Madame ou mademoiselle ?
Voilà qui est fait, commençons-donc :
Madame ou mademoiselle ? La question peut paraître anodine. Pourtant, on n'impose pas aux hommes de dire s'ils sont mariés. Des organisations féministes ont donc décidé de partir en guerre, en exigeant le retrait de la case « mademoiselle » dans les formulaires administratifs. « Ouverture de compte en banque : impossible de se dire "Madame" si on est célibataire. C'est forcément "Mademoiselle".
C’est ce qu’on appelle le français. Dans notre belle langue, il y a un mot pour chaque chose, les synonymes n’existent pas, et chacun apporte des nuances. Beau ne veut pas dire joli. Intelligent ne veut pas dire sage. Madame ne veut pas dire mademoiselle. Les deux mots ne sont en effet pas interchangeables. Mais vouloir se faire appeler « madame » quand on n’est pas marié, ce n’est pas la réclamation d’un droit. C’est la négation de la définition de ce mot dans le dictionnaire.
Pour les hommes, c'est Monsieur ou Damoiseau ? », ironise Christine sur le site Vie de meuf, qui recense toute sorte de clichés sexistes vécus au quotidien.
Personnellement, je ne verrais aucun inconvénient à être désigné comme « Damoiseau » dans mon dossier bancaire. Je ne vois pas pourquoi j’en aurais honte. Ah, c’est vrai : c’est tellement mieux de placarder une sexualité libérée… Toute autre démarche serait de la pudibonderie ou de la violation de vie privée, n’est-ce pas Christine ?
« Ca peut paraître un détail mais c'est très symbolique des inégalités », explique Julie Muret, d'Osez le féminisme !, qui lance mardi, avec Les Chiennes de garde, une campagne pour la fin de la case « mademoiselle ».
Ce ne serait pas mieux de limiter contre la bureaucratie qui adore mettre les gens dans des cases ? Enfin je dis ça, je dis rien.
C'est aussi ce que pense Laurence Waki, auteur de « Madame ou mademoiselle » (Editions Max Milo) : on impose .une identité « soit en fonction de l'âge soit du statut matrimonial, c'est insupportable ».
Sans vouloir paraitre cassant, je pense en effet que l’âge et le statut matrimonial font partie des éléments qui déterminent l’identité de chacun. Au même titre que la couleur des cheveux, les goûts vestimentaires, les préférences gustatives, les affinités littéraires…
« Implicitement, on vous dit que vous n'êtes pas finie tant que vous n'êtes pas mariée », poursuit-elle.
Non, on vous dit simplement que vous n’êtes pas en relation de couple. Si vous considérez qu’une femme n’est pas finie tant qu’elle n’a pas couché avec un homme, c’est là que vous faites preuve de sexisme, mesdames.
« Cela oblige la femme à exposer une situation personnelle et familiale », insiste Julie Muret, notant « la connotation condescendante » de « mademoiselle ».
De toute façon votre banquier sait déjà tout de vous. Vous croyez vraiment que vous pourriez lui cacher que vous avez un conjoint ? A quoi ça rime ces cachoteries ? Quant à la condescendance, on pourrait dire la même chose du mot « madame ». Certains considèrent le mariage comme un esclavage. Ravaler une femme à son statut de femme mariée, c’est aussi d’une certaine manière rappeler sa piètre condition d’épouse. Bref, c’est une question de point de vue personnel. Tout le monde ne met pas de la commisération dans un simple « bonjour mademoiselle », et certainement pas moi.
Si quelques individus mettent de la condescendance dans le mot « fonctionnaire », faut-il pour autant supprimer le mot de notre vocabulaire ? Pareil avec les mots « croyant », « politicien » ou « artiste ». Le problème ce ne sont pas les mots, mais la perception intime des concepts derrière. Tout le monde ne peut pas aimer tout le monde, mais condamner de simples mots, c’est –AMHA– puéril.
« Je ne vois pas pourquoi on fait ce distinguo, qui n'a plus aucun sens », abonde Brigitte Grésy, auteur du Petit traité contre le sexisme ordinaire (Ed. Albin Michel), qui épingle les comportements quotidiens qui « infériorisent les femmes ».
Même si cela est « moins important que les écarts de salaires (entre les sexes), les violences ou les difficultés d'accès à l'avortement », cette question n'est pas un détail car « le langage reflète la réalité du monde », poursuit Brigitte Grésy, qui a milité pour la féminisation des noms de métiers.
Heu, si, clairement, quand on met cette « question » en perspective avec les autres, c’est un détail.
« Le langage reflète la réalité du monde », tu as trouvé ça toute seule, Brigitte ? Cela se voit, parce que c’est faux. Le langage structure la pensée. Ce n’est pas un reflet, le langage est créateur. Sans lui, point de réflexion, sans réflexion, point d’action constructive. Le langage est le moteur de la civilisation. Vouloir simplifier le vocabulaire, bannir des mots décrétés impurs, c’est restreindre le champ de réflexion des individus. Oui, je suis en train d’évoquer la novlangue. Je vais commencer à croire que ce n’est pas qu’un spectre à brandir…
Julie Mouret rappelle d'ailleurs que de nombreux pays ont abandonné la distinction, comme l'Allemagne, où on n'utilise quasiment plus le mot « Fräulein » (mademoiselle).
Naturellement, c’est toujours mieux chez les autres, alors vite, empressons-nous de copier leurs us et coutumes. Après tout nous avons tous eu la même évolution socio-démographique. Donc pas de raison de ne pas reproduire les modèles étrangers.
En plus, c’est dommage que ce joli vocable ne soit plus utilisé en Allemagne. Moi je l’utilise assez fréquemment pour m’adresser à ma sœur ou à ma mère (qui jusqu’à preuve du contraire est mariée) sans y voir autre chose qu’un mot définissant une femme. Ma façon à moi d’étaler mon riche vocabulaire teuton (« Ach pien le ponchour, Fraulein ! »). Car oui dans l’Est de
Qui plus est, souligne Laurence Waki, « le "mademoiselle" n'a aucune valeur légale, c'est simplement un usage » alors que l'on pense souvent que c'est la loi qui impose le « madame » aux femmes mariées et l'interdit aux célibataires.
Et ? Les usages sont anathémisés ? Au XXIe siècle, seul ce qui est dûment légal est bel et bien bon ?
Dès 1972, le ministre de
C’est bien connu,
Plusieurs lettres ou circulaires administratives ont demandé aux services de supprimer cet usage. Pourtant, force est de constater que la case « mademoiselle » n'a pas disparu de notre quotidien...
Comme quoi les coutumes ont la vie dure. A l’instar de celle qui consiste à râler et faire des polémiques sur n’importe quel sujet. C’est bien de chez nous ça.
D'où l'idée de « Osez le féminisme » d'inciter les femmes à exiger un « madame » dans leurs correspondances.
Allons plus loin. Que nos députés votent une loi obligeant toutes les femmes à utiliser le statut de « pute ». Comme ça, plus de madame, plus de mademoiselle. On ne risque pas de porter atteinte à leur vie privée en proclamant qu’elles sont toutes de joyeuses jouisseuses, ce qui mettra tout le monde d’accord.
Pour sa part, Olivia Cattan, de l'association Paroles de Femmes, ne voit pas cette question comme une priorité. « Ca ne va pas régler les problèmes des femmes, les violences, la précarité, c'est un coup de com », s'agace-t-elle, alors que l'actualité récente des féministes a plutôt tourné autour des violences sexuelles, affaire DSK oblige.
Décidément ça devient un même, cette affaire DSK. On en parlera bientôt plus que du nazisme. Un nouveau point Goldwin ?
« Lancer cette campagne ne nous empêche pas de parler des discriminations ou des violences », se défend Julie Mouret, d'Osez le féminisme.
Tout à fait. Et vous continuerez à défiler pour que toutes les femmes se fassent implanter un clitoris, pour que l’avortement soit autorisé jusqu’au huitième mois de grossesse et pour que la polyandrie soit reconnue d’utilité publique. Rassurez-vous, nous sommes bien conscients que vous serez toujours à la pointe des combats pour plus d’humanisme.
Seul problème avec la fin du « mademoiselle », s'amuse Laurence Waki, « on ne décèlera plus les imbéciles », qui tentent de draguer en demandant d'un air entendu : « madame ou mademoiselle ? ».
Il est vrai que les femmes qui draguent ne se posent pas ce genre de question. Que son amant soit célibataire ou marié, peut lui chaut du moment qu’il est compétent, pas vrai ?
Conclusion : il est honteux d’être vierge. Dommage que toutes les femmes naissent dans cette triste situation, mais qu’on se rassure, le monde moderne y pallie de plus en plus tôt. La libération des mœurs que ça s’appelle. Saine et obligatoire révolution, que seuls des attardés mentaux ou des bigots peuvent ne pas applaudir des deux pieds.
Pour info, Marine Hélène développe un point de vue un peu différent ici : http://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/mademoiselle-ou-madame-fini-de-101466
Au plaisir d’en discuter avec vous, Fräulein. Si le petit Robert ne cesse de faire entrer dans ses pages des mots tels que « geek », « énergivore » et « actanciel », qui sont tous ni d’un français intelligible, ni d’une définition claire et objective, pardonnez-moi si au contraire je me bats avec une farouche détermination pour le maintien dans nos dictionnaires de quelques mots bien plus poétiques, fondés et concrets tels que « mademoiselle ».
Décidément Robert se laisse aller. Je crois que je vais en rester à mon Quillet de 1958, qui a la gentillesse de m’épargner ce genre d’atteintes à la richesse de la langue de Molière, m’évitant par-là des douleurs pertérébrantes. Et en dernier ressort, j’irai consulter l’encyclopédie Larousse. Vous avez dit Larousse ? Et après ça on me qualifiera de sexisme…
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