Bouffer à mourir !
Sommes-nous devenus à ce point étrangers à nous-même pour mettre notre santé à ce point en péril ? La prévalence de l’obésité, définie comme un excès de graisse corporelle et estimée par un indice de masse corporelle, a pris des proportions épidémiques à l’échelle planétaire. L’obésité est maintenant si répandue (environ 300 millions de cas dans le monde) que sa prévalence dépasse, pour la première fois dans toute l’histoire de l’humanité, celle de la malnutrition et des maladies infectieuses (Kopelman PG. Nature 404 : 635, 2000. Les personnes à qui la nourriture « profite » trop bien doivent manger moins que les autres, non seulement pour maigrir, mais aussi pour se maintenir à un poids stable. Cela constitue un nouveau phénomène de société. Les tendances à la hausse de la prévalence de l’obésité pourraient continuer à se propager si des changements significatifs ne sont pas apportés dans la structure et le fonctionnement des institutions ayant pour mission de promouvoir la santé et la prévention des maladies dites modernes. Enjeu de santé pour toutes les sociétés, qu’elles soient riches ou pauvres !
Le correspondant du quotidien Le Journal de Montréal, à la Maison-Blanche, écrit ce lundi 12 février 2007 : « Les Américains ne manquent jamais de m’étonner. À peine ai-je le sentiment d’avoir tout vu, tout entendu qu’ils trouvent un autre moyen de me laisser stupéfait. Prenons la dernière stratégie mise de l’avant, la semaine dernière, par le président Bush. Pas pour gagner la guerre en Irak ni pour stopper le réchauffement climatique. Non. La menace qui pèse tellement sur les États-Unis qu’il faut développer une stratégie pour y faire face, c’est l’obésité chez les enfants ».
L’Organisation Mondiale de la Santé a défini l’obésité comme « le principal problème de santé publique de l’Occident en l’an 2000 ». Les chiffres sont alarmants et croissants. Et on estime que 6% des budgets nationaux de santé publique sont dédiés aux maladies liées à l’obésité.
Le site Internet Obésité.com donne cette définition de l’obésité : « D’un point de vue médical, l’obésité est un excès de masse grasse entraînant des inconvénients pour la santé. La masse grasse s’évalue à partir du calcul de l’Indice de Masse Corporelle (ou IMC) qui tient compte du poids et de la taille. Il est évident qu’une personne pesant 100 kilos n’a pas la même corpulence si elle mesure 1,60 m ou bien 1,80 m ! »
Plus de 200 millions de personnes souffrent de diabète de type 2 dans le
monde. L’obésité, qui touche aujourd’hui 1,1 milliard d’adultes et 150 millions
d’enfants, en est un des facteurs important. Si l’épidémie d’obésité continue
de progresser, elle pourrait amener les chiffres du diabète à doubler d’ici
2030. La France par exemple, compte à elle seule 5,3 millions d’obèses et 14,4
millions de sujets en surpoids. Des chiffres impressionnants pour un pays qui
compte 60 millions d’habitants. Aux États-Unis, près de 130 millions
d’Américains, soit tout de même 60% de la population, sont concernés par ce problème.
La Fondation Recherche médicale dresse ainsi l’état des lieux : « Aux États-Unis, le tout dernier rapport du CDC (Center for Desease Control and Prévention, 7 Mars 1997) fait état d’une augmentation du nombre des obèses de 3,3% pour les hommes et 3,6% pour les femmes. Désormais ce sont 33% des hommes, 36% des femmes, 12% des adolescents et 14% des enfants qui présentent un excès de poids. En France, on en compte un sur dix. Mais c’est probablement parmi les Mélanésiens et les Polynésiens que la fréquence est la plus élevée avec 70% des habitants en surpoids important ». D’ici à 2010, sur l’ensemble du continent américain, un enfant sur deux accusera une surcharge pondérale. En effet plus de dix millions d’enfants - soit environ 18% de la population - sont considérés comme étant en situation de surpoids. Le pourcentage a triplé chez les adolescents au cours des 25 dernières années, et a presque doublé chez les enfants âgés de 6 à 12 ans.
Côté européen, un jeune sur quatre accuserait un poids excessif sur la balance et chaque année, 400 000 nouveaux cas d’obésité pourraient être détectés. L’excellent site Internet sur la santé, Doctissimo, nous prévient que « si les Américains sont les champions toutes catégories de l’obésité, plus aucune région du monde n’est épargnée. Du Canada à l’Europe en passant par la Chine, on parle aujourd’hui d’une véritable épidémie ». [...] En 1991, l’obésité, selon les derniers chiffres publiés par la prestigieuse revue médicale Journal of the American Medical Association (JAMA), était à l’origine d’au moins 300 000 décès chaque année outre-Atlantique et seul le tabac ferait plus de morts. Les pays émergents ne sont pas non plus épargnés : 60 % de la population mexicaine serait trop grosse. En Égypte, 35 % de la population est obèse, en Arabie Saoudite, 24 % des femmes sont obèses et 40 % des femmes au Koweit. ». Aujourd’hui en Inde, 26% des femmes entre 20 et 49 ans sont en excès de poids. Le chiffre pour la Chine c’est 20%. Au Zimbabwe, 36% des femmes sont concernées.
Enfin, les statistiques montrent que le quart des jeunes de 2 à 17 ans ont un surplus de poids au Québec. Bien que le tabagisme demeure la plus grande menace à la santé publique au Canada, de mauvaises habitudes alimentaires et l’inactivité physique contribuent à l’obésité et représentent aussi des défis de santé publique importants. Au Canada, selon Statistique Canada, deux adultes sur trois font de l’embonpoint ou sont obèses. La proportion des enfants obèses a presque triplé au cours des 25 dernières années, tant chez les garçons que chez les filles, et ce, dans tous les groupes d’âge, à l’exception des enfants d’âge préscolaire.
Selon un ancien conseiller en nutrition du gouvernement américain, cité par Destination Santé, « l’industrie agro-alimentaire emploie des méthodes de marketing extrêmement sophistiquées pour inciter les consommateurs à manger davantage. Il est ainsi devenu socialement acceptable », affirme-t-il « de manger n’importe où, toute la journée et en plus grandes quantités ».
Des sondages menés par le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC) indique que les
consommateurs basent leur choix de produits d’abord sur les annonces des
étiquettes (« sain », « pas de sucres », « oméga 3 » etc.) que sur les tables
de nutrition au dos. Or, est-ce qu’un produit dit « léger » contient peu de
graisses ou peu de sucres ? Et quelle est la différence entre sel et sodium ?
Faire un choix avisé est souvent difficile parmi toutes ces allégations.
Cependant, force est d’admettre que l’alimentation
trop grasse et trop sucrée n’est pas le seul facteur. La prédisposition
génétique joue aussi un grand rôle.
Pour la Fondation Recherche médicale : « Il est incontestable que de nombreuses obésités sont favorisées par une prise alimentaire excessive. Mais l’identification d’un tout nouveau gène, impliqué dans la dépense d’énergie, laisse penser que la prise alimentaire pourrait être normale, mais les dépenses énergétiques insuffisantes. Ainsi à prises égales, certains individus dissipant moins d’énergie pour fonctionner seront plus gros que d’autres brûlant davantage. De même, des travaux récents, laissent entendre que la répartition des prises alimentaires au cours de la journée aurait son importance, et qu’un décalage dans le temps pourrait donner lieu à une "chrono-obésité ». Philippe Froguel, chercheur CNRS de l’institut Pasteur de Lilles et Rob Sladeck de l’université McGill de Montréal (Canada) ont analysé l’ADN de 700 diabétiques français ayant des antécédents diabétiques dans leur famille et l’ont comparé à l’ADN de 700 personnes non-diabétiques. Les scientifiques ont découvert quatre gènes qui prédisposent une personne à souffrir du diabète.
La Fondation Recherche médicale prévient qu’il faut se garder de raisonner uniquement par le gène. « Les aborigènes australiens urbanisés deviennent obèses et guérissent lorsqu’ils reviennent dans leur milieu d’origine ». [...] Selon l’OMS, la sédentarité fait deux millions de victimes, chaque année, dans le monde ! Deux millions de morts par maladies cardio-vasculaires, diabète ou obésité. Par manque d’activité physique. La sédentarité est bel et bien devenue un fléau des temps modernes.
Le plus tragique est sans conteste l’obésité infantile. Selon la Fondation Recherche médicale, en France, une étude sur des enfants de 10 mois et 8 ans a montré que 10% d’entre eux étaient obèses au lieu des 3% prévisibles. Au Japon, l’obésité enfantine a augmenté de 53%, en Grande Bretagne de 65% pour certaines tranches d’âge, aux États-Unis de 60 %. Le seul pays à avoir stabilisé ses chiffres est la Finlande où un programme de prévention ciblé sur l’enfant a opéré des miracles.
Conscients du problème d’obésité qui sévit dans le monde, les députés européens ont adopté des recommandations pour prévenir ce véritable problème de santé publique. Le régime proposé prévoit la promotion de l’alimentation saine et de l’activité physique, en particulier dans les écoles. Les députés ont accueilli favorablement l’engagement de la Commission en la matière, et demandé que la lutte contre l’obésité soit une priorité européenne. En avril 2007, la Commission devrait également publier un Livre Blanc sur la nutrition et l’activité physique. Un élément très attendu par les associations de consommateurs pourrait être introduit : une signalisation plus simple du contenu nutritionnel des aliments devrait aider les consommateurs à s’y retrouver dans la jungle des étiquettes.
Santé Canada et l’Agence de santé publique du Canada sont déterminés d’aider les Canadiens à améliorer leur état de santé et leur bien-être en favorisant et en appuyant la pratique régulière d’activité physique et la saine alimentation. Ces deux agences viennent de publier un nouveau guide alimentaire canadien entièrement remis au goût du jour.
Estimant que l’obésité infantile notamment était un véritable problème de santé publique coûtant cher au pays, George W. Bush s’est également fait l’apôtre de la lutte contre l’obésité, en exhortant les parents américains à adopter des comportements destinés à réduire l’obésité, comme encourager leurs rejetons à la pratique d’un exercice physique régulier. Le président américain George W. Bush a estimé que l’obésité infantile est un problème qui coûte cher aux États-Unis et il invite les parents à agir pour venir à bout de cette maladie, notamment en encourageant leurs enfants à faire de l’exercice. « Une manière pour ce pays de traiter la question de l’obésité est de faire en sorte que les gens sortent, que cela soit pour du sport, de la marche ou de l’entretien », a déclaré le chef de la Maison-Blanche.
Il faut remarquer en terminant que le président américain aborde l’obésité sous l’angle des coûts, voire des pertes financières pour l’État, comme le montre bien sa déclaration. Comment accorder une importance quelconque aux pertes humaines lorsque le budget militaire dépasse largement celui des dépenses sociales.
« Les Américains ne manquent jamais de m’étonner. À peine ai-je le sentiment d’avoir tout vu, tout entendu qu’ils trouvent un autre moyen de me laisser stupéfait », écrivait le correspondant du quotidien Le Journal de Montréal à la Maison-Blanche.
Questions
- Sommes-nous devenus les
esclaves de notre bouffe ?
- L’État fait-il trop peu ou
assez pour prévenir l’obésité ?
- La prévention auprès des
enfants devrait-elle une responsabilité partagée entre les parents et
l’État ?
- L’État doit-il intervenir radicalement
dans les publicités de malbouffe ?
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