Proposition de loi visant à scléroser la langue française
Devra-t-on bientôt pour s'exprimer par écrit, entrer dans la clandestinité comme au temps des radios libres ?
L’article 1er de la loi n° 94‑665 du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française est complété par un alinéa ainsi rédigé : « L’Académie française fixe et préserve les règles grammaticales, orthographiques et syntaxiques de la langue française. ».
Sur quelles bases ? La rubrique "Dire, ne pas dire" comporte des erreurs manifestes par exemple en ce qui concerne les règles de l'impératif présent (la terminaison en -e ne concerne pas que les verbes du premier groupe).
Le premier alinéa de l’article 2 de la loi n° 94‑665 du 4 août 1994 précitée est complété par les mots : « telle qu’elle est codifiée par l’Académie française. ».
Le premier alinéa de l’article 3 de la loi n° 94‑665 du 4 août 1994 précitée est complété par les mots : « telle qu’elle est codifiée par l’Académie française. ».
La première phrase du premier alinéa de l’article 5 de la loi n° 94‑665 du 4 août 1994 précitée est complétée par les mots : « telle qu’elle est codifiée par l’Académie française. ».
Vu la rapidité de mise à jour du dictionnaire de ladite académie, cela va devenir très compliqué de s'exprimer. Et que dire des rectifications de l'orthographe cautionnées par cette académie mais qu'elle ne mentionne qu'en bas de page ?
« Art. 7 bis. ‒ Les documents administratifs, les publications, les revues, les manuels scolaires, les communications papiers et numériques diffusées en France et qui émanent d’une personne morale de droit public, d’une personne morale de droit privé, d’une personne privée exerçant une mission de service public, d’une association, d’un syndicat, d’un média, d’un parti politique ou d’une personne privée bénéficiant d’une subvention publique, doivent être rédigés en langue française telle qu’elle est codifiée par l’Académie française.
Chiche ! les collectivités publiques risquent d'être les premières sanctionnées avec leurs anglicismes foisonnants.
« L’usage de l’écriture dite inclusive, qui désigne les pratiques rédactionnelles et typographiques visant à substituer à l’emploi du masculin, lorsqu’il est utilisé dans un sens générique, une graphie faisant ressortir l’existence d’une forme féminine, est interdit.
« Le présent article est également applicable aux documents, publications, revues et communications produites et diffusées par les administrations mentionnées au 1° de l’article L. 100‑3 du code des relations entre le public et l’administration. »
À compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, l’utilisation de l’écriture dite inclusive est formellement interdite.
La violation de cette interdiction est punie d’une amende de 7 500 euros pour les personnes morales.
L’octroi, par les collectivités et les établissements publics, de subventions de toute nature est subordonné au respect par les bénéficiaires des dispositions de la présente loi.
Tout manquement à ce respect peut, après que l’intéressé a été mis à même de présenter ses observations, entraîner l’arrêt et la restitution totale de la subvention.
Avec une formulation aussi vague, chacun se trouve soumis à l'arbitraire (cela devient une habitude en France).
Mais qu'en dit l'Académie française ? Dans une lettre ouverte datée du 7 mai signée par la "Secrétaire perpétuel de l’Académie française" et le "Directeur en exercice de l’Académie française", ces zélateurs mélangent encore l'évidente complexité d'une formulation représentative de l'évolution des mentalités et une vision rétrograde de la langue :
Un corset doctrinal prétend ainsi régir la pratique des scripteurs, mutilant les respirations et la logique de la langue. En posant qu’il existerait par principe une corrélation entre le genre des vocables et le sexe de leur référent, les propagateurs de l’écriture inclusive méconnaissent naïvement les règles du genre grammatical, où masculin et féminin ne correspondent pas systématiquement à des catégories sexuées. Ainsi dit-on « une échelle » mais « un escabeau », et dans l’armée « une sentinelle, une ordonnance » ou « une estafette », un marqueur féminin désignant ici des fonctions historiquement masculines.
S'il est certain que ce type d'écriture inclusive est une mauvaise solution à une vraie question, on remarque que ce pseudo-débat est un nouveau moyen de museler la langue et ses évolutions.
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