Le LHC et les nouvelles cathédrales
La cathédrale participait de l’enchantement du monde, alors que le LHC a vocation à expliquer aux esprits désenchantés comment l’univers a pu émerger, et nous-mêmes à sa suite. Voilà peut-être l’Antéchrist du père Nostradamus. Sous terre, dans l’enfer de la chaleur atomique, la machine la plus froide de l’univers. Brrr...
Cercle Dantesque
Allez, cessons-là : la foi et la science n’ont-elles pas fini de se ravir la vedette ? S’opposent-elles tant que ça, d’ailleurs ? Autrefois l’infini, l’infiniment grand, aujourd’hui le plus petit. L’un pour expliquer l’autre.
Prévu pour durer quinze ans, ce cercle de Dante fonctionne sous ultra-vide, à 10-¹³ atmosphère, 10 milliardièmes de milliardième de pression atmosphérique, pas même de quoi y trouver une poussière, ni le bout du poil du bout de la queue de la puce du bout de la queue du chien de Mme Sambal. Le tout plongé dans un monde froid, à - 271,3°C. Rien ne doit venir gêner le passage du proton !
Il s’agit de quoi ? de désintégrer deux protons pour générer de nouvelles particules jamais observées mais pressenties comme les bosons. L’expression « particule de Dieu » a été utilisée pour désigner le boson de Higgs qu’on espère enfin « voir » dans le LHC. Plus petit que la particule d’un atome. Pourquoi faire ? Expliquer comment tout ce qui nous entoure tient debout. Depuis Newton, on n’a pas avancé. Pour saisir le problème de la masse, de la quantité de matière disponible dans l’univers, et savoir pourquoi selon nos calculs actuels certaines particules n’ont pas de masse (les neutrinos par ex.) Coût : 350 millions d’euros. Mais on ne se préoccupait non plus du coût d’une cathédrale...
Pour faire fonctionner à plein régime à l’horizon 2015, il en faudra de l’électricité. Heureusement qu’on ne nous demande pas de pédaler, en plus de financer.
Pour analyser les données le C.E.R.N a affaire à “la grille”, réseau informatique mondial pour analyser les nombreux résultats des collisions, de grands enfants…
Alors à ce prix-là, on a droit de se poser quelques questions :
- Que sait-on de son coût de fonctionnement ?
- Est-ce pour limiter les coûts qu’il ne doit pas durer plus d’une dizaine d’années ?
- Serons-nous capables de la financer plus longtemps, tel un Super-phénix, ou de le recycler en labo plus modeste ?
- La finance mondiale aura-t-elle raison de la physique quantique ?
- Et s’il ne produit rien ? Les physiciens souhaitent que le LHC bouscule les données actuelles de la physique.
- Quels sont les risque liés à son utilisation ?
- Et justement, s’il se passait quelque chose qu’on ne puisse observer, ou que l’on ne saurait interpréter ?
On aurait l’air fins… car on ne voit du Monde que ce que l’on en saisit.
Saurait-on alors définitivement que notre connaissance est éternellement limitée et qu’on n’en voit que la barrière infranchissable ? Ce serait bien la seule certitude qu’on aurait acquise depuis que l’Homme sait qu’il est mortel.
Cercle vicieux ?
Des peurs séculaires se sont greffées autour du projet du LHC. Il serait capable de créer des perturbations dans notre univers proche. Le Professeur Otto Roessler avait fait part de spéculations concernant la production artificielle de trous noirs, rien moins. Des “micro-trous noirs chargés et dangereux”. Pire, on allait créer des “Monopôles magnétiques” des “radiations de Hawking”. Une action en justice a eu lieu aux U.S.A pour faire arrêter le LHC.
Mais le collège diligenté de scientifiques que rien n’arrête a rassuré tout le monde : “Le fait que la Terre et d’autres corps célestes continuent d’exister exclut donc la possibilité que de dangereux monopôles magnétiques mangeurs de protons puissent être assez légers pour être produits au LHC”. Ou bien : “La possibilité que ces collisions aient de dangereuses conséquences est incompatible avec les observations des astronomes : les étoiles et les galaxies sont toujours là.”
L’argument se démontre à l’aide d’équations, mais dit comme cela, il n’ a rien de rassurant ! Ce n’est pas parce qu’on s’empoisonne avec du mercure qu’on meurt. Et de plus, on nous explique par ailleurs que rien n’est si naturel dans le LHC, puisque “Les collisions qui se produiront dans le LHC généreront des températures de plus de 100 000 fois supérieures à celles qui règnent au centre du Soleil.”( lien )
âmes sensibles s’abstenir.(Il soufflerait un vent incroyable)
Maladie de la science industrielle, on a décidément bien du mal à avouer qu’on ne sait pas tout, qu’on ne maîtrise pas tout. Or, pour la première fois, ce que font les scientifiques du CERN (dont le rôle premier serait de douter) c’est affirmer que le risque zéro n’existe pas, que les risques liés au L.H.C n’existent pas.
C’est assez nouveau ça, dans la communication scientifique.
Or, ces risques doivent bien être répertoriés quelque part, et contenus dans un protocole de sécurité. Sinon on peut parier qu’il n’aurait pas été financé. Ce n’est pas un oracle sybillin, ça...
Nous allons donc maîtriser le processus de fabrication de la matière, donc maîtriser l’énergie en laboratoire ! Les applications militaires ne doivent pas se trouver bien loin du LHC, s’ils ne l’ont pas en partie financé.
Comme quoi on fait bien de la physique pure et dure au LHC de Genève et pas de la théologie. Quoique...
Une chose est sûre, c’est que cette fois-ci nous n’avons pas droit à l’erreur sur une expérience jamais tentée à ces niveaux d’énergie et sur une machine aussi complexe. En 2015, on fera un saut dans l’inconnu.
Mise à jour : 09 Décembre 2009, Futura-sciences : Nouveau record au LHC : des collisions à 2,36 TeV !
Article précédent en 2008, Pierre Meur :
Site du CERN : http://public.web.cern.ch/Public/fr/LHC/LHC-fr.html
* tous les chiffres hors norme concernant le LHC sont sur le site du CERN
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