Épinal : enfin le procès du tout-anglais ?
Le procès des irradiés d'Épinal s'ouvre aujourd'hui. Pourtant, l'hégémonie de la langue anglaise, véritable origine de cette tragédie, se trouve totalement absente du banc des accusés, mais aussi des médias traditionnels. Devant une telle politique de l'autruche, il y a fort à parier que ce type de catastrophe se reproduise de plus en plus.
Au début des années 2000, à l'hôpital Jean-Monnet d'Épinal, un radiophysicien met en place une méthode de radiothérapie plus performante. Celle-ci se base sur un logiciel de calcul que les radiothérapeutes prennent rapidement en main. Tout ceci pour le bien des patients.
Oui, mais voilà, il y a un problème. Bien que cela soit strictement interdit par la loi française (nº 94-665 du 4 aout 1994), le logiciel, comme sa documentation, n'ont été fournis qu'en anglais. Et les radiothérapeutes, pourtant compétents et expérimentés, ont mal compris les instructions de paramétrage fournis dans cette langue qui n'est pas la leur. Résultat : entre 2001 et 2006, ce sont plus de 5000 personnes qui ont reçu une dose trop élevée de rayons, allant parfois, sur certains patients, jusqu'à 30% au dessus de la prescription. Plus concrètement, cette catastrophe aura provoqué de graves séquelles chez plusieurs centaines de patients, et même 7 morts.
Aujourd'hui s'ouvre le procès de ce scandale. Des centaines de victimes et leur famille attendent de ce procès qu'on leur dise exactement pourquoi il y a eu un tel dysfonctionnement, et que tout soit mis en œuvre pour que cela ne se reproduise pas. Mais n'en seront-ils pas pour leur frais ? Certes, il y a probablement eu un défaut d'alerte lorsque le personnel s'est rendu compte de son erreur. Certes, certains, semble-t-il, ont tenté de cacher ce qui s'était passé. Certes, ces fautes sont inexcusables. Mais il n'empêche que ces fautes n'ont été commises qu'une fois que le mal était fait, une fois que les patients étaient déjà irradiés. La véritable faute, celle d'origine, qui est que les médecins n'ont pas eu à leur disposition des outils qui soient dans leur langue ; cette faute est totalement absente du procès. Aucun média traditionnel n'en parle. Comme si les problème linguistiques étaient tabou. Comme si la prédominance de l'anglais était une exigence sociale, économique ou peut-être même physiologique que nul n'aurait le droit de remettre en cause.
Cette catastrophe n'est pourtant pas la première provoquée par l'utilisation de la langue anglaise comme langue de communication internationale. On pourrait citer par exemple la plus grande catastrophe aérienne de toute l'aviation civile, qui avait fait 583 mort sur l'aéroport de Los Rodeos, sur l'ile de Ténérife. Dans le monde actuelle où toutes les entreprises d'ambition internationales décident de communiquer en anglais, où les artistes préfèrent abandonner leurs racines et chanter dans la langue de Shakespeare, où même les publicitaires ne cherchent même plus à adapter leur publicités à leur auditoire, mais se contentent de nous faire passer des messages en anglais, on peut raisonnablement s'attendre à ce que ce type de catastrophe devienne de plus en plus courant.
À moins que les pays ne décident de se mettre tous autour d'une table pour discuter de la mise en place d'une vraie solution pour les échanges linguistiques. Mais même si c'était le cas, pour que cette solution ait des chances d'émerger, il leur faudrait mettre leur arrogance de côté, en tous cas pour les plus grands, contrairement à ce qu'avait fait la France à la SDN en 1922. Autrement dit : on n'est pas près de se sentir en sécurité…
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