Attention : un train peut cacher des agresseurs
Au-delà des éventuelles causes politiques de cette lamentable affaire, les véritables responsabilités doivent être trouvées ailleurs !
« Donner au train des idées d’avance », clame notre bonne vieille Société des chemins de fer français (SNCF), qui, depuis sa nationalisation en 1936, a bien du mal à marcher vers la modernité, alors qu’elle vient, à grands frais, de créer son nouveau logo... Pourtant, bien qu’elle améliore nettement et continuellement le confort de ses voitures de première[1] et de seconde classe sur toutes ses lignes, sans exception, en assurant leur réaménagement ou en procédant à leur remplacement, cette vieille institution ferroviaire est en panne d’idées... notamment en ce qui concerne le bien-être de ses clients et usagers !
Que ce soit dans les gares, que ce soit à bord des TGV, des RER ou des trains de banlieue, la loi Evin « réprimant l’usage du tabac dans les lieux publics » est en vigueur ! Mais, depuis janvier 2006, il est également interdit de fumer dans tous les trains corail ou teoz...
Gare au contrevenant, s’il est pris à fumer, l’addition risque d’être salée ! Les contrôleurs, bien souvent aidés par la police, savent se montrer intraitables : le pauvre quidam se retrouve entouré d’une dizaine de policiers, qui, non contents de contrôler son identité, de vérifier la validité de son titre de transport et de le verbaliser, se mettent à le fouiller au corps par palpation, et en lui demandant de montrer le contenu de ses poches !
Pendant ce temps, des mendiants agressifs déambulent dans les gares, sur les quais de gare, en insultant, en toute impunité, des personnes présentes au passage ; des voyageurs se font molester, violer, agresser à bord des trains : là, rien n’est fait, puisque la police, souvent alertée trop tard, ne peut que constater les dégâts !
Alors, c’est à se demander s’il n’y a pas deux poids, deux mesures ?
Les graves incidents sur le train express régional Nice-Lyon en sont la parfaite illustration ! Comment en est-on arrivé à laisser monter dans un train une vingtaine de personnes éméchées, qui se sont empressées de molester, d’agresser, de racketter, de tyranniser près de six cents voyageurs, dont une jeune fille, victime d’attouchements sexuels ?
Au lieu de rechercher des responsabilités politiques dans cette affaire, ne serait-il pas préférable d’en rechercher les causes, qui sont multiples ?
Nicolas Sarkozy, ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur et de la décentralisation, n’est pas responsable du prix modique de ce billet « offert » à 1,20 € par la SNCF à l’occasion du réveillon du nouvel an... Il n’est pas plus responsable du manque récurrent de personnel, que ce soit à bord des trains, sur les quais ou à l’intérieur des gares... Il aura beau créer des brigades spécialisées d’une Police nationale des chemins de fer : malheureusement, vu la densité du réseau de la SNCF, le nombre de gendarmes, de policiers ou de CRS présents sur tout le territoire national ne suffirait pas du tout...
Rejeter la faute sur l’Etat est trop facile ! Le mal est beaucoup plus profond que cela, puisque la SNCF est seule responsable de cette lamentable affaire du TER Nice-Lyon, même s’il semble que ce soient des policiers qui aient fait monter ces voyous éméchés à bord de ce train... Des erreurs ayant été commises, des responsabilités seront à rechercher...
Mais, si on veut aller beaucoup plus loin dans cette recherche, il convient d’examiner attentivement le cas de la Région parisienne !
Dès 20 heures, jusqu’à la fin du service, les cheminots sédentaires ne sont plus à leur poste dans les gares du réseau transilien de la SNCF ni sur le réseau du RER exploité par la SNCF.... Cette situation est tout à fait légale, puisque les services sédentaires dus aux voyageurs sont fermés au public, alors que les trains continuent à circuler !
De ce fait, que ce soit sur le quai ou dans ces gares désertes, des voyageurs, des conducteurs de trains et des contrôleurs peuvent être agressés gravement, en toute impunité ; des jeunes filles et des femmes peuvent être victimes d’attouchements ou de violences sexuelles ; des meurtres gratuits peuvent être commis ! Cela s’est d’ailleurs produit... Plus grave encore, les services de sécurité, qu’on ne peut alerter que grâce à une unique borne d’appel, installée au milieu ou à l’extrémité de chaque quai, sont centralisés à quelques kilomètres de la gare !
Tout cela, au nom d’une certaine rentabilité, qui suppose qu’on privilégie l’utilisation des machines aptes « à délivrer des titres de transport », qu’on veille à ce qu’elles soient en bon état, ce qui est loin d’être toujours le cas !
N’allez pas croire que, après vingt heures, les usagers de ces deux réseaux soient en meilleure posture : il peut leur arriver la même mésaventure, puisqu’il n’y a, outre le conducteur, qu’un chef de train présent à bord de ces trains ! Tout cela, encore une fois, au nom de la sacro-sainte rentabilité... qui suppose qu’on réduise drastiquement le nombre de personnels !
En ce qui concerne le voyageur, qui emprunte ces mêmes réseaux pendant la journée, n’allez pas croire qu’il est mieux loti ! Quand ce ne sont pas les grèves qui sont la cause des difficultés, ce sont les retards accumulés ou récurrents qui sont légion[2] ! De plus, beaucoup s’insurgent, à juste titre, contre la cherté du prix de la carte orange ou des titres de transports... D’autres, manquant, en toute bonne foi, d’informations claires et visibles, se retrouvent en prise, « à cause de leur titre de transport non valable », avec des contrôleurs peu enclins au dialogue... Pourtant, le Syndicat des transports d’Ile-de-France (STIF), organisme de tutelle de la Régie autonome des transports parisiens (RATP) et de la SNCF[3], qui prône une baisse sensible du tarif de la carte orange, multiplie des actions destinées à améliorer le service public dû aux usagers, notamment grâce à la mise en service de voitures plus confortables et climatisées...
Alors, plutôt que de demander une réponse politique à Nicolas Sarkozy ou au chef de l’Etat, comme le fait l’opposition, il faudrait peut-être procéder à la réhumanisation de la SNCF en lui rappelant, au passage, qu’ « elle est responsable de la sécurité physique et morale des voyageurs dont elle assure l’acheminement ». Des mesures simples devraient être prises, qui, à n’en pas douter, seraient créatrices d’emplois nouveaux :
- Ne faudrait-il pas faire en sorte que l’accès aux quais soit de nouveau payant sur tous les réseaux « grandes lignes », même pour une somme modique de 0,15 € ?
- Ne faudrait-il pas ouvrir les guichets dans les gares, même après 20 heures, ceci, jusqu’à la fin du service ?
- Ne faudrait-il pas prévoir de nouveau la création d’un bureau sur chaque quai, pour qu’un ou plusieurs adjoints du chef de gare puissent s’installer de manière à assurer une surveillance discrète, tout en répondant aux sollicitations des usagers ?
- Ne faudrait-il pas réintroduire un service de porteurs officiels dans chaque gare, comme cela se faisait avant, de manière à éviter la présence de personnes indésirables ?
- Ne pourrait-on pas, au lieu de généraliser la mise en place et en fonctionnement des machines « à délivrer des titres de transport », prévoir l’ouverture de guichets supplémentaires ?
- Ne serait-il pas possible de prévoir quatre contrôleurs, et de deux à quatre chefs de trains à bord de tous les trains du réseau SNCF ?
- Enfin, ne serait-il pas possible de réintroduire, à bord des trains corail et des trains teoz, la voiture-bar ou la voiture-restaurant qui existaient avant ?
Bien sûr, toutes ces mesures ne pourraient pas éviter les crimes ou délits commis à bord des trains ou dans les gares ! Mais, peut-être éviteraient-elles à la SNCF[4] l’éventuel paiement de dommages et intérêts dus à des voyageurs victimes de crimes ou délits durant leur parcours !
[1] Depuis quelques années, les voitures de première classe ont été supprimées sur le réseau transilien (banlieue parisienne) de la SNCF et sur le réseau RER de la SNCF/RATP
[2] Comme sur la Ligne « D » du RER, surnommée : « Ligne poubelle » par des usagers en colère.
[3] Y compris, pour les lignes RER, conjointement exploitées par la SNCF et la RATP
[4] Qui devrait y penser, lorsqu’elle parle de rentabilité !
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