation sur la pharmacochimie.

                  J’apprenais hier une décision de l’OMS visant à réformer le système mondial de la recherche pharmaceutique. Il ne tourne plus rond, et les pays pauvres ne veulent plus financer les chercheurs des pays riches. Ils n’en ont pas les moyens de toute façon...

                  Je comprendrais donc votre focalisation personnelle sur des sujets où il y a potentiellement un travail rémunéré derrière : c’est humain.

                  Ce que je tente de montrer c’est qu’il existe des pistes bien débroussaillées maintenant permettant à opérer la bascule sur OFF par l’utilisation du seul esprit. Ce n’est pas cher à apprendre, reproductible sans coût et inusable ! Donc il n’y a pas vraiment de budget pour paver cette voie déjà tracée , parfois au prix d’une prise de risque importante en termes économiques.

                  En suivant Antonio Damasio (L’erreur de Descartes et autres ouvrages), on vérifie bien l’interaction du physiologique et du cognitif. Ce que je crois possible de tester avec quelques expériences simples, c’est la capacité du cerveau à considérer le craving comme un leurre, à ne plus y attacher d’importance et d’émotions négatives. J’ai mis au point un geste mental, que je nomme ‘Gommenvie’, qui permet au fumeur de s’affranchir de sa sensation de manque. L’inspiration en vient de Peter Kelder, auteur d’une petite merveille de littérature intitulée Les 5 tibétains (Vivez Soleil, 1989, ISBN 2 88058 398 5, original US © 1985, Washington, Harbor Press). C’est un remake du mantram hindhou, avec des accents de ce brave Emile Coué (dénigré en France parce que pas assez académique, son empreinte aux USA fut plus pérenne). Académiquement cela ne relève pas du corps mais de l’esprit. Et je ne sais si ma technique serait opérante dans le cas de dépendance autre que le tabagisme. Mais ce phénomène mental qui permet de reprendre le contrôle ne fait aucun doute. Mon job est de le permettre sur commande et non d’attendre qu’éventuellement il survienne de façon spontanée ou provoquée accidentellement. Quelques heures de formation y pourvoient et le problème est réglé, presque infailliblement.

                  Personnellement je ne suis pas favorable à la prise de contrôle de l’étude des phénomènes psychologiques par les sciences expérimentales. La médecine a ses modèles, la psychologie et le fonctionnement de l’inconscient en a d’autres. On veut à tout prix rendre rationnel ce qui ne l’est pas : erreur méthodologique. D’ailleurs l’influence de l’irrationnel prime sur le rationnel dans notre vie quotidienne. Je n’irai pas voir un médecin caractériel même si c’était un puits de science : chacun met le curseur où il lui plaît. Et ce qui plaît est de l’ordre de l’irrationnel (pensons à l’amour !). Il y a là une tentation totalitaire. La science n’a pas de valeur éthique par elle-même : voyons Tchernobyl, le sang contaminé, etc...Je ne prends pas la science comme une religion du savoir.

                  Je me suis dans le passé intéressé à la mise sous contrôle, au sens statistique, des proces-sus de changement humains, comme l’apprentissage par exemple. Peut-on assurer, au sens de l’assurance de la Qualité, qu’un élève va apprendre quelque chose ?

                  Il y a bien les modèles de l’ISO, repris par l’AFNOR. Mais le terme du processus, ce que l’élève va avoir acquis ou appris, cela dépend d’abord de ses motivations, du sens qu’il met dans l’acte d’apprendre ce que l’on lui propose. J’en suis arrivé à la conclusion que l’on peut assurer le processus ... à condition de lâcher la prise du contrôle précisément. Cela est tout à fait paradoxal.

                  La science expérimentale est basée sur la logique d’Aristote, et l’exclusion du tiers : une qualité est A ou n’est pas A mais ne peut être par exemple et A et non A. Mais qu’est-ce qui prouve que le fonctionnement du cerveau obéit à cette logique ? Aristote ne le disait pas : il disait seulement que c’était simple de raisonner comme cela.

                  Pour revenir à nos problèmes d’addiction, je suis convaincu que la logique aristotélicienne est mise en défaut. Et tant que l’on se limitera à une science qui la présuppose, on ne saurait décrire ce qui se passe. On ne voit pas le relief avec une seule longue vue : il faut une binoculaire.

                  Pour en revenir à votre proposition de recherche FONDAMENTALE, je propose alternativement que l’on remette en cause plutôt certains fondements mêmes de notre exploration du réel. La psychologie a fait sa mue depuis Freud (ce qui ne fut pas chez lui sans de sérieux états d’âme...), et le tableau proposé échappe aux évaluateurs de l’INSERM : c’est beaucoup trop COMPLEXE pour eux, qui veulent toujours tout maîtriser et comprendre. C’est au contraire en acceptant une part d’inconnu, de non maîtrisable impossible à reproduire expérimentalement, que l’on avancera (vous pointez notamment le problème de la différence, naturelle dans la construction du cerveau à cause de sa plasticité par ex.). En d’autres mots, les scientifiques positivistes droits dans leurs bottes ont du mal à quitter le piédestal que le XXème siècle leur a permis de bâtir : le prix à payer est lourd d’avoir à se remettre en question sur les fondements même de sa légitimité et de ses connaissances. Une révolution intellectuelle est requise : à la fois diplômé en sciences dures (chimie) et en sciences molles (formation), je sais qu’inventer une cohérence, même partielle et transitoire, n’est pas facile. On y perd quelques cheveux ! Mais comme le plongeur sous-marin, ce que l’on découvre alors est coloré et merveilleux : un monde nouveau se dévoile, au prix du risque. Michel Serres rappelait récemment dans sa chronique sur France Info que ’péril’ est à la racine du terme ’expérience’. Plongez donc ! C’est profond, vertigineux parfois. Bonne chance !


                • Hume (---.---.205.1) 6 juin 2006 17:51

                  Votre approche psychologique est extrement interessante mais je ne pense pas qu’elle soit suffisante. Me placant a l’interace de l’esprit et du biologique (car je fais de la psychologie experimentale sur l’animal), je crois comme vous a l’influence du mental sur le physiologique, comme l’inverse. J’imagine un beau dialogue entre les deux !!

                  Mais vu les modifications neurochimiques et neuronales entrainees par les substances addictives je pense qu’une approche pharmacochimique peut aider. Cela me semble pour la cocaine ou la morphine, peut etre moins pour la nicotine. Cependant, comme toutes les pathologies qui touchent a l’esprit, je pense que le plus efficace est une action synergique d’une therapie cognitive associee a une approche pharmacochimique (si elle est efficace !!). Dans de nombreuses maladies, comme dans la schizophrenie, cette double approche semble la plus efficace car onm attaque le probleme par les « deux bouts » (de la raison, n’en deplaise a Rouletabille !).

                  Sur les avancees de la recherche fondamentale, je vous conseille de regarder sur pubmed les travaux de Stanley Glick sur une substance tres interessante et surtout ces derives. Vous trouverez egalement une lecture du meme sujet plus ludique sur le site « The Ibogaine dossier » (http://www.ibogaine.org/) et plus generalement en tapant le mot cle ibogaine sur n’importe quel moteur de recherche.

                  Sinon, je vois que vous vouv interessez a la relation esprit-cerveau. Je vous conseille un livre (mais peut-etre que vous le connaissez !) qui va plus loin que celui de Monsieur Damasio, dont je n’aime pas le titre car il fait dire a Descartes ce qu’il na pas dit (! !). C’est « Neurophilosophy : Toxard a unified Science of the Mind-Brain » de Patricia Smith Churchland qui travaille a l« universite de San Diego (UCSD) il me semble. Le livre existe en francais sous le titre si je ne dis pas de betise, »Neurophilosiphie : l’esprit-cerveau". Tres bon bouquin reactualise il y a qlq annees. La partie philo a ete un peu dur pour moi mais vous avez l’air mieux arme ! Il me semble qu’elle a egalement un site web ou elle expose ses principales idees.


                • Luc DUSSART Luc DUSSART 7 juin 2006 08:04

                  Merci beaucoup pour ces références. Je me procurerai l’ouvrage de Patricia Churchland, qui date déjà de 1986 : il semble qu’elle soit au cœur des questions difficiles. Cela semble assez pointu en effet.

                  Je ne savais pas non plus que l’effet de l’ibogaine sur l’addiction tabagique avait été étudié. Je vais regarder cela de plus près. Cela reste une substance hautement narcotique ce me semble. Le produit tel quel a peu de potentiel chez les industriels du médicament car il s’agit d’herboristerie et la protection intellectuelle (brevet) est limitée... Il est possible qu’il reste donc un épiphénomène pour ce qui concerne l’aide à l’arrêt du tabac. Un transparent 52 de la présentation de New York le 25 février dernier est explicite sur les obstacles au recours à cette substance A suivre cependant. Merci encore.

                  Ceci me donne l’occasion de solliciter votre avis : les fumeurs de tabac sous la forme cigarette ne cherchent en général pas un effet particulier du produit. Le tabagisme a ceci de particulier que l’on ne sait pas vraiment avec quel projet on fume, si ce n’est de ressembler à un acteur que l’on a vu fumer à l’écran (et qui généralement est sponsorisé par l’industrie cigarettière), faire comme le grand frère, se donner un genre ou encore tout simplement s’occuper plutôt que de rester les bras ballants... C’est très différent de l’alcoolique ou du fumeur de cannabis, qui recherche une ivresse, ou du consommateur de stimulants. Le fumeur fume sans raison : c’est la raison pour laquelle il est éthiquement acceptable de l’inciter à mettre un terme à une dépendance furtive, omniprésente et cependant incompréhensible.

                  L’addiction se caractérise par une saillance : c’est le terme que l’on donne au comportement auquel on aura recours dès que l’on cherche à stimuler son cerveau en accroissant la sensation de plaisir. Il y a bien une saillance dans le tabagisme : quelle que soit la situation vécue, ennui, stress, besoin de concentration, désir de relaxation, qui sont respectivement contradictoires par paires, le fait de fumer apporte une sensation - fugace - de bien-être.

                  Mais il y a une différence notable que je ne sais pas bien analyser ni en mesurer la conséquence. La saillance du junkie ou du joueur pathologique se concrétise par une centration de tous les instants d’éveil sur du comportement alors que le tabagisme ne crée pas cette polarisation. Est-ce dû au fait que le tabac est en vente libre dans un magasin proche, à un prix réduit ? La vie du fumeur ne tourne pas autour du tabac. Ce serait plutôt l’inverse : la fumée l’entoure à longueur de journée. Tout se passe comme si les fumeurs ne savaient pas pourquoi ils fument, dans quel but. Dans ces conditions, un comportement alternatif, fut-il aidé par une substitution a moins de chance d’éliminer la dépendance.

                  Vous dites aussi qu’il y a avantage à associer pharmacothérapie et intervention cognitive : il a été reconnu qu’associer une thérapie comportementale et cognitive (TCC) accroissait les chances de succès d’un accompagnement du sevrage avec palliatifs nicotiniques.

                  Pour ce qui est de mes propres interventions psychocognitives, j’ai constaté - empiriquement - que l’usage prolongé de patchs ne rendait pas l’abstinence durable plus probable et que les patchs étaient un facteur de rechute. Sur la base de cette observation qui s’impose à tout esprit scientifique, avant les théories, je déconseille d’associer les deux protocoles palliatifs + TCC dans le cas du tabagisme d’un fumeur sans co-morbidité. La première raison est que la promesse de gain par rapport au placebo est minime (j’ai lu de l’ordre de 3% seulement en évaluation contrôlée). Une autre étude à plus long terme par Yudkin indique que l’écart n’est pas significatif. Il n’est pas correct de le cacher.

                  Les TCC seules sont relativement efficaces, mais je suis en peine de trouver une évaluation comparative contrôlée avec et sans le protocole pharmacologique considéré comme étant la référence (c’est à dire comparant TCC avec ou sans palliatifs, les thérapies psychologiques ne s’évalauant pas de la même faàon que les traitement allopathiques). S’il n’y a pas recours à un produit susceptible de servir d’étalon placebo, les modes d’évaluation contrôlée valables en biomédecine ne sont plus utilisables : et comme on ne sait pas évaluer on affirme que ce n’est pas évalué. On boucle, comme le serpent qui se mord la queue. Ce type de raisonnement tautologique doit être écarté.

                  Je préfère déconseiller l’usage de tout palliatif nicotinique pour une autre raison : ils n’aident pas la réappropriation d’une identité de Non Fumeur. Celui-ci est abstinent grâce au palliatif mais reste fumeur dans l’image de soi. Un fumeur à qui il manque quelque chose. En terme d’apprentissage d’une renaissance à la vie sans tabagisme, le palliatif est un frein. Je montrerai en détail comment dans un prochain billet. L’usage d’une aide médicamenteuse n’a pas que des avantages (cela déresponsabilise notamment) et dans le cas des palliatifs nicotiniques pour le sevrage tabagique la balance est défavorable. C’est la raison de l’intitulé de mon papier.


                • Hume (---.---.205.1) 7 juin 2006 20:53

                  Bonjour !

                  Merci encore pour ce commentaire. Je n’ai pas le temps de repondre en detail, je le ferai demain.

                  Juste pour l’ibogaine : le travail recent porte sur un derive synthetique qu’il a produit et qui n’aurait pas les proprietes hallucinogenes de l’ibo et ne serait pas neurotoxique a forte dose (a contrario de l’ibo). Par contre elle garde les proprietes anti-addictives et il a fait une etude tres interessante (mais sur l’animal...) sur cette substance et la nicotine. Votre intervention est vraiement interessante et j’apprends un certain nombre de choses sur les therapies « alternatives » pour la cigarette. Bravo et merci beaucoup !!


                • Rocla (---.---.36.82) 9 juin 2006 08:53

                  Chapeau bas,

                  En voià une journée qui commence bien,venant de lire toute cette page concernant le sujet mentionné,je n’ y ai pas vu l’ ombre de la moindre agressivité, exceptionnel !

                  Merci à vous,et bonne continuation,

                  Rocla


                  • citoyen citoyen 9 juin 2006 14:36

                    Pourriez-vous nous en dire plus sur cette censure ? En quoi votre papier - fort intéressant du reste, les commentaires sur agoravox en témoignent à eux seuls !- ne respecterait la charte que le ministère a du mettre en place ?

                    Merci de votre réponse ou de avis car au-delà de votre point de vue sur les patchs que je partage, ayant été moi même fumeur, l’information que vous donnez sur une « censure » est fort intéressante ...

                    A bientôt donc


                    • Luc DUSSART Luc DUSSART 9 juin 2006 15:59

                      @ citoyen

                      Certaines phrases de mon envoi au Forum « Fumer dans les lieux publics : pour ou contre ? » le 1er juin dernier ont été ’modérées’ avant publication le ... 9 juin. Mes craintes d’avoir été complètement censuré le 5 juin étaient donc infondées.

                      Six éléments ont été censurés. Trois sont des références à des médecins (qui doivent déranger eux aussi apparemment), trois sont des critiques concernant la politique de santé publique en France. Les voici restituées entre crochets dans leur contexte :

                      - - - - - -

                      ... prétendus substituts. [Son site : www.sansnicotine.com]. Il s’agit d’un médecin, ...

                      Les médecins, ils obéissent aux ordres, [ceux de l’OMS, de l’OFT (Office Français de Prévention du Tabagisme)] et de tous ceux ...

                      La médecine a perdu la tête. [on a retrouvé « Du Prozac dans l’eau potable » titrait cet été David Servan-Schreiber dans Le Monde (fin août de mémoire).]

                      financés par les labos... [Il est temps d’arrêter le massacre. Le problème des aides à l’arrêt, c’est non pas un problème médical, c’est le problème de la médecine.]

                      On confond médecine et santé. [Le Ministère de la Santé est en réalité le ministère de la Médecine, qui est piloté par l’industrie pharmaceutique en sous-main.]

                      ... : ils ont été censurés. [Je cite ici le Pr Molimard, dans son bel ouvrage ’La fume’, Sides, 2003. Molimard sait de quoi il parle en matière d’arrêt du tabac, ce qui n’est pas le cas de tant de tabacologues plus ou moins co-optés qui n’ont pas fumé...]

                      - - - - - -

                      Merci de votre vigilance : il est intéressant de noter ce qui est jugé incorrect dans le Forum du Gouvernement. Merci à Agoravox de permettre la libre expression.

                      Une loi de 1905 a séparé l’État de l’Église. Je me demande si l’Institution Médicale n’a pas pris la place vacante de cette dernière dans la régulation sociale.


                      • Snejanko (---.---.180.70) 13 juin 2006 19:00

                        Bravo pour votre tenacité et votre persévérance à publier vos propos tels que vous les aviez pensés au départ.

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