Evolution du niveau d’étude au sein de l’OCDE : La France est un bon élève
Alors que le niveau global d’étude des Français était très inférieur à celui de nombreux pays développés il y a encore quelques décennies, ce retard semble être en train de se combler, comme le confirme le rapport de l’OCDE intitulé « Regard sur l’éducation ». La situation est plus préoccupante aux USA, au Royaume-Uni et en Allemagne.
Ainsi, comme le montre le graphe ci-dessous, sur la population des 45-54 ans, seulement 59% des Français ont obtenu un diplôme d’étude secondaire (Bac). Ce chiffre est considérablement plus faible que celui des USA (90%), de l’Allemagne (84%) et du Japon (82%). Il est même sensiblement inférieur à celui du RU (64%), et à la moyenne des pays de l’OCDE (64%).
L’étude des classes d’âge suivantes met en lumière une augmentation soutenue du taux d’obtention d’un tel diplôme en France et au Japon, atteignant respectivement 80% et 94% en ce qui concerne les 25-34 ans. Bien que ce taux ait aussi augmenté régulièrement au RU, sa croissance a été bien plus faible, ce pays n’obtenant qu’un taux de 70% pour les 25-34 ans, inférieur à la moyenne des l’OCDE (77%). L’Allemagne et les USA voient quant à eux leur taux stagner ou diminuer à partir de la génération des 45-54 ans. Ce taux se maintient tout de même à 87% aux USA, et 85% en Allemagne pour les 25-34 ans.
L’évolution est comparable en ce qui concerne les personnes ayant obtenu un diplôme d’étude tertiaire (enseignement supérieur), comme le montre le second graphe. Alors que les 45-54 ans sont seulement 18% en France à avoir achevé de telles études, ce taux grimpe à 38% chez les 25-34 ans. Pour comparaison, les chiffres sont respectivement de 41% et 39% pour les USA qui régressent là encore, 26% et 23% pour l’Allemagne, 24% et 31% pour le RU, et 33% et 52% pour le Japon.
Plus encore que dans le cas des études secondaires, la France a rattrapé son retard en matière d’études supérieures. Le Japon, quant à lui, caracole en tête du classement de l’OCDE (avec le Canada, 53%). Le RU a lui aussi progressé, mais là encore, bien moins vite que l’ensemble des pays de l’OCDE, ce qui le place à présent au niveau de la moyenne des pays membres. La situation des USA et de l’Allemagne est bien plus préoccupante. Ces deux pays voient leur taux diminuer sensiblement depuis la génération des 45-54 ans pour les USA, et des 35-44 ans pour l’Allemagne. Aux USA ce taux reste néanmoins supérieur à la moyenne de l’OCDE (39%), contrairement à l’Allemagne qui obtient désormais un taux parmi les plus bas des membres l’OCDE (23%).
La France semble donc remporter son défi de massification de l’éducation, au moins d’un point de vue statistique. Car bien sûr, j’entends déjà les critiques : « Les bacheliers d’aujourd’hui n’ont pas le même niveau que ceux d’hier », « Le certif de nos grands parents vaut autant que le bac d’aujourd’hui », « Les jeunes ne savent plus écrire », « Ma grand-mère connaissait toutes les préfectures et sous-préfectures de France »...
Il n’existe malheureusement pas de statistiques sur ce sujet, mais l’on peut tout de même comparer le niveau des jeunes Français par rapport à leurs congénères des autres pays de l’OCDE pour vérifier s’ils ont « décroché ».
Dans ce but l’OCDE publie, au sein de son rapport, les derniers résultats de son enquête PISA concernant le niveau des élèves de 15 ans en mathématique. Pourquoi cette discipline ? Parce que c’est la plus objective à mesurer. Effectivement, des matières comme l’histoire ou les langues ne peuvent être comparées directement sans beaucoup de précaution. Le japonais est bien plus difficile à maîtriser que l’anglais par exemple. L’OCDE a mesuré, les années précédentes, le niveau en culture scientifique et en maîtrise de la langue, mais cette année, le rapport se concentre uniquement sur les maths.
La France, avec 511 points, obtient un score bien supérieur à la moyenne de l’OCDE (489) et se situe dans le deuxième quart des pays membres. Elle est néanmoins distancée par la tête du classement regroupant la Finlande (543), la Corée (542), le Canada (538), le Japon (534), les Pays-Bas (533) et la Belgique (529). En queue du classement on retrouve le Mexique (385), la Turquie (412), la Grèce (445), le Portugal (466), l’Italie (466) et les USA (483).
Le niveau des jeunes Français en mathématiques, même s’il n’est pas excellent, est donc plus qu’honorable, comparé au niveau global de celui des membres de l’OCDE. La massification de l’enseignement secondaire et tertiaire n’a donc pas provoqué de décrochage mesurable de la France par rapport aux autres pays développés. La politique éducative menée depuis l’après-guerre, et plus énergiquement depuis le début des années 1970, par l’ensemble des gouvernements successifs, a donc porté ses fruits.
Mais abordons maintenant la situation préoccupante des USA, de l’Allemagne et du RU.
Aux USA et au RU, l’inflexion dans la progression de nombre de diplômés se situe au niveau de la classe d’âge des 45-54 ans. Cette classe d’âge a été formée au secondaire au cours des années 1970 et au tertiaire durant les années 1980. Dès lors, la progression du taux de diplômés a cessé aux USA et a fortement ralenti au RU. Or ces deux pays ont connu des changements majeurs de politique intérieure dès la fin des années 1970 au RU avec l’arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher, et au début des années 1980 aux USA avec Ronald Reggan.
Au RU, cette politique a engendré un doublement de la pauvreté. Le taux de personnes percevant un revenu inférieur à 50% du revenu médian a ainsi progressé de 6-7% (selon les sources : OCDE, CIA Factbook, New policy Institute) en 1980, à 13-14% en 1994. Il se maintient toujours à un niveau très élevé (environ 12%).
De plus, les inégalités de revenu sur l’ensemble de la société ont, elles aussi, fortement augmenté durant cette période. L’indicateur de Gini mesurant cette disparité a ainsi augmenté de plus de 13% sur cette période.
Les USA n’ont pas connu d’augmentation sensible de leur taux de pauvreté et de leur indice de Gini, mais les chiffres reste très élevés, et supérieur aux autres pays occidentaux (17% de pauvreté).
Les politiques de réduction des dépenses publiques menées par ces deux gouvernements durant les années 1980-1990 peuvent aussi être invoquées, bien que les USA soient encore les champions des dépenses d’éducation avec plus de 12 000 US$/élève (tout niveaux confondus et en parité de pouvoir d’achat) et que le RU se maintient au niveau de la moyenne de l’OCDE (7300 US$).
Le problème de l’Allemagne est encore plus inquiétant, tout du moins en ce qui concerne les études supérieures. La nouvelle génération (25-34 ans), formée au secondaire dans les années 1980-1990 et au tertiaire dans les années 1990-2000 est bien moins diplômée que la génération précédente. Pourquoi ? J’avance ici deux hypothèses.
-Il s’agit d’un contrecoup de la réunification. Les populations de l’Allemagne de l’Est étaient très bien formées, mais les jeunes de l’époque de la réunification ont pu choisir de rentrer rapidement sur le marché du travail afin de profiter des richesses et produits accessibles dans notre société de consommation. Dans ce cas, la situation devrait s’améliorer avec la génération actuellement en formation.
-Il s’agit d’un problème plus grave, dû à la structure même du système éducatif allemand, structure qui est peut-être dépassée. Est-ce le fait de sa grande et précoce sélectivité ? (quatre types d’établissements de niveaux dès dix ans). Est-ce causé par une inadaptation des études supérieures par rapport au monde du travail ?
La question reste ouverte, mais il serait temps pour l’Allemagne d’étudier ce problème plus en profondeur.
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