On n’explique toujours pas l’origine des espèces, 150 ans après Darwin
Depuis un siècle et demi que les savants étudient et appliquent l’évolution et ses concepts imaginés par Darwin tout en les revisitant, on ne sait toujours pas comment et pourquoi les espèces apparaissent. Une fois apparues dans le milieu, on peut arriver à déceler quelques facteurs expliquant pourquoi certaines espèces durent alors que d’autres disparaissent. Mais le mystère des origines persiste. Ce qui d’un point de vue épistémologique se comprend aisément. C’est toujours à la fin qu’on comprend les choses, l’univers, le vivant, les espèces, l’homme et sa nature, son histoire. Les origines sont bien plus difficiles à concevoir, surtout l’origine de l’univers et de la vie.
La spéciation est le processus de l’évolution qui conduit à faire apparaître et se fixer les espèces, avec maintenant, un consensus sur les embranchements phylogénétiques. On sait tracer l’arbre phylogénétique mais l’origine des espèces reste mystérieuse. Quelques hypothèses font consensus. Mais deux d’entre-elles viennent d’être remises en cause par deux chercheurs du Michigan dans le PNAS livré ce 3 septembre 2013 (D.L Rabosvsy, D.R. Matute). Ces chercheurs se sont intéressés au taux d’apparition des espèces en étudiant les imposantes données rassemblées depuis des décennies sur les mouches et les oiseaux. La théorie qui prévaut met en relation le taux de génération des espèces avec deux facteurs favorisant l’isolation reproductive. Ce concept étant devenu déterminant, notamment dans les études portant sur la microévolution. Les deux piliers de l’isolation reproductive sont premièrement le contexte géographique avec les barrières naturelles et les zones climatiques favorisant une adéquation entre le vivant et le milieu, cet ajustement expliquant alors comment certaines espèces apparaissent en s’adaptant ; deuxièmement, la compatibilité sexuelle, laquelle inclut deux volets, celui des organes de reproduction, parfois sophistiqués comme chez les insectes et bien évidemment la compossibilité génétique qui au final, renforce l’espèce dont l’un des traits qui la caractérise est l’interfécondité ; tandis que les croisements interespèces sont le plus souvent stériles.
Rabosvsy et Matuta ont développé des outils mathématiques pour en savoir plus sur les corrélations entre le degré d’isolation reproductive et la vitesse d’apparition des espèces en étudiant les données portant sur l’échelle géologique (macroévolutive). Leurs conclusions sont inattendues. A l’échelle géologique, il n’y a pas de lien causal fort entre le degré d’isolation reproductive et la diversification des espèces. Et donc qu’on ne dispose plus d’une esquisse de modèle permettant d’expliquer la spéciation. Selon les auteurs, il faut chercher ailleurs et tracer de nouvelles spéculations théoriques. Les barrières reproductives ne semblent pas canaliser et servir de levier à la spéciation. Par levier on entend facteur, géographique et surtout génétique. La courbe d’apparition des barrières reproductive n’est pas corrélée à la courbe d’apparition des espèces déclare Rabovsky. Et donc, on ne peut plus rendre compte de la spéciation avec la théorie actuelle qui la met en relation avec les barrières reproductives. Mieux encore, les gènes de spéciation identifiés récemment ne jouent pas un rôle décisif dans la spéciation. Les évolutionnistes ont suivi une mauvaise piste.
La compréhension de la spéciation reste un enjeu scientifique majeur pour ce siècle. Je ne sais pas si le défi est plus accessible que celui des origines de la vie. Peut-être que les deux défis sont complémentaires. Les ressorts de la spéciation imposent de faire fonctionner l’imagination théorique. Le défi est intellectuellement passionnant. Ce crois bien que c’est en passant par la compréhension du vivant qu’on accèdera à la compréhension de l’évolution et non l’inverse.
liens PNAS et U.Michigan http://www.pnas.org/content/early/2013/08/28/1305529110.abstract http://www.ns.umich.edu/new/releases/21655-long-held-assumption-about-emergence-of-new-species-questioned
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