Considérations émeutières
1. Emeute vient d'émouvoir : qui s'émeut, commet déjà une émeute, microcosmique... L'émotion qui émeut, meut. De mouvoir, motion, mouvement avec le préfixe d'extériorisation ex-, alloforme é-. Donc un mouvement intérieur, une émotion, est extériorisée, dans l'émeute. Emeute macrocosmique. Le tout est de savoir quoi, qu'est-ce qui est extériorisé, dans l'émeute. L'indignation, peut-être. Mais face à quoi ?... Une bavure, un dérapage, une violence policière ?... Soit !... Il faudrait admirer, en revanche, la rareté du phénomène. Il faudrait aussi mépriser, en revanche, l'énormité des émeutes, qui guedinent, violemment, contre la violence. Oui, c'est guedin.
2. L'émotivité n'est pas la cérébralité, certes. L'émotivité, plus que la cérébralité, est en droit de guediner. Du moins guedine-t-elle, avec ou sans droit. Elle prend ses aises. La cérébralité, de son côté, est bien faible : elle a la force d'une pensée, c'est-à-dire pas de force mécanique, contre le mécanisme émotif. Et pourtant, certaines émotivités se laissent gérer par la cérébralité, et couramment les cérébralités gèrent les émotivités... Que se passe-t-il donc, pour que la cérébralité perde le contrôle ?... Dans un sens, ce contrôle, la cérébralité ne l'a jamais : l'émotivité prime, la cérébralité réprime... C'est donc que des émotions débordent. Comme une rivière abondante, elles débordent sans digue. Et l'on dit que c'est dingue, finalement guedin... D'où vient que les digues manquent ? Enfin quand les digues manquent, on dit qu'il faut endiguer. Curieux. Car ce n'est plus le moment d'élever des digues. Les digues, il fallait les élever avant... Cela dit, face à l'assaut prémédité de la résidence d'un maire, la cérébralité joua pour l'émotivité, de manière complotiste.
3. Un jeune homme meurt, sous le coup d'une bavure, suite à un comportement qu'il n'aurait pas dû avoir, mais qui ne méritait pas la mort. Il ne méritait pas pour ça la mort, pourtant... pourtant, il mourut. Un peu comme George Floyd, et pourtant sans la légalité de George Floyd... les déboulonnages de statues. Comme avec les morts durant les Gilets Jaunes, aussi, au début : ni les civils, ni les autorités, ne méritent de mourir pour "ça". Certes, les autorités bravent cette possibilité, quand elles prennent leurs fonctions... Enfin ne voyez-vous pas, la double injonction contradictoire ? "Il ne faut pas mourir, la mort est inéluctable." Comme encore, avec la gestion du covid, qui prit tant sur la jeunesse, au bénéfice d'une vieillesse qui a déjà vécu ses belles années, et qui endure plus aisément l'isolement/la protection sanitaire... Emeutes, Gilets Jaunes, Covid : c'est guedin, guedin, guedin. Monde hypernarcissique : la mort est devenue intolérable.
4. Plus que tout autre chose, ces émeutes sont vaines : elles luttent contre la mort. Au prétexte d'un mort déplorablement malencontreux, les émeutiers croient ainsi repousser les limites de la vie, leurs vies, et conjurer la mort. Où la mort prend un drôle de visage : le visage des autorités, le visage des administrations, le visage des systèmes, le visage de nos territoires. Mais leurs émeutes, les y font eux-mêmes passer pour la mort, aux yeux des autres. Ils voulaient conjurer la mort, et pour cela ils étaient devenus la mort. Comme les affiches de têtes de mort, dans les chambres d'ados. Ou bien, la Santa Muerte hispanique. C'est guedin, parce que c'est phobophobique : ça a peur de la peur. Thanatophobophobique : peur de la peur de mourir... provenant de la part des autorités, c'est une injustice qui s'entend.
5. Ce n'est pas parce qu'une injustice s'entend, que les émeutes sont comprises : issues des franges populaires et/ou immigrées, voire post-immigrées, du peuplement, avant tout, il y a la précarité. Précarités économiques et/ou culturelles. Sociales en général, car le social conjugue l'économico-culturel : l'aisance et la confiance sociétales. C'est que la précarité est une épée de Damoclès, un sentiment de mort-vivance, permanente. L'aisance économique sans la confiance culturelle, cela produit des pontificats séparatistes. La confiance culturelle sans l'aisance économique, cela produit des marginalités complotistes. Pontificats séparatistes et marginalités complotistes se conjoignent régulièrement, du moins à gauche, quand à droite se réfugient les pontifes duplices (pour leurs intérêts économiques bien compris) et les marginaux intègres (pour leurs intérêts culturels bien compris) sans solution de conjonction : la gauche aura donc, toujours l'avantage du nombre, rejointe d'ailleurs par les pontifes duplices, de droite. Enfin, "ça" ce n'est pas qu'un phénomène à la base de la pyramide sociale. Au milieu ou au sommet, c'est pareil : la droite n'aura jamais l'avantage du nombre, car il s'émeut.
6. Vers le haut de la pyramide sociale, pas forcément tout en haut, on a l'aisance économique et la confiance culturelle. France Inter, France Culture, tiennent les rennes et sont reines. De temps en temps, une CNews ou une Sud-Radio tentent de faire contrepoids. Manques de bols : CNews ou Sud-Radio font de droite... et face au mainstream gauchophile alors, ne restent plus que des souterrains métapolitiques, néodroitiers. Sans plus. Mais tout en haut de la pyramide sociale, voilà une aisance économique, et une confiance interculturelle parce qu'éduquée, au sens d'élevée selon les standards internationaux. De là, elle convainc le mainstream, c'est normal, avec ses convictions et ses moyens : Georges Soros, Mark Zuckerberg, tant d'autres, Français compris, face auxquels le mainstream aime taxer Vincent Bolloré, en France, qui ne faisait que pareil... C'est que personne ne veut bien mourir, du moins, avant l'heure, heure que nul pour soi ne connaît... De temps en temps, cela produit un suicide, en vengeance contre le monde, sans plus. #PasDeVagues
7. Les émeutiers se donnent un tas de raisons comme aucune. C'est comme une intersyndicale des frustrations. C'est qu'on déteste le hasard : "eh oui, refiler une arme, pour usage de la violence légale, parfois, ça finit par piquer." Détester la mort, c'est détester l'heure que nul pour soi ne connaît, c'est détester le hasard... et c'est donc, enfin, détester les réalités. Qui sont, aussi, hiérarchisées, dans leurs genres, à différents niveaux, bon gré mal gré, bon an mal an, cahin caha. Chez les anars, c'est pareil : les vieux de la vieille, dans les groupes, ont des droits d'aînesse, qu'ils se font un honneur, de feindre mépriser. La force de l'habitude, tout simplement. C'est comme ce complotiste, qui en appelle à la liberté, surtout la sienne...
8. Enfin on les a vus, les bourgeois, bohèmes ou pas, même quand ils se planquent. D'ailleurs, aujourd'hui, ils se planquent bien : les bourgeois sont les ingénieurs de nos mondes, ou du moins mobilisent-ils l'ingénierie. Les bourgeois, donc, s'ingénient. Et pourtant, ils proclament être comme tout le monde, fondus dans la masse. Ils y tiennent : c'est leur sauf-conduit. Les méchants, ce sont forcément les seigneurs féodaux et les néofascistes modernes... où pourtant, nos bourgeois sont des "rats". Non seulement rapias, car c'est très ingénieux, un rat. Un rat, ça se font dans la masse, où les masses sont embourgoiseées un tantinet : chacun son smartphone... mais un rat, ça ronge. Ici, financièrement, rentièrement, industriellement, à la base. Les rats, ou les sous-marins de nos océans-masses. Ils ont déchaîné, ès publicités agressives, tous les désirs, abattu toutes les digues, par exemples pour vendre des jeux vidéos (et non en jouant aux jeux vidéos)... We all live in a yellow submarine, yellow submarine...
9. Les bourgeois subornent, à travers les flux financiers, et rognent ce qu'ils peuvent, quand ils peuvent, où ils peuvent. Les mafieux font pareil, hors la loi : ils profitent qu'on s'ingénie pour eux, et s'ingénient à ingénier, l'ingénierie bourgeoise, en effrénant les désirs. C'est la fascination générale, pour le rat, le malfrat, et le ripou aussi d'ailleurs, dans nos films. La corruption n'est pas un mode anormal, du fonctionnement sociétal. C'est le fonctionnement sociétal, normal. Tout est devenu glauque. Parce que marchand, en somme.
10. Tout est dominé par le dieu Glaucos, dont les yeux de poulpe brillent, au milieu du triste et défiant bleu-vert vaseux, de nos mondes submergés. Entendez-vous résonner l'Appel de Chtulhu ? Grand Ancien titanesque, logé dans les abysses sous-marins, prêt à nous rendre tous fous, dans nos cauchemars les plus atroces. Howard P. Lovecraft était un visionnaire... Voilà pourquoi tout est guedin. Les armées claires-obscures, infamilières, des adeptes de Cthulhu, grouillent et lancinent, du haut en bas de l'échelle sociale.
11. Artialiser les émeutes, comme je fais, ne les empêche(ra) pas. Nous réclamons nos pardons. Des pardons. Le pardon. Nous demandons pitié, grâce, merci. Nous nous soumettons, émotivement, de même, au phénomène, ainsi qu'un Christophe Castaner genou à terre, braillant que l'émotion prime sur la loi. Façon d'endiguer, pendant que ça déborde, sans avoir placé de digues, préalablement, et il déborde à son tour, de bons sentiments mainstream, gauchophiles, prêts à grossir l'émoi qui suscite(ra) l'émeute future : partie du problème. Quoi de pire que d'accorder de la pitié ? Cela ne suffit pas, et suscite encore plus de fiel, en face.
13. On dit qu'il faudrait des aisances économiques, des confiances culturelles. Avons-nous tort ?... A chaque jour suffit sa peine, il faut bien gagner son pain, le mériter. Ceci pour l'économie, et rêver de cuillères automatiquement en or dans toutes les bouches, c'est donner des moyens, à qui ne les méritent peut-être pas. Mais actuellement, tous ceux qui ont des moyens, les méritent-ils en vérité ?... Chacun chez soi et les vaches seront bien gardées, il faut savoir raison garder, aimer les siens. Ceci pour la culture, et rêver de patchworks culturels harmonieux, c'est à la fois ignorer les conditions communautaires du développement culturel, et l'épuisement cognitif de la charge mentale, liée à l'interculturel foisonnant en permanence (les bourgeois le savent, qui cultivent l'entre-soi). Or actuellement, tous ceux qui ont des maîtrises, les valorisent-ils en vérité ?
14. Est-ce que la vérité, a quelque chose à voir là-dedans ? Quelle pureté du vrai, recherche-t-on ainsi ? Le fait est, que le vrai est impur. Que la vérité est émue. Qu'émue, elle se fausse. Et que les faussements trament nos réalités. Il faut y vivre mais, pour y vivre, il faut ne pas s'en émouvoir outre-mesure. Ne pas en faire mille et une émeutes. Sinon, on se fait la mort, croyant conjurer la mort, et l'on refuse d'y vivre. Vivre nos réalités. Or, face à l'intolérable, il n'y a pas que l'affrontement : il y a la fuite. Réelle, ou dans l'imaginaire.
15. La fuite. C'était ce que le magicien Gandalf conseillait à sa petite compagnie, face au Balrog, genre de démon lovecraftien, tiré du Seigneur des Anneaux. Pour le détruire, seul, de ce qu'il en avait le pouvoir : "Fuyez, pauvres fous !"... Et du haut en bas de l'échelle sociale, chacun de fuir, sauve qui peut. Le principe de précaution n'est-il pas notre maître à tous, notre anneau unique, à l'avenir ?
Lire aussi :
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- Considérations bourgeoises ;
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