Réformes : va-t-on vers un retour forcé des femmes au foyer ?
Notre pays s’enorgueillit d’avoir un des meilleurs taux de fécondité d’Europe et un pourcentage de femmes professionnellement insérées très convenable. Pourtant, certaines réformes pourraient remettre en cause ce résultat du fait de leur impact sur la vie professionnelle des femmes.
Parmi ces mesures, la suppression budgétaire des postes des professeurs qui partent en retraite est abondamment commentée et conduit lycéens et professeurs dans la rue. Je n’entends cependant pas évoquer le résultat que cela peut avoir sur l’autonomie financière des femmes faute, sans doute, de représentantes dans nos hémicycles.
Ces commentateurs relèvent notamment que les bons résultats scolaires qualitatifs des enfants des pays scandinaves et d’outre-Rhin se font pour un coût financier bien moindre qu’en France puisque la journée de cours se termine en général vers 13 heures dans ces pays.
Naturellement intéressé par ce modèle éducatif moins onéreux pour le budget de l’Etat, notre gouvernement tend à le copier.
La durée des cours a déjà été quelque peu limitée dans le primaire et Xavier Darcos a précisé à cette occasion : « Avec cette nouvelle organisation de la semaine, la durée hebdomadaire de l’instruction obligatoire passera, pour tous les élèves, de 26 heures à 24 heures, soit un total de 864 heures d’enseignement par an, ce qui reste bien au-dessus de la durée moyenne d’enseignement des pays qui obtiennent les meilleures performances scolaires dans les classements internationaux. »****
La perte annoncée de milliers de postes d’enseignants par la suppression des postes des titulaires qui partent en retraite dans les prochaines années contraindra probablement à une limitation progressive du nombre d’heures de cours dans le secondaire pour les mêmes raisons que celles évoquées par le ministre pour le primaire.
Personne ne semble s’interroger sur les moyens qui seront donnés aux familles tant dans le primaire que dans le secondaire pour assurer chaque après-midi les frais de garde ou les activités de leurs enfants.
Aujourd’hui, une mère de famille bénéficie via la solidarité nationale et le personnel enseignant d’une prise en charge de ses enfants jusqu’à 16 h 30 en semaine.
Demain, le coût de ces 3 h 30 supplémentaires de prise en charge des enfants par rapport aux pays scandinaves n’impactera certes plus les impôts des plus fortunés de nos concitoyens, mais il demeurera néanmoins supporté directement par les familles.
Qui peut un instant imaginer qu’une caissière de supermarché à temps partiel ou une salariée au Smic sera en capacité de régler chaque jour 3 h 30 de salaire pour la garde ou les activités de son enfant ? (deux fois plus de femmes que d’hommes sont au Smic ** ce qui représentait en juillet 2006 15,1 % du salariat ***)
On constate à l’heure actuelle et du fait des maternités une baisse considérable de l’emploi des femmes *. La suppression des cours l’après-midi amènera évidemment une aggravation de cette situation pour des raisons strictement financières.
Autre exemple de mesure attentatoire à l’autonomie financière des femmes : « l’offre valable d’emploi ».
Dans le nouveau dispositif, une « offre valable d’emploi » est celle dont la rémunération peut être inférieure à votre ancien salaire voire inférieure à l’indemnité Assedic que vous percevez. Comme si cette perspective n’était pas suffisamment inquiétante, ce peut être, cumulativement, une offre d’emploi qui vous impose des trajets domicile-travail importants, source de frais.
A l’évidence les jeunes femmes :
- qui entrent plus difficilement dans l’emploi que les jeunes hommes ;
- qui sont souvent évincées de leur emploi via notamment les CDD qu’il est aisé de ne pas renouveler pour une femme enceinte ;
- qui sont plus souvent qu’eux employées à temps partiel non choisi ;
- qui sont touchées par le chômage forcé post-maternité faute d’avoir un poste leur permettant d’assumer des frais de garde ;
- qui sont, de plus, souvent conduites à démissionner de leurs emplois pour suivre leurs conjoints mutés ne seront guère aidées par une telle réforme.
On se demande pourquoi le gouvernement a retenu cette idée de régression du salaire de reprise qui n’existe qu’en Allemagne sur les huit pays européens de comparaison cités en exemple.
Serait-ce parce que notre président tient à se rapprocher de la tradition allemande de l’activité féminine définie par les « trois K : Kinder, Küche, Kirche » ce qui se traduit par la femme au foyer s’occupe des enfants de la cuisine et se rend… à l’église.
Va-t-on vers un retour forcé des femmes au foyer ?
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