Retraite : les faits sont têtus et la solidarité douteuse...
Nous allons rentrer dans une énième phase de rediscussion de nos régimes de retraites qui va sans doute être douloureuse...
Pourtant nous avons la chance, contrairement aux allemands ou aux japonais, de bénéficier d’un taux de natalité hors normes par rapport aux autres pays dans le monde ce qui nous devrait nous mettre en position plus favorable que d’autres pays pour trouver des solutions acceptables au rééquilibrage entre retraites servies aux anciens et futurs retraités, cotisations perçues sur les salaires des actifs et âge de départ en retraite qui sont les trois variables de l’équation des systèmes de retraites.
Car la mécanique financière et mathématique des systèmes de retraite par répartition est simple (en dehors des calculs dit actuariels qui visent à calculer les engagements à long terme des caisses). D’un côté il y a des recettes, les cotisations perçues sur les salaires des actifs et de l’autre des dépenses, les recettes servies aux retraités et celles qu’il faudra payer aux futurs retraités sur les décennies à venir. Les deux chiffres doivent être équilibrés dans la durée, sinon à un moment ou à un autre votre système sera en déséquilibre et menacera de s’écrouler. Un point central de cet équilibre est l’âge de départ en retraite qui détermine la durée de cotisation des actifs d’un côté, donc les recettes, et la durée de paiement des retraites en fonction de la durée de vie des retraités, donc les dépenses.
Or nous sommes dans une situation qui est déjà déséquilibrée et qui va tous les ans en se déséquilibrant un peu plus. Nous avons plus de retraités que d’actifs et l’espérance de vie de ces retraités croit tous les ans du fait des progrès de la médecine. On vient d’annoncer que cette espérance de vie vient d’augmenter sur la seule année 2009 de 2 trimestres supplémentaires !! Côté recettes ce sont des baisses constantes que l’on enregistre du fait du nombre de chômeurs et d’une durée de cotisation constante à âge de départ en retraite inchangé.
Trois solutions pour rééquilibrer le système : Augmenter les recettes c’est-à-dire faire payer plus de cotisation aux actifs, diminuer les dépenses en diminuant les retraites servies aux retraités existants, aux retraités futurs ou aux deux. Et puis au milieu,un remède moins douloureux pour tout le monde, augmenter l’âge de départ en retraite qui a le triple avantage d’augmenter les recettes en augmentant la durée de cotisation,de diminuer les dépenses en diminuant la durée de perception des retraites et de correspondre à l’évolution de la démographie et de l’espérance de vie.
Les faits sont connus et ne vont pas changer avec le temps. Mais on bute sur trois problèmes :
- Les syndicats, qui sont ceux qui participent aux négociations sont fortement représentatifs,- et représentés par-, des "vieux" actifs proches de la retraite et qui défendent leur intérêt personnel à court terme. Leurs enfants parce qu’ils sont moins syndicalisés, que le problème retraite est lointain pour eux et qu’ils sont trop jeunes pour avoir accès aux candidatures syndicales ne sont quasiment pas représentés dans ces discussions alors que ce sont eux qui vont devoir payer !
- L’autre est d’ordre idéologique. C’est François Mitterrand qui en 1983 institua la retraite à 60 ans. Grande victoire de la gauche et des syndicats sur laquelle il est idéologiquement difficile de revenir. Revenir sur une glorieuse victoire de Papy, vous n’y pensez pas ! Il faudra me passer sur le corps avant que cela arrive
- La troisième est sociologique. Le privé n’est pas concerné puisque par l’habile modification des régimes de retraites d’Edouard Balladur, ils sont déjà au-delà des 60 ans pour pouvoir toucher leur retraite à taux plein et leur âge de départ en retraite recule d’un trimestre tous les ans. De qui parle-t-on alors ? Des 5.6 millions de fonctionnaires et d’employés de la fonction publique qui eux campent sur ces 60 ans
Un élément positif néanmoins dans cette situation bloquée depuis des années. Martine Aubry vient de renier le chef en admettant qu’il faudra aller au-delà des 60 ans pour l’age de départ en retraite. Peut-être parce que ca va lui permettre de démontrer à son parti qu’elle est présidentiable mais peu importe. Reste maintenant à ce que le syndicats admettent aussi les faits et tournent leur veste, avec de grandes précautions oratoires bien sûr.
Une référence intéressante, celle des pays qui nous entourent et ne sont pas a priori plus idiots que nous. Voici déjà la carte des ages de départ en retraite des pays voisins. Pas un seul dans toute l’Union européenne qui en soit resté à 60 ans, pas un ! Tous stupides n’est-ce pas ?
Autre élément intéressant, les principes intangibles suivant lesquels sont organisés les systèmes de répartition allemand, , pourtant beaucoup plus déséquilibrés démographiquement que nous :
- Le déficit des systèmes de retraite n’est pas toléré. On régule 1/ en ajustant l’âge de la retraite. Dès 1992 l’Allemagne décidait de repousser l’age de départ en retraite à 65 ans et a programmé depuis 2007 de passer graduellement à 67 ans d’içi 2029. 2/ Au-delà, on ajuste les retraites elles mêmes à la baisse y compris pour les personnes déjà retraitées
- La solidarité intergénérationnelle est assurée par une limite légale aux prélèvements sur les salaires des actifs qui ne peuvent dépasser 22 pct à aucun moment d’ici 2030 (pour l’instant c’est 19.9pct). Si ce taux de prélèvement pour une raison quelconque était amené à augmenter, dans le cadre de ce que les allemands appellent "l’effort partagé entre générations", les retraites seraient réactualisés à la baisse ;
Comme vous voyez un autre monde et d’autres manières de penser. Il nous reste à attendre le résultat des négociations intenses qui vont se dérouler cette année et dont on peut espérer qu’elles retrouveront l’esprit de cet "effort partagé entre génération" qui est souvent oublié chez nous.
A suivre
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