Bon, je veux bien qu’une opinion évolue. Mais entre :
« Soyons clairs : Google Knol est l’anti-encyclopédie, la matrice idéale pour toutes les campagnes de propagande et de désinformation, une insulte à la société de la connaissance. »
Et :
"clairement, knol prolonge Google plus qu’il n’attaque Wikipedia et lui sera complémentaire.[...]
Le modèle économique est malin : comme avec AdSense, tout le monde peut être rémunéré sans se compliquer la vie. "
Je suis heureux d’apprendre que tu n’as jamais vu d’excès de modération ici ou là sur le web. C’est vrai. Les modérations sont toujours parfaites, les modérateurs éclairés, et le monde merveilleux.
« La multiplication des pages et des entrées homonymes va à l’encontre de la démarche encyclopédique. » La démarche encyclopédique date du XVIIème. Au 17ème, on croyait que le monde était constitué d’objets et on pensait qu’il y avait des énoncés vrai ou faux sur ces objets... Que de progrès depuis ! De Saussure à Thomas Khun, en passant par Niels Bohr ; l’encyclopédie du 21ème sera-t-elle multidimensionnelle ?
En tout cas, le modèle 1 entrée | 1 définition risque d’être mis à mal par le dynamisme de l’Internet.
Le langage bouge, évolue, se transforme ; les points de vue s’assemblent, s’affrontent, sans réussir à s’éliminer ; si tout cela fini par respecter un modèle neo-darwinien par la mise en concurrence : à mes yeux, cela est parfait.
D’ailleurs, cela fait belle lurette que « LES articles » ont remplacés « L’encyclopédie » dans la vie scientifique... Or , il y a toujours de très nombreux articles sur un même sujet.
« L’encyclopédie » est avant tout un objet de vulgarisation destiné à l’étudiant ou au gentilhomme. Elle fait croire que « il y a des choses dont on est sûr », en figeant la science à un moment donné de son évolution, en donnant raison aux courants dominants de ce moment précis. Elle est nécessaire et pratique, mais par nature insuffisante et dogmatique.
Je pense que Google ne fera pas concurence à Wikipedia (laissée aux étudiants et aux modérateurs « transparents »). Google avec Knol développe un modèle économique sein et rémunérateur pour l’édition d’articles scientifiques en ligne. En effet, aujourd’hui la majorité des articles scientifiques sont accessibles via des éditeurs privés HORS DE PRIX(plein d’exemples ici :http://www.bu.univ-paris5.fr/spip.php ?article671). Knol devrait permettre l’édition d’articles scientifiques dans le cadre d’un modèle économique un peu plus sein.
Il ne faut pas oublier que d’un certain point de vue la qualité (qui est le produit de normes sociales) s’oppose à la liberté (de dire ce que l’on pense, même si l’on s’exprime mal ou qu’on « pense mal »)
De nombreux espaces 2.0 (Wikipedia, Agoravox, Forum Futura Science) sont victimes d’une surcharge de modération.
L’autocensure des espaces collaboratifs frisent parfois le ridicule (ex : la polémique entre le modérateur dit « manchot » de Wikipedia et Jean-Pierre Petit).
Les normes et critères qualitatifs de ces espaces deviennent non plus un paradigme profitable au développement d’une connaissance saine, mais une sorte de dogme qui institut de petits modérateurs en manque de pouvoir en véritables inquisiteurs.
Wikipedia rejette toute forme de débat dans ses pages (sauf, éventuellement dans « discussion », et à condition que les débats restent politiquement corrects). Reprenant le rêve encyclopédique, elle se veut une source de savoir objectif.
Or, l’objectivité est le fruit d’une méthode. Les paradigmes et les vérités se transforment à travers le temps. La plupart des sciences produisent du débat (particulièrement en sciences humaines). Ainsi, un bon cours d’histoire met en avant les points de vues et les explications opposés sur un même évènement, les élèves de master sont invités à analyser et débattre. Les espaces collaboratifs, eux, prétendent mettre en avant une vérité objective sur ce même évènement.
L’initiative de Google me semble donc être bonne. Certes, elle ouvre la place à un relativisme qui a des travers. Mais elle aura au moins l’avantage d’obliger les espaces Web 2.0 à modérer leurs modérateurs, à redonner un peu de liberté d’expression à un Web 2.0 qui croulait de plus en plus sous le poids de la censure et du politiquement correct.